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Interview exclusive du président du Cos-Lépi: Sacca Lafia fait des révélations sur la correction de la Lépi
Publié le lundi 20 octobre 2014   |  L`événement Précis


Sacca
© Autre presse par DR
Sacca Lafia, Président du Conseil d`Orientation et de Supervision des operations de correction de la Lépi.


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our la première fois depuis qu’il dirige cette institution, le président du Conseil d’orientation et de supervision de la Lépi (Cos-Lépi), l’honorable Sacca Lafia a accepté d’accorder une interview à un journal. Nous l’avons rencontré samedi dans la matinée dans son bureau, au quartier Agblangandan, avec la même sérénité qu’on lui connait. Il est venu travailler ce jour non ouvrable comme à son habitude et y restera jusqu’à 18 heures. Sacca Lafia a livré le fond de son cœur sur la correction de la Lépi et tout ce qui s’y passe. C’est une tâche bien difficile et assez sensible aussi. Mais, il affirme l’accomplir avec bonheur tout comme les autres membres du Cos-Lépi. Bientôt, l’étape de l’enregistrement complémentaire. Et il faudra à nouveau du souffle financier, à hauteur de 2 milliards de FCFA pour assurer son organisation et sa réussite. La correction de la Lépi et ses péripéties incessantes constituent le menu principal de cette interview exclusive dont Sacca Lafia accorde la primeur à votre journal, « L’Evènement Précis ».



L’Evénement Précis : Monsieur le président, dites-nous exactement là où vous en êtes aujourd’hui avec la correction de la Lépi ?

Sacca Lafia : Je vous remercie d’abord. Il faut avouer que c’est pour la première fois que j’accorde une interview à un journal dans le cadre des activités de la Lépi. Mais, c’est avec plaisir que je le fais puisque les paroles s’envolent, et les écrits restent. C’est donc l’occasion pour vos lecteurs d’avoir sur la main et devant leurs yeux, la réalité de ce qui se passe au niveau du Cos-Lépi. Où est-ce que nous en sommes ? Je vais répondre de façon claire. J’ai un chronogramme que je suis de près. Je viens de terminer, entre aujourd’hui et demain, le traitement des données récoltées au mois d’avril dernier dans le cadre de l’audit participatif. Je l’ai déjà expliqué plusieurs fois. Ces données ont été regroupées dans la mémoire d’un ordinateur. Et comme ces derniers jours, on est en train de terminer, on peut séparer déjà celles qui sont issues de la Lépi de 2010 de la Lépi de 2014. C’est environ, 3.350. 000 personnes. Et de tous ceux qui ont participé à l’audit participatif, on a pu identifier ceux qui n’avaient pas fait la biométrie et qui sont environ 700 000 personnes. Il y a aussi environ 500 000 autres qu’on ne sait où classer, parce que leurs informations sont incomplètes. C’est déjà donc une avancée importante pour la Lépi. Ceux qui sont, par exemple, dans la base de données de 2010, aujourd’hui, on peut faire leur liste. Et la semaine prochaine, on peut voter avec celle-là. Mais cette liste serait incomplète parce qu’il y aurait des adultes dans cette second catégorie qui n’auraient pas pu prendre part aux élections.



Vous disiez tantôt, Lépi 2010, Lépi 2014 ; clarifiez un peu, est-ce à dire qu’on a deux Lépi ?

Oui, je vais parler des résultats des Rena Lépi de 2010 qui étaient arrêtés en son temps puisqu’a un moment donné, en 2010, ceux qui avaient entre 8 ans et 18 ans étaient dans une base de données. Et nous autres, pour l’opération 2014, on s’est remis à reprendre un peu le recensement des populations, on a aussi eu des données. Et on s’est mis à comparer les deux pour en sortir une seule liste définitive. Il n’y a donc pas deux Lépi. Les données de 2010 sont stockées quelque part dans la mémoire d’un ordinateur A, celles issues de l’audit participatif d’avril dernier sont aussi stockées dans la mémoire d’un ordinateur B. Et on met les deux ordinateurs en face pour voir ce qu’on peut aller récupérer sur les données de l’ordinateur A. Voilà donc la différence.

Avant de continuer l’interview, vous voudriez bien nous expliquer une nouvelle fois encore ce qu’on appelle Lépi ?

Comme on la définit, la Lépi est une Liste électorale permanente informatisée. Cela est nouveau dans notre pays, qu’on puisse avoir dans la mémoire d’un ordinateur, le nom, prénom, la filiation, le sexe, l’âge des citoyens. Donc, en 2009, 2010, notre Gouvernement s’est donné cette ambition, et les moyens, aidé de la communauté internationale pour la constituer. Dans les pays plus organisés que nous, les gens parlent de l’état civil. Dans ces pays, lorsqu’un enfant naît, on a déjà son nom et son prénom et on le classe dans un ordinateur. Et il ne le quitte jamais, que pour aller au cimetière. Mais dans nos pays africains, cela n’existe pas. Et c’est heureux que, pour la première fois, un Gouvernement s’est donné pour ambition de dire qu’il veut avoir des données sur ses citoyens. C’est donc très développeur, parce que le développement se fait avec des hommes. Il est donc important d’archiver toutes les données des populations, même jusqu’aux photos et aux données biométriques. C’est une première dans notre pays. Et cela est normal que ça crée des polémiques. Vous savez, nous sommes des générations différentes. Ceux qui sont nés avec l’ordinateur savent que c’est possible. Mais ceux qui sont nés bien avant l’ordinateur et qui ne s’en servent pas se posent toujours des questions, à savoir, comment on peut mettre 6 millions 500.OOO noms avec l’affiliation, la profession, même les photos dans une petite machine, bien moins grande qu’une cuisinière. C’est donc très difficile de le comprendre par certains, mais ce n’est pas la peine qu’on s’attarde sur cela. La science actuelle permet beaucoup de choses. Si des hommes se sont rendus sur la lune, il y a cent ans, l’on ne pouvait pas imaginer cela. Si aujourd’hui on peut rentrer dans une machine volante, et à l’intervalle de 6 heures, on fait 6000 km, il y a deux cent ans, ce n’était pas imaginable. Le monde évolue donc. On doit l’accepter et continuer, en évitant de perdre le temps sur ce qui nous parait magique. Il n’y a plus de magie. Tout est réel aujourd’hui.

Mais, beaucoup de gens continuent de croire que la Lépi n’existe pas, malgré toutes les explications que vous donnez, simplement parce certaines dispositions de la loi, comme sa publication sur l’internet et dans le journal officiel n’ont pas été respectées à ce jour ?

Quand on traite cette question de façon philosophique, on peut dire que la Lépi n’existe pas. Si on la traite également de façon légale, on peut aussi dire qu’elle n’existe pas parce qu’on n’a pas obéi à toutes les dispositions de la loi. Mais, maintenant, de façon matérielle et réelle, la Lépi existe, parce qu’elle a servi à des élections. Il reste qu’elle peut ne pas avoir la qualité qu’on a souhaitée et qui est décrite dans la Loi. Mais, une liste existe. Et d’aucuns diront que c’est la Lépi, parce qu’ils pensent que si on l’a décrite d’une certaine manière et qu’on a atteint 80% de ce qu’on souhaite, cela est déjà satisfaisant. De toutes les façons, les uns et les autres ont raison. Je dois quand même rappeler que quand on établissait la loi devant régir la Lépi, il n’y avait pas la CNIL (Commission nationale de l’informatique et des libertés) qui a la charge de protéger les données personnelles. Cette CNIL est née après, mais a dit qu’elle n’est pas partie prenante de la publication de la liste dès le départ et donc qu’elle ne peut pas autoriser cette publication. Or, dans un pays de droit, on doit respecter les institutions. Mais, il y a aussi un autre facteur qu’il ne faut pas négliger pour le cas de la publication de la Lépi dans le journal officiel. La question est de savoir si cela est possible et pragmatique. J’ai parlé tout à l’heure d’environ 3.500.000 qui sont partis aux élections sous la Lépi. Si par page, il y a cent personnes, il faudra diviser 3.500.000 par cent, cela fait environ 36.000 pages. Vous imaginez ce que cela fait. Même le dictionnaire Larousse ne dépasse pas 2000 pages. Dans quel journal officiel peut-on publier autant de pages et quel intérêt cela apporte réellement au développement d’un pays. Ceux qui le réclament vont lire les deux ou trois premières pages et abandonner. J’ajoute aussi que ce n’est pas en un seul exemplaire que vous allez publier mais au moins 100. Vous voyez ce que cela va prendre comme papiers, encre, etc. C’est vrai que la loi l’a dit, mais on peut la reprendre pour être proche de la réalité.

Mais M. le président, c’est quand même difficile de croire à quelque chose qu’on ne peut voir et qu’on ne peut pas toucher du doigt ?

On s’en est pourtant servi. Est-ce qu’on touche du doigt l’air ou le vent ? Mais, va-t-on dire qu’ils n’existent pas ? Donc, ce n’est pas parce qu’on ne le touche pas du doigt qu’on dira qu’elle n’existe pas. Arrêtons donc cela.



Quelles sont les difficultés majeures que vous rencontrez depuis que vous dirigez le Cos-Lépi ?

Je crois qu’il n’y a personne qui puisse imaginer qu’on peut faire ce travail-là sans difficultés. On les a de plusieurs ordres. La première difficulté est d’ordre matériel. On a hérité des équipements de la Lépi de 2010 qui sont un peu usés aujourd’hui. Et on n’a pas pu les renouveler. On a aussi des difficultés d’ordre humain et politique, aussi parce que le Cos-Lépi est constitué des hommes politiques de toutes les tendances, et il faut pouvoir les concilier. Nous avons aussi des difficultés d’ordre institutionnel. C’est un travail qu’on fait, certes, pour l’intérêt de la nation, mais c’est l’Assemblée nationale qui est totalement représentée. L’exécutif n’est pas là, cela ne peut donc pas manquer de créer quelques frictions qui sont d’ailleurs humaines. Il y a également et surtout des difficultés d’ordre financier. La première Lépi a coûté près de 40 milliards, la moitié financée par le budget national et l’autre par les partenaires au développement et qui, semble-t-il, ont été mal remerciés. Cette fois-ci, la Lépi reprise est exclusivement financée par le budget national. Vous imaginez donc ce que cela pouvait être pour sortir 10 milliards ou 11 milliards nécessaires. Ce n’est pas facile pour un Gouvernement dans un pays africain comme le nôtre. Il y a les formalités à respecter parce que c’est un budget national et il faut respecter le code des marchés publics. Autre difficulté d’ordre humain, il faut savoir que c’est un grand nombre de gens que nous utilisons, environ 20.000 à 30.000 agents déployés sur l’ensemble du territoire national, la seule garantie que nous avons donc est le diplôme. Parfois certains reviennent avec des résultats en deçà de ce que vous attendez et il faut encadrer tout cela. Autant de paramètres qui jouent dans la célérité du travail que nous menons. Et imaginez-vous que cette liste-là sorte et que votre nom n’y figure pas, ce que cela peut faire comme effet. Si c’est un simple citoyen, il peut ne pas en faire une grande histoire, mais si c’est un candidat, alors cela devient une histoire, et il pourrait dire que c’est un coup politique qu’on lui a fait. C’est donc un travail très subtil.

Monsieur le président, dites-nous exactement aujourd’hui, combien avez-vous déjà reçu du Gouvernement en matière de fonds ?

Écrivez cela en gras et en gros. A la date d’aujourd’hui, on a reçu en tout et pour tout 9 milliards 11 millions du Gouvernement.



Vous attendiez combien ?

Notre tout premier budget était de 13 milliards 300 et quelques millions. Et on pensait qu’on doit pouvoir finir en décembre 2013. Le Gouvernement nous a demandé d’élaguer certaines dépenses de ce premier budget. On lui a finalement proposé un budget de 9 milliards 800 millions. Quand on est arrivé en décembre 2013, on a vu qu’on n’avait pas fini. C’est alors qu’on a introduit un nouveau budget de 4 milliards et quelques… Et nous avions dit, voilà ce qu’il nous faut pour fonctionner en 2014. Mais, j’avoue qu’aucun de ces quatre documents n’a jamais été adopté ni rejeté de façon officielle. C’est donc notre difficulté. Aujourd’hui, nous avons fait des simulations et nous avons constaté que nous avons encore besoin d’environ 8 milliards, si non plus. Ceci pour poursuivre le travail jusqu’au bout, imprimer les cartes et sécuriser les données. Et c’est ce dernier volet qui nous prend assez d’argent. J’avoue, qu’aujourd’hui, la sécurité informatique n’est pas totalement assurée. Et nous n’avons même pas encore abordé les cas des Béninois de l’extérieur. Donc, tout cela demande des ressources complémentaires que nous attendons.

Donc, environ 17 à 18 milliards au total pour boucler votre budget ?

Oui, pour finir totalement, il faut attendre 17 à 18 milliards. Toutefois, on peut faire moins.

L’établissement de la première Lépi a coûté cher. Sa correction semble également coûter cher à l’Etat. Ce qui a récemment amené le président de la république à dénoncer la cherté des élections au Bénin. Etes-vous du même avis ?

Cher ou pas, c’est toujours relatif. Tout est en faveur du produit que l’on veut obtenir. 18 millions de francs Cfa peuvent vous paraître cher si vous voulez acheter une petite voiture. 18 millions peuvent aussi ne pas représenter une grosse somme pouvant vous permettre d’acquérir un véhicule haut de gamme, dernier cri. Si depuis 50 ans, un travail qu’on devrait faire au jour le jour pour établir un état civil, il faut voir toutes les sommes d’argent qu’on y aurait englouties pour payer les fonctionnaires, imprimer les documents et mener les autres activités connexes pour qu’on ait de façon exhaustive les données de 6.500.000 personnes. Mais on ne l’a pas fait. Et si on décide de le faire en 24 mois, cela a un coût. Pour qu’on dise que c’est cher, il faut qu’on voit aussi si dans le peu qu’on présente quelles sont les dépenses abusives. Si on n’a pas abusé quelque part, si on n’a pas acheté des objets superflus, on ne peut dire que cela est cher. Ensuite, cela dépend de la qualité du produit et l’usage qu’on veut en faire. Si on doit faire la Lépi rien que pour les élections, on verrait qu’elle coûte cher. Mais, si on voit l’exploitation et l’opportunité de gestion qu’on peut en tirer, on va constater que cela est vraiment moins cher. Ce que nous faisons maintenant va nous permettre de faire au moins 6 élections. Et si à chacune de ces élections, on doit faire une liste, on dépenserait encore plus d’argent, car il n’y a aucune liste qui coûte moins de 3 milliards. Or, on pourrait utiliser les résultats du travail que nous faisons pour au moins 20 ans.



Vous portez, aujourd’hui, une lourde responsabilité dans l’organisation des élections prochaines dont la tenue effective suscite beaucoup de polémiques, lorsqu’on sait qu’on ne peut pas les organiser sans la Lépi ?

On peut organiser les élections sans la Lépi, mais elles ne peuvent pas avoir lieu sans une liste fiable. Leur organisation appartient d’ailleurs à la Cena.



Mais la Cena a besoin d’une liste que vous devriez mettre à sa disposition ?

Même à une semaine avant les élections, la liste peut être disponible. Nous autres, avons la charge de mettre à la disposition de la Cena des données. Aujourd’hui, on peut dire, à la Cena, qu’il y a un tel nombre d’électeurs, un tel nombre de centres de votes, tel nombre d’urnes que vous devez avoir et voilà les coordonnées de chaque bureau où vous désirez vous rendre. C’est cela notre rôle, et nous pensons pouvoir le remplir à bonne date.



Les gens ne manquent pas non plus de critiquer l’organisation interne du Cos-Lépi, dénonçant surtout le fait qu’il y ait aujourd’hui deux présidences à sa tête, celle que vous assumez et celle de votre vice-président qui est d’un autre bord politique. Toute chose qui ne favorise pas la conduite harmonieuse des travaux ?

De loin, c’est une fausse impression que les gens ont. Je peux vous avouer que depuis qu’on est revenu de l’audit participatif, nous membres de Cos-Lépi, on n’a pas d’interventions particulières, si on a quelque chose à faire, c’est d’organiser les gens et de les aider à avancer. Ce sont des techniciens et ils se chargent de faire l’essentiel. C’est vrai qu’il peut arriver qu’on ait des points de vue différents. Mais, ce n’est pas forcement entre camps de la mouvance et de l’opposition. C’est généralement entre des individus qui ont des approches et des perceptions différentes. Et je ne pense pas que c’est parce que nous venons de différents bords politiques que quelque chose se bloque. Cela a plutôt besoin d’avoir des analyses objectives sur ce qu’on fait et d’améliorer le travail.



La prochaine étape, à savoir, l’enregistrement complémentaire est prévu pour démarrer le 03 novembre. Cette date ne sera-t-elle pas à nouveau reportée parce que vous ne seriez pas prêt en son temps ?

C’est vrai que nous sommes aujourd’hui à environ deux semaines de cette date-là et je suis encore optimiste, parce que le chronogramme que j’ai établi depuis le 06 octobre est en train d’être exécuté à ce jour. Nous avons donc espoir. Si dans les deux semaines qui viennent, je parviens à mettre en œuvre les tâches restantes, à savoir, le chargement des kits, la production des PDF, l’impression de la liste intégrale des 6.500.000 citoyens concernés, etc, rien ne nous empêchera de faire l’enregistrement complémentaire, mais également si on a des ressources complémentaires parce que notre compte est vide actuellement.

Mais, M. le président, vous avez eu récemment 2 milliards. Dites-nous à quoi ils ont servi ?

Vous savez, c’est maintenant qu’on est en train de payer les agents qui nous ont aidé à faire l’audit participatif en avril, ainsi que les mass médias, les maires, les conseillers qui nous ont aidé à mobiliser les populations. Il y a aussi d’autres charges, comme les frais d’électricité, d’impressions et autres. Ensuite, il faut aussi avoir le cœur net. Le Gouvernement a envoyé une inspection ici au Cos-Lépi qui y a séjourné pendant trois semaines, et je ne pense pas que cette inspection ait remarqué des irrégularités dans le fonctionnement du Cos-Lépi et dans l’utilisation des fonds qui sont mis à notre disposition. Cela doit pouvoir donc tranquilliser les uns et les autres. Donc, quand on demande des ressources, on doit pouvoir nous les donner.



Donc, selon ce que vous venez de dire, les 2 milliards sont déjà consommés et la caisse de la Lépi est redevenue vide ?

Je n’ai pas sous la main les derniers chiffres. Je sais qu’on a encore quelques reliquats, parce qu’il y a des fournisseurs qu’on n’a pas encore fini de régler. Mais, je sais qu’il nous faudra encore des ressources pour pouvoir retourner sur le terrain.



Par rapport à l’enregistrement complémentaire, il vous faudra encore combien ?

Pour faire l’enregistrement, on a besoin d’imprimer en trois exemplaires 6.500.000 noms à raison de 20 noms par page. Calculez donc le nombre de pages et multiplier par 4. On a aussi besoin de transporter des groupes électrogènes, des kits de Cotonou jusqu’à Karimama, par exemple, qui est à près de 950 km de Cotonou, ainsi que dans tous les villages du Bénin. On a aussi besoin, pour la même opération, de plus de 15.000 jeunes gens, si vous leur payez 2000 F par jour, cela fait déjà 30 millions par jour, pour deux semaines. Il faut aussi ramener tout ce matériel à Cotonou. Donc, si vous appuyez sur votre calculette, vous vous rendrez compte qu’il nous faudra deux à deux milliards et demi pour assurer cette opération.



La balle est donc à nouveau dans le camp du Gouvernement ?

Oui, on va commencer à le dire encore. La balle sera dans le camp du Gouvernement pour nous trouver les ressources.



Et s’il n’arrivait pas à satisfaire à temps cette doléance ?

Répondez vous-même à la question.



La Lépi version corrigée va donc sortir si tout se passe bien, le 18 décembre 2014, comme vous l’avez promis. Vous y croyez toujours ?

Oui, elle va sortir dans la deuxième semaine du mois de décembre, si vraiment tout se passe bien tel que nous l’avons programmé.



Quelle sera l’étape qui suivra l’enregistrement complémentaire ?

Si on revient, on doit encore traiter. Vous imaginez qu’on doit aller, à nouveau, dans chacun des 5000 villages avec un ordinateur, prendre la photo des gens, et des renseignements. On a près de 2500 ordinateurs apprêtés pour l’opération, et il faut pouvoir mettre toutes les données en un seul endroit. Et c’est après cela qu’il faut imprimer la liste électorale définitive.



La correction de la Lépi est aujourd’hui presque conduite par des hommes politiques au grand dam des autres acteurs, dont les organisations de la société civile, qui dénoncent d’ailleurs leur exclusion d’un instrument national si important dans la vie du Bénin ?

De mon point de vue personnel, la société civile devait rester comme un recours, et au moment où les politiciens ne s’entendent pas, qu’elle puisse intervenir. Si elle est actrice dès le départ, elle ne pourra plus intervenir plus tard. Ensuite, le travail de la correction de la Lépi est un travail plus technique que politique et social. Mais les politiques veulent s’assurer que cela se fait dans la légalité et dans la transparence, parce qu’ils sont les principaux utilisateurs du produit qui va sortir du travail des techniciens. Mais, en fait qu’elle soit faite par la société civile ou par les politiques, le résultat sera le même. Même si c’est la société civile qui supervise la correction, ils ne vont pas trouver 15 millions de citoyens, ni 4 millions, c’est toujours 6.500.000. L’INSAE a également eu à faire le recensement et nos chiffres sont très proches des leurs. Ensuite, je veux que vous compreniez que, nous, les politiques faisons de gros investissements pendant les élections, jusqu’à 1 milliard. Et quelqu’un qui sort une telle somme doit s’assurer que l’instrument qui permet de les juger soit le plus objectif possible. Comprenez-nous donc. Que la société civile nous attende et veille à ce que nous ne glissions pas dans la violence.

Les techniciens font le gros du travail parce que c’est leur domaine de compétence. Mais quelles sont les garanties que vous avez au plan technique pour qu’on puisse dire que c’est vraiment un travail crédible qu’ils abattent ?

D’abord, il faut savoir que les techniciens ont été recrutés pour leurs compétences et non pour leurs convictions politiques. En technique, on ne ment pas, et ils sont d’horizons divers. Il y a donc la possibilité de les contredire. Et ce qu’on fait est matériel. Si on va dans un village et on affiche la liste. Tous ceux qui sont susceptibles d’être présents figurent sur la liste, le problème est réglé. Si personne n’a pu dire dans les 5000 villages qu’il a été exclu des listes parce qu’il habite telle région, à cause de ses convictions politiques ou religieuses, on peut donc s’en contenter. Ce n’est pas une fin en soi. C’est de donner la possibilité à chacun, conformément à la loi, de pouvoir aller voter. Et chez nous, les élections ne sont pas obligatoires. Quelqu’un peut rester chez lui durant toutes les phases de la correction de la Lépi. Il n’est fait obligation à personne d’aller voter.



Le Centre national de traitement, votre maison fétiche si on peut ainsi dire, où les données de la Lépi sont domiciliées dans un serveur, est-il bien gardé aujourd’hui ?

J’en ai parlé tout à l’heure quand j’évoquais la question de la sécurisation. Ce centre n’avait pas un siège. Il était auparavant logé au niveau du Centre international de conférences avant d’être ramené dans l’un des locaux du Cos-Lépi à Agblangandan. J’avoue, en tout cas, qu’il y a encore des investissements à faire pour pouvoir le sécuriser. Il y a une sécurité du point de vue informatique, empêchant n’importe qui d’avoir accès aux données. C’est un logiciel à installer pour contrôler les mouvements de tous ceux qui y ont accès. Il nous faut également de l’argent pour l’acquérir. Il y a également la sécurité à mettre en place pour protéger les lieux. Des militaires nous aident pour l’instant, mais cela ne suffit pas entièrement, parce que ce sont des hommes, et il peut y avoir des complicités, d’où d’autres options à faire comme les serrures électroniques ou magnétiques. Aujourd’hui, nous nous munissons d’un minimum de sécurité pour que les données ne disparaissent pas. Mais à la fin des travaux, on prendra les mesures qu’il faut.



De votre regard de politicien et aussi de citoyen, lorsque la Lépi sera livrée, vous êtes sûr que cela suffit pour que toutes les élections qui s’annoncent se tiennent convenablement ? Pensez-vous que ces élections auront-elles lieu ?

En politique, ce n’est pas une question de croyance comme en religion. C’est un jeu et un jeu a ses règles. Ceux qui sont à la tête des institutions sont conscients de leur responsabilité et savent qu’il faut organiser les élections en respectant la loi. Le seul facteur limitant aujourd’hui est qu’il y a une liste. Et nous travaillons ardemment pour qu’elle sorte. Et moi je pense que quand elle sortira, on doit pouvoir faire confiance aux autres pour qu’ils jouent leur partition jusqu’au bout. Je demande au peuple béninois d’être rassuré, d’être tranquille. Nous sommes au Cos-Lépi en train de faire un travail de qualité. Il sera exhaustif, impartial et transparent. La liste qui doit sortir devrait pouvoir permettre de faire des élections qui rassurent les uns et les autres. Le reste ne dépendra pas de nous, mais on souhaiterait que le Gouvernement nous accompagne à temps et à bonne date. Je demande au peuple béninois de faire confiance à nous qui sommes-là. On a été sélectionné pour le servir et on le fait avec foi, détermination et conviction que ce pays doit avancer et que les citoyens doivent être mieux épanouis pour que le Bénin continue de grandir. Nous sommes prêts à faire tous les sacrifices qu’il faut pour qu’on aboutisse à ce résultat.


Entretien réalisé par Christian TCHANOU

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