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Eric Aïvodji, aménagiste à propos des défis environnementaux dans les communes: « Si on veut développer une commune, on doit maitriser ses paramètres écologiques »

Publié le mardi 9 juin 2020  |  La Nation
Eric
© aCotonou.com par dr
Eric Aïvodji, aménagiste
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Par COMLAN ERIC,
Passionné de la nature, Eric Aïvodji, aménagiste de formation, accorde du prix aux espaces verts. Rencontré dans son jardin privé dans la commune d’Abomey-Calavi, il fait l’état des lieux de la gestion des espaces verts dans certaines communes, évoque les normes de l’Oms et les défis environnementaux pour les prochains conseils communaux.
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Quel est votre regard sur la gestion des espaces verts dans les communes du Bénin ?

Je dirai que le domaine de l’espace vert est encore à la traîne au Bénin. En dépit des efforts des acteurs de l’environnement, il reste beaucoup de vide à combler. Quand on s’intéresse aux normes et aux statistiques, on se rend compte qu’on est encore bien loin de la norme recommandée par l’Organisation mondiale de la Santé (Oms). Il faut au moins 10 m² d’espace vert ou de coin de nature pour le citoyen qui vit dans une zone agglomérée.

Où en est-on avec le respect de cette norme au Bénin ?

La valorisation de l’espace vert n’est pas encore un réflexe pour les Béninois. Une étude d’une équipe pluridisciplinaire de chercheurs dans les communes du Grand Nokoué a montré que les indicateurs sont alarmants, et aussi bien les décideurs politiques, les responsables communaux que les citoyens doivent redoubler d’efforts pour corriger le tir. Les chiffres ne sont pas reluisants. Par exemple, pour la commune d’Abomey-Calavi et Sèmè-Kpodji, c’est 0,06 m² par habitant au lieu de 10 m², Ouidah, 0,27 m² par habitant, Porto-Novo, 0,18 m² et Cotonou, 0, 12 m² par habitant.

N’est-ce pas la faute à ceux qui sont chargés de la réalisation et de l’application des différents plans d’urbanisme ?

Je pense qu’il faut nuancer. Car, ils ne sont pas les seuls responsables de cette situation. Acteurs de premier plan dans l’organisation de l’espace, les géomètres, urbanistes et autres prévoient parfois ces coins de nature mais c’est la mise en œuvre qui pose problème. Souvent, lors des opérations de recasement et de voirie dans les communes, il est attribué des zones pour l’espace vert mais au final ces réserves sont orientées vers d’autres buts.
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Qui sont donc les responsables de cette situation ?

Il faut dire que les responsabilités sont partagées. C’est la faute non seulement des décideurs mais également des citoyens qui doivent s’approprier cette norme. Selon la Constitution du Bénin, chaque citoyen a droit à un environnement sain ; donc, il doit protéger la nature pour en profiter. Nous devons revoir notre façon de concevoir notre cadre de vie. Par exemple, l’adage qui dit que le locataire ne doit disposer d’un coin de nature ou même planter dans la maison où il vit, constitue un cliché à déconstruire. Qu’on soit locataire ou propriétaire, chacun doit aménager un coin de nature. Il y a de mauvaises habitudes qu’il faut abandonner afin d’apporter sa pierre au développement durable de sa commune.

Quel lien faites-vous entre le développement des communes et la question de l’espace vert ?
Notre environnement influe sur tout ce que nous faisons. En tant qu’acteur du développement, l’homme a besoin d’un cadre de vie aménagé pour être capable de fournir un bon rendement. Le développement durable prend sa racine dans la gestion de l’espace vert qui offre des potentialités énormes aux communes. Il faut intégrer la question de l’espace vert au développement durable qui est une conjonction de plusieurs paramètres à savoir culturel, social, politique, économique et écologique. Si on veut développer une commune, on doit maitriser les paramètres écologiques. Il est important de veiller à ce que le citoyen reste dans un environnement sain, vert, capable de favoriser les échanges.
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Et pourtant, des espaces verts sont détruits lors des grands projets ?

C’est une question préoccupante dans notre pays. Beaucoup d’arbres sont coupés lors de la mise en œuvre de différents projets de développement. Je pense que c’est parce que nos responsables à divers niveaux ne tiennent pas compte des indicateurs de société que ces dérapages arrivent.C’est pourquoi, les travaux d’urbanisation et de voirie doivent être précédés des études Vrd (Voirie, réseau et divers). Il faut établir les plans de réseau (eau, électricité, fibre optique), les plans de lotissements, voirie et autres en tenant compte des espaces verts.

Quels risques courent les populations en détruisant les espaces verts ?

Les risques sont nombreux et se retrouvent sur tous les plans :
économique, sanitaire, social et autres. L’homme a besoin plus d’oxygène que de la nourriture pour son bien-être. C’est pourquoi, il faut privilégier ce principe en consacrant plus d’espace qu’aux plantes aux bétons. Les risques sont d’autant plus grands que l’Oms recommande de prévoir 40 % de la superficie d’une maison pour le bâtiment et 60 % pour l’espace vert. Si les citoyens ne respectent pas cette norme, cela va rejaillir négativement sur leurs quartiers, leurs communes et le pays. C’est la cause des changements climatiques, des catastrophes et autres.

Que gagnent les populations de nos villes en respectant ces recommandations ?

Le gain est énorme. En respectant les normes environnementales, les communes vont atteindre leur développement à tous les niveaux (sanitaire, économique, social et autres). Sur le plan sanitaire, il y a également la phytopharmacie ou la pharmacie verte qui constitue une valeur sûre pour traiter certaines maladies. Les plantes préviennent et guérissent les maux du corps en ce sens que nous disposons dans notre environnement des plantes qui peuvent nous sauver la vie. Si un homme veut connaître une productivité remarquable, il doit vivre dans un environnement sain. En ce sens, les espaces verts permettent d’accroître les activités économiques dans les communes.
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Quels sont, en la matière, les grands défis qui attendent les communes ?

Les nouveaux conseils communaux doivent avoir l’humilité de créer un cadre de concertation entre tous les acteurs de la cité. Les décideurs et les bénéficiaires doivent réfléchir ensemble aux questions de développement durable des communes. Il s’agit pour les conseils communaux d’associer les populations à tous les projets. Ils doivent travailler à la mise en place de services dédiés à la protection du cadre de vie. Car la plupart des communes ne disposent pas de personnel capable de la gestion de l’environnement. Il y a quelques années, je me suis amusé à passer dans certaines communes pour faire ce triste constat.

Les services environnementaux ne sont pas disponibles ou la ressource humaine disponible n’est pas adéquate. Ils doivent veiller à créer ces services et à recruter des hommes capables de faire le job. Grâce à l’Ecole d’horticulture et de l’aménagement des espaces verts, beaucoup de jeunes ont été formés. La ressource humaine est disponible aujourd’hui. C’est aux responsables communaux de penser plus à la protection du cadre de vie en intégrant les questions environnementales à tous les niveaux. Ils doivent veiller à la réalisation et à la mise en œuvre responsable des différents documents de planification de l’espace.
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