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Débat autour de la proposition d’amendement de la Constitution: La majorité parlementaire prête pour le referendum, la société civile émet des réserves

Publié le dimanche 15 juillet 2018  |  L`événement Précis
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© aCotonou.com par dr
Bloc de la Majorité Parlementaire (Bmp)
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Les députés de l’Assemblée nationale ont rejeté, le jeudi 5 juillet dernier, le projet de loi portant amendement de la Constitution du 11 décembre 1990 par voie parlementaire. La voie du référendum qui est la suite attendue après cet événement laisse perplexes les députés membres du Bloc de la majorité parlementaire (Bmp), notamment le député Abdoulaye Gounou. Présent à la cérémonie de lancement du projet de mobilité urbaine « Bénin Taxi » dans le département de l’Atacora, il a saisi cette occasion pour éclairer la lanterne des populations sur le bien-fondé de la démarche conduisant à la révision de la Constitution. Face aux élus locaux communaux et municipaux, maires, préfets, têtes couronnées, rois, sages et populations de la ville de Natitingou, Abdoulaye Gounou a expliqué que la décision de réviser la Constitution n’est pas que l’apanage du Bmp. Selon ses explications, les 83 députés du parlement béninois étaient unanimes sur le projet de révision de la Constitution béninoise. Il s’est référé à l’un des quatre points soumis, la promotion de la représentativité des femmes, pour démontrer aux populations le mécanisme suggéré par les députés pour faire appliquer cette réforme et permettre aux femmes d’être présentes aux instances de prise de décision, aussi bien au plan local, que communal et législatif. « On a décidé qu’il faut trouver un système pour accompagner les femmes. Mais l’article 26 de notre Constitution actuelle s’oppose à la discrimination positive. On a tous décidé d’amender l’article pour accompagner les femmes. Sur les 24 circonscriptions, on aura 24 femmes et au terme de la compétition, nous verrons la liste qui est arrivée à la première place. Il y aura deux têtes de liste. Une femme tête de liste dans chaque circonscription et la tête de liste normale, de sorte qu’il y ait au moins une femme par circonscription électorale, même si elles n’avaient pas été placées », a détaillé le député Gounou. Une stratégie qui, de même que les autres points soulignés, avait connu l’approbation des députés tant de la minorité que de la majorité parlementaire. Abdoulaye Gounou s’est désolé du recalage de l’amendement par voie parlementaire et a fait part aux populations de l’engagement de ceux de la majorité à assurer la prise en compte de cette réforme. « Nous allons faire aboutir cette réforme, contre vents et marées », clamera-t-il, sous les ovations des populations.

« Il faut accompagner nos épouses »

A propos du point relatif à la représentativité des femmes au sein du parlement. Voici ce qu’il en dit : « Les 83 députés de la mouvance comme de l’opposition étaient tous d’accord. On a décidé qu’il faut trouver un système pour accompagner les femmes. Mais l’article 26 de notre actuelle constitution s’oppose à la discrimination positive qu’il faut installer à l’Assemblée nationale. A Agoué, on a tous décidé d’amender l’article pour accompagner les femmes. Nous avons décidé de créer un poste pour les femmes par circonscription électorale. Sur les 24 circonscriptions, on aura 24 femmes et au terme de la compétition, nous verrons la liste qui est arrivée à la première place. Il y aura deux têtes de liste. Une femme tête de liste dans chaque circonscription et la tête de liste normale, de sorte qu’il y ait au moins une femme par circonscription électorale, même si elles n’avaient pas été placées. Il faut accompagner nos épouses. Il faut que les femmes soient députées. Nous allons faire aboutir cette réforme, contre vents et marées. C’est l’élément phare de la réforme. »



La société civile s’oppose à l’alignement des mandats

La Plateforme électorale des Organisations de la société civile (Osc) du Bénin a rendu publique sa position au sujet de la réforme du Code électoral. C’était le jeudi 12 juillet 2018 au Codiam à Cotonou.

Après son atelier de construction de positions tenu à Cotonou suite au processus d’amendement de la loi N°2013-06 du 25 novembre 2013 portant Code électoral en République du Bénin, la Plateforme électorale des OSC du Bénin affiche ses positions sur un total de 8 points de réformes majeures. Le tout premier porte sur l’alignement des mandats législatif, présidentiel, et l’organisation des élections générales. A ce sujet, la présidente de la Plateforme, Fatoumatou Batoko-Zossou, trouve non pertinents les motifs avoués de la réforme proposée qui sont, d’une part, liés au coût élevé des élections et d’autre-part, au fait que le pays soit constamment en campagne électorale et élections. Selon ses explications, la problématique du coût des élections peut être réglée autrement que par le groupage, et la seconde raison évoquée, a déjà été réglée par le Code électoral en vigueur qui fixe strictement les périodes de campagne. La Plateforme s’est prononcée contre l’allongement à 5 ans du mandat législatif dans le but de l’aligner sur le mandat présidentiel. « Ce serait dénaturer le dispositif démocratique et électoral hérité de la Conférence des forces vives de la nation, qui permet au peuple de guider la gouvernance présidentielle à travers des législatives en cours de mandat présidentiel en aboutissant à une majorité parlementaire favorable ou non au Président de la République », a fait savoir Fatoumatou Batoko-Zossou. Au cas où il y aurait groupage d’élections, la Plateforme propose la réduction du mandat des élus communaux et locaux à 4 ans, de manière à organiser leurs élections avec les législatives la même année, et en prenant certaines précautions comme la conception de documents électoraux explicites, le règlement des questions de délimitation des communes, arrondissements, villages ou quartiers de ville, la rigueur de la Céna dans la gestion des listes de candidatures, le recours aux juridictions de proximité susceptibles de désengorger la Cour suprême. Elle recommande, par contre, le maintien de la tenue de l’élection présidentielle et le mandat présidentiel tels quels actuellement dans le dispositif électoral béninois.

Des autres points de réformes
La Plateforme électorale des Osc du Bénin reste favorable aux autres points de réformes majeures proposées par les initiateurs de la proposition d’amendement. Il s’agit de l’exigence du quitus fiscal et de la résidence ininterrompue pendant un an pour les candidats aux élections législatives, de la suppression du Cos-Lépi et de l’attribution de ses charges à la Céna, de la représentativité des femmes en politique. Elle recommande, entre autres, le maintien de la disposition actuellement en vigueur sur l’obligation faite aux partis politiques ou listes de partis de présenter des listes de candidatures dans tous les arrondissements du territoire national pour l’élection des conseillers communaux ou municipaux. Concernant la composition de la Céna, elle propose entre autres, le maintien du nombre des membres à 5, et l’accord aux magistrats de désigner leur représentant à la Céna. Enfin, sur la question relative à l’augmentation de la caution pour l’élection présidentielle qui passe de 15.000.000 FCFA à 50.000.000 FCFA, la Plateforme propose également comme amendement, le paiement de la caution au dépôt de la candidature, la sanction des « candidatures fantaisistes », et le versement au Trésor public des cautions, après validation des dossiers de candidature.

« Nous allons faire aboutir cette réforme contre vents et marées »: Abdoulaye Gounou à propos de la loi portant amendement constitutionnel

Les positions sont davantage tranchées entre opposants et « mouvanciers ». Et ceci, depuis la dernière tentative de révision de la Constitution. Après l’échec de la seconde phase au parlement, à savoir l’obtention des 4/5ème, les députés auteurs de la proposition de loi portant amendement de la Constitution et l’ensemble des membres du Bloc de la majorité parlementaire (Bmp), ne brandissent qu’une seule doléance aujourd’hui : aller au référendum. La Constitution l’a certes prévu en son article 155, mais laisse au Chef de l’Etat, la prérogative de prendre l’initiative. S’il le juge opportun, tenant compte des conditions nécessaires à son organisation, il le fera. Au cas contraire, il peut aussi dire niet. Mais la guéguerre se fait déjà virulente entre majorité et minorité parlementaire, au point qu’on oublie le caractère facultatif de ce scrutin qui dépend de la seule volonté de Patrice Talon.
D’un côté, il ne serait jamais question d’aller au référendum dans les conditions actuelles. Dans une analyse qu’il a publiée au milieu de la semaine sur les réseaux sociaux et dans les médias, le député Valentin Agossou Djènontin de la minorité parlementaire a sorti des arguments « solides » pour combattre toute possibilité d’un référendum en ces moments. Il s’est surtout basé sur l’absence d’une proposition de loi référendaire en ces temps au parlement, conformément aux dispositions de la Loi N° 2011-27 du 18 Janvier 2012 portant conditions de recours au référendum. « A ce jour, l’Assemblée nationale du Bénin n’a jamais connu, ni examiné une proposition de loi référendaire portant amendement de la Constitution de la République du Bénin. Par conséquent, le Président de l’Assemblée Nationale ne saurait envoyer une telle proposition de loi au Gouvernement pour l’organisation d’un quelconque référendum ». En effet, l’article 3 de la Loi 2012-27 du 18 Janvier 2012 dispose : « Le projet ou la proposition de loi référendaire doit mentionner dans son intitulé son caractère de loi référendaire. Une telle loi n’a jamais été examinée à l’Assemblée Nationale le jeudi 5 juillet 2018 pour être transmise le vendredi 6 juillet 2018 au Gouvernement. » Le député Djènontin en conclura qu’on ne saurait s’aventurer dès lors vers un référendum en l’état, sans tordre le cou à la légalité constitutionnelle. De l’autre côté, celui des députés de la majorité parlementaire, tout peut être corrigé très vite. Certains misent sur le Code électoral dont le toilettage annoncé, permettra de suppléer à certaines indispositions soulevées dans le camp adverse.

La magie attendue
Les arguments pour ne pas renoncer à ce fameux référendum ne périssent plus. Ils sont nombreux, les partisans de Talon, qui envahissent déjà le terrain pour préparer l’électorat à cette éventualité. La campagne précoce en prélude à cet hypothétique référendum se ressent abondamment sur les réseaux sociaux aussi, où les soutiens du chef de l’Etat se disent déjà convaincus que le « Oui » vaincra le « Non ». Certains font presque la cour à Patrice Talon pour aller dans leur sens. Le député Adam Bagoudou ne demande pas mieux. Dans une interview accordée à « l’Evènement Précis » en début de semaine, il laissera entendre : « … Étant donné que le dossier est envoyé au niveau du gouvernement pour dire nous avons voté, voilà la suite, et bien, en respect à l’article 156 de la Constitution, le gouvernement va faire diligence pour ne pas enfreindre à cette disposition de la Constitution, et organiser le référendum, certainement avant la fin de l’année». Il y a donc déjà des idées de date. Talon a encore plus de 6 mois pour agir, même si, au niveau d’autres acteurs publics, « la chose est impossible ». Michel Adjaka, ex président de l’Union nationale des magistrats du Bénin (Unamab), attend de voir s’il y aura référendum, alors que tout lui semble défavorable dans les six mois à venir. Il évoque entre autres, la loi référendaire actuelle qui exige que le corps électoral soit convoqué 120 jours avant le scrutin, que la liste électorale soit apprêtée 90 jours avant l’élection, que le dossier soit inscrit à l’ordre du jour de la première session parlementaire de l’année, etc. Lorsqu’on sait que la nouvelle mandature du Conseil d’orientation et de supervision de la Lépi (Cos-Lépi) ne finira ses travaux d’actualisation et ne rendra la nouvelle liste que le 31 janvier 2019, que la première session parlementaire a été clôturée le vendredi 06 juillet, Michel Adjaka et plusieurs autres observateurs se demandent par quelle magie, un référendum peut se tenir actuellement, sans enfreindre la loi. D’où leur étonnement face aux appels pressants de certains hommes politiques à son organisation sans délai.
D’une manière ou d’une autre, la chose parait impossible dans un avenir immédiat, à moins que tous les textes existants soient revus et taillés sur mesure pour y parvenir. Et c’est sans doute le plus difficile des exercices auxquels pourrait se soumettre l’Assemblée nationale, si la majorité parlementaire ne se ravise. Et si le Chef de l’Etat, aussi, s’engage dans leur direction.

Christian TCHANOU et Rastel DAN
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