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Tribune libre : Entrepreneuriat et politique, le cri du cœur

Publié le jeudi 14 juin 2018  |  Matin libre
Kwame
© aCotonou.com par DR
Kwame Senou,chroniqueur
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Lorsque l’année dernière, j’écrivais que la jeunesse n’est pas un sauf-conduit vers l’excellence, je ne savais pas que cette sortie devrait être répétée. La prise de parole en public est une occasion, de vivre la communauté. Tant elle vous donne l’occasion de partager votre vision avec vos contemporains pour en extraire les réactions. Qu’elles soient positives ou négatives, ces réactions constituent l’occasion pour se faire un avis définitif sur la question qui a poussé en premier lieu à s’exprimer.

J’ai acquis la conviction depuis un an que c’est un couple qui dirige le monde, l’entrepreneuriat et la politique. La conjonction de leurs efforts est capable d’apporter un bien-être durable, une justice sociale et un environnement meilleur.

S’engager en politique, un courage nécessaire

Il est temps de prendre au sérieux la politique. En effet, l’avenir de l’Afrique et plus particulièrement du Bénin appartient aux jeunes. Nul n’est besoin ici de rappeler les indicateurs démographiques. Mais il faut mieux interpréter ces indicateurs : les personnes qui décident actuellement ne vivront pas assez longtemps pour en subir les conséquences. Ensuite la grande différence d’âge fait que les jeunes n’auront plus personne à blâmer pour leurs échecs dans quelques années.

C’est ici que commence le cri de cœur. A la différence de ceux qui vous invitent à vous politiser et que vous comprenez comme une incitation à un activisme Facebook, à un ‘’personal branding ’’ et à la surenchère en interviews dans la presse internationale, je vous invite à vous engager sérieusement en politique. Cet engagement sérieux passe par l’entrée dans un parti politique, un mouvement politique ou un think tank. Cet engagement est à distinguer des initiatives hasardeuses de candidatures solitaires essentiellement enflammées par l’ego. La politique est un métier, un art et il faut se donner le temps de l’apprentissage, le stage professionnel nécessaire à la maîtrise des compétences pratiques car prétendre renverser les choses sans écouter ou apprendre de ceux qui, depuis bientôt 60 ans, orientent la vie politique nationale est une hérésie. Une autre façon de s’engager sérieusement en politique, c’est de soutenir les autres jeunes qui ont le courage d’y aller, de se battre dans la guerre de positionnement, de mobiliser les financements et de faire le travail du terrain. Je dois tempérer en disant que ce soutien doit s’accompagner d’un discernement nécessaire pour filtrer les imposteurs et les parvenus.

La politique décide de tout. En mettant les lois et les règlements dans la main des politiques, notre conception sociale leur a donné d’énormes pouvoirs. Le budget est une loi et elle détermine l’investissement public, la politique sociale de l’Etat et la vie des entreprises à travers la détermination et la collecte de l’impôt. Comment imaginer un instant que les jeunes puissent changer leurs destins s’ils sont absents du champ politique, centre des décisions. Voilà pourquoi il est impératif pour les jeunes d’y avoir leur place. Contrairement au football, les affaires de la cité ne peuvent se gérer depuis le banc de touche ou pire les gradins des spectateurs.

Rêver plus grand

L’évangile de l’entrepreneuriat a rapidement séduit les jeunes à qui il fut promis auto-emploi, fin de la tyrannie des patrons et liberté d’aller et de venir. Plusieurs tribunes depuis quelques temps, venant de jeunes entrepreneurs rétablissent la vérité. Se payer un salaire ne peut qu’être fonction des efforts fournis soi-même. Beaucoup de jeunes entrepreneurs expérimentent donc, avec douleur, l’absence de revenus et les clients « difficiles » d’ailleurs beaucoup plus épuisants que les patrons. Mais l’Afrique et le Bénin ont besoin des entrepreneurs surtout jeunes. Leur fraîcheur et leur naïveté ouvriront la voie aux solutions privées du développement ; les grandes innovations du monde ont été l’œuvre de personnes ou organisations privées. Ensuite parce qu’ils sont les plus concernés, l’entrepreneuriat des jeunes pourra définir le futur qu’ils espèrent. Mais alors pourquoi rêver plus grand ?

L’entrepreneuriat tel qu’il est aujourd’hui est cosmétique. C’est un entrepreneuriat qui veut être invité aux conférences, sélectionné pour tel programme de leadership ou mis en couverture de magazine. C’est un entrepreneuriat qui veut être célébré avant d’avoir créé suffisamment d’emplois ou de la valeur. C’est une faiblesse, une petitesse compréhensible à des âges où l’on n’a généralement pas assez fait pour être reconnu mais où les réseaux sociaux et les flux d’informations nous mettent en compétition avec quantité de génies du monde entier. Malgré cela, il faut rêver grand, car lorsque les effluves de la célébration montent à la tête, l’esprit s’en retrouve embrouillé, incapable de proposer des évolutions. Rêver grand demande des jeunes entrepreneurs de se donner des buts plus grands qu’eux. Les problèmes de l’Afrique ne se règleront pas uniquement avec des applications ou des innovations saugrenues. Je pense à tous ces développeurs d’applications qui veulent informer les paysans de la météo ou des prix, et qui se rendent compte que les smartphones ne sont pas disponibles. Un simple serveur vocal GSM en langues nationales pourrait efficacement produire des résultats.

Rêver plus grand, je le martèle, demande des idées d’entreprises qui plongent dans l’anonymat mais répondent à des besoins existants. C’est aussi envisager de grands projets aux coûts importants qui forcent à l’association et l’humilité. Heureusement que, passée l’euphorie sur l’entrepreneuriat, les choses se structurent de plus en plus, avec des entreprises où les jeunes sont 2, 3, 4 voire plus.

Mais pourquoi parler de l’entrepreneuriat et de la politique et pourquoi est-ce urgent ?

Les crises économiques successives, les défis de notre continent et de notre planète nous démontrent à souhait que le leadership mondial qu’il soit politique ou entrepreneurial est capable de changer en mal ou en bien, le sort du monde. Dans un environnement où la politique fait l’objet d’un dédain de la part des esprits les plus brillants de la République, et où l’entreprenariat est désormais une affaire de frustrés du monde de l’emploi, il me semble important de rétablir ces deux fonctions dans leur contexte qui est fait de sacerdoce suprême, d’engagement et de détermination, c’est d’ailleurs à ces hauts prix que les lauriers de l’honneur et de la fortune célèbreront les acteurs qui s’y engagent.

La politique et l’entrepreneuriat doivent attirer nécessairement pour le bien de la communauté mais aussi pour le bien personnel. Il faut y attirer des esprits brillants, généralement avides de sécurité et cachés en expatriation ou persécutés au pays. Il faut y attirer le maximum pour que le jeu de la compétition fasse émerger les plus forts, les plus valeureux, les plus intelligents pour le bien de la Nation toute entière.

C’est donc un appel à tous ceux qui se sentent capables et prêts, de se lancer ou dans l’entrepreneuriat, créateur d’emplois et de richesses ou en politique, créatrice des conditions socio-économiques favorables. Ils auront le soutien de bien des gens qui n’attendent que leur engagement.

Kwame Senou
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