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Edito: Un changement radical

Publié le vendredi 12 octobre 2018  |  L`événement Précis
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Vers la fin des années 1980, lorsque prit fin la guerre froide et que nos pays se retrouvèrent seuls face à la débâcle économique de tant d’années de mauvaise gestion, le constat fut consternant. Des mois d’arriérés de salaires dus aux fonctionnaires, des systèmes de santé à la dérive, une éducation nationale dévastée, sans compter le système productif en panne, une banqueroute qui obligea certains citoyens au suicide… Tel en fut le résultat. Sollicitées pour réparer la gabegie, les institutions de Bretton Woods n’avaient eu d’autre choix que d’imposer les fameux programmes d’ajustement structurels (PAS) dont l’un des leitmotivs avait été de limiter sévèrement les dépenses sociales. Gèle des recrutements dans la fonction publique, départs volontaires à la retraite, gèle des avancements, coupes claires dans les budgets de l’éducation et de la santé…Dans la foulée, les écoles normales devant former les enseignants pour préparer l’avenir du pays furent fermées.
Nous sortons d’un séisme. La décennie 90 a été celle du sacrifice suprême. Le capital humain a été liquidé au nom de la réalisation des sacro-saints équilibres macroéconomiques. Il fallait faire de la croissance économique à tout prix, et surtout au prix de nous autres, élèves puis étudiants. La formation en a pris un coup énorme. Les bibliothèques et les laboratoires étaient aussi rares que les enseignants qualifiés. Les équipements de santé n’étaient acquis qu’à compte-gouttes. Aujourd’hui encore, même dans l’hôpital de référence qu’est le CNHU, il y a des médecins qui sont obligés d’amener leurs propres équipements de leurs cabinets privés pour soigner les patients. Souvent, même si vous avez l’argent pour payer les soins et les médicaments, soit il n’y a pas de spécialistes soit il n’y a pas d’équipement adéquat disponible. Beaucoup de morts, beaucoup de cadres ou de futurs cadres, de grands patrons, architectes d’un Bénin nouveau sont partis, morts par malchance. Morts par centaines et par milliers.
En fait, on a oublié pendant longtemps que personne ne mange les pavés et que le véritable capital est le capital humain. Les institutions de Bretton Woods ont commencé à le comprendre en observant la fulgurance imprévue des dragons d’Asie du sud-est et des pays émergeants. Toutes les études révèlent que pour atteindre les performances qui leur ont permis de sortir de la nuit de la pauvreté, ces Etats ont dû faire de gros efforts d’investissement dans le capital humain. Tout commence par une éducation de qualité et un système de santé performant.
Il y a quelques années, j’ai suivi un reportage sur le premier jour du Bac en Corée du Sud. Les Sud Coréens vouent une telle vénération à l’éducation que ce sont des motards qui vont chercher les candidats chez eux à la maison pour éviter qu’ils n’arrivent en retard à leur centre de composition. Les routes menant aux centres d’examen sont fermées à la circulation jusqu’à ce que les candidats entrent en salle. Le pays s’arrête pour quelques heures pour offrir les meilleures conditions de succès à ceux qui représentent son avenir. Imaginez les investissements des parents et de l’Etat pour la réussite de ces enfants. Imaginez la pression sur les enfants eux-mêmes qui, comme en retour, font tous les efforts, pour avoir les meilleures notes. Quand ces notes ne tombent pas, c’est la dépression, des suicides…Le revers de la médaille. Je parle de la Corée du Sud, un pays qui avait, en 1960, presque le même niveau de développement que le Bénin, mais qui a compris que le premier trésor est le capital humain, tant qu’un pays a l’intention de sortir de la pauvreté.
Ce jeudi 11 octobre 2018, la Banque Mondiale a enfin pris en compte cette dimension essentielle du développement des nations, en lançant un indice dénommé Indice du capital Humain. Il mesure les performances réalisées sur l’éducation et la santé des citoyens. Jim Yong Kim, président du Groupe de la Banque mondiale, a pu déclarer à cette occasion : « Le capital humain est souvent le seul capital des personnes les plus pauvres. C’est un des facteurs essentiels d’une croissance économique durable et inclusive.» Cette dernière phrase vient comme détruire tout ce qui a été appliqué à nos Etats il y a quelques années. Cette évolution paradigmatique est comme une révolution intellectuelle au sein des institutions internationales qui comprennent enfin que la première variable du développement reste l’homme et tout l’homme.
Désormais, il faudra le clamer partout : les investissements sur l’homme constituent le premier outil de performance économique pour aujourd’hui et pour demain. A bon entendeur, salut !

Olivier ALLOCHEME
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