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Décision de la Cour constitutionnelle sur le retrait du droit de grève: Le droit est dit, mais...
Publié le mardi 23 janvier 2018  |  La Nation
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© aCotonou.com par DR
La Cour constitutionnelle du Benin




Objet de polémique, la loi visant à supprimer le droit de grève aux agents de la santé, de la justice et aux paramilitaires est déclarée contraire à la Constitution par la Cour constitutionnelle, en sa décision Dcc 18-001 du 18 janvier dernier. Si cette décision apaise quelque peu les syndicats, elle suscite néanmoins quelques inquiétudes à prendre en compte.

La décision de la Cour constitutionnelle qui casse le retrait du droit de grève aux magistrats, aux agents de la santé et aux paramilitaires a été bien appréciée par les travailleurs concernés et une frange de la population. A l’annonce du verdict, beaucoup de citoyens ont laissé exploser leur joie, comme s’ils avaient gagné un pari. Si la Cour a joué sa partition en jugeant l’article 50 de la loi 2015-18 portant statut général de la Fonction publique contraire à la Constitution, la loi votée par l’Assemblée pour retirer le droit de grève aux agents concernés pose cependant des préoccupations de fond : devrions-nous encore nous contenter des mouvements de grève tous azimuts à l’avenir dans un pays économiquement faible ? Les mouvements de débrayage sont-ils la dernière arme de revendication des travailleurs? Le Bénin mesure-t-il l’impact des grèves sur ses maigres ressources ? A y voir de près, les grèves créent beaucoup de problèmes qu’elles n’en résolvent.
Pas besoin d’être Mère Thérèsa pour s’apitoyer sur le sort des pauvres citoyens qui, dans ces conditions, se retrouvent souvent sans voix, seuls face au silence imposé par les grévistes. Hélas ! même si leurs programmes, prévisions et projections doivent chambouler.
Dans le secteur de la santé, beaucoup craignent souvent le pire avec les mouvements de grève. Des cœurs saignent désespérément, impuissants d’agir face aux décès de parents. Ces drames qui se jouent en silence touchent généralement très peu la fibre sensible, encore moins patriotique des agents grévistes qui tournent ‘’fièrement’’ dos à leur travail.
« La semaine dernière, j’ai emmené mon enfant en classe de 3e se soigner dans un centre de santé public à Gbégamey. Mais les agents de santé ne nous ont pas reçus. Ils nous ont simplement dit qu’ils sont en grève », se plaint Nassirou Boukari, chauffeur.
Appolinaire Akoutodji, juriste, renchérit : « Il n’est pas dit que tout problème doit être réglé par la grève. Dans le secteur de la santé, les agents prêtent serment pour guérir les malades, mais aujourd’hui, ils abusent du droit de grève ».
Que dire du secteur de la justice dans lequel les cours et tribunaux deviennent subitement déserts, sans vie, en temps de grève ? Ici, les justiciables voient plutôt des jours sombres, du fait des audiences reportées en défaveur des personnes en détention. Déjà en situation normale, le traitement de certains dossiers n’évolue pas toujours à un rythme acceptable. En plus des mouvements de grève, c’est quasiment l’enfer pour des prisonniers, obligés de subir des rallonges dans des maisons d’arrêt qui répondent très peu aux normes. Sans oublier le cas des usagers qui paniquent parce qu’ils doivent se faire légaliser la copie d’une pièce ou de l’autre dans le cadre d’un recrutement ou officialiser un acte.
En ce qui concerne la sécurité, les citoyens sont beaucoup plus éprouvés en l’absence du contrôle du terrain par les professionnels. Les cas de braquage, de vols ou autres crimes s’enregistrent allègrement. Avec le dispositif sécuritaire déjà insuffisant pour la quiétude des populations, ces cas suscités viennent en rajouter au lot d’insomnie et de misère.

Fragilisation

L’autre aspect qui fait réfléchir pendant ces périodes, c’est le soutien manifeste que témoignent certains agents non concernés par la grève, mais qui boycottent aussi les activités en guise de solidarité.
Si la paralysie des activités permet aux grévistes de se faire entendre, il paraît judicieux de s’attarder sur ses conséquences. Dans un pays pauvre comme le Bénin, la cessation des activités dans un secteur ou dans un autre vient fragiliser davantage l’économie nationale en quête de stabilité et de souffle.
« La lutte contre la grève et l’impunité est un outil de développement de ce pays. Les grèves ralentissent le développement du pays », apprécie Jules Adilékon, conducteur de taxi-moto.
Invité à se prononcer sur la question, ce dimanche 21 janvier sur l’une des chaînes de télévision privées de la place, Me Bastien Salami souligne que la décision de la cour est «rétrograde, émotive et malheureuse». Justifiant ses propos, il explique que « la décision de la Cour constitutionnelle est un rétropédalage, car en 2011, la même Cour avait interdit la grève et aujourd’hui, elle prend une décision contraire ».
Ailleurs, l’Etat tape du poing sur la table pour couper court à tout mouvement et réduire les effets de la grève. Mais ici, c’est le Bénin, pays de paix et de démocratie. Pays de laisser-aller et d’exagération aussi, doit-on reconnaître.
A contrario de certains citoyens et juristes qui n’approuvent pas la grève dans l’administration publique béninoise, les syndicalistes y voient plutôt le seul instrument de pression pour obtenir satisfaction à leurs revendications. Tant ils en ont à défendre ! C’est le cas des secrétaires généraux des centrales et confédérations syndicales, notamment de la Confédération syndicale des travailleurs du Bénin, Kassa Mampo, de l’Unstb, Emmanuel Zounon qui avaient appelé les travailleurs à la mobilisation générale, au lendemain du vote de la loi, objet de polémique par l’Assemblée nationale. Tombé jeudi 18 janvier dernier, le verdict de la Cour constitutionnelle tend à apaiser les grévistes. Toutefois, les syndicats n’entendent pas désarmer.
« Maintenant, nous devons aller vers nos vraies revendications», ont-ils lâché, vendredi 19 janvier dernier, au lendemain de la décision de la Cour pour maintenir leur pression sur le gouvernement.
Au demeurant, l’Etat est aussi appelé à revoir ses positions jugées parfois trop ‘’rigides’’ en honorant ses engagements vis-à-vis des travailleurs pour la bonne marche de l’administration publique. On espère que la rencontre du chef de l’Etat ce jour avec les syndicalistes permettra de tourner définitivement la page de la grève pour le bonheur des populations et le développement du pays.
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