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Carburants toxiques à la pompe: Le gouvernement siffle la fin de la récréation

Publié le mardi 16 juillet 2019  |  La Nation
Station
© Autre presse par DR
Station d`essence
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Le Bénin n’accepte plus l’essence et le gasoil toxiques sur son sol. Le décret portant limitation de la teneur en soufre dans ces types de carburants est clair, et les négociants ont été suffisamment avertis. Cette mesure prise en janvier dernier, est entrée en vigueur hier, lundi 15 juillet.

Les stations-service, depuis leur avènement, servent des carburants toxiques aux populations africaines en général.Mais c’est fini ! Le Bénin n’en veut plus, sur son territoire. Notamment, l’essence et le gas-oil dont la teneur en soufre est de 1500 Particules par millions (Ppm), alors même que les carburants vendus dans les pays occidentaux d’où proviennent ces produits pétroliers ont une teneur en soufre de 10 Ppm.
En effet, un décret (nouveau) limitant la teneur en soufre dans l’essence et le gas-oil, est entré en vigueur depuis hier. L’acte, en date du 15 janvier dernier, fixe désormais le taux de soufre dans l’essence à 150 Ppm et dans le gas-oil à 50 Ppm. Cette mesure permet au Bénin d’intégrer le cercle (très) restreint des nations africaines qui ne tolèrent plus que des carburants sales et toxiques soient déversés sur leurs sols par les négociants.

« Dirty Diesel » à l’origine du séisme

Ce sont les troublantes révélations de l’Ong suisse Public Eye, suite à son enquête dénommée « Dirty Diesel » et publiée en 2016, qui sont à la base de cette révolution. « L’Ong aurait appris qu’en Europe, c’est-à-dire dans les ports d’Amsterdam,
Rotterdam, Anvers…, on embarque, en direction de l’Afrique, surtout l’Afrique de l’Ouest, des carburants dits de qualité africaine », rapporte Clément Kotan, président de l’Unité de protection de l’Environnement (Upe), une Ong qui a aussi lutté pour l’avènement du décret d’interdiction. « Vous convenez avec moi que c’est surprenant. Le carburant, c’est le carburant. Il ne peut pas y avoir une qualité réservée exclusivement à l’Afrique et une autre réservée à l’Europe », commente-t-il avant d’expliquer que c’est ce jargon qui a poussé Public Eye à ouvrir une enquête qui, après des blocages sur place en Europe,l’a finalement conduit en Afrique. A en croire Clément Kotan, les enquêteurs de l’Ong ont parcouru plusieurs pays africains, en recueillant à chaque étape des échantillons d’essence et de gas-oil vendus par les stations-service agréées. Ces échantillons ont été, par la suite, envoyés dans des laboratoires européens pour analyses, et les résultats qui en sont issus sont alarmants.
« Ces résultats ont montré que la teneur en soufre dans les carburants de qualité africaine varie de 1500 à 10 000 Ppm. Alors qu’en Europe, quel que soit le pays, le taux de soufre dans les carburants vendus ne dépasse pas 10 Ppm », déclare le président de l’Ong Upe. « Ça veut dire qu’on nous empoisonne avec les carburants toxiques qu’on nous envoie. L’essence vendue à la station nous empoisonne », poursuit-il, d’un ton colérique. L’investigation a donc permis de découvrir le pot-aux-roses.
Quelques mois après ces révélations, certains ministres de l’Environnement de la Cedeao se sont réunis à Abuja à l’invitation de leur homologue nigérian avec, à leurs côtés, les dirigeants de la Cedeao et du Programme des Nations Unies pour l’environnement. « Ils ont dit voilà ce qui est sorti. C’est catastrophique ! Que faisons-nous dans l’espace Cedeao ? C’est de là qu’ils ont indiqué qu’il y avait une étude de la Banque mondiale qui disait que si les pays d’Afrique subsaharienne limitaient la teneur en soufre à 150 Ppm pour l’essence, et 50 Ppm pour le gas-oil, ils pouvaient économiser un milliard de Dollars par an sur leur budget. Ainsi, ils se sont dit qu’il leur faudra saisir alors cette étude qui a une base scientifique… », raconte Clément Kotan dont l’Ong a suivi le parcours du dossier. La délégation béninoise, une fois rentrée, a rendu compte au gouvernement. D’où le décret d’interdiction qui fait d’ailleurs partie d’une liste de recommandations faites à l’endroit de l’Exécutif béninois.

Quid des dommages ?

Entre autres conséquences de l’usage des carburants toxiques,il y a la pollution atmosphérique et les maladies respiratoires et cardiovasculaires. Le risque d’être affecté par ces maladies est donc plus grand lorsque l’on s’expose aux carburants toxiques. Mais il n’est pas rare de voir certains mécaniciens au contact de ces produits pétroliers à longueur de journée. Ghislain Kpozé, mécanicien en fin de formation, explique que cette pratique est monnaie courante dans sa profession notamment quand il s’agit de nettoyer les filtres à essence. Il lui arrive donc de manipuler l’essence à main nue et pis encore, il s’en sert à l’aide de sa bouche. C’est un gros risque et cette pratique ne sera pas sans conséquence sur la santé, selon certains spécialistes.
Mais la grosse surprise dans ce dossier, c’est que l’Ong suisse Public Eye indique que les négociants, auteurs des importations des carburants toxiques en Afrique,ne sont pas en infraction pour autant. Ils ont simplement profité d’une des faiblesses de l’arsenal juridique des pays africains dans le secteur.
Pour l’application rigoureuse de la nouvelle norme, un comité interministériel a été mis sur pied. A cela s’ajouteront d’autres structures existantes en matière de contrôle de la qualité des produits pétroliers.

Ariel GBAGUIDI (Stag.)
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