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Regards croisés de deux Avocats sur l’actualité nationale : Charles Badou, « Le Pag s’exécute avec ses limites et succès »
Publié le mardi 12 decembre 2017  |  Matin libre
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© aCotonou.com par Didier Assogba
Me Alain Orounla, avocat de Sébastien Adjavon
Cotonou, le 02 Novembre 2016. Affaire de cocaïne, l`ambiance à la brigarde territoriale de Cotonou.




(Alain Orounla : « Le Pag a son talon d’Achille…, c’est le financement »)
Deux praticiens du droit étaient les invités de l’émission hebdomadaire et dominicale « 90 minutes pour convaincre » de l’Ortb radio. Dimanche 10 décembre 2017, Me Charles Badou et son confrère Alain Orounla ont fait le tour des sujets brûlants de l’actualité. Le premier dans sa toge d’Avocat à la Cour a été présenté comme très proche du Pouvoir, alors que son second, Avocat à la Cour, se réclame d’une « neutralité critique ». Deux regards croisés mais qui se rejoignent parfois autour des sujets comme la lutte contre l’impunité avec en toile de fond le dossier Atao Hinnouho, la réforme du système partisan et l’exécution du Programme d’action du gouvernement (Pag).

Au sujet du Pag, Me Charles Badou a fait savoir que le but c’est de régler un certain nombre de problèmes, surtout d’ordre structurel : l’eau, l’électricité, l’administration, les infrastructures. « J’estime pour ma part que cela se fait avec des heurts mais avec des succès aussi », a-t-il laissé entendre. Son confrère Alain Orounla trouve que « le Pag a son talon d’Achille…, c’est le financement ». Selon son diagnostic, les prévisions étaient exorbitantes même si, a-t-il nuancé, le gouvernement a le droit d’avoir des ambitions pour le pays. A en croire Me Orounla, ces ambitions n’ont malheureusement pas tenu compte des réalités. Il a semblé aussi dire que l’image que projette aujourd’hui le Bénin à l’international ne favorise pas les investissements. « Je voudrais conclure en invitant nos autorités à beaucoup plus d’humilité et de modération dans la conduite des affaires ». Sur ce dernier pan, la réplique ne va pas tarder. « J’ai reconnu tout à l’heure qu’il y a des limites à tout, mais n’exagérons pas. N’amplifions pas plus qu’il n’en faut », bémolise Charles Badou.

La réforme du système partisan

Sur la réforme du système partisan, le débat a été focalisé sur ce projet de charte relayé abondamment sur les réseaux sociaux. Pour Me Badou, les deux points sur lesquels il faut mettre l’accent, c’est le financement des partis politiques et deuxièmement déterminer les contours et les critères qui permettent de dire que c’est tel parti politique qui mérite financement, qui mérite d’exister. « La principale motivation de cette réforme est qu’on dénonce la prolifération des clubs électoraux qui ne répondent pas au système partisan que nous avons voulu. C’est vrai que c’est une préoccupation compréhensible qui aurait pu être légitime si on ne nous avait pas imposé l’option du multipartisme intégral en 1990. Moi, je crois que ce n’est pas utile de revenir là-dessus », dixit Me Orounla. Et de justifier : «…si le travail était correctement fait, il y a beaucoup de partis qui auraient disparu. Ensuite, il y a la sélection naturelle parce qu’il ne suffit pas d’avoir un parti, il faut pouvoir gagner des élections. Un parti qui ne gagne pas des élections mourra de sa propre mort ». Pour ce qui est du projet de proposition, l’Avocat est inquiet : « je vois dans le projet de proposition de loi des prémices inquiétantes comme par exemple, on passe pour la création d’un parti politique, de 10 membres fondateurs par départements, à 50 par commune. C’est vrai que ça donne une assise plus grande au parti qui se constitue mais je ne crois pas qu’il soit nécessaire d’avoir 50 par commune pour être un vrai parti utile. D’autant que les 50 on peut les trouver c’est qu’on incite à avoir de faux membres fondateurs. Je pense que ce qui serait mieux, est le système de financement équitable de partis qui aurait envoyé beaucoup plus d’élus, etc. Il ya des craintes que cette réforme n’aille dans un sens : celui de privilégier les grosses écuries et d’empêcher l’expression plurielle dans l’animation de la vie politique ». Me Charles Badou de repréciser : « On n’interdit à personne d’animer la vie politique simplement vous ne pouvez vousprévaloir d’être parti politique et de bénéficier de tout ce qui est attaché aux partis politiques que si vous respectez un certain nombre de conditions. On peut trouver que 50 par commune est un peu trop. Pourquoi pas… Mais trouver 50 par commune n’est pas excessif. Ce n’est qu’un projet, on peut réviser si on estime que ce n’est pas faisable mais il faut forcément un ancrage au niveau des communes… ». Il va à son tour relever des imperfections : « Pour avoir financement il faut double conditions. Premièrement il faut que vous ayez 1/5e des députés et que ce cinquième proviennent du 1/3è des circonscriptions électorales. J’estime pour ma part qu’il y a un amendement important à faire. J’estime que c’est limité. Vous ne pouvez obliger à ce qu’on participe aux élections locales sans que les résultats des élections locales ne soient pris en compte dans le financement des partis politiques… Obligation du 1/3 des circonscriptions électorales j’estime que c’est un peu forcer pour le moment ».

Lutte contre l’impunité

Le cas du député Atao Hinnouho dont le domicile a été perquisitionné dans une affaire de trafic de « faux » médicaments a été le plat de résistance du débat. Même si les deux praticiens du droit ont dit ne pas connaître le dossier dans son fond, cela ne les a pas empêché d’opiner. Pour Me Alain Orounla, la maison Bénin est sale et il faut l’assainir ; la contrebande étant devenue, selon lui, le sport favori de plusieurs autorités. Cependant la lutte doit être implacable et aller partout. Car, même si Me Orounla a reconnu au président de la République le mérite d’une fermeté dans cette lutte, il n’a pas manqué de relever son caractère sélectif. On a le droit et le devoir de lutter contre l’impunité, mais Alain Orounla estime qu’il y a trop de coïncidence qui conforte certains dans leurs interprétations à savoir que c’est une chasse aux sorcières ou la traque aux opposants. Le jeune avocat n’a pas manqué de faire un lien avec la prise de position du député contre le projet de révision de la Constitution, le Chef de l’Etat qui avait soutenu que pour être réélu, l’on n’a pas besoin d’un bon bilan mais cela dépend de la façon dont on affaiblit les grands électeurs. Pis, après le rejet du projet de révision constitutionnelle, il a déclaré urbi et orbi qu’il fera désormais la politique (ce qui sous-entend la politique politicienne). Me Alain Orounla est allé loin en rappelant la façon dont les dossiers LéhadySoglo et Laurent Mètongnon ont été traités par le gouvernement. Comment peut-on parler de traque aux opposants ?, rétorque Charles Badou. Il rappelle dans son argumentaire qu’avant le député épinglé, il y avait les femmes des marchés Adjégounlè à Cotonou, Parakou et Djougou qui ont été dessaisies de leurs marchandises et certaines d’entre elles présentées au Procureur de la République. « La révision de la Constitution est derrière nous. Pourquoi quand les bonnes dames ont été cassées on n’a pas crié au complot ? Mieux un Chef de l’Etat dès sa prise de fonction est déjà en politique », a-t-il martelé. Au regard des faits, les deux Avocats semblent s’accorder sur le flagrant délit et le député risquerait gros. « L’immunité n’est pas impunité ou ne saurait cacher l’impunité », a confié Me Orounla en ajoutant qu’il y a risque de poursuite eu égard au rapport présenté par la police. « C’est inacceptable qu’il y ait de tels stocks chez le député », condamne Charles Badou. Et sur l’impotance d’un mandat avant la perquisition du domicile. « J’ai parcouru le Code de procédure pénale, je n’en ai pas trouvé. L’inexistence de ce bout de papier n’empêche pas la perquisition », a fait savoir Alain Orounla qui explique que le mandat peut être verbal.

J.B
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