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Métier de Zémidjan à Porto-Novo: De l’épanouissement au déclin

Publié le vendredi 7 mai 2021  |  La Nation
Zémidjans
© Autre presse par dr
Zémidjans à Cotonou au Bénin
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Le métier de conducteur de taxi-moto communément appelé Zémidjan, développé à Porto-Novo dans les années 1980, est aujourd’hui un tremplin pour de milliers de personnes, surtout des jeunes sans emploi. Il leur permet de joindre tant bien que mal les deux bouts en attendant de trouver mieux. Mais depuis quelque temps, le secteur bat de l’aile.


Autrefois rentable pour les acteurs, la conduite de taxi-moto Zémidjan ne les satisfait plus ces derniers temps.
Chemise bleue enfilée sur un pantalon Jeans déchiré par endroits sur une moto de marque Boxer de couleur rouge. La journée démarre ainsi pour Camille Migan, conducteur de taxi-moto à Porto-Novo. Depuis près de dix ans, il accomplit le même rituel chaque jour et parcourt la ville à la recherche de clients. Selon lui, la conduite de Zémidjan autrefois perçue comme un métier de seconde zone est de plus en plus embrassée par bon nombre de jeunes. Ils sont des milliers de conducteurs à s’acharner toute la journée et toute la nuit dans les rues de Porto-Novo.
« C’est un métier d’homme », fait observer Camille Migan. Cela, au regard de l’effort physique et de l’endurance que cela requiert.
Richard Kponou est conducteur de taxi-moto. Ce quadragénaire, père de trois enfants, dit exercer le métier depuis 19 ans. « J’ai commencé en 2002. J’en ai fait ma profession. C’est grâce à cela que j’ai pu me réaliser », confie-t-il, tout fièrement. Ce métier était vraiment rentable, insiste Camille Migan. Selon lui, par le passé, il pouvait faire jusqu’à 6000 FCfa de recette en une seule journée. Il trouvait même plus les dimanches à cause des cérémonies funèbres qui sont très prisées à Porto-Novo.
« Le dimanche, quand je ne suis pas invité à une de ces fêtes, je peux gagner jusqu’à 8 000, voire 10 000 FCfa. Les dimanches sont mes jours fastes », ajoute-t-il. Camille Migan fait savoir qu’il y a des mois où il peut se retrouver à plus de 100 mille de recette. Selon lui, la conduite de taxi-moto lui a permis d’acquérir son premier engin grâce auquel il a pu dégager un bénéfice de 150 à 200 mille F Cfa.


Les temps ont changé aujourd’hui, regrette Camille Migan, car le rendement n’est plus proportionnel à l’investissement physique.
« On se faisait beaucoup d’argent avant sans grands efforts. Le métier payait mais aujourd’hui, ce n’est plus le cas», raconte-t-il.
La raison : le métier est pris d’assaut par des milliers de personnes, toutes catégories sociales confondues. Chômeurs, étudiants, ouvriers, artisans, enseignants et autres se sont lancés dans le métier. «Nous sommes trop nombreux, comparativement à notre effectif par le passé », dénonce Romain Affognon, président de l’Association des conducteurs de taxi-moto Espoir de Pobé La Gare. Il signale l’existence parmi eux de faux zémidjan qui enfilent juste une chemisette bleue pour chercher de l’argent. A l’en croire, avec l’avènement des faux conducteurs, les recettes ont baissé. Lazare Hounnoukon, propriétaire de sa moto, note que l’infiltration du secteur par d’autres acteurs fait aujourd’hui que le métier ne marche plus comme avant. «Je fais difficilement aujourd’hui une recette de 3000 F Cfa par jour. Si j’enlève les frais de carburant et de nourriture de ma famille, il me reste à peine 1000 FCfa », a-t-il déclaré. Ce bénéfice, à l’en croire, est dérisoire par rapport aux charges d’amortissement de la moto.
Une fois interpellés par l’association, ces intrus sont conduits à la mairie de Porto-Novo où ils sont sommés de remplir les formalités d’obtention de numéro de conduite de taxi-moto. Romain Affognon assure que son association a mis en place une organisation pour traquer ces faux Zémidjan et les sortir de leurs rangs. Mais tout comme Camille Migan, Lazare Hounnoukon dit ne pas avoir le choix. En dépit des difficultés, il est obligé de conduire pour ne pas manquer à ses obligations familiales.
« C’est à cause de ma situation que je suis devenu conducteur de taxi-moto. Je suis dans ce métier, cela ne fait pas encore un an. J’ai commencé en septembre 2020», raconte Sébastien Assogba, le visage triste. Vendeur de pièces détachées par le passé, il dit s’être reconverti en zémidjan à cause des difficultés financières.


La santé à rude épreuve
En plus, des problèmes de santé se posent à eux. « C’est un métier qui fatigue. On se tue à petits feux, à force de conduire tous les jours», fait savoir Camille Migan, les yeux tout rouges et les paupières lourdes de fatigue. Il dit ressentir des courbatures dans tout le corps, notamment aux épaules, aux avant-bras et à la hanche. Pis, poursuit Camille Migan, rester assis sur la moto pour conduire toute la journée a entraîné des dysfonctionnements érectiles à son niveau. Il y a aussi des accidents de la circulation qui sont monnaie courante dans leurs rangs à Porto-Novo.
Pour docteur Franck Houétomènon, la conduite de taxi-moto ne saurait donner de troubles érectiles. Selon lui, les zémidjan peuvent être exposés aux accidents de la circulation, aux problèmes respiratoires, aux troubles oculaires, aux infections et au rhume. « Je recommande aux conducteurs de taxi-motos de se faire consulter fréquemment auprès d’un médecin, de travailler avec modération et de ne pas parcourir de longue distance de façon répétée, de se programmer des heures de repos. Il faut aussi qu’ils aient une moto en parfait état pour contribuer à leur confortabilité», conseille Dr Houétomènon.


Par Immaculée HOUEDETE (Stag). A/R Ouémé-Plateau
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