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Assemblée nationale : La loi sur le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme adoptée

Publié le mardi 12 juin 2018  |  La Nation
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© Autre presse par DR
Assemblée Nationale du Bénin
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Le Parlement a adopté, ce lundi 11 juin, le projet de loi portant lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme dont l’examen a démarré vendredi 8 juin dernier. L’avènement de cette loi permettra surtout au Bénin d’harmoniser et de renforcer sa réglementation nationale par rapport aux nouvelles mesures en cours dans l’Union économique et monétaire ouest-africaine afin de se prémunir contre la criminalité financière.

Composé de 165 articles répartis en sept titres, le projet de loi portant lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme adopté, ce lundi 11 juin, par l’Assemblée nationale est une fusion actualisée de la loi n°2006-14 du 31 octobre 2006 portant lutte contre le blanchiment de capitaux et la loi n°2012-21 du 27 août 2012 portant lutte contre le financement du terrorisme en République du Bénin. Les deux textes communautaires ont montré leurs limites après quelques années d’application obligeant les Etats de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (Uemoa), de concert avec la Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Bceao), à procéder à leur relecture, actualisation et fusion pour leur internalisation dans chacun des huit pays de l’Uémoa. La loi uniforme adoptée hier vise à prévenir et à réprimer le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme et de la prolifération des armes de destruction massive ainsi qu’à faciliter les enquêtes et les poursuites y relatives.

Ainsi, aux termes de l’article 8 du texte, sont considérés comme blanchiment de capitaux, certains agissements intentionnellement commis tels que la conversion ou le transfert de biens, par toute personne qui sait ou aurait dû savoir que ces biens proviennent d'un crime ou délit ou d'une participation à un crime ou délit, dans le but de dissimuler ou de déguiser l'origine illicite desdits biens, ou d'aider toute personne impliquée dans cette activité à échapper aux conséquences juridiques de ses actes ; la dissimulation ou le déguisement de la nature, de l'origine, de l'emplacement de la disposition, du mouvement ou de la propriété réelle de biens ou des droits y relatifs, par toute personne qui sait ou aurait dû savoir que ces biens proviennent d'un crime ou délit ou d'une participation à un crime ou délit et l'acquisition, la détention ou l'utilisation de biens, dont celui qui s'y livre, sait ou aurait dû savoir, au moment où il les réceptionne que ces biens proviennent d'un crime ou délit ou d'une participation à un crime ou délit. Il y a aussi blanchiment de capitaux même si l’acte commis par l'auteur de l'infraction a procuré des biens à blanchir ; ou si les activités qui sont à l'origine des biens à blanchir sont exercées sur le territoire d'un autre Etat membre ou celui d'un Etat tiers.
Quant au financement du terrorisme, il s’entend tout acte commis par une personne physique ou morale qui, par quelque moyen que ce soit, directement ou indirectement, a délibérément fourni ou réuni des biens, fonds et autres ressources financières dans l'intention de les utiliser ou sachant qu'ils seront utilisés, en tout ou partie, en vue de la commission notamment d'un ou de plusieurs actes terroristes ; d'un ou de plusieurs actes terroristes par une organisation terroriste et d'un ou de plusieurs actes terroristes, par un terroriste ou un groupe de terroristes. La tentative de commettre une infraction de financement du terrorisme ou le fait d'aider, d'inciter ou d'assister quelqu'un en vue de la commettre, ou le fait d'en faciliter l'exécution, constitue également une infraction de financement du terrorisme.

La loi retient l'infraction commise, que l'acte en question se produise ou non, ou que les biens aient ou non été utilisés pour commettre cet acte. L'infraction est commise également par toute personne physique ou morale qui participe en tant que complice, organise ou incite d'autres à commettre les actes susvisés.

Appel à la vigilance des banques

En fait, le texte adapte et actualise le cadre juridique de façon à accroître l’efficacité des mesures de lutte contre la criminalité financière. Il prévoit une approche tenant davantage compte des risques. A ce titre, la loi renforce notamment les obligations de vigilance à l’égard de la clientèle, plus claires et plus transparentes, afin de disposer de procédures et contrôles adéquats, garants d’une meilleure connaissance des clients et d’une meilleure compréhension de la nature de leurs activités. Elle introduit plusieurs innovations touchant notamment l'insertion d'un volet portant sur la lutte contre le financement de la prolifération des armes de destruction massive, par la prise en compte des résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies relatives à la prévention, la répression et l'interruption de la prolifération des armes de destruction massive et de son financement, l'introduction de dispositions relatives à l'évaluation des risques en vue de la mise en œuvre de mesures proportionnées de prévention, l'inclusion de dispositions spécifiques visant à limiter l'utilisation des espèces dans les transactions. A ce titre, il est prévu que le prix de la vente d'un bien immobilier dont le montant est supérieur à un seuil fixé par l'autorité compétente, c’est-à-dire la Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Bceao), ne puisse être acquitté qu'au moyen de virements ou de chèques. Les personnes assujetties sont tenues de déclarer à la Cellule nationale de traitement des informations financières (Centif) les transactions en espèces d'un montant égal ou supérieur à un seuil fixé par une institution de la Bceao qu'il s'agisse d'une opération unique ou de plusieurs opérations qui apparaissent liées. Le texte précise les mesures de vigilance spécifique à mettre en œuvre par les institutions financières dans le cadre de leurs relations de correspondant bancaire transfrontalier ; insère de dispositions interdisant explicitement aux institutions financières de nouer ou de maintenir une relation avec une banque fictive définie comme un établissement de crédit constitué dans un Etat où il ne dispose d'aucune présence physique effective permettant l'exercice des activités de direction et de gestion. Il donne par ailleurs de précision sur des méthodes et moyens de recherche ainsi que de constatation de l'infraction de blanchiment de capitaux ou de financement du terrorisme par l'administration des douanes. A ce titre, il est prévu que les agents des douanes puissent procéder à l'immobilisation et à la perquisition des moyens de transport ainsi qu'à la visite et à la retenue des personnes soupçonnées, conformément aux missions qui leur sont assignées dans leur zone d'action?

De lourdes sanctions pénales

La loi insiste sur la surveillance particulière de certaines opérations. C’est ainsi qu’aux termes de l’article 32, il est prescrit que doivent faire l’objet d’un examen particulier de la part des institutions financières, tout paiement en espèces ou par titre au porteur d’une somme d’argent, effectué dans des conditions normales dont le montant unitaire ou total est égal ou supérieur à 50 millions de francs Cfa ; toute opération portant sur une somme égale ou supérieure à 10 millions de francs Cfa, effectuée dans des conditions inhabituelles de complexité ou injustifiées ou paraissant ne pas avoir de justification économique ou d’objet licite.

A cet effet, les institutions financières sont tenues de se renseigner auprès du client, et/ou par tous autres moyens, sur l’origine et la destination des fonds ainsi que sur l’objet de l'opération et l’identité des acteurs économiques de l'opération. Un rapport confidentiel écrit comportant tous les renseignements utiles sur les modalités de l'opération est établi ainsi que sur l'identité du donneur d'ordre et, le cas échéant, des acteurs économiques impliqués. Une vigilance particulière doit être également exercée à l'égard des opérations provenant d'institutions financières qui ne sont pas soumises à des obligations suffisantes en matière d'identification des clients ou de contrôle des transactions. L’institution financière doit s’assurer que ses obligations sont appliquées par ses bureaux de représentation, ses succursales, ou ses sociétés filiales dont le siège est à l’étranger, à moins que la législation locale n’y fasse obstacle, auquel cas, elle en informe la Centif.

Les mêmes vigilances et surveillances particulières concernent aussi les virements électroniques. Selon l’article 33 de la loi, les institutions financières qui effectuent des virements électroniques sont tenues d'obtenir et de vérifier, concernant le donneur d'ordre, son nom complet, son numéro de compte, lorsqu'un tel compte est utilisé pour effectuer le virement de fonds, son adresse ou, en l'absence d'adresse, son numéro d'identification nationale ou le lieu et la date de sa naissance ainsi que, si nécessaire, le nom de son institution financière. L’établissement financier du donneur d'ordre requiert également le nom du bénéficiaire et le numéro de compte de ce dernier, lorsqu'un tel compte est utilisé pour effectuer le virement de fonds. Les informations visées supra doivent figurer dans le message ou le formulaire de paiement qui accompagne le virement. S'il n'existe pas de numéro de compte, un numéro de référence unique doit accompagner le virement.
Les dispositions précédentes ne s'appliquent pas aux virements de fonds effectués au moyen d'une carte de crédit ou de débit ou d'un téléphone portable, si la carte ou le téléphone sert à payer des biens ou des services et si le numéro de la carte ou du téléphone accompagne, tous les virements découlant de la transaction, précise le texte uniforme. Elles ne s'appliquent pas non plus aux transferts pour lesquels le donneur d'ordre et le bénéficiaire sont tous deux des institutions financières agissant pour leur compte, ni aux virements effectués au profit d'autorités publiques, pour le paiement d'impôts, d'amendes ou d'autres prélèvements.

Les manquements à toutes ces dispositions liées aux infractions en matière de blanchiment de capitaux sont punies d’une peine d’emprisonnement de trois à quatorze ans, selon le cas, et au paiement d’une amende égale au triple de la valeur des biens ou des fonds sur lesquels ont porté des opérations de blanchiment de capitaux avec possibilité d’interdiction de séjour. La peine d’emprisonnement est de dix ans au moins et d’une amende égale au moins au quintuple de la valeur des biens ou des fonds sur lesquels ont porté les opérations de financement du terrorisme. Des sanctions pénales sont également applicables aux personnes morales poursuivies pour les infractions de blanchiment de capitaux ou de financement du terrorisme.

Les députés saluent l’avènement de cette loi communautaire qui manquait à l’arsenal juridique béninois pour réussir la lutte contre la criminalité financière au Bénin. Ils recommandent le renforcement des capacités de l’administration douanière appelée à jouer un rôle important dans cette lutte aux côtés de la Centif, placée sous la tutelle du ministre chargé des Finances, dotée désormais d’autonomie financière et d’un pouvoir de décision autonome sur les matières relevant de sa compétence, notamment le traitement et la transmission d’informations en vue de la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme?
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