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Tentative de suppression des libertés syndicales et de grève à la justice : Mission impossible ou difficile pour les députés
Publié le jeudi 26 juin 2014   |  actubenin.com


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© Autre presse par DR
Assemblée nationale du bénin


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Arracher à la justice béninoise son indépendance, est un vieux rêve du président de la République. Pour l’instant, il n’y arrive pas mais ne baisse pas les bras. La dernière idée en date de Yayi Boni, c’est de bannir le syndicalisme et la grève à la maison justice. Un projet qui fait du chemin à l’Assemblée nationale. Face à cela, c’est l’épineuse question de l’équilibre des pouvoirs qui menace la démocratie béninoise.

Après plusieurs échecs de tentatives de domestication du pouvoir judiciaire, le chef de l’Etat Yayi Boni n’est pas prêt à renoncer à ses manœuvres tendant à affaiblir la justice. Impuissant dans le bras de fer qui l’oppose à l’Union nationale des magistrats du Bénin (Unamab), il s’apprête à commettre l’une des plus grosses erreurs de sa présidence. Son plan consiste à faire voter une loi à l’Assemblée nationale pour supprimer les libertés syndicales et le droit de grève aux magistrats. Des libertés pourtant reconnues par la Constitution du 11 décembre 1990. Si le projet de loi portant interdiction du droit de grève était voté par l’Assemblée nationale, Yayi Boni aurait réussi un grand coup, lequel nuira non seulement à son propre camp, mais aussi au système démocratique. La façon dont le président de la république s’investit dans ce dossier afin de le voir aboutir n’est pas un bon signe pour l’Etat de droit. Il veille à exercer la pression sur les députés de son camp en mettant en jeu non seulement son influence sur certains mais aussi en les dotant de moyens pour l’accompagner. Il exige des parlementaires qu’ils collent à son projet en servant des arguments peu convaincants. En effet, la présidence de la République soutient que l’action de Yayi Boni vise à libérer les justiciables de l’otage des organisations syndicales de la justice et entre autres à donner des garanties aux investisseurs étrangers qui renoncent à apporter leurs capitaux au Bénin, du fait de l’appareil judiciaire constamment paralysé. Au cours de la Table ronde organisée du 17 au 19 juin à Paris par le gouvernement béninois, Yayi Boni a promis aux investisseurs qu’il va opérer des réformes au sein de la justice afin de la rendre plus opérationnelle. Il y a beaucoup de gens qui l’auraient applaudi si les réformes annoncées portaient sur les doléances des magistrats. A commencer par la correction des irrégularités contenues dans les dernières nominations au niveau des Cours et Tribunaux. Ensuite, il y a la question de la sécurité des magistrats. Egalement à l’ordre du jour, la revendication relative à la suspension des décrets querellés.

L’Assemblée nationale sous l’emprise de Yayi ?

Alors que ces questions sont restées sans solution satisfaisante, le chef de l’Etat a fait l’option de raviver la tension et d’exaspérer la colère des acteurs de la justice. Les nombreuses manœuvres visant à déstabiliser l’appareil judiciaire ayant rencontré une farouche résistance et l’affirmation des magistrats, le président de la République a cette idée de passer par l’Assemblée nationale pour atteindre ses objectifs et peut-être plus qu’il l’espérait au début. Dans sa nouvelle trouvaille, il met les députés au devant de la scène en orchestrant une stratégie législative, comme il a eu à le faire contre les Douaniers. Il a voulu rééditer l’exploit contre les organisations des syndicats des travailleurs, mais très tôt son projet a été rangé suite à des manifestations de colère qui ont été initiées par les leaders syndicaux. On peut comprendre que la loi interdisant la grève aux douaniers n’a pas subi le même sort, parce que ces agents de l’Etat sont avant tout des militaires qui ont le devoir d’obéissance, voire de soumission. Ce qui n’est pas le cas avec les magistrats encore moins les autres corps civils de l’Administration publique. D’ailleurs, l’Unamab et les Centrales syndicales font une déclaration commune ce jour à la Bourse du travail pour dénoncer cette initiative du régime en place. C’est dire que ce dernier verra sur son chemin tous les travailleurs aux côtés des magistrats s’il ne renonce pas à ce projet plus que jamais controversé. C’est un signal fort que donnent ces regroupements syndicaux pour montrer à Yayi Boni qu’il se trompe en voulant adopter la même politique pour arrêter les mouvements de paralysie au niveau du secteur de la justice. On se demande si le président de la République ira jusqu’au bout dans cette nouvelle aventure alors même qu’il tente de courtiser la justice au lendemain de la Table ronde de Paris. Aucun président parmi ses prédécesseurs ne s’y est essayé, pas même à un bras de fer. Pourtant, ils avaient une majorité à l’Assemblée nationale. Le problème de Yayi Boni, c’est de croire qu’il peut utiliser l’étendue de son pouvoir et sa majorité parlementaire pour asservir les institutions de la République et désarticuler les piliers de l’Etat de droit. Le problème également de l’autre côté, c’est que les Institutions de la République ne réussissent pas à l’arrêter dans ses dérives. On les soupçonne de se livrer à des relations de copinage voire de connivence avec l’Exécutif, alors que la Constitution du 11 décembre 1990 a prescrit la séparation des Pouvoirs. Dans cette dernière dérive en date qui est dirigée contre l’Etat de droit, on se demande si les députés qui se montrent déjà favorables à l’idée de Yayi Boni ont intérêt à le soutenir. On se demande si l’Assemblée nationale succombera à la pression du chef de l’Etat pout lui permettre une fois encore de déséquilibrer les pouvoirs.

Entre soutien et opposition

Selon nos indiscrétions, pendant que ces questions sont parfaitement d’actualité, certains parlementaires de la majorité présidentielle rechignent devant ce projet du chef de l’Etat. La Commission des lois dirigée par Hélène Aholou Kêkê, avocate de carrière qui reste un baron de la majorité parlementaire, montre qu’elle a une décision difficile à prendre. Jouant un rôle clé dans la préparation des lois à soumettre à la plénière, sa réticence à sortir le texte de son couvent est un signe de méfiance vis-à-vis du président de la République. On se souvient qu’elle n’avait pas permis l’étude du projet de loi portant révision de la Constitution déposé par Yayi Boni à l’Assemblée nationale. En son sein, des proches du président de la République ne sont pas prêts pour soutenir le projet s’il n’était pas considérablement modifié. En revanche, d’autres tout comme bon nombre de députés de la majorité apportent leur entière adhésion à l’initiative. Quant à l’opposition parlementaire soutenue par des collègues en phase avec le régime, ce sujet n’est pas à l’ordre du jour. Face à tout cela, une question : A quel point Yayi Boni va-t-il faire pression sur l’Assemblée nationale jusqu’à l’adoption de cette loi ? En attendant de voir les choses évoluer dans ce sens comme dans l’autre, il faut indiquer au président de la République que l’aboutissement de son projet ne règlera pas la situation. Bien au contraire, son régime se retrouverait confronté à un problème sociopolitique plus grave que celui d’aujourd’hui : cela pourrait nuire aux candidats aux différentes élections, aggraver le surpeuplement des prisons, favoriser l’abandon des dossiers pendants devant la justice, occasionner le boycott des assises. Yayi Boni va-t-il tenter d’aller jusqu’au bout et risquer de voir la situation du pays aller de mal en pis ? En tout cas, Michel Adjaka, président de l’Unamab, puissant syndicat au sein de l’appareil judiciaire a prévenu sur les risques que comporterait l’entêtement du chef de l’Etat à priver sa corporation des libertés syndicales et de grève. Faut-il le rappeler, le projet de loi en question tend à supprimer purement et simplement ces droits constitutionnels aux magistrats. Au lieu de les encadrer. Autrement dit, les intentions du roi du Palais de la Marina vont au-delà de ce que l’Assemblée est prête à accepter.

Fidèle Nanga

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