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Suspension des élections rectorales et autres: L’intersyndicale des enseignants appelle le gouvernement à l’esprit d’ouverture

Publié le mercredi 5 decembre 2018  |  L`événement Précis
Marie-Odile
© aCotonou.com par Didier Assogba
Marie-Odile Atanasso, La ministre de l’Enseignement supérieur et de la recherche scientifique, lors de l`atelier national d’échange des organisations de la société civile et des élus locaux sur la localisation des ODD
Palais des congrès de Cotonou, lundi 21 novembre 2016. Atelier national d’échange des organisations de la société civile et des élus locaux sur la localisation des ODD
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L’Intersyndicale des enseignants des universités publiques du Bénin donne de la voix au sujet de la décision de suspension des élections des recteurs et des responsables des Unités de formation et de recherche. C’est à travers une déclaration rendue publique ce lundi 03 décembre 2018. Réunis en assemblée générale le 21 Novembre 2018, les syndicats qui composent l’intersyndicale, ont relevé les incongruités que porte cette décision du gouvernement. Elle invite le gouvernement à faire preuve d’esprit d’ouverture en laissant le processus des élections des responsables des Ufr se poursuivre comme il est de tradition depuis plus de trente-cinq ans. En attirant l’attention de la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique, Marie-Odile Attanasso et du gouvernement sur certains « faits dommageables » pour le système, elle a également précisé combien le gouvernement court le risque de créer une « exacerbation des tensions » dans les universités nationales du Bénin (Unb). Lire la déclaration, ci-après.

LIRE L’INTEGRALITE DE LA DECLARATION

Les enseignants du supérieur du Bénin, réunis en Assemblée Générale extraordinaire le mercredi 21 novembre 2018, ont décidé de rendre publique la présente déclaration pour porter à la connaissance de l’ensemble de la communauté nationale et internationale que le gouvernement du Bénin vient de provoquer une exacerbation des tensions dans les universités nationales du Bénin (UNB) en décrétant la suspension des élections des Recteurs et des responsables des Unités de Formation et de Recherche (UFR). Cette décision incompréhensible a été précédée d’une série d’actes posés par le cabinet de la Ministre de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique (MESRS) visant à retirer aux enseignants du supérieur divers acquis obtenus depuis très longtemps pour faciliter leur travail académique et de formation des cadres du pays. Lesdits actes se sont multipliés dès la suspension le 30 mars 2018 du mouvement de grève déclenché au début de cette année. L’attitude de l’autorité de tutelle depuis quelques mois surprend plus d’un parce que nous avions cru en sa bonne foi lorsqu’elle réclamait l’arrêt de la grève pour calmer les tensions sur les campus et conduire à terme l’année académique. La posture très offensive adoptée par le cabinet du MESRS depuis avril 2018 a été aggravée par l’adoption par le Parlement du Bénin de plusieurs lois qui portent sévèrement atteinte aux libertés syndicales et chosifient le travailleur béninois. Au regard de la succession des faits, il n’est pas exagéré d’affirmer que la suspension des élections dans les UNB est la suite d’un plan apparemment bien ficelé, avec dans le viseur les enseignants du supérieur en premier.
L’Assemblée Générale a fustigé les conditions dans lesquelles le décret qui suspend les élections dans les UNB a été rendu public et condamne fermement cette décision.

Que s’est-il passé ?
Le 25 octobre 2018 le décret n° 2018-441 du 20 septembre 2018 est mystérieusement posté sur les réseaux sociaux. On peut lire dans ce décret que c’est suite à une proposition de notre Ministre présentée en Conseil le 19 septembre 2018 que l’acte a été signé le 20 septembre. Plus d’un mois avant, la communauté universitaire a reçu l’arrêté Année 2018N°593/MESRS/DC/SGM/CT-AAPDS/SA/059SGG18 signé et publié le même 19 septembre 2018 pour lancer les opérations de préparation des élections des responsables des UFR à l’Université d’Abomey-Calavi et l’Université de Parakou. Avant cela, la Ministre, par courrier en date du 24 juillet 2018 (courrier N° 2444-18/MESRS/DC/SGM/CTAAPDS/SA) a informé la communauté universitaire que la date du scrutin pour les élections des responsables des UFR est fixée au 16 novembre 2018. Pourquoi le gouvernement choisit après tout ceci l’option d’un revirement sans aucune concertation ?
Face à ces interrogations, la Coordination de l’Intersyndicale des UNB (CIS) a fait unanimement l’option de conditionner sa participation aux travaux de la deuxième session du Conseil Sectoriel de Médiation et de Promotion du Dialogue Social (CSMPDS) à une audience avec la Ministre pour comprendre les motivations qui fondent la prise de ce décret. L’audience demandée par la CIS a été accordée et s’est tenue le 30 octobre 2018.

Que retenir de l’audience avec la Ministre ?
D’entrée de jeu, la rencontre a été qualifiée par la Ministre de « séance de vérité ». Le gouvernement reproche aux universitaires une mauvaise gouvernance globalement à trois niveaux : administratif, académique et financier. Le plus préoccupant aux yeux de la Ministre est la mauvaise gouvernance administrative. Des échanges de courriers ont été mentionnés au cours de l’audience pour justifier un manque de considération des dirigeants universitaires et des syndicats pour l’autorité ministérielle. Sur le plan académique, un sérieux malentendu est survenu entre les chefs d’établissement de l’Université d’Abomey-Calavi et le gouvernement au sujet de la réforme des frais d’inscription et des frais de formation ; le chef de l’Etat aurait désapprouvé les comportements des acteurs universitaires sur la question. Au plan financier, des actes de mauvaise gestion ont été évoqués. Toutefois, aucune pièce à conviction pouvant permettre de situer très clairement les responsabilités n’a été exhibée par la Ministre lors de cette audience concernant les pratiques de mauvaise gouvernance financière mentionnées.
Après avoir pris acte des griefs faits aux UNB par la Ministre, la CIS a publié immédiatement un bref communiqué et a entrepris une longue série de concertations. Au terme des diverses rencontres, la CIS a conclu que l’heure est effectivement grave et qu’il s’avère nécessaire de convoquer une Assemblée Générale pour une réflexion d’ensemble sur la situation.

Quelles sont les orientations données par l’Assemblée Générale du 21 novembre 2018 ?
Au terme de ses travaux, l’Assemblée Générale a décidé de mandater la CIS pour poursuivre diligemment les concertations afin que le processus électoral devant conduire à l’installation des nouveaux responsables des UFR reprenne son cours normal dans les meilleurs délais.
Par ailleurs, l’attention de la MESRS et du gouvernement est appelée sur les faits suivants.

1- La désignation par élection des dirigeants des universités publiques n’est pas un fait récent ;
elle a commencé dans une période de dictature, depuis le début des années 80, et représente un acquis fondamental obtenu de hautes luttes et au prix de lourds sacrifices. On ne saurait donc remettre en cause aujourd’hui ces acquis démocratiques surtout dans un Etat de droit en construction depuis l’historique conférence des forces vives de la Nation de février 1990.

2- Les élections dans les universités publiques du Bénin font partie intégrante désormais de l’identité de l’enseignant du supérieur béninois. Elles représentent une innovation institutionnelle essentielle parfaitement adaptée à l’histoire et au vécu socio-culturel de notre pays.

3- Les enseignants du supérieur du Bénin tiennent à ce que les universités publiques et leurs UFR continuent d’être dirigées par des autorités légitimes pour garantir la stabilité et préserver la cohésion au sein de la communauté universitaire, conditions essentielles pour renforcer et pérenniser nos nombreux succès.

4- ‘’Sans liberté académique, l’enseignement supérieur court à sa perte et sa chute provoque toujours une grave désarticulation de l’ensemble du système éducatif’’. Pour les enseignants du supérieur du Bénin, la liberté académique commence par l’élection de leurs dirigeants.

5- Il est urgent d’associer les partenaires sociaux, notamment l’Intersyndicale des UNB, au processus de révision des attributions du Conseil National de l’Education (CNE). Le processus en cours peut être assimilé à une opération forcée et, en plus, il se déroule dans des conditions de grande opacité.

6- Même si nos conditions de travail demeurent peu favorables, des efforts louables ont été déployés par nos responsables élus, surtout au cours des dernières années. Les réalisations qu’ils ont initiées tant au niveau des infrastructures/aménagement que dans la promotion de la recherche universitaire sont visibles. Pour qui connaît bien l’histoire des universités publiques du Bénin, il n’est pas exagéré d’affirmer que ce niveau de réalisations et la volonté des acteurs élus de servir la communauté universitaire dépassent nettement ce qui est observé par le passé.

7- La mauvaise gouvernance ne saurait être un prétexte pour remettre en cause les élections dans les UNB. Il revient tout simplement à l’autorité de sanctionner tout dirigeant fautif, en se conformant à la légalité républicaine et en agissant en toute impartialité et sans complaisance. Le pouvoir exécutif dispose de tous les moyens légaux de contrôle, d’investigation et de répression. Il ne tient donc qu’à lui de les utiliser en évitant l’amalgame. Il est utile de rappeler ici qu’un Recteur nommé et son agent comptable ont déjà fait l’amère expérience de comparaître devant les tribunaux pour faits de détournements par le passé. Les enseignants du supérieur pensent qu’il convient juste d’appeler les organes de contrôle du pays à mieux faire leur travail pour débarrasser les UNB et toutes les institutions de la République de toutes pratiques contraires à l’orthodoxie administrative et financière.

8- L’histoire enseigne que la communauté universitaire sanctionne régulièrement ses propres dirigeants élus dont la gestion se révèle peu convaincante en leur refusant un second mandat. Il convient de rappeler, en plus, qu’un responsable d’UFR élu a été destitué par ses pairs à mi-mandat à l’Université d’Abomey-Calavi pour des faits de mauvaise gestion légalement établis dans un passé récent.
L’Assemblée Générale appelle tous les enseignants du supérieur à la vigilance et la mobilisation car si la suppression des libertés académiques vers laquelle le gouvernement du Bénin tend devient effective, nos succès dans le domaine de l’éducation seront perdus. Œuvrons toujours pour faire reculer l’ignorance, en veillant aux libertés sur nos campus, condition essentielle pour promouvoir une éducation de qualité pour tous et le progrès social.
Au demeurant, et en transposant le problème au niveau de l’Etat, peut-on, sur le seul fondement qu’un pouvoir politique a mal gouverné, décider de remettre en cause le principe de l’élection du Président de la République et des députés ? Certainement pas, car ce serait sacrifier la démocratie et revenir à l’ère de l’Etat dictateur, despotique et policier.
Enfin, l’Assemblée Générale, invite le gouvernement à faire preuve d’esprit d’ouverture en laissant le processus des élections des responsables des UFR se poursuivre comme il est de tradition depuis plus de trente-cinq ans.

Vive le Bénin !
Vive l’Université au service du développement !
Vive les UNB !
Vive l’Intersyndicale des UNB !
Pour la coordination de l’Intersyndicale des universités nationales du Bénin
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