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La Nation N° 6038 du 29/7/2014

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Assemblée nationale : Les magistrats seront-ils ou pas privés du droit de grève ?
Publié le mercredi 30 juillet 2014   |  La Nation


Bénin
© Autre presse par DR
Bénin : les autorités appelées à sursoir à l`étude du projet de loi portant interdiction de droit de grève aux magistrats


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A la demande de 43 députés, l’Assemblée nationale a ouvert hier sa 4e session extraordinaire de l’année 2014. A l’occasion, ils ont entamé l’examen de la proposition de loi complétant et modifiant l’article 18 de la loi n°2001-35 du 21 février 2003 portant statut de la magistrature au Bénin. Au terme du débat général, l’étude proprement dite de la proposition de loi s’est poursuivie jusqu’au petit matin de ce mercredi 30 juillet.


Par Thibaud C. NAGNONHOU


Un quorum de 50 députés présents a favorisé hier l’ouverture de la 4e session extraordinaire de l’année 2014. Une session dont la convocation a été sollicitée le 11 juillet dernier par 43 députés pour connaître de l’examen de deux points : la proposition de loi relative à la loi portant radiodiffusion numérique en République du Bénin et l’examen de la proposition de loi sur la modification de la loi n°2001-35 du 21 février 2003 portant statut de la magistrature au Bénin. Cette dernière est connue sous le fameux nom de proposition interdisant le droit de grève aux magistrats. Après avoir reçu la demande de convocation de cette session, le président de l’Assemblée nationale, Mathurin Nago dit avoir consulté, conformément aux dispositions du Règlement intérieur et de la Constitution, le bureau et la Conférence des présidents de l’Assemblée nationale respectivement les 22 et 24 juillet derniers. Les deux organes ont retenu l’ouverture de cette session extraordinaire pour hier mardi 29 juillet pour se pencher sur ces deux dossiers. Ainsi, juste après l’ouverture de la session, le président de l’Assemblée nationale a appelé le dossier de la proposition de loi sur la modification de l’article 18 de la loi n°2001-35 du 21 février 2003 portant statut de la magistrature au Bénin.
Du contenu du rapport
Selon le rapport de la Commission des Lois, de l’Administration et des Droits de l’Homme, rapport lu par son rapporteur Grégoire Akoffodji, cette proposition de loi vise fondamentalement à mettre fin aux grèves intempestives qu’organise l’Union nationale des magistrats du Bénin depuis le 24 janvier 2012. Pour les initiateurs, les magistrats sont des fonctionnaires spéciaux et ne peuvent aller en grève de façon intempestive comme tout autre agent de l’Etat ordinaire. D’autant que ce sont eux qui garantissent le respect des libertés et de la justice. Les signataires de la proposition de lois disent vouloir, à travers leur initiative, sauver la population souvent victime des grèves intempestives des magistrats. Il s’agit de promouvoir les droits de l’homme, le droit des personnes détenues et d’assurer le droit de justice au citoyen. C’est pourquoi, ils ont décidé de corriger l’article 18 de la loi qui ne permet pas aujourd’hui d’atteindre ces trois objectifs. Le rapport de la Commission des Lois, de l’Administration et des Droits de l’Homme renseigne qu’il y a eu trois positions des députés. Il y a ceux qui soutiennent, ceux qui sont contre et un troisième camp qui souhaite la mise en place d’une commission d’information parlementaire temporelle afin d’opérer un toilettage complet de tous les textes sur les magistrats. Ce rapport lu sera attaqué par Antoine Kolawolé Idji. Membre de cette même Commission, il dit ne pas totalement se retrouver dans ce qui a été lu. «Le rapport est tout sauf celui de la Commission des Lois. Ce que je viens d’entendre est incroyable», déclare-t-il demandant une suspension pour permettre aux membres de la Commission de se revoir pour apprécier le rapport. Il sera contredit par Sacca Lafia, vice-président de la Commission des Lois et qui a présidé les travaux. Il se dit être mis à l’index maladroitement reconnaissant qu’effectivement Antoine Kolawolé Idji était présent et a participé activement aux travaux. Il trouve inutile la demande de suspension pour permettre à la commission de se retrouver à nouveau pour apprécier le rapport de la commission. Pour Karimou Chabi Sika, l’intervention de Antoine Kolawolé Idji est une pure diversion. Elle participerait à la stratégie de l’obstruction parlementaire pour empêcher la poursuite de l’examen du dossier, dit-il, invitant Mathurin Nago à rejeter cette demande de suspension. Candide Azannaï insiste au respect des textes et de la procédure parlementaire. Il fait observer que le rapport lu n’a jamais été adopté au sein de la Commission à laquelle il appartient. «On ne saurait prendre des votes d’amendements pour l’ensemble du rapport. C’est de la tricherie pure et simple», martèle Candide Azannaï qui félicite Antoine Kolawolé Idji pour son honnêteté intellectuelle. Pour Grégoire Akoffodji, rapporteur de la commission, le rapport retrace la sincérité des débats en commission. Il a martelé que le rapport a été bel et bien adopté le 11 juillet. Soumise au vote, la demande de suspension de Antoine Kolawolé Idji sera rejeté par 25 voix pour et 42 contre.
Le choc des argumentations
Le débat général sur la loi a été houleux. Il y a eu 30 députés inscrits qui se sont prononcés sur l’opportunité ou non de cette proposition de loi qui défraie la chronique depuis quelques semaines au Bénin. Deux camps se sont dégagés de ce débat général qui a duré plus de cinq heures d’horloge. Il y a ceux qui sont favorables à cette loi, essentiellement des députés de la Mouvance présidentielle. Et à leur antipode, ceux qui sont contre notamment les députés de l’Union fait la Nation, le PRD, la RB et certains députés de la Mouvance présidentielle, qui se sont insurgés contre cette proposition de loi visant à interdire le droit de grève aux magistrats. Tour à tour Nazaire Sado, Boniface Yéhouétomè, Léon Comlan Ahossi, Charlemagne Honfo, Louis Vlavonou, Ibath Sanni Glèlè, Epiphane Quenum, Emmanuel Golou, Jonas Gbénamèto, Lazare Séhouéto, Eric Houndété et Candide Azannaï se sont prononcés. Ils ont désapprouvé l’initiative de cette proposition de loi qui ne serait pas opportune. «Ce qui est en jeu, c’est l’Etat de droit. Ce qui est en jeu, c’est l’équité, la légalité et la liberté», plaide ce dernier qui soutient que celui qui s’attaque à la justice s’attaque à la morale et à la vertu. Il a invité ses collègues députés à faire attention. «En cherchant à modifier le statut des magistrats, c’est s’attaquer à l’indépendance de la justice. La grève est la conséquence de l’injustice que subissent les magistrats notamment dans les nominations. La modification de l’article 18 de cette loi est un attentat contre l’édifice démocratique du Bénin», déclare Candide Azannaï. Son collègue Nicaise Fagnon embraye et démontre que l’heure est grave. Il relève des contradictions fragrantes graves dans la proposition de loi déposée par les initiateurs de cette loi. Notamment l’interdiction qui sera faite désormais aux magistrats de participer à des délibérations politiques. Il évoque le cas de la composition de la CENA où le législateur a prévu la présence d’un magistrat. «La suppression du droit de grève aux magistrats ne résoudra aucun problème», estime le député membre de la Majoritaire parlementaire. Epiphane Quenum dit soutenir la suppression de grève aux douaniers mais non aux magistrats. Il demande plutôt de traiter la cause des grèves intempestives de ces derniers au lieu de vouloir les faire taire. Il dit ne pas être d’accord que les gens grèvent 365 jours sur 365 jours mais proteste contre la volonté de régler les problèmes coup par coup. Pour Zéphirin Kindjanhoundé, même étant de la Majorité parlementaire, sa conviction politique ne l’empêche pas de voir les choses avec objectivité. Il trouve que trois mois de grève dans le secteur judiciaire, c’est trop. Mais il estime que la solution n’est pas dans le retrait du droit de grève aux magistrats mais plutôt d’engager le dialogue avec eux. De restriction en restriction, il se demande si ce n’est pas déjà la révision lente de la Constitution béninoise qui est engagée. La même appréhension sera partagée par Valentin Aditi Houdé. A en croire ce dernier, la justice, troisième pouvoir, ne peut être juste que si elle jouit de la plénitude de ses prérogatives et de ses libertés. Il serait hasardeux de tenter de remettre en cause les pouvoirs des magistrats dont le droit de grève. Il invite ses collègues à s’abstenir de voter cette proposition de loi qui «assassine la démocratie et l’Etat de droit». La Représentation nationale a le devoir de voter des propositions de lois qui améliorent les conditions de travail et de vie des magistrats, plaide-t-il. Son collègue Lazare Séhouéto va plus loin pour dire que c’est la panne du dialogue social qui est la source des grèves. Il dit qu’il ne soutient pas les grèves perlées mais il est pour le droit des gens à manifester leur mécontentement. Comme ses autres collègues, Eric Houndété aussi fait remarquer que la grève n’est pas le mal dont souffre le Bénin. Il attaque le rapport présenté en plénière et qui serait tronqué contrairement à ce que disent Sacca Lafia et Grégoire Akoffodji respectivement vice-président et 2e rapporteur de la Commissions des Lois. Le Parlement rendrait service aux populations s’il fait diligence de voter les propositions de lois sur les réquisitions, le Partenariat public-privé et l’organisation de la filière coton, analyse Eric Houndété.
Contre-attaque de la Mouvance
Face aux réquisitions des députés non favorables à cette proposition de loi, leurs collègues d’en face pour la plupart des signataires de cette initiative notamment El Hadj Issa Azizou, Daouda Takpara, Karimou Chabi Sika, Djibril Mama Débourou, André Okounlola, Gaston Yorou, Thomas Ahinnou, Lucien Houngnibo ont pris leur contre-pied. Ce dernier menace d’assigner les magistrats qui ont affiché leurs noms dans les cours et tribunaux du Bénin comme de vils délinquants. «Le Bénin n’est pas plus démocratique que la France et le Sénégal en Afrique où les magistrats n’ont pas le droit de grève», plaide Gaston Yorou. Pour Rachidi Gbadamassi, l’auteur de la proposition de loi querellée, l’homme politique digne est celui qui est en contact avec sa base et qui fait la volonté du peuple qui l’a mandaté. Il est revenu sur les motivations de son initiative. Selon lui, le souci majeur de sa démarche se résume à la situation des grèves interminables dans les cours et tribunaux et l’image de la destination Bénin aux investisseurs qui chercheront à investir au Bénin. Il trouve que les magistrats ont franchi le rubicond en affichant les noms des signataires de cette proposition de loi dans les tribunaux, comme une épée de Damoclès qui plane sur certains députés signataires de cette loi. Il se demande là ou se trouve l’indépendance et l’impartialité de la magistrature lorsque des magistrats dansent avec des députés de l’Opposition. Il dit ne pas craindre pour sa liberté si son initiative va le conduire en prison. «Je n’ai pas peur de la prison ni de la mort tant je suis convaincu de ma démarche», soutient Rachidi Gbadamassi.

Hélène Kèkè fait revirer le débat
Se prononçant en dernier ressort sur la loi, la présidente de la Commission des Lois change le cours du débat. Hélène Kèkè Aholou sort une carte. Evoquant les articles 75.1 et 72.2 du Règlement intérieur de l’Assemblée nationale qui stipulent que : «Les propositions de lois, ainsi que les rapports des commissions peuvent toujours être retirés par leur auteur, quand bien même leur discussion est engagée. Toutefois, si un autre député reprend une proposition retirée par son auteur, la discussion continue». Au nom de cette disposition, et en sa qualité de présidente de la Commission des Lois, elle demande le retrait du rapport en examen. Cette suggestion va créer un remue-ménage dans l’hémicycle. Sacca Lafia s’insurgera contre cette suggestion pour faire remarquer que le rapport porte sa signature et celle du rapporteur qui est Grégoire Akofodji. Si on doit retirer le rapport, il revient à lui ou à Grégoire Akoffodji de retirer ce rapport et non à Hélène Kèkè Aholou qui n’est pas signataire de ce rapport. Pour Rachidi Gbadamassi, la commission des Lois n’est pas au dessus de la plénière. Il demande au président de l’Assemblée nationale de balayer du revers de la main la suggestion de Hélène Kèkè Aholou pour soumettre le texte au vote. Il dénonce le dilatoire du camp d’en face. Mama Djibril Débourou dénonce la présidente de la Commission des Lois qui aurait juré de faire feu de tout bois pour empêcher le vote de cette loi. La belle preuve serait son absence exprès lors de l’examen en commission de cette loi, obligeant le vice-président Sacca Lafia à diriger les travaux. Antoine Kolawolé Idji demandera au président de l’Assemblée nationale de respecter la procédure législative pour donner raison à la présidente de la Commission des Lois. Hélène Kèkè Aholou revient encore à la charge pour donner les raisons de son opposition à cette loi. Mais elle sera suivie par le président de l’Assemblée nationale qui a suspendu les travaux pour permettre à la Commission des Lois d’ajuster ce rapport pour aboutir à une position claire de la commission. Sur ce, la plénière a été suspendue hier pour 30mn.


T C N.



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