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diplomatie et coopération : légitimité d’une nouvelle gestion ou gageure

Publié le jeudi 27 juillet 2023  |  Fraternité
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Diplomatie et Coopération : un tandem qui chemine habituellement en liens étroits visant à améliorer les relations entre Etats et singulièrement à générer des projets aux fins d’assurer le développement d’un pays comme le nôtre. Mais nous nous devons de garder à l’esprit qu’en système de rupture dans lequel nous évoluons, il est régulier de changer les règles du jeu du moment qu’elles ne se révèlent pas efficaces à souhait. Ces derniers temps, notre diplomatie a tenu le haut du pavé. Le sujet mérite alors que tout intellectuel citoyen s’y intéresse à quelque titre sans toutefois porter atteinte à la récente décision du chef de l’Etat transférant la fonction Coopération du Ministère des Affaires Etrangères et de la Coopération au Ministère de l’Economie et des Finances. Le couple diplomatie-coopération vient donc d’être séparé.

IL S’AGISSAIT EFFECTIVEMENT D’UN COUPLE ;
A preuve, la signification des préfixes des deux composantes. Le préfixe ‘’co’’ de Coopération provient du latin ‘’cum’’ qui signifie ‘’avec’’ et exprime tout à la fois, l’esprit et l’idée d’association. Le préfixe ‘’di’’ de diplomatie émane du mot grec ‘’di ‘’ signifiant ‘’double sens’’ et évoquant les concepts de partenariat et de négociation. Dès lors, il devient bien difficile de séparer le tandem coopération et diplomatie qui réclame proximité et interaction ; et nous savons qu’habituellement un couple vit ensemble. Ainsi, l’étymologie des mots éclaire des fois et aide à mieux cerner des situations.


UNE PRECISION TERMINOLOGIQUE DELICATE MAIS PREALABLE A TOUTE REFLEXION SUR LE SUJET
Il arrive qu’une chose et la manière de la faire se traduisent par le même terme et qu’elles soient, de manière discursive, susceptibles de créer la confusion dans les esprits à telle enseigne qu’elles faussent les analyses. L’on peut voir dans le terme diplomatie, la manière comme l’on peut y voir les moyens. Faire les choses avec diplomatie, c’est les faire avec le tact qui convient afin d’obtenir le résultat escompté ; il n’y a pas d’école pour en acquérir la qualité d’autant que la diplomatie afférente aux relations qui s’y attachent, en l’occurrence, n’implique que des individus. Considérée sous l’autre aspect, la diplomatie n’est plus seulement une manière de faire, mais l’appropriation des outils et de l’ensemble des voies et moyens requis pour obtenir les meilleurs résultats des relations entre des Etats, et cela s’apprend à l’école. Naturellement, ceux qui ont acquis ces connaissances se doivent de les exercer avec le tact qui convient pour obtenir les résultats attendus par le chef de l’Etat qui les commandite.
Il se fait que Coopération est un terme tout aussi énigmatique que Diplomatie. La coopération revêt la double signification interne et externe. Au premier titre, elle est généralement perçue comme une manière de participer à une œuvre commune. Au second, elle est l’ensemble des éléments constitutifs d’échanges dans divers domaines entre des Etats.


UN RAPPEL DE L’HISTOIRE DU POSITIONNEMENT DE LA FONCTION COOPERATION A TRAVERS LES TEMPS
Lorsque nous consultons l’histoire de nos institutions politiques, nous constatons que la fonction Coopération n’a pas été exercée uniformément par le Ministère des Affaires Etrangères depuis notre accession à la souveraineté nationale. Nous devrions nous rappeler que l’organigramme gouvernemental de notre pays l’avait placée sous la tutelle du Ministère du Développement Rural jusqu’à l’avènement du Gouvernement Militaire Révolutionnaire. La fonction avait été alors rattachée, pour la première fois semble-t-il, au Ministère des Affaires Etrangères et elle s’y était installée durablement depuis le 30 janvier 1976 jusqu’à cette année 2023. Si le tandem Diplomatie-Coopération est ainsi resté quasiment un demi-siècle durant au Ministère des Affaires Etrangères, c’est qu’il y avait de bonnes raisons qu’il en fût ainsi. Et si la Haute Autorité a séparé le couple, c’est qu’elle a eu de bonnes raisons de le faire tout aussi certainement. Il convient donc de faire la part des choses afin de se faire le bon jugement.

LA RAISON DE LA DOMICILIATION DU COUPLE AU MINISTERE DES AFFAIRES ETRANGERES JUSQU’ALORS
Ainsi que nous l’avons mentionné plus haut, le contenu de la coopération, c’est l’ensemble des projets de développement de notre pays en partenariat avec des pays tiers, tandis que la diplomatie est l’inévitable ensemble des voies et moyens qui l’accompagnent notamment dans la recherche des sources de financement. C’est précisément en raison du fait que ces projets sont généralement soutenus par des investissements étrangers que le couple Coopération-Diplomatie a été jusqu’alors domicilié au ministère qui a pour fonction de s’occuper des affaires étrangères. Il ne saurait y avoir de fait de coopération à l’international sans le support de la diplomatie et, en cela, le Gouvernement Militaire Révolutionnaire avait vu juste. A tout Seigneur, tout honneur donc.

LES PLAUSIBLES RAISONS DE DEFAIRE LE MINISTERE DES AFFAIRES ETRANGERES DE SA COMPOSANTE COOPERATION
-La légitimité de l’appellation Ministère des Affaires Etrangères
Nous estimons que la seule appellation ‘’Ministère des Affaires Etrangères’’ sans plus d’autres précisions d’attributions parait, en dehors de toute autre considération, plus noble d’autant qu’elle évite la redondance. En effet, il va de soi et sans dire qu’un ministère des affaires étrangères s’occupe implicitement de la coopération qui, en l’occurrence, relève de l’étranger fondamentalement. Au demeurant, l’ajout Coopération à un ministère des affaires étrangères n’est décidemment pas heureux en ce sens que le terme revêt d’ordinaire la connotation d’une assistance de pays plus développés, qui peine à se dissimuler et qui entache si gravement souveraineté et dignité nationales.

- La rectitude de l’ancienne gestion de la Coopération
Il nous parait évident que le chef de l’Etat n’aurait pas touché à la fonction Coopération du Ministère des Affaires Etrangères et l’aurait laissée là où elle était s’il avait estimé qu’elle avait brillé par son efficacité en termes d’apport de capitaux étrangers. Naguère, c’était un crime de lèse-majesté qu’un ambassadeur s’adressât à toute autre structure que le Ministère des Affaires Etrangères quand bien même s’agirait-il du chef de l’Etat lui-même. Il n’avait de correspondant que le seul Ministère des Affaires Etrangères, son autorité de tutelle. Le Ministère était assurément trop exclusif en exigeant cela mais il ne faisait que respecter les prescriptions administratives en vigueur.
La faiblesse des capacités prospectives de nos ambassades
Peut-être devrions-nous également pointer du doigt le déficit en matière de capacités prospectives de nos ambassades et recommander leur renforcement.

-La légitimité de l’attelage coopération et économie : une logique associative
Tout bien pesé, il sied de reconnaitre objectivement qu’il y a une logique certaine à rapprocher la Coopération du Ministère de l’Economie et des Finances précisément en raison de la composante Economie de ce dernier. La Coopération est, dans notre système, au service de l’Economie et cette dernière implique autant les investissements locaux qu’étrangers.

UNE NOUVELLE GESTION DE LA FONCTION COOPERATION
En principe, l’appellation du ministère ainsi abrégée, à savoir Ministère des Affaires Etrangères, sous-entend néanmoins que ledit ministère conserve la fonction Coopération et garde en son sein la division y afférente dans la mesure où les affaires étrangères impliquent la Coopération au reste, sous toutes ses formes. Mais il se fait que dans la nouvelle réglementation, la fonction a quitté le Ministère des Affaires Etrangères et de la Coopération purement et simplement pour rejoindre le Ministère de l’Economie et des Finances. Mais il se fait en revanche que par la force choses, l’on a dû laisser tout de même au Ministère des Affaires Etrangères, et pour cause, la faculté de participer de quelque manière à l’exercice de la fonction qui lui a été officiellement retirée cependant. Il est évident, en effet, que les investisseurs sont à l’étranger et que le Ministère de l’Economie et des Finances quand bien même en charge de la Coopération n’a pas, pour l’instant en tout cas, de compétence externe en matière de prospection du marché des investissements à l’étranger. Ses agents ne peuvent explorer de leur siège, le champ des capitaux étrangers ; aussi a-t-il été demandé aux ambassadeurs d’adresser dorénavant leurs rapports d’activités au Ministère de l’Economie et des Finances désormais en charge de la Coopération. Nous aurions alors tendance à parler d’une fonction Coopération partagée qui ne peut dire son nom officiellement. Un Ministère des Affaires Etrangères et de la coopération amputé de sa branche coopération d’une part, un Ministère de l’Economie et des Finances en charge de la Coopération sans compétence externe ni réels moyens d’action autonome d’autre part, et tenu de faire appel aux diplomates du Ministère des Affaires Etrangères pour exercer sa fonction Coopération. Une fonction politiquement détenue désormais par un ministère, mais techniquement encore exercé par l’ancien détenteur. Sauf erreur d’appréciation de notre part, c’est nous semble-t-il, le tableau tel qu’il se présente actuellement. Mais alors se pose :

LA QUESTIION DE LA DOUBLE TUTELLE
Les ambassadeurs ainsi instruits, il se pose la question de leur double tutelle : celle du Ministère de l’Economie et des Finances en charge de la Coopération et celle de leur ministère, ancienne seule autorité de tutelle. En fait et pour appeler un chat un chat, il s’agit d’une tutelle partagée sur fond d’une coopération partagée par la force des choses. Une double tutelle sur une même fonction remplie par deux entités juridiques différentes en l’occurrence deux ministères, sous la houlette, il est vrai, de celui qui en est désormais dépositaire et qui la gère. L’équation se complique dans la mesure où les ambassades passées sous une tutelle fonctionnelle et séquentielle du Ministère de l’Economie et des Finances en charge de la Coopération, continuent d’être régies administrativement et globalement par l’autorité de tutelle qu’est le Ministère des Affaires Etrangères. Un problème de droit administratif se poserait alors.

L’APPREHENSION D’UN MINISTERE EN CHARGE DE LA COOPERATION TROP INVASIF
Selon toute vraisemblance, c’est ce qu’a voulu éviter le chef de l’Etat. Le décret portant le nouveau gouvernement aurait pu créer tout de go un Ministère de l’Economie, des Finances et de la Coopération. Au lieu de cela, il a créé un Ministère de l’Economie et des Finances en charge de la Coopération. Dans notre entendement, il y a là comme une nuance à dessein pour déjouer le risque de donner naissance à un super Ministère de la Coopération.
En tout état de cause, l’expérience de la France en matière de gestion de la coopération nous laisse un enseignement édifiant. Le Général de Gaulle, président de République, avait créé un Ministère de la Coopération en 1959. Puis, face aux problèmes techniques que posait cette autonomie dont le manque de support diplomatique, mais aussi, il faut bien l’admettre, à la faveur de l’arrivée de la gauche au pouvoir, le Président Mitterand a transformé le ministère en Ministère de la Coopération et du Développement. Nonobstant cela, la gestion d’un tel ministère s’était empirée toujours par manque de soutien diplomatique. Finalement, ledit Ministère a été purement et simplement fondu dans le Ministère des Affaires Etrangères en Janvier 1999.

UN DILEMNE DEJA SURMONTE ET UNE COHABITATION ASSUREE
Le dilemme, c’est qu’une fonction a été transférée d’un Ministère A à un Ministère B en laissant au Ministère A les voies et moyens d’exercer cette fonction désormais confiée au Ministère B. Mais il sied de reconnaitre que le dilemme s’est d’ores et déjà adouci au sommet par la personnalité et le background du nouveau Ministre des Affaires Etrangères. Il suffit de rappeler que ce Ministre provient en droite ligne du service des investissements du Ministère de l’Economie et des Finances et après une affectation de très brève durée à la présidence de la République, centre névralgique de la diplomatie de notre pays, comme pour y fixer déjà ses amarres. Et ses prestations fort professionnelles en République Populaire de Chine à l’occasion de la troisième édition économique et commerciale chine-Afrique de Changsa et celle de la réunion de la cinquième session de la commission mixte ont fini de nous convaincre que l’esprit de Coopération n’a pas quitté le Ministère des Affaires Etrangères. Il y a été question de coopération principalement. La bonne collaboration est ainsi établie entre les deux ministères et nous n’avons apparemment plus de raison de nous inquiéter pour ce qui est d’éventuels conflits d’attributions.

NOS PROPOSITIONS
Restent alors deux paramètres à résoudre pour soumettre le dilemme entièrement : la question du manque de compétence externe du Ministère de l’Economie et des Finances en charge de la Coopération pour accroître de façon autonome le flux des investissements étrangers et la question du renforcement des capacités prospectives des diplomates en matière d’exploration du marché des investissements étrangers. Nous proposons alors une bonne politique d’affectation d’attachés économiques et commerciaux dans les ambassades. L’attaché n’est pas un diplomate de carrière. Il vient d’un ministère technique en renfort à l’ambassade dans un cadre déterminé. Il pourra y être affecté pour une durée de trois ans avec des objectifs bien déterminés et une obligation de résultats estimés annuellement. Nous ferons la réflexion sur le renforcement des capacités prospectives des diplomates en termes de coopération économique dans un prochain article
Ambassadeur Candide Ahouansou
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