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Interview avec l’ambassadeur de la Turquie près le Bénin : « Je me félicite de constater un engouement croissant pour la Turquie parmi la population béninoise »

Publié le mercredi 10 novembre 2021  |  Fraternité
Kemal
© aCotonou.com par DR
Kemal Onur Özçeri, ambassadeur de la Turquie au Bénin
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Dans la ferveur de la célébration du 90ème anniversaire de la proclamation de la République de son pays ce 29 Octobre 2021, Monsieur l’ambassadeur de la Turquie près le Bénin, Onur ÖZÇERI était face à la presse. A cette occasion, le diplomate éclaire la lanterne de l’opinion sur la vie de la Turquie en général et en particulier sur son niveau de développement actuel ainsi que l’état de sa démocratie. Interview.

Bonjour Monsieur l’ambassadeur, faites-vous découvrir à nos aimables lecteurs
Mon nom est Onur Özçeri. Je suis l’Ambassadeur de la République de Turquie près le Bénin depuis décembre 2018. La Turquie a ouvert son ambassade à Cotonou en 2014 et je suis le deuxième ambassadeur permanent résidant au Bénin. Je suis un diplomate de carrière, depuis 1994 au Ministère des Affaires Étrangères de mon pays.

Peut-on avoir une idée sur la Turquie en termes géographique, politique et socioculturel ?
La Turquie se retrouve au carrefour de plusieurs continents : l’Europe, l’Asie, le Moyen-Orient et l’Afrique. Nous avons des liens très forts forgés durant de nombreux siècles avec notre voisinage. Depuis le 29 octobre 1923 et la proclamation de la République, la Turquie a entrepris une phase de modernisation et réussi à porter son développement à un niveau très avancé pour se hisser parmi les 20 plus grandes économies du monde. Notre population est de 84 millions d’habitants et à 99 % musulmane vivant sur une superficie de 780 mille km carrés.
La Turquie est membre de la plupart des institutions occidentales/européennes (OTAN, Conseil de l’Europe, OCDE, OSCE). La Turquie et l’Union européenne sont associées depuis 1963 et en Union Douanière depuis 1996. La Turquie ne néglige pas son engagement avec les autres composantes de son identité en étant par exemple un acteur très actif au sein de l’Organisation de la Conférence islamique et ses objectifs fondateurs.
La Turquie a de très bonnes relations avec bon nombre de pays asiatiques ou sur le continent américain mais également sur le continent africain, devenant l’un des partenaires stratégiques de l’Union africaine. Je peux résumer et dire que la Turquie possède des relations multi directionnelles à 360°.
Ce que la Turquie aspire avant tout est de vivre dans une aire de paix et de stabilité avec ses voisins. Malheureusement, de nombreux conflits dans son environnement immédiat et des groupes terroristes qui y sont hébergés continuent d’avoir des impacts négatifs sur la Turquie. C’est pourquoi elle doit consacrer beaucoup de temps et de moyens pour sa diplomatie mais aussi à sa défense pour protéger son indépendance et sa sécurité tout en continuant sur la voie de la croissance économique.

Le 29 Octobre, c’était la fête nationale de la Turquie. Comment l’avez-vous célébrée ?
A cause de la pandémie de la COVID-19, nous n’avons malheureusement pas pu organiser une grande célébration comme cela fut le cas en 2019. Cette année, nous avons célébré avec un nombre très restreint d’invités, constitués pour la plupart de nos ressortissants de Cotonou. Mais cela n’a pas affecté la ferveur de notre célébration. Nous nous sommes remémorés les héros et martyrs de notre guerre d’indépendance de 1918-1923 avec à leur tête Mustafa Kemal Atatürk, premier président-fondateur de la République. Nous sommes fiers de ce que notre pays a réalisé comme avancées en 98 ans. Lors de la célébration à l’Ambassade, j’ai lu le discours de notre président de la République, Recep Tayip Erdogan, un message fort à la nation que la Turquie continue résolument sur son élan. La Turquie, malgré la pandémie, a connu de nombreuses réussites en économie, en politique intérieure et étrangère, démontrant ainsi le niveau de son développement.

Et que peut-on garder à l’esprit s’agissant de la santé des relations diplomatiques entre la Turquie et le Bénin ?
Après l’indépendance du Bénin en 1960, c’est en 1963 que les relations diplomatiques entre la Turquie et le Bénin ont débuté. A partir de 2014, avec l’ouverture de l’ambassade ici à Cotonou et celle du Bénin à Ankara, nos relations bilatérales ont connu un grand essor. A l’heure actuelle, nous avons des relations dans pratiquement tous les domaines : politique, économique, éducation, coopération, contacts humains. Je dirais que nos relations ont des bases qui se consolident chaque jour et ont un grand potentiel de développement.

Peut-on connaitre quelques actions concrètes ?
La visite du président Patrice Talon en 2016 et 2018 et les entretiens avec le président Erdogan ont permis aux deux pays de mettre en avant un certain nombre de priorités et des objectifs. Nous utilisons les mécanismes bilatéraux existant afin d’atteindre ces objectifs. Je peux citer la construction, le commerce, l’investissement, l’agriculture, l’éducation et la sécurité parmi les secteurs dans lesquels nous tentons d’avoir des résultats concrets.
Je me félicite de constater un engouement croissant pour la Turquie parmi la population béninoise. Le nombre de Béninois visitant la Turquie est en hausse. La compagnie aérienne turque a augmenté ses vols devenus quotidiens. Côté éducation aussi, nous avons beaucoup d’étudiants qui postulent pour des bourses d’études supérieures en Turquie. Le commerce entre les deux pays est en nette augmentation. Nous sommes autour de 130 millions de dollars par an de commerce bilatéral. La Turquie figure parmi les 10 plus grands fournisseurs du Bénin. En termes d’investissements, notre tâche est d’augmenter le nombre d’entreprises turques installées au Bénin et qui y investissent Nous avons déjà une entreprise qui est installée à Abomey-Calavi, qui est active dans le secteur du béton. De nombreuses entreprises prospectent les possibilités d’investissement.

Monsieur l’ambassadeur, vu le temps que vous avez passé au Bénin, s’il vous était donné de parler des Béninois, que diriez-vous ?
Je vais entrer bientôt dans ma quatrième année au Bénin et je m’y plais bien. Grâce aussi à l’ouverture d’esprit des Béninois que j’ai rencontrés, j’ai pu m’intégrer auprès d’eux. Je pense que le Béninois est quelqu’un de fier, réservé mais ouvert au dialogue. Sur beaucoup de sujets je constate que je suis sur la même longueur d’ondes, je possède la même sensibilité avec mes amis béninois. Ce que je ressents également c’est la transformation du Bénin qui est enclenchée par le Gouvernement. Le Bénin a changé de vitesse dans son développement et les résultats se font déjà ressentir dans tous les domaines. Je vois un peuple fier de son passé, de sa culture et de plus en plus confiant pour son avenir. Et le Bénin n’est pas seul dans son parcours. La Turquie est un pays ami sur lequel il peut compter.

Qu’est-ce que vous avez à répondre à ceux qui taxent souvent la Turquie de pays dictatorial ?
Il s’agit d’une calomnie odieuse qui est colportée par ceux qui ne supportent pas la montée en puissance de la Turquie.
En réalité, la Turquie est une démocratie où les élections libres se déroulent à échéances régulières. Elle est membre depuis 1949 du Conseil de l’Europe qui regroupe les démocraties européennes qui adhèrent à la Convention Européenne des droits de l’homme. Il y a bien d’autres garde-fous dans notre système démocratique : nous avons les partis politiques. Sachez qu’au parlement, il y a trois partis d’opposition, mais également des journaux, des sites internet et des télévisions d’opposition. Donc, j’invite mes amis béninois à ne pas se fier aux médias européens, mais à se faire eux-mêmes une idée de ce qu’est la Turquie en diversifiant leurs sources d’informations. Vous pouvez aussi obtenir des nouvelles via l’agence de presse, Anadolu (Anatolie) qui a, sur son site internet, des informations constamment actualisés en français (www.aa.com.tr/fr).
Comme je l’ai dit au début de ma réponse, les accusations vis-à-vis de la Turquie ne sont pas innocentes. Pour comprendre leur raison, il faut apprécier sur un plan plus large ce qui se passe aujourd’hui autour de la Turquie. Nous assistons a la répétition de ce que nous avons subi après la première guerre mondiale quand les grandes puissances ont ouvertement convoité le territoire turc. Mais sur le terrain et ensuite à la table de négociations, nous avons réussi à déjouer ces plans. La Turquie, tout au long de son histoire, et du fait de sa localisation géographique, a toujours subi des assauts, des tentatives d’influence, de domination et de manipulation. 98 années plus tard, sa montée en puissance et le fait qu’elle défend avec acharnement ses droits et son territoire, dérangent. La Turquie n’acceptera jamais que sa souveraineté soit restreinte ou ses droits bafoués comme en Méditerranée par exemple.
Tout ce que veut la Turquie, c’est une scène internationale paisible, la stabilisation des régions troublées, la justice, le respect du droit. Nous ne pouvons tolérer que des pays qui utilisent leur statut aux Nations-Unies permettent que des crises s’enlisent, ferment les yeux sur des violences, juste pour leurs intérêts particuliers. C’est le sens de la formule de mon Président quand il dit que le monde « ne se limite pas à cinq » (allusion aux cinq membres permanents du Conseil de Sécurité des Nations qui disposent d’un droit de veto).
En conclusion, je voudrais dire que la Turquie d’aujourd’hui, consciente de son passé et des acquis de ses 98 années, affirme haut et fort son indépendance en se plaçant à côté des pays qui refusent les ingérences et veulent s’affirmer et se développer dans un environnement de coopération respectueux des souverainetés nationales. La quête pour la démocratie ou les engagements internationaux ne peut servir de prétexte à des diktats et des injustices.
Nous prônons le dialogue d’égal à égal sans donneur de leçons. Et c’est aussi la raison pour laquelle, nous pensons qu’un partenariat avec l’Afrique est important pour la Turquie. Dans cet environnement international perturbé, nous avons tout à gagner du dialogue que nous pouvons avoir parmi nos amis sur le continent africain qui sont dans le même état d’esprit.

Quel message pour clore cette interview au cours de laquelle nous n’avons pas la prétention d’avoir abordé toutes les questions ?
Je remercie la presse pour m’avoir permis de présenter mon pays la Turquie à vos lecteurs. Je souhaite longue vie à notre amitié. Vive la Turquie ! Vive le Bénin ! Vive la coopération turco-béninoise. J’invite les Béninois à s’intéresser aussi à la Turquie, à la découvrir et à venir dialoguer avec nous. Merci beaucoup.
Réalisation : Adrien TCHOMAKOU
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