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Gestion du pouvoir sous la Rupture : La Justice à l’épreuve de l’immixtion de l’Exécutif

Publié le jeudi 24 mai 2018  |  Matin libre
Société
© Autre presse par DR
Société civile ; Sebastien Adjavon, Président du Conseil national du Patronat
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Depuis 2016, la justice semble ne fonctionner que pour les intérêts du chef de l’Etat. Les interpellations faites jusque-là par la justice prouvent à tout le moins que ce pouvoir tend à devenir un instrument de terreur que manipule le gouvernement.

Au Bénin, la justice inquiète. Tout porte à croire qu’elle n’existe que pour les opposants. Elle serait donc un appendice du gouvernement qui ne fait qu’exécuter les injonctions du Chef de l’Etat. La majorité des personnes interpellées ces derniers mois montre sans doute que le pouvoir judiciaire est de plus en plus instrumentalisé. Des cas édifiants prouvent qu’il y a lieu de s’interroger sérieusement sur les libertés au Bénin. En effet, quelques mois après l’accession de Patrice Talon au pouvoir, l’homme d’affaires Sébastien Ajavon avait été placé en garde dans une sombre affaire de cocaïne. Dans ce dossier, le juge décidera d’un non-lieu. Le dossier ne sera jamais vraiment élucidé. Sébastien Ajavon, allié politique de Patrice Talon entre les deux tours de la présidentielle de 2016, est considéré comme une potentielle menace pour le pouvoir. Il fallait donc l’éliminer du monde des affaires et de la scène politique pour offrir un boulevard à Patrice Talon. Près d’un an après le feuilleton Ajavon, la justice épinglera le syndicaliste Laurent Mètongnon pour des présumés retro commissions qu’il aurait touchées pendant qu’il était le président du Conseil d’administration de la Caisse nationale de la sécurité sociale (Cnss). Poursuivi depuis fin 2017 par le Tribunal de première instance de Cotonou, Laurent Mètongnon est placé en détention provisoire. Il a déjà fait six (06) mois en prison sans que ses avocats ne sachent comment et quand prendrait le procès. Laurent Mètongnon qui avait appelé à voter pour Talon et contre le candidat de Yayi Boni est devenu très critique envers le gouvernement de la Rupture. Membre du Front pour le sursaut patriotique (Fsp), il alertait régulièrement sur la gestion opaque du gouvernement de Patrice Talon. Pour beaucoup, le procès intenté contre lui reste une mesure tendant à le faire taire. D’ailleurs, ses défenseurs soulignent que l’accusation ne repose sur aucune preuve réelle. Le Secrétaire général de la Fédération des syndicats des travailleurs du ministère des Finances (Fesyntra-Finances) en savait beaucoup sur la gestion de Patrice Talon. Et il fallait, comme beaucoup l’affirment, le neutraliser. L’autre exemple qui confirme la volonté de l’Exécutif de mettre la justice à son service reste le dossier Atao Mohamed Hinnouho. Le député Hinnouho accusé de trafic et de vente de faux médicaments avait d’abord fui le Bénin fin 2017 avant de se livrer à la justice vers la fin du mois d’avril. Alors que le juge des libertés et de la détention a refusé d’exécuter un mandat d’arrêt décerné contre le député, un mandat de dépôt sera délivré pour fraudes fiscales, un délit qualifié de flagrant dans la même affaire. Atao Hinnouho admis à l’hôpital pour des soins, sera déposé manu militari à la prison civile de Cotonou. Dans la foulée, un autre mandat sera décerné par la même justice contre Atao pour incitation à la rébellion. Une nouvelle infraction qui vient corser les accusations. Mais les soutiens du député de la 15ème circonscription électorale parlent d’acharnement politique. Pour eux, c’est pour contourner la procédure de levée d’immunité que la justice et l’Exécutif ont dû imaginer toutes ces infractions pour détruire leur leader. « Les différentes procédures engagées contre Atao ne respectent aucune norme. Ce sont juste des inventions pour atteindre un objectif politique », a confié un lieutenant d’Atao. Fondamentalement, c’est une lecture qui semble proche de la réalité. Tout est fait pour faire coffrer un député qui a voté contre la révision de la Constitution et qui ose critiquer les actions du gouvernement. Comme lui, plusieurs autres députés de l’opposition pourraient rejoindre la prison. En effet, des demandes de levée d’immunité ont été déposées contre les députés valentin Djènontin et Idrissou Bako. Lesdites demandes devraient être examinées incessamment. Une commission spéciale dirigée par le Général Robert Gbian a déjà même été mise en place dans ce cadre. D’autres opposants pourraient atterrir dans les maisons d’arrêt puisque le régime ne tolère aucune contradiction. Il est vrai que pour distraire l’opinion et montrer que la bataille contre la corruption est impartiale, quelques affidés du régime de la Rupture ont été interpelés par la justice. Mais ce sont souvent des menus fretins de la scène politique.

Depuis 2016, on a comme impression que le pouvoir exécutif manipule la justice. Les opposants qui peuvent résister à Patrice Talon sont traqués. Même s’ils trainent des casseroles, la coïncidence est trop frappante pour ne pas susciter des craintes ou encore des suspicions. Il faut bien s’inquiéter de l’immixtion de l’Exécutif dans le judiciaire. La démocratie béninoise est danger.

Mike MAHOUNA
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