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Ousséni Banao parle de son combat panafricaniste « L’Etat n’a plus vocation à faire des affaires »
Publié le mardi 28 janvier 2014   |  24 heures au Bénin


Ousséni
© Autre presse par DR
Ousséni Banao, homme d`affaires d`origine burkinabé


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Désormais très actif entre le Nigéria et le Ghana dans le domaine des infrastructures et du négoce, l’homme d’affaires Ousséni Banao, d’origine Burkinabé a accepté se confier à la presse. Une interview déroulée dans un grand hôtel d’Abuja, haut lieu de buisines où se croisent les hommes d’affaires des quatre coins du globe. C’est dans ce cadre, sous les lambris dorés, que Ousséni Banao nous a confié ses appréhensions sur les événements actuels à travers le continent, ses espoirs sur l’émergence de l’Afrique, le partenariat Chine Afrique. L’homme d’affaires n’a rien perdu de son mordant sur les égarements des pouvoirs publics en Afrique. Il n’a pas manqué de donner un grand coup de gueule dans ce qu’il considère comme une déviance dans le partenariat Chine-Afrique confisqué par les Etats au détriment des opérateurs privés. Cet entretien se veut le début d’un série de sorties médiatiques.



Monsieur Ousséni Banao, dites nous ce que les nombreux événements survenus en Afrique ces derniers années vous suggèrent.


Je vous remercie de l’occasion que vous m’offrez une fois de plus de parler de l’Afrique notre continent si cher à nous tous, mais malheureusement si secoué par des événements qui s’y déroulent ces deniers temps, signes annonciateurs des mutations globales du moment. Personnellement, je dois avouer toute ma préoccupation au vu du déferlement des actes de ce processus dit civilisateur imposé une fois de plus aux Africains et au reste du monde, depuis l’extérieur avec une puissante machine destructrice.
La violence et la brutalité avec lesquelles s’opèrent ces mutations sur le continent interpellent toutes les consciences humaines et les valeurs identitaires de notre continent.
On ne peut pas comprendre qu’on puisse prétendre imposer LA DEMOCRATIE par l’instrumentalisation de la trahison et de la déchirure avec son corolaire inévitable de bains de sang sur fond de poussée du radicalisme et de l’extrémisme. On se croirait encore aux méthodes apocalyptiques du temps des conquêtes précoloniales et coloniales, à l’instar de ce qu’on a observé et continue de constater en Libye, en Tunisie, en Égypte, en Centrafrique, au Congo etc...
Des images de chaos et de terreur incompréhensibles et inadmissibles qui rappellent les épopées sanglantes des conquêtes de Soundiata Keita, Kankan Moussa ou du Roi Béhanzin, pour ne citer que celles d’Afrique..., (car il existe là-bas Guillaume le conquérant, le Roi charlemagne, Louis…….).

Avec la complicité des Africains quand même Monsieur Banao

Je vous le concède. Cela devient néanmoins préoccupant qu’à chaque grand rendez-vous de l’histoire, nous Africains nous passons toujours à côté !
L’Afrique n’a toujours pas su opérer les mutations indispensables à sa modernisation à travers des processus pacifiques basés sur la grande force de notre culture et de sa valeureuse sagesse légendaire.
Le recours à la force, à la guerre, aux armes demeure plus actuel que jamais. La communauté internationale développe de jours les foyers de tensions avec la multiplicité de groupes rebelles et même extrémistes contre des régimes légitimes, reconnus par la même communauté internationale. Aujourd’hui plus qu’hier malheureusement, c’est très facile à ceux qui nourrissent des ambitions inavouées sur l’Afrique d’armer des groupuscules pour venir à bout d’armées nationales régulières et loyales à la légalité …
Au nom de la Démocratisation et de la Liberté d’expression tous les abus sont y compris sous le couvert des Nations-Unies et de nations dites civilisatrices. La notion paix mondiale rime de nos jours avec abdication pour tous les régimes pouvant résister au diktat.
Pour construire ce continent, on n’a pas besoin de détruire totalement l’existant. Tout au contraire assumer le passé pour mieux bâtir le futur.

Vous semblez un peu désabusé par l’évolution de la situation de ces dernières années


Quel Africain ne le serait pas ? Pour quelqu’un qui a passé une grande partie de sa vie à prôner l’humanisme et le panafricanisme universel avec comme socle un monde plus juste, c’est légitime. On a remplacé la protection et la sauvegarde des intérêts des plus fragiles et des minorités par l’intolérance et la violence inouïe. Il y a de quoi être indigné.
Les spectacles du chaos à Tripoli, au Caire, à l’Est du Congo, à Bangui n’autorisent pas à la sérénité.
Aujourd’hui plus que jamais, la question est de savoir si une autre voie n’était pas possible et pourquoi les Africains ont-ils choisi d’accepter la voie importée de l’atrocité et de la terreur.
Les gens ne se battent plus pour défendre une identité nationale et des frontières. Aujourd’hui on s’affronte pour un lopin de terre, une église, une mosquée, sans savoir que l’on se détruit pour autrui avec des concepts et conceptions impropres à nos valeurs d’antan. Pendant ce temps les commanditaires exploitent pour leurs comptes et celui des puissances étrangères qui les utilisent nos minerais, nos richesses et notre sous-sol.
Les affrontements et les brutalités sont déclenchées avec une telle facilité entre les fils d’un même pays à telle enseigne que cela jette des doutes sur notre capacité à transcender l’animosité et l’adversité. Vous comprenez que face à cette absence manifeste de repères qui ont fait la fierté et la réputation de nos aïeules, le panafricaniste que je suis soit préoccupé mais pas désabusé.
Cela exige de nous plus de détermination, plus d’engagement afin pour sortir la barque des flots.


QUELLE EST ALORS VOTRE CONVICTION PERSONNELLE SUR L’AVENIR DU CONTINENT AFRICAIN APRÈS LE TABLEAU QUE VOUS VENEZ DE BROSSER ?

C’est d’ailleurs le sens du combat panafricaniste : y croire et tout faire pour aboutir. L’Afrique est notre terre unique et aucune autre alternative ne s’offre à nous que sa RENAISSANCE aussi bien culturelle qu’économique. Le tableau qui semble sombre n’est nullement un motif suffisant pour émousser la marche du continent. Les violences notées ça et là montrent surtout une mutation générationnelle, une opportunité qui doit être saisie cette fois-ci pour redessiner le rôle et la place du continent dans le concert des nations des temps nouveaux.
Pour assurer aux générations futures un avenir prometteur, l’AUTORITE ET LA SOUVERAINETE EFFECTIVE INCONTESTABLE du continent doit être rétablies sans conditions et sans délais.
Jadis, les violences, les guerres, les razzias avaient pour motivations l’expansion territoriale des royaumes et empires ainsi que le rayonnement des souverains. Mais cette fois-ci, on note un attachement de la jeunesse aux questions de liberté, de justice et de démocratie. Une jeunesse malheureusement très tôt déviée de ses motivations premières et réorientée vers des mirages imposés de l’extérieur...
Lorsque vous écoutez les acteurs de l’embrasement des rues au Caire, de la révolution en Libye ou des affrontements à Bangui, il est question de valeurs fondatrices de nations modernes. Mais très vite tout est fait pour perpétuité l’impunité pour les plus complaisants avec ceux qui se font désormais appelés « acteurs majeurs » de la communauté internationale. Par contre, les acteurs africains jugés trop indépendants doivent subir la foudre de la justice internationale.


Que préconisez-vous face à tous ces bouleversements ?


Le grand problème, c’est la capacité des Africains à s’affranchir des influences négatives extérieures dans ces foyers de tension. Il faudrait que les luttes de libération et d’instauration de la démocratie soient conduites et menées par les Africains eux-mêmes, avec leurs propres moyens et suivant leurs propres motivations et valeurs socioculturelles. Ceci afin que les situations créées ça et là pour des besoins légitimes ne soient l’occasion pour des puissances extérieures de faire main basse sur les richesses du continent. Ce qui est très souvent le cas actuellement. L’instrumentalisation des élans émérites de la jeune génération est le prochain défi du panafricanisme du nouveau millénaire. Sauf qu’aujourd’hui les nouveaux moyens disponibles ne nous permettent pas d’être optimisme sur la fin.
Cependant le développement des moyens de communication et leur maîtrise par les africains nous donne beaucoup d’espoir, à la seule condition que ces nouveaux instruments soient aussi utilisés à bon escient et de façon plus responsable et honnête.
On ne peut plus cacher l’autocratie, les massacres, les privations de liberté et tous les obstacles à l’épanouissement des citoyens et à la justice à plusieurs vitesses dans notre continent.
L’éclosion économique doit être portée par une dynamique démocratique où la justice et l’équité guident tous les programmes et projets de développement.
On espère qu’après cet élan de contestation des citoyens s’ensuivront une phase de stabilisation propice à un meilleur environnement des affaires et de la capacité d’entreprendre.

APPAREMMENT VOUS ENTREVOYEZ DES PERSPECTIVES MALGRÉ LES DIFFICULTÉS DU MOMÉNT

Constatez vous mêmes que l’Afrique ce n’est pas que la Côte d’Ivoire, la Centrafrique, le Congo ou le Soudan. C’est aussi le Ghana, l’Ethiopie, l’Afrique du sud, le Maroc et beaucoup d’autres pays qui accomplissent de remarquables avancées économiques et structurelles, et même le grand Nigéria quoi qu’on pense et dise.
C’est cette Afrique qui l’emportera à coup sûr. Le monde en est conscient.
D’ailleurs tous les organismes internationaux spécialisés dans le business finissent par se rendre compte que l’avenir des affaires se trouve en Afrique. Ils ont en ligne de mire ces espaces de prospérité qui se multiplient sur le continent.
Auparavant, lorsqu’il y a un conflit quelque part cela déteint sur toute la sous région voire le continent. De nos jours, on constate que les zones de tensions sont contenues dans des limites raisonnables même si cela est motivé par leurs intérêts égoïstes stratégiques vitaux. Ce sont des progrès peu perceptibles mais qui dénotent néanmoins de l’émergence d’une responsabilité collective dans la conduite des affaires du continent.
Même s’il faut améliorer les instruments d’intégration régionale et sous régionale, il est aisé de constater la part prise désormais par les questions économiques à l’occasion des sommets de l’Union Africaine, de la Cedeao, de la Cemac ou de la Sadc, de l’Igad, etc…
Les discours à ces tribunes ont beaucoup évolués avec une émergence de nouveaux leaders qui n’hésitent plus à faire des sujets de démocratie des références non négociables.


IL EXISTE POURTANT DES DISPARITÉS D’UNE RÉGION À UNE AUTRE...


On ne peut nier les influences négatives de puissances étrangères en l’Afrique dont je parlais tantôt. Mais il faut l’aborder désormais avec une approche différente que celle qui a prévalu jusque là. Nous devons sortir des clivages francophones, anglophones et autres. Il est vrai que l’espace francophone va très très mal avec l’instabilité politique, le déficit démocratique, l’anachronisme du Franc CFA, la tutelle diplomatique excessive, etc... Mais actuellement la solution doit être globale. Les anglophones doivent aller au secours des anglophones et vice versa.
En cela, le leadership encore balbutiant de l’Afrique du sud ou du Nigeria peut apporter un nouveau souffle à la renaissance africaine. On a vu le gouvernement sud africain s’ingérer dans le règlement de crise au Congo démocratique, au Burundi, en Côte d’Ivoire, à Madagascar, en Centrafrique et ailleurs avec plus ou moins de succès. Ce sont des initiatives à repenser en fonction des perspectives en vue. Cependant il faut déplorer la perte de vitesse de l’Egypte et de l’Algérie englués dans des troubles de tous ordres ces dernières années.
Plusieurs chefs d’Etat n’hésitent plus à prôner des solutions africaines aux problèmes africains même si cela manque parfois de conviction par peur de représailles des occidentaux.
C’est révolu l’époque des blocs au sein de l’OUA, alignés respectivement sur les deux protagonistes de la guerre froide. Il faut renforcer le bloc unique africain face aux enjeux de la planète, d’où LES ETATS UNIS D’AFRIQUE MAINTENANT OU JAMAIS. Un sujet qui ne fait plus tabou et qui est porté au plus haut niveau par l’Ua.

QUEL BILAN POUVEZ VOUS FAIRE ALORS DU PARTENARIAT ASIE-AFRIQUE DONT VOUS ÉTIEZ UN GRAND PIONNIER ET QUI A D’AILLEURS CONTRIBUÉ EN GRANDE PARTIE A VOTRE REPUTATION ?

Vous venez de mettre le doigt de la problématique de l’Afrique ou des Africains face au reste du monde. Pour moi c’est une grande satisfaction qu’on ait rompu avec notre tête-à-tête exclusif avec ce qu’on appelait "bailleurs de fonds" traditionnels c’est à dire l’Union européenne et les États-Unis. Aujourd’hui, les échanges avec l’Asie notamment la Chine, la Corée du Sud et le Japon ont pris de l’envergure. C’est déjà un acquis considérable en attendant d’améliorer notre incapacité à investir convenablement la région du Golfe Persique et Arabique.
Un bémol cependant. Le partenariat dont je parlais il y a quelques années a été dévié de ses objectifs initiaux. Il était question que les acteurs économiques et sociaux africains s’émancipent et partent à la rencontre de leurs homologues des autres continents en position de partenaires majeurs et privés. Il fallait aller, nous aussi, sur le marché international avec les arguments qui sont les nôtres et discuter d’égal à égal avec les autres. C’était un plaidoyer pour que les africains prennent d’assaut tous les officines, tous les foras, tous les endroits où on parle du devenir du monde.
Mon bémol concerne toutefois la trop grande implication des États dans ce partenariat qui de nos jours est devenu un BUSINESS D’ETAT. L’Etat n’a plus vocation à faire des affaires. Aujourd’hui, l’action des hommes d’affaires est embrouillée par l’intrusion massive de l’administration publique. Cette tournure aurait dû être précédée d’une réforme des mécanismes institutionnels en la matière afin de corriger les anciennes pratiques déplorées à l’époque des bailleurs de fonds dits traditionnels, justifiées par les slogans et programmes de BONNE GOUVERNANCE et de TRANSPARANCE dans la gestion des affaires publiques.
C’est malheureusement encore la même façon qu’autrefois qui s’observe, sauf que cette fois-ci, l’interlocuteur n’est plus l’Ue, la banque mondiale, le FMI ou les Clubs de Paris et Londres et autres, mais la Chine.
Il n’est pas normal qu’on retombe dans les mêmes clichés en effet à savoir la politique de la main tendue et l’assistanat providentiel. Ce qui ne fait plus des Africains des partenaires égaux mais des assistés médiocres et incompétents. Nos cadres ne peuvent plus conduire les projets dans la posture de gens qui vont à l’échange mais plutôt de nécessiteux à la recherche d’aide.
Je déplorable également qu’aujourd’hui l’Afrique ne se tourne que vers la Chine et non l’ASIE dans sa diversité et ses immenses opportunités.
Au bilan, le constat est plus que décevant avec l’absence de transfert de compétence et de technologie, l’endettement massif, le manque de suivi surtout dans les projets d’infrastructures, la corruption, le défaut de transparence dans la conclusion des contrats miniers, le recul démocratique dans certains pays.
Parce qu’on a permis à des fonctionnaires qui ne connaissent pas grand chose en affaires d’envahir le terrain des négociations d’affaires. On voit même des États négocier directement avec des opérateurs privés chinois sur des projets sur lesquels ces États auraient dû solliciter l’expertise de leurs opérateurs privés nationaux officiant dans le domaine concerné. Il y a beaucoup d’autres dysfonctionnements qui n’offrent pas beaucoup d’opportunités aux hommes d’affaires africains. Mais ces derniers n’ont pas baissé les bras et sont très actifs.
Ma conviction est que ces entrepreneurs africains qui ont choisi de prendre d’assaut le marché asiatique et du golfe arabique à leurs risques et périls finiront pas s’imposer et contribueront donc de cette manière à inverser les tendances.

Un mot sur vos activités actuelles

J’ai toujours eu une vie intense. Avec d’autres Africains nous nous attelons à apporter notre contribution à l’édification d’une Afrique conforme à nos rêves. Je dois avouer que le Nigéria offre d’énormes potentialités pour le décollage de l’Afrique. A partir d’ici à Abuja on peut avoir un aperçu sur des milliers et des milliers d’opportunités d’affaires avec des projets structurants pour le continent et ceci en relations avec de nombreux pays du monde entier. C’est vrai que lorsqu’on opère sur une plateforme pareille on a tendance à négliger les autres petits pays de la sous région où j’ai des entreprises. Mais ce n’est qu’une impression. Aussi bien dans le Btp, l’ingénierie, les banques et les financements de projets, je me sens totalement épanoui. Nous avons donc des raisons d’espérer pour un nouvel essor du panafricanisme porté par les propres fils du continent.

Je vous remercie


Propos recueillis par la Rédaction

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