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La Presse du Jour N° 1888 du 17/5/2013

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Supposée tentative d’empoisonnement du Chef de l’Etat : Voici les révélations troublantes du magazine international «Jeune Afrique»
Publié le mardi 21 mai 2013   |  La Presse du Jour




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Le dossier relatif à la supposée tentative d’empoisonnement du Président de la République du Bénin révélée courant octobre 2012 par le Parquet du Tribunal de première instance de première classe de Cotonou continue de faire couler encre et salive. Après les médias béninois, l’hebdomadaire international «Jeune Afrique» s’est intéressé au rapport produit par le FBI sur les supposés médicaments qui devraient servir à donner la mort au chef de l’Etat béninois. C’est à la faveur d’une enquête réalisée par notre confrère Malika Groga-Bada et publiée dans le N°2729-2730 de «Jeune Afrique» de la période allant du 28 avril au 11 mai 2013. L’enquête est intitulée : « Bénin : Boni Yayi et l’affaire des poisons ». Bonne lecture !
Bénin : Boni Yayi et l’affaire des poisons
Persuadé d’avoir été victime d’une tentative de meurtre, commanditée par le businessman Patrice Talon, le Président a fait appel au FBI pour procéder à des analyses toxicologiques. En exclusivité, J.A. a eu accès à ce rapport aux résultats troublants.
On ne le dira jamais assez, l’affaire est digne d’un roman d’espionnage. Aujourd’hui, après bien des rebondissements, c’est à Paris que se joue un épisode déterminant de la guérilla judiciaire entamée sur les rives du lac Nokoué. Le 17 avril, les juges de la cour d’appel de Paris ont décidé de renvoyer au 22 mai-pour complément d’information- l’examen de la demande d’extradition formulée par le Bénin à l’encontre de l’homme d’affaires Patrice Talon et d’Olivier Boko, son bras droit. Tous deux sont accusés de « tentative d’assassinat » sur la personne du Président, Thomas Boni Yayi.
Dans la conduite de ses affaires – à la tête d’un florissant empire agroindustriel-, Patrice Talon, 55 ans, avait pourtant largement bénéficié de l’amitié de Boni Yayi, à qui il avait apporté son soutien financier durant ses campagnes présidentielles 2006 et 2011. Opérateur majeur de la filière coton, le businessman s’était retrouvé en situation de quasi-monopole, de la fourniture d’intrants à l’égrainage. En 2011, son entreprise, Bénin Control SA, était au cœur du Programme de vérification des importations (PVI), qui supervise le trafic du Port autonome de Cotonou. De fait, Talon était devenu le pivot de l’économie béninoise, dont les activités portuaires et le coton sont les deux poumons. Beaucoup de pouvoirs entre les mains d’un seul homme…
Aussi, après tant d’années d’amitié, la chute est-elle particulièrement rude pour ce magnat qui, selon les enquêteurs béninois, est l’instigateur d’un complot visant à empoisonner le Chef de l’Etat. Ses complices ? Ibrahim Mama Cissé, le médecin du Président, et Zoubérath Kora-Séké, sa gouvernante et nièce. Les policiers sont formels : Talon a promis à chacun d’eux 1 milliard de F Cfa (environ 1,5 millions d’euros). En échange, ils devaient substituer différents poisons aux médicaments que prend habituellement le dirigeant béninois. Mise au point dans un hôtel bruxellois, l’opération était prévue pour le 20 octobre 2012. Elle a échoué in extremis, après une imprudence de Zoubérath Kora-Séké, les messages qu’elle échangeait avec Patrice Talon ayant été interceptés par son petit ami, à en croire un ministre proche du Président.
Rocambolesque
Mais avant même que cette affaire n’éclate, Patrice Talon s’était réfugié en France, en septembre 2012, après avoir fui son pays dans des conditions rocambolesques. Car au Bénin, où rien n’allait plus entre lui et son ancien protecteur, il faisait déjà l’objet d’une demi-douzaine de procédures judiciaires. Vol qualifié, escroquerie, détournements de subventions de l’Etat dans la filière cotonnière…et même une tentative de putsch déjouée au dernier moment, et pour laquelle Johannes Dagnon, son commissaire aux comptes-et cousin-est incarcéré…Un « acharnement judiciaire » que l’intéressé explique par son refus de céder aux pressions du Chef de l’Etat. « Boni Yayi voulait que je le soutienne dans une réforme constitutionnelle qui lui aurait permis de briguer un troisième mandat, accuse-t-il. Nous en avions parlé à plusieurs reprises, mais, la dernière fois, la conversation a été plus que tendue. »
Aujourd’hui installé en région parisienne, l’homme d’affaires est sous contrôle judiciaire. Pour Cotonou, il ne fait aucun doute qu’il sera extradé. « Non seulement ses complices ont avoué, mais le rapport d’analyses toxicologiques est édifiant », assure un proche du Palais de la Marina. Afin de démontrer à quel point la menace était sérieuse, les autorités béninoises n’ont pas hésité à faire appel au FBI. Les enquêteurs de l’agence fédérale américaine se sont rendus à Cotonou fin novembre 2012 pour y récupérer les médicaments incriminés, avant de les expertiser dans leur laboratoire de Quantico, en Virginie.
Les résultats ont été transmis aux autorités béninoises le 16 avril, accompagnés d’un courrier de Michael A. Raynor, Ambassadeur des Etats-Unis à Cotonou. Ce rapport daté du 38 mars-dont J.A s’est procuré copie, et que l’Ambassade américaine se refuse de commenter-est la pièce maîtresse de l’instruction béninoise, le document sur lequel repose désormais la demande d’extradition.
Les experts n’ont pas trouvé de « produits radioactifs » destinés à « achever » le Président par asphyxie, contrairement à ce qu’avait déclaré Philippe Houndégnon, l’ancien commissaire central de Cotonou lors d’une conférence de presse mémorable, le 22 octobre dernier. Mais dans les médicaments que Thomas Boni Yayi prenait quotidiennement ont été instillés des substances toxiques et dangereuses, comme l’attestent des plaquettes de gélules rafistolées avec du scotch.
Ampoules
Le président utilise ordinairement du Lyrica (prégabaline), un antiépileptique, du Josir L.P, qui traite les inflammations de la prostate, et du Dafalgan 500, un antalgique classique. Dans plusieurs gélules des deux premiers remèdes, les scientifiques ont décelé des traces d’un laxatif, le bisacodyl. Dans le Dafalgan, ils ont découvert du psilocine (ou psilocybine), un puissant hallucinogène, dont l’usage médical est strictement encadré. Enfin, dans trois ampoules injectables retrouvées avec les médicaments incriminés, ils ont identifié un agent pouvant provoquer un blocage neuromusculaire (de l’atracurium ou cisatracuruim), un anesthésiant (de la kétamine) et un opiacé censé maximiser les effets des autres substances (le sufentanyl).
Au vu de ces résultats, l’on indique désormais dans l’entourage du Président que si ces médicaments peuvent être qualifiés de « mortifères », ils ne visaient pas à tuer. « Ils auraient entraîné des réactions incontrôlés, suffisamment étranges pour que la Cour Constitutionnelle le déclare incapable d’exercer ses fonctions et le destitue », affirme un ministre proche du Chef de l’Etat. Une « nuance » que la défense de Patrice Talon a bien l’intention d’exploiter.
« Tantôt on parle de tentative d’empoisonnement, tantôt de tentative d’assassinat, la qualification même des faits pose problème », assène le très médiatique William Bourdon, avocat de Patrice Talon. « Le dossier présenté par le Bénin est d’une approximation et d’une pauvreté incroyable, même le Procureur l’a révélé », ajoute-t-il.
Car pour la défense, rien ne dit que les aveux de Zoubérath Kora-Séké ou du Dr Ibrahim Mama Cissé n’ont pas été obtenus sous la contrainte. Dans les procès-verbaux de police dont J.A a eu connaissance, le médecin affirme que Talon lui a ordonné d’administrer les médicaments au Chef de l’Etat, et qu’il avait menacé de faire exploser en vol l’avion présidentiel. Mais selon une source proche du dossier, le prévenu n’aurait pas du tout tenu le même discours en présence de son avocat.
Instrumentalisation
Pour l’heure, la défense parisienne de Patrice Talon dénonce un règlement de comptes politiques et l’instrumentalisation, à cette fin, de la justice béninoise, rappelant au passage les relations difficiles que cette institution entretient avec l’ONG Amnesty International.
Le juge d’instruction béninois doit fournir à la cour d’appel de Paris, avant le 22 mai, un maximum de pièces justifiant sa requête contre Talon et Boko. Et Me Christian Charrière-Bournazel, avocat-conseil de Thomas Boni Yayi, qui, même s’il ne peut pas intervenir dans la procédure, la surveille comme du lait sur le feu, tient à ce que les choses soient claires : « Extradition ne veut pas dire condamnation. La justice française examinera les charges et décidera en conscience ».
Mais même si la justice donne son accord, une extradition est éminemment politique. Or, de mémoire d’avocat, jamais personne n’a été extradé de la France vers le Bénin. Dans un courrier officiel joint au dossier d’instruction, Cotonou assure ne plus appliquer la peine de mort, mais la loi abolissant cette sentence-votée en 2011-n’a toujours pas été promulguée. Et le Bénin rappelle qu’il fait partie de la liste des seize « pays sûrs » recensés par l’Office français de protection des étrangers et apatrides (Ofpra). Il est vrai que le dernier rapport de l’organisation sur le pays aurait besoin d’être actualisé. Il date de 2005, soit un an avant l’arrivée au pouvoir de

Thomas Boni Yayi.

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