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Cour spéciale des affaires foncières: Fonctionnement et procédure

Publié le vendredi 28 octobre 2022  |  La Nation
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© Autre presse par dr
Cour spéciale des affaires foncières
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Par Anselme Pascal AGUEHOUNDE,

La Cour spéciale des affaires foncières est créée et va récupérer dès son installation toutes les procédures foncières en instance dans les communes de son ressort, excepté celles qui sont déjà en délibéré. La loi 2022-16 du 19 octobre 2022 portant création, organisation et fonctionnement de la Cour spéciale des affaires foncières fixe la procédure devant cette juridiction.

L’organisation judiciaire du Bénin vient d’être enrichie d’une nouvelle cour, une juridiction spécialisée dénommée la Cour spéciale des affaires foncières. Conformément à l’article 3 de la loi 2022-16 du 19 octobre 2022 portant création, organisation et fonctionnement de la Cour spéciale des affaires foncières, cette cour a compétence sur les actions réelles immobilières et les actions relatives à l’expropriation pour cause d’utilité publique.
L’action réelle immobilière, c’est l’action par laquelle une personne physique ou morale demande la reconnaissance ou la protection d’un droit réel sur un immeuble. Il peut s’agir d’une action en revendication: celui qui prétend détenir le droit de propriété contre celui qui conteste la réalité de ce droit; d’une action en bornage qui permet de délimiter les terrains et parcelles ; ou d’autres actions dérivées des démembrements du droit de propriété, en l’occurrence les actions en matière de servitude et d’usufruit.
Quant à l’expropriation pour cause d’utilité publique, elle est une procédure qui permet à l’Etat, pour cause d’utilité publique, de contraindre un particulier ou une personne morale, bon gré mal gré, à céder son bien immobilier contre juste et préalable dédommagement.
Le ressort territorial de la cour spéciale des affaires foncières s’étend sur sept communes que sont : Abomey-Calavi, Allada, Cotonou, Ouidah, Porto-Novo, Sèmè-Podji et Tori-Bossito. Le siège de la juridiction est à Cotonou ; mais la cour peut, au besoin, se réunir dans l’une des sept communes relevant de son ressort territorial. La loi portant création de la nouvelle cour précise que le contentieux des actes administratifs relatifs au foncier (attestation de recasement, convention…) reste de la compétence du juge administratif ; et les infractions foncières commises dans le ressort territorial de la Cour spéciale des affaires foncières (relevant donc du volet pénal) sont de la compétence de la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme.
La création de la Cour spéciale des affaires foncières, faut-il le rappeler, répond à la nécessité d’adresser la problématique de l’insécurité foncière dans ces communes où la terre reste source de nombreux conflits. «Malgré les innovations du code foncier et domanial, notamment en matière de gestion du contentieux, force est de constater que la problématique de l’insécurité foncière demeure et représente un risque potentiel de trouble à l’ordre public, autant qu’un frein à l’investissement public et privé. En effet, les lenteurs procédurales, la défiance des justiciables à l’égard des juges et les incertitudes des solutions jurisprudentielles sont autant de facteurs aggravant le phénomène et auxquels s’ajoute souvent la remise en cause de l’autorité des décisions de justice en la matière », a expliqué le gouvernement à l’occasion de la transmission du projet de loi à l’Assemblée nationale dans le compte-rendu du Conseil des ministres du mercredi 11 mai 2022.

L’on ne dira pas, comme ce fut le cas à la naissance de la Cour de répression des infractions économiques et du terrorisme, que la Cour spéciale des affaires foncières est une juridiction d’exception qui viole le principe du double degré de juridiction. La Criet elle-même étant déjà dotée du double degré de juridiction après modification de la loi relative à sa création.
La Cour spéciale des affaires foncières présente un fonctionnement et une organisation similaire aux autres juridictions. L’article 5 de la loi y relative stipule que la Cour spéciale des affaires foncières comprend une chambre des appels; une chambre de première instance; un parquet; et un greffe. La Cour est composée de magistrats nommés par décret pris en Conseil des ministres, sur proposition du ministre chargé de la Justice, après avis du Conseil supérieur de la magistrature. La chambre des appels est présidée par un magistrat de grade hors-classe qui assume les fonctions de président de la Cour spéciale des affaires foncières. La chambre de première instance est présidée par un magistrat de grade terminal au moins. Et le parquet spécial près la Criet exerce les fonctions du ministère public près la Cour spéciale des affaires foncières. Le greffe est composé d’un greffier en chef et de greffiers nommés par arrêté du ministre de la Justice. La Cour spéciale des affaires foncières peut se réunir en assemblée générale, en audiences solennelles ou en audiences ordinaires ou foraines.
Outre le fonctionnement et l’organisation, les voies de recours devant la Cour spéciale des affaires foncières sont également conformes à la législation en vigueur. « Les décisions rendues par la Cour spéciale des affaires foncières sont, conformément à la législation en vigueur, susceptibles selon le cas, d’opposition, d’appel, de tierce opposition, de pourvoi ou de révision », stipule l’article 20 de la loi 2022-16 du 19 octobre 2022 portant création, organisation et fonctionnement de la Cour spéciale des affaires foncières. L’opposition et la tierce opposition sont soumises à la juridiction qui a rendu la décision attaquée. L’appel interjeté contre les jugements rendus par la chambre de première instance est porté devant la chambre des appels. Le pourvoi en cassation contre les arrêts rendus par la chambre des appels est soumis à la chambre judiciaire de la Cour suprême. La Cour spéciale des affaires foncières est donc dotée du double degré de juridiction, chambre de première instance et chambre des appels, avec la possibilité de pourvoi en cassation près la chambre judiciaire de la Cour suprême.

Une procédure qui priorise le règlement pacifique
La Cour spéciale des affaires foncières joue un rôle juridictionnel mais aussi de bons offices. Lorsqu’une affaire foncière est portée devant elle, la chambre saisie procède obligatoirement à une tentative de conciliation. « En cas d’accord, le président dresse un procès-verbal de conciliation signé par les parties, dont une expédition est revêtue de la formule exécutoire », précise l’article 15 de la loi portant création de la Cour spéciale des affaires foncières. Si la tentative de conciliation aboutit, point besoin d’instruire. Au cas contraire, ou si l’une des parties est absente ou ne s’est pas fait représenter au jour fixé pour la première audience, le président de la chambre saisie procède à la mise en état de la cause. Dans la conduite de l’affaire, la chambre, à la demande conjointe des parties ou de sa propre initiative mais avec l’accord des parties, ordonne une médiation ou une conciliation sur tout ou partie du litige. Le dossier est alors renvoyé au rôle d’attente pour la durée de la procédure de médiation ou de conciliation qui ne peut excéder trois mois. « En cas d’accord, le président procède à l’homologation du procès-verbal dressé par le médiateur ou le conciliateur. A défaut d’accord ou à l’expiration du délai imparti, le président ordonne la poursuite de l’instance », peut-on lire dans les derniers alinéas de l’article 16 de la loi. C’est dire que la Cour spéciale des affaires foncières, au début de l’instance, doit d’abord procéder à une tentative de conciliation; puis à toute étape de l’instance, elle peut, si les parties le désirent, ouvrir la voie de la médiation ou de la conciliation. La poursuite de l’instance n’est ordonnée qu’à l’échec de ces tentatives de règlement à l’amiable. Quelle que soit l’option de règlement préférée par les parties, le ministère public peut demander communication du dossier de toute affaire dans laquelle il estime devoir intervenir et faire ses observations.
Pour ce qui concerne les procédures d’urgence, les référés ou les sursis à exécution, le président de la chambre de première instance, dans les matières qui relèvent de sa compétence, exerce les prérogatives de juge des référés. Ses ordonnances sont susceptibles de recours devant la chambre des appels. Le président de la chambre de première instance prend des ordonnances sur requête et les mêmes prérogatives appartiennent au président de la chambre des appels.
Les dispositions finales de la loi précisent que, dès l’installation des magistrats et du personnel qui animeront cette juridiction, toutes les procédures foncières en instance dans les communes de son ressort, à l’exception de celles déjà en délibéré, seront transférées à la nouvelle cour?

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