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Edito: Un gouvernement de compromis

Publié le lundi 9 septembre 2019  |  L`événement Précis
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© Autre presse par DR
Rencontre Gouvernement-Syndicat
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Patrice Talon cherche probablement une réponse moins guerrière à la crise postélectorale, sans donner l’impression de faiblir. Telle est la lecture que l’on peut faire de la composition de son quatrième gouvernement rendue publique la semaine écoulée. Et pour cause, l’entrée de deux nouveaux ministres qui peuvent traduire cette impression.
Premièrement Eléonore Yayi. Même si la nouvelle ministre de l’enseignement supérieur n’est pas membre attitré des FCBE, elle a quelque chose que la plupart des responsables actuels de ce parti n’ont pas : elle est membre de la famille biologique de l’ancien président Boni Yayi. Certains pourraient y voir de la traitrise, et les FCBE se sont même empressés de rejeter son appartenance annoncée à leur parti, l’évidence est que le Chef de l’Etat tente à travers sa nomination, de montrer qu’il n’est pas rancunier, qu’il n’en veut pas à Yayi ni à sa famille. C’est un message d’ouverture, quelque peu malicieux il faut le dire. Malicieux parce qu’il n’ignore certainement pas les mésententes qui pourraient jaillir au sein de la famille Yayi, du fait de cette nomination. Mais au fond, tous ceux qui voudront gloser sur la méchanceté de Talon ou sa supposée inimitié avec Yayi, auront un fait tangible qui parle contre cette théorie : un membre de la famille de l’ancien président travaille avec Talon. Cette seule réalité apparait en définitive comme une réponse douce qui prépare sinon une future ouverture, du moins un dégèle.
Mais il est facile de voir que ce ministre se situe en droite ligne de la guéguerre Talon-Yayi. Sur les 24 ministres, 9 sont d’anciens collaborateurs de l’ex-président. C’est pratiquement le tiers du gouvernement qui se trouve être des produits de l’ancien régime. Si ce n’était pas encore clair, nous voyons là un signe que Yayi aura du mal à récupérer ses anciens hommes pour aller livrer bataille. Il aurait en face de lui une bonne partie de ceux qui connaissent ses sales dessous. Appelez cela comme vous voudrez, mais c’est une tactique de guerre qui arrache à l’ennemi l’essentiel de ses hommes les plus agiles. Car ici, il n’y a pas que les anciens ministres qui soient passés de l’autre côté. Il y a aussi les députés.
Deuxièmement, il y a Alain Orounla. Le ministre de la communication fut par le passé avocat de Sébastien Ajavon et de Komi Koutché. Il connaît probablement à fond les dossiers qui les opposent à l’Etat. Si Eléonore Yayi marque une certaine ouverture, Alain Orounla traduit par contre une volonté d’en découdre. Ici, Talon s’adjuge les services d’un transfuge de l’opposition. Crédité du poste de porte-parole du gouvernement, c’est à lui qu’il reviendra de donner la réplique à l’opposition, lorsque ce sera nécessaire. Avouons que tout bon avocat qu’il est, Alain Orounla pourrait se retrouver à ravaler publiquement ses vomissures du passé. C’est en cela que l’exercice qu’il fera sera savoureux pour nous qui observons avec humour les changements de veste qui adviennent au sein de la classe politique. Orounla au gouvernement, c’est un motif de courroux permanent pour Sébastien Ajavon dont on connait les colères telluriques.
Troisième constat majeur, c’est l’accroissement du nombre de femmes. Il passe de quatre à cinq. C’est une évolution dérisoire mais qui souligne une prise en compte marginale de la question genre. Au moment où les organisations de la société civile se battent pour asseoir la légitimité de l’approche genre au sein du gouvernement, cette timide évolution éloigne le Bénin de la perspective paritaire. A moins d’un virage dans la politique actuelle, virage qui n’est guère possible dans l’état actuel des choses.
On aura compris qu’il ne s’agit nullement d’un gouvernement dit de technocrates. Même si tout le monde sait que ce vocable est une douce illusion, il signifie la prise en compte d’une certaine rationalisation de la composition gouvernementale en tenant compte des profils professionnels des ministres. Ici, du moins, se présente une équipe à la composition très politique, même si les postes clés (finances, justice, défense, plan, affaires étrangères) sont détenus par des technocrates. En fin de compte, Patrice Talon a réalisé un savant dosage qui lui permettra d’affronter les prochaines élections avec sérénité.

Par Olivier ALLOCHEME
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