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Boni Yayi interpellé sur l’impact environnemental du pétrole de Sèmè
Publié le lundi 28 octobre 2013   |  24 heures au Bénin


Ouverture
© AFP par SEYLLOU
Ouverture de la 17ème session ordinaire de la Conférence des Chefs d`Etat et de Gouvernement de l`UEMOA
Jeudi 24 octobre 2013. Dakar. Plusieurs chefs d`Etats sont arrivés à Dakar où ils prendront part à la 17ème session ordinaire de la Conférence des Chefs d`Etat et de Gouvernement de l`UEMOA et au sommet extraordinaire de la CEDEAO.Photo : Boni Yayi, président du BENIN


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Dans le cadre de l’exploitation prochaine du pétrole de Sémé, un compatriote béninois vient d’adresser une lettre ouverte au Chef de l’Etat. A travers ce courrier , l’auteur attire l’attention de la Haute Autorité sur l’impact environnemental liė à la gestion de ce gisement.


Monsieur le Président,

A travers les médias nationaux, j’ai appris le 23 Octobre dernier que le Bénin, mon pays dispose enfin d’un important gisement de pétrole exploitable sur quatorze bonnes années. Il serait bien ingrat de ma part de ne pas vous féliciter pour tous les efforts consentis par vous et vos différents gouvernements afin de découvrir la manne pétrolière à laquelle vous aviez aussi longtemps cru. C’est sans aucun doute une preuve de votre amour pour ce beau pays et celui de Dieu pour vous et ses fils.
La belle découverte de la South Africa Petroleum (Sapetro) réjouit plus d’un béninois. Bien qu’au départ, peu d’entre eux comprenaient votre « obsession » pour le pétrole aux larges de nos côtes, je ne doute un seul instant qu’ils sont des milliers à reconnaître le mérite de votre persévérance. Aussi sont-ils des milliers à se poser de légitimes questions sur les impacts de son exploitation sur le quotidien du béninois lambda.

Monsieur le Président,
Je fais confiance à votre vœu de longue date de prospérité partagée pour que les richesses qui seraient obtenues de ces quelques 87 millions de barils de pétrole soient judicieusement réparties et exploitées sur les quatorze prochaines années. Que voudraient mes concitoyens de ce pétrole ? Si je m’en tiens à vos différents propos et aux déclarations médiatiques de vos collaborateurs sur ce projet, l’exploitation du pétrole devrait booster notre économie nationale qui comme l’a dit l’autre est un maigrichon otage exclusif depuis de nombreuses années de la fiscalité ; contribuer au renforcement de la croissance économique ; participer au développement infrastructurel et humain du pays. Et sans aucun doute, les béninois, malgré un air de méfiance, y croient. Mais rassurez, la méfiance n’est point à votre égard, ni à l’endroit de vos collaborateurs connus pour leur orthodoxie de gestion de la chose publique, mais méfiance justifiée en raison de la tragédie survenue dans plusieurs pays africains et du monde de l’exploitation du pétrole. En Afrique, le pétrole est apparu comme un danger public car il a été dans bon nombre de pays dont je me permets volontiers de ne pas citer, source de corruption massive, de détournement de deniers publics, d’inégalités de répartition des richesses, d’injustice sociale, de pauvreté aigue, et très populairement des rébellions et des instabilités politiques.

Monsieur le Président,
Le ministre de l’énergie, des mines et des recherches pétrolières Barthélémy Kassa n’a pas manqué ce 23 octobre 2013 de nous faire espérer un autre gisement de plus cent millions de barils de pétrole aux larges de nos eaux territoriales. Avec ces annonces, le Bénin ferait très bientôt de grands pas dans la loge très restreinte des pays producteurs et exportateurs de pétrole au monde. Mais permettez-moi de m’inquiéter>
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M’inquiéter non pas du partage équitable et efficient de la richesse du pétrole, ni de l’investissement effectif des revenus dans le développement, encore moins de quelconque instabilité politique (car le peuple béninois est un peuple de paix), mais m’inquiéter sur le modèle de production qui sera le nôtre.

Monsieur le Président,
Je vous sais futuriste, grand défenseur de la cause du développement durable. Je vous sais très attaché aux urgentes questions de protection de l’environnement et de gestion des changements climatiques. Vos derniers remaniements ministériels en disent long sur votre côté éthique et d’équité intergénérationnelle. Sans me tromper, je pourrais dire fièrement que nous sommes le seul pays au monde avec un ministère dédié exclusivement et implicitement à la gestion des changements climatiques, des ressources naturelles et un ministère chargé des politiques de développement durable.

Au regard de tout ceci, je me dois en ma qualité d’environnementaliste, et persuadé que vous en êtes un de m’interroger sur notre modèle de production. En quoi et comment intègrera-t-il les questions de changements climatiques, de protection de l’environnement, d’exploitation rationnelle de ressources naturelles ? En quoi notre modèle de production serait-il basé sur les principes du développement durable ? En effet, c’est un secret de polichinelle que le pétrole, malgré sa forte contribution au développement, à la réduction du déficit énergétique, son exploitation a de graves conséquence le système écologique et les ressources naturelles notamment celles très proches du bassin pétrolier et des oléoducs.

Très Cher Président,
Aviez-vous en mémoire le drame de Porga en 2006 avec plus d’une centaine de morts ? Aviez-vous des nouvelles du drame environnemental dans le delta du Niger au Nigéria ? Saviez-vous ce qui s’est passé au Lac Mégantic au Québec cet été ? Aviez-vous une idée de la quantité de gaz à effet de serre (GES) produite par l’exploitation du pétrole ? Quel serait le bilan carbone de l’exploitation de notre champ pétrolier ? Saviez-vous que l’extraction du pétrole dans le bassin sablier de l’Alberta (Canada) libère dans l’atmosphère 15 à 30% du CO2 contenu dans le sol ? Aviez-vous une idée de la quantité d’eau exploitée pour liquéfier le pétrole dans le monde ? Combien de cours d’eaux ont été volontairement taris par l’exploitation du pétrole ? Et combien encore de ces cours d’eaux ont été pollués dans le monde en raison du pétrole ? Saviez-vous qu’il faut en moyenne dépenser et faire brûler une tonne de pétrole, produire autant de CO2 pour deux gisements ? Saviez-vous combien de sols ou de terres arables, d’animaux et même d’Hommes sont contaminés par la production du pétrole ?

Monsieur le Président,
Je me permets de croire que vous trouverez mes inquiétudes légitimes. En effet, les impacts environnementaux du pétrole ne sont pas l’apanage des pays en développement. Les affres écologiques et humaines du pétrole sont identiques dans toutes les régions du monde. Au-delà de la destruction de l’écosystème, les Hommes sont de très grandes victimes. L’exploitation du pétrole s’accompagne des maladies cancérogènes, des attaques cardiaques, des tumeurs et des maladies de foie. Pour vous en apercevoir, commanditez une mission d’observation environnementale (environnementaliste, climatologue, économiste, médecin y compris,…) dans n’importe quelle région productrice du pétrole au monde.

Monsieur le Président,
L’extraction du pétrole est très polluante pour l’environnement, la santé des travailleurs, des populations, etc… Je ne nous le souhaite pas. Mais saviez-vous combien coûte en moyenne en termes de destruction écologique, d’impacts humains et d’investissement une marée noire ? La récente marée noire du Golfe de Mexique en Louisiane nous en donne l’exemple. N’étant point dans le secret des dieux, je ne sais si mon pays possède un projet de raffinage de son pétrole. Mais sachez qu’il est autant dangereux sur le plan environnemental que l’extraction. En effet, le raffinage entraîne aussi le rejet de plusieurs polluants atmosphériques dont les oxydes de souffre, les oxydes d’azote, les composés organiques volatils, le monoxyde de carbone, le benzène et de nombreux Gaz à Effet de Serre (GES).

Monsieur le Président,
Je ne suis point un anti émergence de mon pays. Mais je m’en voudrais de ne pas partager avec vous mes inquiétudes sur l’ambitieux projet de la République d’être un pays producteur et exportateur de pétrole. Je n’ai aucune connaissance fiable des installations prévues dans le cadre de ce projet mais je voudrais tirer votre attention sur les risques probables d’incendies avec de fortes émissions de polluants sur les sites pétroliers et dans le transport des produits pétroliers. Souvenez-vous de la mémoire de nos concitoyens disparus dans les incendies de Porga. Aussi ne vous aurais-je pas rendu service en ne vous rappelant pas que la consommation moyenne d’un camion citerne émet de 79g de CO2 par tonne transportée et par kilomètre parcouru. A cet effet, tout calcul bien fait montre que le transport de Sèmè au Port de Cotonou d’une tonne de pétrole produirait au minimum 3950 (3,95Kg) de CO2. Imaginez donc un seul instant toute la quantité de C02 qui serait produite par année pour le transport de ces quelques 87 millions de barils sur les quatorze prochaines années.
Comme vous le réalisez sans doute, les conséquences écologiques et humaines de l’exploitation du pétrole sont désastreuses aussi bien pour l’extraction, le raffinage, le transport et sans oublier la fuite du pétrole. Un regard dans le monde nous permet de réaliser que le pétrole provoque par excellence une dégradation de l’écosystème par asphyxie du milieu, destructions de fonds marins, intoxication des sols, contamination aux polluants très nocifs des hommes.
Le bilan de la vente illicite et de la consommation de l’essence frelatée sur le couvert environnemental, la population est déjà effrayant. Il en est de même pour la pollution atmosphérique dans les grandes agglomérations du pays.

Monsieur le Président,
Qu’en sera-t-il donc de l’exploitation du pétrole au Bénin ? Avions-nous pris le temps de réaliser ne serait-ce qu’une seule étude d’impact environnemental pour notre très ambitieux projet ? Si oui, où en sont les grands résultats ? Et enfin, en quoi notre modèle de production accordera-t-il de place aux principes de base du développement durable ?
Espérant que vous et vos collaborateurs trouveront légitimes mes inquiétudes et y apporteront très incessamment des réponses satisfaisantes pour l’opinion nationalvet internationale, Veuillez agréer Monsieur le Président, l’expression de ma profonde reconnaissance.

Durablement Vôtre

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