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Ces femmes qui font des métiers d’hommes: Dans l’univers des femmes sérigraphes-calligraphes

Publié le jeudi 19 mars 2020  |  Matin libre
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© aCotonou.com par DR
Femme qui font un métier d`hommes
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Mettant de côté leur féminité et au mépris des contraintes et réalités de la société béninoise, elles exercent et s’imposent aujourd’hui dans ce métier traditionnellement masculin : celui de la sérigraphie-calligraphie. Si elles inspirent aujourd’hui respect de la part de leurs congénères masculins et suscitent l’admiration de leurs proches, la tâche n’est malheureusement pas si simple pour elles dans des milieux « masculins ». Dans ce nouveau numéro de votre rubrique « Ces femmes qui font des métiers d’hommes », nous vous embarquons au cœur des réalités que vivent ces femmes qui se sont fait une place dans cette profession « masculine ».



Dans l’après-midi de ce jeudi, 12 mars 2020, l’atelier Arts Adebayor Décor installé à Ekpè (commune de Sèmè-Podji) grouille de monde. Une dizaine d’apprentis étaient à l’œuvre. Surprenant, mais dans cet atelier, environ six filles suivent un apprentissage en sérigraphie-calligraphie, un métier considéré autrefois comme métier d’hommes. Il sonnait environ 15h30 minutes. De teint clair, effilée et surtout souriante, Micheline Dossou est l’une des apprenties de Liamidi Adébayor. Pourquoi a-t-elle choisi d’apprendre un métier “d’homme“ ? « Ce que l’homme peut faire, c’est clair que la femme aussi peut », nous a rétorqué celle qui n’a que 19 ans. Même réponse de la part de Michkath, de taille courte et surtout timide. La vérité est que le choix n’a point été facile ni pour Micheline ni pour Michkath car les parents s’en sont très vite mêlés. « Les parents se sont opposés catégoriquement estimant qu’il s’agit d’un métier d’homme et qu’il n’y avait aucun honneur à le faire », confie Micheline. Si cette dernière a réussi à convaincre ses parents sur son choix, ce n’est pas le cas de Michkath. Elle fut obligée de solliciter l’intervention de son frère aîné pour supplier ses parents afin qu’elle puisse vivre sa passion de faire des impressions sur des habits et autres supports. A environ cinq minutes de marche, nous atteignons l’atelier “Les six couleurs Arts-Sô“. Ici, on en compte davantage d’apprenties filles. Agée de 20 ans, Fidélia n’a pas fait face à l’opposition de ses parents en opérant son choix de faire la sérigraphie-calligraphie. Car, nous a-t-elle confié, son choix a été inspiré des copines qui lui rendaient visite en présence de ses parents. Elle semble aujourd’hui prendre du plaisir à exercer son métier. C’est le cas également chez Alice Mètowanou qui avoue ne pas comprendre les raisons qui pourraient pousser des parents à s’opposer à un tel choix. “D’ailleurs, beaucoup de filles sont admiratives de ce que je fais et m’encouragent“, s’est-elle réjouie. Virginie est dans l’atelier, il y a à peine huit mois. Pour elle, il y a du mérite dans le fait qu’une femme ose faire un métier dit d’homme. ‘’Bien que les gens soient surpris en me voyant, ils sont fascinés’’, a-t-elle lancé en souriant. Depuis 4 ans, Grâce Houenou fait son chemin dans ce métier. Mais elle connaît un apprentissage qu’elle n’aurait jamais souhaité. Alors qu’elle a commencé ses premiers pas dans un atelier à Sèmè-Kraké, elle a dû essuyer toute sorte de moquerie. Pire, elle est souvent accusée d’avoir une aventure amoureuse avec son patron. Elle était la seule fille dans le lot des apprentis. Mais elle a toujours refusé de s’avouer vaincue encore moins de se décourager. Le hic est que son père ne va pas approuver son choix mais elle profitera du fait qu’elle réside chez sa tante pour apprendre son métier de rêve. Par contre, Ruth Gbantè, elle, ne pourra pas apprendre son métier de rêve : la couture. Le métier de la sérigraphie-calligraphie lui sera proposé et imposé par ses parents. Si nul ne leur ôte leur droit d’être féminine, elles savent qu’elles doivent mettre leur vie personnelle entre parenthèses pour se comporter comme des hommes dans ce métier. En tout cas, pour elles, aucun métier n’a un visage d’homme.

Des préjugés…

Elles sont souvent perçues comme des femmes à part. Micheline semble déjà habituée à certains regards dans son entourage. Quant à Michkath, elle s’en désole et déplore des critiques d’autres femmes qui, selon elles, devraient l’encourager. Ruth, elle, pour éviter des critiques de son entourage, a simplement décidé de ne pas se faire d’amis et de partager son quotidien entre la maison et l’atelier. Mais Grâce se sent davantage motivée par ce qui se raconte sur elle et son métier. Ce qui est évident, beaucoup manquent d’admiration à l’endroit des femmes sérigraphes-calligraphes ; elles se sentent généralement isolées. Elles perdent souvent l’amitié des anciens copains, camarades de classes, des amis d’enfance.

Relation amoureuse et “métier d’homme’’

Ces femmes qui font des métiers “d’hommes“ trouvent-elles facilement leur âme sœur ? La question reste toute posée. Ruth Gbantè vit sa première relation amoureuse seulement depuis deux semaines mais refuse de faire un lien avec son métier. A l’en croire, inutile de penser que le fait de choisir un tel métier ferait fuir les hommes. Alice Mètowanou est quasiment la préférée d’un étudiant depuis quelques années. Mais elle avoue que son mec a failli la quitter en raison de son choix. Mais elle se réjouit désormais d’avoir une relation stable. Tout est si beau et calme dans la relation de Virginie même si au début, son petit ami s’opposait à son métier. Micheline Dossou avait une relation amoureuse avant de démarrer son apprentissage. Mais son choix a failli également faire basculer sa vie amoureuse. Celle qui préfère la compagnie des hommes à celle des femmes, semble avoir appris à son petit ami à éviter des crises de jalousie. Et son rêve a toujours été de voyager sur la Guinée, le Congo et l’Afrique du Sud pour se perfectionner davantage. « Si un métier plaît à une femme, elle peut le faire peu importe si autrefois, c’était exclusivement réservé aux hommes » a-t-elle martelé. Michkath, elle, se refuse toute aventure amoureuse durant son apprentissage et ne rêve que d’ouvrir son propre atelier. Bien qu’elle soit en relation avec un homme depuis peu, Grâce Houenou n’eut pas assez de chance. Selon ses confidences, le fait qu’elle soit soupçonnée d’avoir une aventure avec son patron avait compliqué les choses. Son père la faisait surveiller et chaque fois qu’elle rentrait tard, on ne lui faisait pas de cadeau. Difficile alors de se construire une vie amoureuse dans une telle ambiance.



Patron : entre tentation et soupçon

Ils sont souvent soupçonnés de courtiser leurs apprenties et d’user de leur position pour demander des faveurs sexuelles à ces dernières. Si Liamidi Adébayor reconnaît le fait, il affirme que sa conscience ne lui reproche rien et qu’il n’a jamais essayé d’avoir une aventure amoureuse avec une apprentie. Alfred Hountondji, lui, estime qu’il revient au patron de se faire respecter en évitant des actes susceptibles de remettre en cause sa crédibilité. Car le risque est qu’il pourrait perdre également la confiance des clients et surtout le respect de son entourage. De toute façon, la femme se libère et s’impose de nos jours, dans des milieux dits “masculins“ autrefois.

La sérigraphie est l’une des techniques d’impression les plus connues, et la plus utilisée par les entreprises pour imprimer des dessins sur des produits de tailles différentes fabriqués avec divers matériaux. Dans les secteurs commercial et artistique, on l’utilise depuis plus d’un siècle, principalement pour imprimer des images et des dessins sur des T-shirts, des sacs en toile, du papier, du bois, de la céramique et d’autres matériaux. Il y a différentes sortes de sérigraphie, selon l’objectif recherché et le procédé d’impression utilisé. Parmi elles, on trouve la sérigraphie graphique, la sérigraphie d’art et la sérigraphie textile.

Aziz BADAROU
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