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La Presse du Jour N° 1910 du 18/6/2013

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Polémique autour de la croissance économique du Bénin en 2012 : Pourquoi Abdikarim Farah aurait dû se taire
Publié le mardi 18 juin 2013   |  La Presse du Jour


Abdikarim
© Autre presse par DR
Abdikarim M. FARAH, représentant résident du Fonds monétaire international au Bénin


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M. Abdikarim Farah, Représentant résident du Fonds monétaire international (FMI), était au cabinet du ministre béninois de l’économie et des finances Jonas Gbian le vendredi 14 septembre 2013. Ses déclarations en ont rajouté à la polémique qui s’enfle en ce moment autour du taux de croissance économique réalisé par le Bénin en 2012.
Quels sont les chiffres réels de la croissance économique au Bénin en 2012 ? 3,8 % ou 5,4 % ? La question préoccupe aujourd’hui beaucoup de Béninois, qu’ils soient de la diaspora ou non. Interpellé sur ce sujet d’actualité, M. Abdikarim Farah, Représentant résident du FMI au Bénin, lâche à nos confrères du journal «Fraternité» : « Je vous rappelle que nous avons publié un rapport intitulé «Perspectives économiques régionales». Les chiffres qui sont contenus dans ce document indiquent un taux de croissance de 3,8 %. Mais il faut préciser que ces chiffres ont été arrêtés fin 2012, début 2013. Après cela, nous avons reçu de nouveaux chiffres émanant de l’Institut national de la statistique et de l’analyse économique (Insae) qui fixent le taux de croissance à 5,4 %. Ce sont les derniers chiffres qui nous sont parvenus et nous nous en servons pour nos analyses ».
A la question de savoir avec précision à quelle période on peut situer les nouveaux chiffres, M. Farah déclare : « on parle de la croissance de 2012. Les nouveaux chiffres arrêtés en mars concernent 2012 » ; il a par ailleurs estimé que « les chiffres initiaux de 3,8 % n’ont pas pris en compte le dernier trimestre de 2012 ». « Vous savez, le monde est dynamique et à présent, nous avons de nouvelles estimations. Elles sont dues aux résultats issus du secteur agricole. C’est un aspect important. Aussi, l’activité portuaire a été plus élevée que ce qui était prévu. Finalement, les chiffres dont se sert le FMI sont ceux produits par l’Institut de la statistique du Bénin, soit 5,4 % », a avancé M. Farah qui s’expliquait ainsi sur les raisons qui pourraient justifier le décalage observé entre 3,8 et 5,4 %. Malheureusement, ce miracle qui s’est produit dans l’intervalle de trois mois et que tente de justifier M. Farah est bien loin de convaincre les Béninois.
Une toile de confusions
Honnêtement, M. Abdikarim Farah aurait dû refuser ce rôle que lui ont confié les autorités béninoises. Car pour beaucoup de Béninois, c’est du déjà-vu. On se souvient en effet de la frénésie diplomatique qu’il y a eu lorsque la presse a rendu public un rapport non encore validé commandité par l’Union Européenne sur la campagne cotonnière 2012-2013 au Bénin.
« Les chiffres qui sont contenus dans ce document indiquent un taux de croissance de 3,8 %. Mais il faut préciser que ces chiffres ont été arrêtés fin 2012, début 2013 », a dit M. Farah. Plus loin, il déclare que « les chiffres initiaux de 3,8 % n’ont pas pris en compte le dernier trimestre de 2012 ». Toute la confusion qui met à nu la gymnastique intellectuelle voire diplomatique de M. Farah est là. Il y a donc de quoi s’inquiéter.
Pour le moins qu’on puisse dire, l’analyse des explications apportées par M. Farah nous permet en tout cas de douter de la qualité de celui qui représente au Bénin le Fonds monétaire international (FMI). Et si les choses sont vues sous cet angle, on comprend alors pourquoi notre pays a du mal à décoller au plan économique. Si on écoute bien M. Farah, le miracle béninois s’est produit dans le dernier trimestre de l’année 2012 avec les résultats enregistrés dans les secteurs de l’agriculture et du port. Aussi curieux que cela puisse paraître, le Représentant résident du FMI au Bénin n’a pas osé donner les chiffres qui ont permis au Bénin de passer d’un taux de 3,8 % à 5,4 %. En termes clairs, il n’a pas osé dire dans quelle proportion les secteurs de l’agriculture et du port qu’il a cités ont contribué au miracle béninois : passer de 3,8 % à 5,4 % en un trimestre. Ne pas produire ces chiffres et soutenir que les chiffres dont se sert le FMI sont ceux produits par l’Institut de la statistique du Bénin pose un véritable problème de crédibilité. Le FMI n’est pas une petite institution et si c’est comme le décrit son représentant au Bénin qu’il a toujours fonctionné, alors il y a de quoi donner raison à nos amis Gaston Azoua et Dieudonné Lokossou qui n’ont jamais cru aux institutions de Breton Woods.
Sur tout un autre plan, l’argument avancé par M. Farah pour expliquer le miracle qui se serait produit en trois mois ne tient pas une seconde. Au plan agricole, le Bénin se cherche toujours. Le plus important produit agricole qui lui permet d’être présent sur le marché international est le coton. Alors qu’il a prévu de produire 300.000 tonnes pour réaliser un taux de croissance de l’ordre de 1 %, le Bénin n’a produit que 240.000 tonnes avec un bénéfice net d’environ 20 milliards de F Cfa, selon les chiffres officielles (mais contestables) rendus publics. Au port autonome de Cotonou, les activités ont certes repris. Mais on est encore loin des pics des années de gloire. De quoi parle donc M. Farah sans nous produire des chiffres certifiés par la prestigieuse institution qu’il représente au Bénin ?
5,4 % riment avec pauvreté
Un taux de croissance de 5,4 % se sent. Mais tel n’est pas le cas au Bénin où 5,4 % de supposée croissance économique riment avec pauvreté. Les Béninois doivent encore faire la queue pour acheter du maïs et du riz. Tous autant qu’ils sont, ils n’ont pas accès à des soins de qualité. Et sur le plan de la réalisation des infrastructures sociocom-munautaires, on est bien loin de ce que nous avions connu sous le Président Nicéphore Soglo. On ne peut pas parler de taux de croissance de 5,4 % quand le Gouvernement doit tendre sa sébile pour des opérations 120 jours pour équiper les hôpitaux et les lycées agricoles. On ne peut pas parler de 5,4 % de croissance économique alors que le Gouvernement doit en appeler à la solidarité nationale pour financer la sécurité interne.
La Banque Mondiale en sauveur
Comme le dit un adage africain, « même si le mensonge prend l’ascenseur, il finira toujours par se faire rattraper par la vérité qui prend l’escalier ». En appliquant cette sagesse africaine à la polémique qui oppose le Gouvernement béninois et le Président Abdoulaye Bio Tchané, ancien Patron Afrique du FMI et ancien Président de la Banque ouest africaine de développement, au sujet du taux de croissance économique réalisé par le Bénin en 2012, on constate tout simplement que le vent a soufflé et on a vu l’anus du pique-bœuf, surtout lorsqu’on intègre les vérités de la Banque Mondiale.
Contestant en effet le taux de 5,4 % avancé par le Gouvernement, M. Abdoulaye Bio Tchané a lors d’une sortie médiatique effectuée à Cotonou avancé que le taux de croissance économique du Bénin en 2012 n’est que de 3,8 %. Cela a suffi pour déchaîner les passions avec à la clef une instrumentalisation du Représentant résident du FMI au Bénin. Heureusement que dans ce débat, la Banque Mondiale est venue en sauveur. Pour cette seconde institution de Breton Woods, le taux de croissance économique du Bénin en 2012 est de 4,0 % contre 4,1 % en 2011 où on a produit moins de 150.000 tonnes de coton avec une baisse énorme des activités portuaires marquées par le départ des gros clients du Bénin vers les ports de Lomé, de Tema et même d’Abidjan. Sans commentaire, lisons ensemble le rapport en lettres et en chiffres produit par la Banque Mondiale. Il est intitulé « Perspectives économiques mondiales : Afrique sub-saharienne ». Ce document qui, dans son aperçu général, précise que « l’Afrique au sud du Sahara présente une croissance moins volatile, mais plus lente », renferme des arguments scientifiques auxquels on peut accorder un crédit et qui n’ont rien à avoir avec le discours tenu par M. Farah.

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