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La Nation N° 6056 du 26/8/2014

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Contre-performances scolaires dans le Borgou-Alibori : Diagnostic d’un mal aux racines profondes
Publié le mercredi 27 aout 2014   |  La Nation


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© L`événement Précis
Grossesses en milieu scolaire: Quand le tabou familial livre l’avenir des filles à la rue


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Résultats catastrophiques aux différents examens, déperdition scolaire et grossesses en milieu scolaire en masse, les difficultés du système éducatif dans les départements du Borgou et de l’Alibori restent préoccupantes. Les causes lointaines et immédiates des contre-performances qui s’enchaînent au fil des ans, sont nombreuses..

Les résultats peu reluisants engrangés depuis plusieurs années par le Borgou-Alibori lors des examens du Brevet d’études du premier cycle et du Baccalauréat sont très faibles, en dépit des nombreuses séances de sensibilisation et autres actions initiées par les associations et les acteurs politiques pour inverser la tendance. Le mal persiste et fait couler beaucoup d’encre et de salive. La question a focalisé, la semaine dernière, l’attention des membres de la Conférence administrative départementale qui s’y sont penchés à Parakou, à travers une restitution des résultats par les directeurs départementaux en charge des Enseignements primaire et secondaire. Il ressort de leurs exposés que le Borgou-Alibori a occupé le dernier rang à tous les examens de fin d’année : 84,15% de réussite au CEP contre une moyenne de 89,56% au plan national, 35,90% au BEPC contre 47,57% pour l’ensemble du pays, 17,71% au BAC contre 24% au plan national. Et de tous ces résultats, le cas de la commune de Pèrèrè reste plus préoccupant avec notamment 47,45 % de réussite au CEP (31,91% pour le complexe scolaire de Tissérou par exemple).Dans le même temps, le phénomène des grossesses en milieu scolaire prend de l’ampleur dans les communes. Cette année encore, plus de 150 jeunes filles élèves du Borgou-Alibori ont abandonné les cours pour cette raison, signale la chargée de projet à l’ONG l’Association Jeunesse Initiatives positives (AJIP–Bénin), Rolande Aïzannon. Au premier trimestre de l’année 2012-2013, il a été enregistré plus de 195 cas de grossesse déclarés dans seulement 48 établissements sur les 106 que comptent le Borgou et l’Alibori. N’dali, Sinendé, Bembèrèkè, Tchaourou sont les communes les plus touchées par le fléau avec même plusieurs cas d’écolières de CM1 et CM2. Et ce n’est qu’un des facteurs qui expliquent la tendance baissière des taux de réussite aux différents examens.
Causes des échecs massifs
Les responsabilités en ce qui concerne les faibles taux de réussite aux examens scolaires sont partagées et engagent non seulement les apprenants et les enseignants, les syndicats mais aussi les parents, les autorités locales et nationales. Pour le directeur départemental des Enseignements maternel et primaire du Borgou et de l’Alibori, Fidèle Barè Worou, la première cause des contre-performances scolaires, c’est la grève observée pendant plus de quatre mois par les enseignants, surtout dans les circonscriptions scolaires de Parakou I et II et de N’dali. Pourtant, les résultats de ces communes ne sont pas les plus catastrophiques des deux départements ! A en croire le DDEMP/BA, la concentration des écoles privées en milieu urbain, c’est l’arbre qui cache la forêt. Il évoque aussi la pénurie d’enseignants aussi bien en nombre qu’en qualité et leur concentration dans les zones urbaines au détriment des zones dites enclavées. «Tout le monde veut rester là où il y a l’électricité et les réseaux GSM. Ce qui explique aussi le phénomène des enseignants résidant hors de leur zone de travail», laisse-t-il entendre. «Vingt-neuf écoles primaires dans le Borgou-Alibori sont dirigées par des enseignants qui ne sont pas titulaires du Certificat d’aptitude pédagogique (CAP)», renseigne-t-il. Le déficit en personnel d’encadrement qui plombe le contrôle et le suivi des enseignants, la difficulté pour les parents de suivre les enfants du fait de la grande différence de méthodologie d’apprentissage des nouveaux programmes dits d’approche par compétence, l’inconscience professionnelle de certains enseignants qui brillent par l’absentéisme répété, les retards non justifiés aux cours, sont autant de raisons qui expliquent la déchéance scolaire, à en croire Fidèle Barè Worou. A tout cela, s’ajoutent le phénomène des enseignants éthyliques, le jumelage forcé des classes de différents niveaux faute d’infrastructures et d’enseignants.
Des raisons valables pour le secondaire
Au-delà des grèves de plus en plus perlées au fil des années scolaires, de la politisation et de la syndicalisation à outrance du système éducatif, le directeur départemental de l’Enseignement secondaire Borgou-Alibori (DDESFTPRIJ/BA), Adamou Sanni, voit la non organisation des examens blancs pour le public comme l’une des causes immédiates des résultats catastrophiques aux examens dans le Borgou-Alibori. Il se désole aussi que l’Etat n’ait pas su gérer très tôt la crise, jouant ainsi au pourrissement de la situation. Mais d’autres causes certes lointaines mais pertinentes justifient ce que déplorent aujourd’hui écoliers, élèves, parents, enseignants, politiques et autres acteurs de l’éducation nationale. Pour le DDESFTPRIJ/ BA, le niveau des élèves qui quittent la classe du CM2 pour la sixième devient de plus en plus faible. «Certains élèves sont incapables de faire une phrase complète», s’indigne Adamou Sanni. Le manque de rigueur dans la préparation des cours, la recherche de gain facile des enseignants qui courent d’établissement en établissement à la recherche des heures de vacation, la non qualification de bon nombre d’enseignants qui viennent au métier par nécessité, le recours massif aux enseignants vacataires sans aucune notion pédagogique, l’insuffisance de moyens pour le suivi des enseignants, le quota horaire non atteint, sont des facteurs des contre-performances scolaires enregistrées aujourd’hui. «L’Etat crée les collèges mais le nombre d’enseignants qu’il faut, les infrastructures et les autres mesures d’accompagnement ne suivent pas », signale Adamou Sanni. Du coup, les censeurs éprouvent d’énormes difficultés pour élaborer les emplois du temps et les responsables des lycées et collèges sont obligés de jongler avec les effectifs pléthoriques, le système des classes volantes au gré des intempéries, diagnostique-t-il. A titre d’exemple, pour l’année scolaire qui vient de s’achever, l’on a compté 92 groupes pédagogiques pour seulement 53 salles de classe disponibles au CEG Hubert Maga de Parakou. C’est dire que la capacité des infrastructures d’accueil et de mobiliers au niveau primaire comme du secondaire, se trouve dépassée, en dépit de nouvelles salles de classe construites par endroits.De plus, pour des collèges de Kalalé, Sinendé, Nikki, N’dali, Parakou, Bembèrèkè, pour 42 enseignants agents permanents de l’Etat dénombrés, on compte 562 agents contractuels de l’Etat et 1772 vacataires dont de simples bacheliers qui ne jouissent d’aucune formation professionnelle. Force est de constater que des étudiants sortis des sciences économiques enseignent les mathématiques, des diplômés des sciences juridiques dispensent des cours de français ou de philosophie, etc. La paresse des élèves qui s’adonnent plutôt aux vidéoclubs, aux parties de soirée dansante "Kukumba", les parents qui ont démissionné en ce qui concerne le suivi des enfants justifient également les échecs massifs et la baisse drastique du niveau des apprenants.
Parer au plus pressé
Vu la gravité de la situation, particulièrement au niveau du Borgou-Alibori, le DDEMP-BA, Fidèle Barè Worou, suggère la mise sur pied d’un comité de crise pour analyser la situation de fond en comble au niveau des deux départements et proposer des approches de solutions. Pour sa part, le DDESFTPRIJ-BA, Adamou Sanni, pense plutôt qu’il faut une table ronde départementale qui doit réunir tous les acteurs du système : le préfet, les maires, les responsables du système éducatif, les associations de parents d’élèves, les syndicats des enseignants. Mais en attendant, il urge d’impliquer davantage les élus locaux dans la gestion du système éducatif ; eux qui, préoccupés par les questions de collecte des taxes, du foncier, des pistes rurales et autres problèmes des communes, s’intéressent très peu à la qualité de l’éducation dispensée dans leur contrée. Pour inverser la tendance actuelle, il urge même que les collectivités locales se substituent à l’Etat qui ne peut plus faire face aux besoins, en mobilisant les ressources nécessaires, en faisant former les enseignants et en proposant des initiatives d’incitation à l’excellence à travers des bourses d’études par exemple au niveau local. Et quid des confessions religieuses dont les écoles pointent souvent en tête de peloton lors des résultats de fin d’année ! Par ailleurs, il s’avère nécessaire de procéder à un suivi rigoureux des enfants dans les maisons, une sensibilisation des enseignants sur leur rôle dans la formation de la relève, la formation des enseignants non qualifiés dans les écoles normales et l’encadrement et le suivi des enseignants dans la préparation et la dispensation des cours. Aussi, l’ajournement des candidats au Bac doit-il être géré avec rigueur pour que ceux-ci ne gonflent pas inutilement les rangs en changeant de séries à tour de bras pour les prochains examens. Le retour au probatoire permettrait de tamiser les candidats à présenter au bac par exemple.



Par Claude Urbain PLAGBETO A/R Borgou-Alibori

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