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Matin libre N° du 13/1/2015

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Entretien avec l’ancien ministre Ganiou Soglo : «Au Bénin, les hommes vertueux on ne les aime pas»
Publié le mardi 13 janvier 2015   |  Matin libre


L’ancien
© Autre presse par DR
L’ancien ministre de la Jeunesse, des Sports et Loisirs, Ganiou Soglo.


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Il y a un moment qu’il ne s’est plus fait entendre dans les médias. Mais le jeudi 8 janvier 2015, votre Quotidien « Matin Libre » a réussi à lui arracher cet entretien dans lequel il s’est, de façon décontractée, prononcé sur les grandes préoccupations de l’heure au plan nationale. De la question de la l’Organisation des élections à la gouvernance du président Yayi Boni en passant par la gestion des Soglo à la mairie de Cotonou, Ganiou Soglo n’a pas pratiqué la langue de bois.
« La vérité, je m’en fiche complètement. Mon papa a été Chef de l’Etat. On l’a critiqué.. », a-t-il déclaré pour justifier sa liberté de parole et répondre à ceux qui pourraient le traiter d’opposant dans ses critiques. Lisez plutôt.

Monsieur le ministre, « Matin Libre » s’honore de cet entretien avec vous parce qu’il y a un moment qu’on vous a lu ou entendu dans les médias. Alors, le Bénin vit actuellement une situation d’impasse électorale. La Liste électorale peine à être actualisée. Les acteurs politiques se rejettent le tort. Quelle lecture faites-vous de la situation?

Je vous remercie. Tout d’abord, je me permettrai de vous présenter mes vœux de santé, succès pour la nouvelle année. Il est vrai que cette question de la Lépi nous interpelle. J’ai fait partie du gouvernement du président de la République, Yayi Boni à un moment donné. Et on nous a fait comprendre en conseil des ministres que l’Union européenne et autres bailleurs de fonds allaient aider notre pays à se doter d’un outil indispensable pour que nous ayons des élections qui se fassent à bonne date et à moindre coût. Aujourd’hui, nous voyons que l’ensemble de la Nation a engagé près de 67 milliards Franc Cfa dans un processus de confection de liste électorale permanente informatisée qui ne marche pas. On ne sait pas où se trouve la liste. On nous a parlé à un moment donné de clé. A la longue, on s’est posé la question de savoir s’il ne s’agit pas de gargue. Je pense qu’en tant qu’homme politique, même si cela fait longtemps qu’on m’a attendu sur des questions d’actualité, il est évident qu’aujourd’hui en 2015, on ne peut pas continuellement nous dire que la Lépi n’est toujours bouclée. De jour en jour, on engage des ressources additionnelles. C’est l’argent des Béninois que nous pourrions mettre dans d’autres secteurs vitaux de notre économie et qu’on continue à engloutir dans un processus dont on ne voit pas la fin. Donc j’espère qu’on aura une Lépi crédible, fiable où chaque Béninois verra son nom et que ce sera une liste qui ne donne plus lieu à des déballages. On a vu les Ghanéens aller aux élections présidentielles tranquillement. Le processus n’a pas fait l’ombre d’un doute. Je pense qu’on ne peut pas continuellement invoquer au Bénin, Dieu et les mannes de nos ancêtres sur des choses où on engloutit des sommes importantes.

A vous entendre, on comprend que vous voulez d’une Lépi alors que l’opposition qui opte désormais pour le Rena/Lépi.

Ce que je tiens à vous dire, c’est que depuis 1990, nous sommes allés cahin-caha à des élections à bonnes dates qui se sont passées dans une relative transparence, tranquillité pour nos populations sans Lépi même si tout n’a pas été parfait. Je veux attirer votre attention sur quelque chose. On n’a pas forcément besoin de Lépi pour aller à une élection dans ce pays. Mais on va faire comme d’habitude au Bénin? Quid des milliards qu’on a engloutis pour un processus? On va repartir avec quelque chose avec laquelle on a toujours travaillé sans aucun. Il y a quelque chose qui ne va pas. A un moment donné, il faut se poser les bonnes questions. On engloutit des milliards. Et quand ça ne va pas, on met ça de côté et on demande à recourir à un autre processus qui marchait avant. Pourquoi on a fait tout ça alors? Les milliards investis, sont des milliards pour notre école, pour la santé. Si un Béninois a un accident, peut-il bénéficier d’un Irm? On ne l’a pas. C’est à croire que tout le monde est d’accord pour qu’on dilapide notre pays. A un moment donné, il faut qu’on dise stop.

Monsieur le ministre, on fait face à un véritable blocage. Les acteurs ne veulent plus se parler. La Plateforme et toute l’opposition se sont retirées du comité préparatoire du dialogue politique parce que la majorité présidentielle ne veut pas accepter les préalables qu’ils ont posés. Aujourd’hui, quelle solutions proposez-vous?

Je vais être franc avec les lecteurs de Matin libre. Je n’ai pas de réponse toute faite, toute prête. Ce qui est dommage, c’est que le préalable que demande l’opposition, ce n’est pas non plus irréalisable. Demander à avoir accès de façon équitable aux médias de service public, je pense que c’est normal. Je suis un citoyen béninois. A une époque où je voulais faire des choses dans notre pays sans aller dans la politique politicienne, à savoir la bataille pour une loi sur le sport, sur le logement, je n’ai pas eu droit à l’Ortb. On a dit : « il est opposant» Et j’ai dit à qui et à quoi? C’est un préalable normal. On peut prétendre avoir une démocratie et empêcher les autres acteurs de pouvoir avoir une lecture divergente de la vôtre. Tous les acteurs politiques savent que quand mon père a été Chef de l’Etat, aucun de ces politiciens qui sont là aujourd’hui et qui critiquaient Nicéphore Soglo et son épouse, ne m’a vu leur dire « vous avez tort ». Si vous avez d’être un personnage public, vous devez accepter la critique. Et tous les acceptaient de venir me voir et de critiquer mon père, ma mère, mon frère et plus tard moi-même en tant que député et plus tard ministre. Si on vous critique et que vous avez envie d’apporter votre réponse, vous allez à la télévision avec les éléments que vous pouvez donner. L’Ortb couvre l’ensemble du territoire national. Ce n’est pas l’ensemble des chaines privées qui couvre le territoire national. C’est un préalable qui est équitable. Au sujet de la question, je pense que si nous voulons parler aujourd’hui de la révision de la Constitution, les gens préfèrent que ce soient en début de mandat d’un Chef d’Etat qui arriverait. Si vous voulez réviser la Constitution en fin de mandat, avec tout ce que nous avons eu en Afrique, la sous-région et même dans notre pays, les gens se demandent pourquoi faire une révision de la Constitution à un an du départ du Chef de l’Etat.

Mais est-ce qu’il ne faut pas laisser le débat se faire à l’Assemblée nationale?

Mais vous avez vu aussi que dans certains pays où il y avait une majorité à l’Assemblée nationale, cette majorité ne parlait pas pour l’ensemble du peuple. On l’a vu au Burkina-Faso. Il faut savoir raison gardée. Oui, nous savons qu’un pays se dote de contre-pouvoir, d’une Assemblée nationale. Mais à un moment donné, le peuple peut ne pas se retrouver dans les élus qu’il a envoyés quelques années au paravent à l’Assemblée nationale. Donc à quelques mois de la fin du mandat du Chef de l’Etat, je pense que si on voulait vraiment apaiser la tension sociopolitique dans notre pays, ce préalable aurait pu être levé très rapidement. Et on discute des vrais problèmes qui touchent nos populations. Le panier de ménagère. Comment les gens vivent? Dans quels pays, ils vivent? Ont-ils accès à l’eau potable? Ont-ils accès aux soins de santé? Ce sont des questions qu’on ne peut pas passer sous silence. Les questions sont importantes parce que si la cité est ce qu’elle est, c’est que les hommes se sont dits, nous nous dotons d’institutions et de gens pour nous gouverner. Mais pour autant, on ne peut pas faire comme si dans un pays, le seul son de cloche qu’on entend, c’est toujours des questions de politique politicienne. C’est vrai que des élections doivent avoir lieu à bonne date mais on a l’impression que tout tourne autour de la Lépi. Mais sur les choix économiques, c’est comme si on gère le quotidien.

Vous évoquiez les préoccupations sociales des populations. Mais pourquoi depuis que vous avez quitté le gouvernement, on vous entend peu sur ces questions-là ?

Vous me titillez. J’ai quitté le gouvernement en juin 2011. Pendant un an, j’ai pris un peu de recul puisque j’en ai besoin et pour laisser aussi aux nouveaux acteurs politiques le soin de conduire les destinées de notre pays. En 2012, je suis revenu sur la scène médiatique. Et en 2013, pour rappeler qu’au niveau économique, il y avait des choses qui n’allaient pas. Rappelez-vous que j’avais énormément parlé du secteur privé en indiquant qu’un Etat ne crée pas les emplois. L’Etat crée les conditions pour que le secteur privé crée des emplois. Dîtes-moi, chers amis journalistes, nous sommes un petit pays d’à peu près 10 millions d’habitants. Il y a aujourd’hui à peu près quarante agences qui travaillent pour la résolution du problème de l’emploi des jeunes. Je dis bien quarante. Ça a résolu le problème de l’emploi des jeunes dans notre pays? A-t-on créé quarante agences ou Fonds de soutien à l’emploi des jeunes pour simplement donner de l’emploi aux gens qui travaillent dans ces agences ou pour réellement résoudre la question de l’emploi des jeunes? Est-ce qu’il n’aurait pas mieux valu s’asseoir avec le Patronat béninois pour avec lui et la société civile comment nous pouvons alléger les charges fiscales des entreprises pour qu’elles puissent aujourd’hui embaucher plus de jeunes? Quelles sont les incitations fiscales pour faire en sorte que les gens puissent passer de l’informel au formel? C’est important quand vous pensez de l’informel au formel. Vous donnez la chance à vos employés d’être régis par le Code du travail. S’il leur arrive quelque chose, ils sont protégés. Aujourd’hui au Bénin, non content d’avoir alourdi les procédés de création d’entreprise, on vous taxe à tous les niveaux.

Monsieur le ministre, le gouvernement a annoncé un certain nombre de réformes visant à permettre aux gens qui évoluent dans l’informel de formaliser leurs activités.

Je vais vous dire sincèrement. Aujourd’hui, notre pays n’a pas profité à tort ou à raison des 10 ans de difficultés qu’avait connues la Côte d’Ivoire à l’époque du président Gbagbo. La plupart des entreprises ont préféré aller au Sénégal, au Togo et au Ghana. Aujourd’hui, les investisseurs directs étrangers préfèrent aller au Togo, au Ghana, en Côte d’Ivoire que venir au Bénin. Ce n’est pas faire injure à notre gouvernement que de dire qu’aujourd’hui, vouloir entreprendre dans notre pays, c’est la croix et la bannière. Je ne vais pas citer des entreprises que je connais pour les mettre en difficulté. On vous dit, on est venu INVESTIR dans votre pays parce que votre pays a une attractivité à cause de sa proximité avec le Nigéria, sa proximité avec des pays comme le Niger et le Burkina-Faso et on se rend compte que nous sommes harcelés continuellement par l’administration fiscale et les politiques.

Lorsque vous peignez tout en noir, n’êtes-vous pas en porte-à-faux avec les rapports de la Banque mondiale, notamment le rapport Doing business qui récemment nous a surclassés?

Je vais vous dire. Hier soir, j’écoutais la chronique de Bernard Maris, cet économiste qui malheureusement vient de décéder dans ce carnage qui a eu lieu à Charlie Hebdo et qui disait « les économistes ont toujours ce désir de faire croire qu’ils sont très intelligents en maniant des chiffres improbables, inchiffrables pour faire croire qu’ils ont la science infuse alors que ce sont des bêtises». Je suis économiste. Le meilleur économiste va vous expliquer les choses de la façon la plus simple. Chacun comment on peut manipuler les chiffres. La réalité, vous la sentez sans problème. Ce que nous vivons actuellement dans notre pays, on le ressent. On n’a pas besoin d’avoir quelque chose de la Banque mondiale, du Fonds monétaire international, du Doing business. Aujourd’hui, des restaurants ferment tous les jours au Bénin et vont en Côte d’Ivoire.

Le rapport Doing business cache donc la réalité ?

C’est de la macroéconomie. Il vaut mieux aller dans la microéconomie pour voir la vraie réalité que connaissent et que vivent les citoyens.

Alors vous avez dans votre message de vœux insisté sur le secteur privé ; mais aussi sur l’agriculture. Alors parlez de votre vision de l’agriculture.

Nous n’allons pas aller si loin. C’est toujours la Côte d’Ivoire puis à un moment donné, le Burkina-Faso, voire le Ghana ou encore le Togo. Je dirai que dans l’ensemble du monde, aucun pays ne s’est développé sans l’agriculture. Et tout le monde vous dit que l’agriculture doit être plurielle. Vous ne pouvez pas baser votre politique économique sur un seul produit. J’ai entendu certains membres du gouvernement dire « nous sommes autosuffisants au niveau alimentaire. Le Bénin produit maïs, vend même à l’étranger». Mais ce n’est pas ça. Accompagner une filière comme on a pu le faire sous le président Soglo et aujourd’hui, on en voit les méfaits même au niveau de la filière coton. On encadre les gens ; on leur apporte des intrants. On leur apporte des semences. On crée une filière qui va donc créer une transversalité sur d’autres secteurs de la vie économique c’est-à-dire le transport, les entreprises, le port du pays, la communication. Et c’est ce qui a fait le bonheur de la Côte d’Ivoire. Vous n’avez pas simplement le cacao, le café, vous avez l’hévéa, la banane, les légumes. Vous avez un secteur agricole qui devient un secteur agro-industriel, donc un secteur générateur de richesses et d’emplois. Et c’est ce que je veux faire comprendre à notre pays. Le coton a été une culture de rente importée par les colons de l’époque qui appauvrit nos sols. J’ai vu à l’Ortb des professionnels de l’agriculture qui nous ont dit que ceux qui font du maraîchage dans le Nord se servent des intrants chimiques du coton qui tuent. Et c’est ça le danger. Si on met des milliards dans le coton, tous les ans, on nous dit que la production ne donne pas les rendements escomptés. Et pire, aujourd’hui, les rapports nous disent que nous avons une offre mondiale de coton qui est supérieure à la demande parce qu’aujourd’hui, la Chine a un coup d’arrêt au niveau de sa demande intérieure et demande moins de côté que par le passé. Les prix du coton chutent. Et j’aimerais demander quelle est la rentabilité que nous, Etat béninois, gagnons à simplement à injecter des milliards dans ce secteur alors que nous avons d’autres secteurs. L’industrie laitière crée des milliers d’emplois au Sénégal. C’est une véritable industrie. L’industrie maraichère dans certains pays de la sous-région, comme vous le voyez au Niger, au Burkina-Faso, créent des milliers d’emplois et de revenus. Nous savons aujourd’hui que tous les jours que nos oignons, nos tomates viennent du Niger, du Burkina-Faso. Dîtes-moi, comment l’Etat encadre-t-il ces filières agricoles qui devraient avoir le même impact que la filière cotonnière car ça fait quand même plus de trente ans qu’on nous parle de coton. A côté du coton, dîtes-moi l’autre filière qui fait la fierté de notre pays dont on retire des ressources substantielles? Il ne suffit pas de dire «nous sommes autosuffisants au niveau alimentaire. Le maïs a produit tant de tonnes. On arrive à vendre du maïs au Congo-Brazzaville». D’accord, mais aujourd’hui, le maïs est-il un secteur réellement porteur notre pays? C’est la question que nous devons nous poser.

L’opinion publique ne va pas hésiter à vous classer dans l’opposition puisque à vous entendre, la gouvernance Yayi a des problèmes.

La vérité, je m’en fiche complètement. Mon papa a été Chef de l’Etat. On l’a critiqué. Nicéphore Soglo et son gouvernement ont fait des erreurs. Mais beaucoup de Béninois se rendent compte qu’au vu de ce qui a été fait au niveau économique, pendant cinq ans, ils peuvent avoir la tête haute par rapport au travail qu’ils ont fait. L’Inrab (Institut de recherche agronomique du Bénin). Paradoxalement, voilà un institut qui devrait être à la pointe des nouveautés industrielles de notre pays surtout agricoles. Vous avez les meilleurs ingénieurs agronomes de la recherche qui ont fait le bonheur de la Côte d’Ivoire avec le palmier ; qui ont fait le bonheur du Burkina-Faso et du Niger aujourd’hui. Dîtes moi ceux qui travaillent à l’Inrab qui ont pu même trouver des semences améliorées pour le coton, cela a-t-il amené le gouvernement à aller des semences de coton à l’Inrab? Ou ne pas aller acheter des semences en Turquie? Donc dire que vous êtes classé parce que vous ne faîtes que apporter une voix… on ne peut pas dire que le gouvernement fait tout mal. Mais il peut beaucoup mieux faire. Si j’ai soutenu le président Yayi Boni pendant les quatre ans où j’ai été au gouvernement avec lui, les 75% des Béninois ont voté pour le président en 2006. Je suis parti du gouvernement en 2011. On peut dire que le premier quinquennat n’a pas été facile. Les acteurs politiques ne lui ont pas rendu la tâche facile. Deuxième mandat, on va vraiment se dire où est ce qu’on va aller par rapport l’économie de notre pays. Le président est réélu pendant un an, on entend que parler de Pvi et de changement de la Constitution. J’ai des amis qui ont été des farouches détracteurs de l’actuel président ivoirien, Alassane Ouattara. Aujourd’hui, ils vous disent « le Monsieur travaille». Ce n’est pas simplement de dire en quatre ans, on est parvenu à atteindre presque 10% du taux de croissance. Les Ivoiriens le ressentent. Vous allez à Abidjan, vous sentez ce foisonnement. Les Ivoiriens n’ont pas fait ce que nous avons fait il y a quelques mois, une table ronde à Paris. Ils ont fait une grande réunion à Abidjan où des investisseurs du monde entier sont venus pendant 10 jours en Côte d’Ivoire. Air France a fait voler l’A 380 pour la première fois en Afrique de l’Ouest. A Abidjan, les restaurants et les hôtels étaient pleins. La plupart de nos compatriotes que moi, je vois à Abidjan, travaillent dans le secteur privé en Côte d’Ivoire voire à Lagos. Il y a quelques jours, j’allume ma télévision et je vois un de nos compatriotes qui vient de monter l’une des plus grandes entreprises de mèches de cheveux à Lagos. Il a un chiffre d’affaires de près de 5 milliards de franc Cfa par an. On parle de lui. France 24 parle de son entreprise où il emploie près de 200 personnes à Lagos alors que dans son pays d’origine, il ne peut pas le faire. Il y a bon nombre de concitoyens qui travaillent dans la sous-région et qui ont des difficultés à travailler chez eux. Alors, le dire, on vous traite d’opposant, moi ça ne me dit rien dit. Au moins, je suis vacciné depuis le temps où on m’a traité de rebelle, d’enfant martien. Ça ne me dérange. Au moins, les gens savent une chose : c’est que j’accepte la critique et que j’essaie d’être un homme droit. Mais au Bénin, les hommes qui sont un peu vertueux, on ne les aime pas. Ça ne me dérange pas.

Là, vous remettez en cause la gestion du Chef de l’Etat ou de ses collaborateurs qui sont censés mettre en œuvre sa vision ?

Il ne faut pas revoir tout ce que j’ai dit, sous le prisme d’un seul homme. Je ne dis pas que le Chef de l’Etat est la cause de tous les problèmes de notre pays. Mais il est le premier magistrat du Bénin. Malheureusement ou heureusement, c’est vers lui qu’on se tourne. C’est lui qu’on regarde. Il est le Chef de l’Etat, donc le Président de tous les Béninois. C’est lui qui conduit la barque de notre maison commune. Mais pour autant, nous sommes tous aussi responsables, collectivement du succès de notre pays. Et donc on ne doit pas tout voir sous le prisme du Chef de l’Etat. Donc, il y a des choses qui sont conduites de façon honorable. Moi je suis heureux de voir que grâce au Chef de l’Etat, il y a une unité de tracteurs, qui a vu le jour dans notre pays. Si maintenant, le gouvernement, comme il a l’intention de subventionner ces tracteurs, pour que ceux qui travaillent réellement puissent vraiment avoir accès à ces tracteurs, à moindre coût, c’est une très belle chose. Je ne vois pas pourquoi il ne faudra pas louer cette initiative. Mais pour autant on nous a parlé de machines agricoles dans ce pays, et on a débloqué près de 200 milliards de Fcfa pour la mécanisation, mais cela a été un fiasco monumental.

Vous évoquiez les rapports houleux qui existent entre les hommes d’affaires et le Chef de l’Etat, mais il y a eu dégel des relations entre Sébastien Ajavon et le Chef de l’Etat qu’en dites-vous ?

C’est une bonne chose. Je pense que le Président Ajavon, qui est un républicain, nationaliste, pour moi qui le côtoie amicalement, Je vois comment il traite ses employés. Il est l’un des rares chefs d’entreprise qui tous les ans, rassemble tous ses employés autour d’une grande fête, c’est rare. On me dira que Ganiou Soglo l’a dit parce qu’il est ami avec Sébastien Ajavon. Il faut le reconnaître, il a mis en place une structure qui honore notre pays. Pour le moins je pense que non comme le président du patronat, mais le président de Cajaf Comon, Il aurait pu lui dire à un moment donné, comment pouvons-nous faire pour que tu passes peut-être d’importateur net de produits, à exportateur, et donc que tu investisses dans les filières locales. Mais là encore il n’y a que le gouvernement qui puisse inciter quelqu’un qui gagne déjà de l’argent, qui a une filière bien définie, à pouvoir passer d’importateur net, à exportateur net, bien qu’il fasse de la réexportation vers le Nigéria. Mais on aurait pu lui dire, pourquoi ne vas-tu pas investir dans une filière intégrée au niveau national pour que l’Etat puisse t’accompagner, t’accorder des aides. Je ne sais pas ce qui s’est passé entre lui et le Chef de l’Etat. On a perdu près de trois ans dans une guéguerre stérile, pour finalement se rendre compte que c’est l’Etat qui lui doit de l’argent. Mais il faut savoir raison garder, l’Etat a reconnu son erreur, cependant, je pense que c’est un homme avisé. On ne parle aujourd’hui que d’un protocole d’accord, ce qui ne signifie pas déblocage des fonds. Il ya donc eu des écrits, je n’ai pas lu ce protocole d’accord, j’ai simplement lu dans la presse qu’il y a eu protocole dont je ne connais pas les détails. Mais je sais que c’est un homme avisé, j’espère que le décaissement se fera et il pourra reprendre ses activités. Parce que cette entreprise emploie énormément de Béninois et de béninoises dans notre pays.

Non seulement vous êtes ami à Sébastien Ajavon, mais aussi vous êtes très lié à Patrice Talon, qui serait le parrain de votre fille, de ce côté-là aussi ce n’est pas la joie entre le Chef de l’Etat et cet homme d’affaires.

Malheureusement, comme je l’ai dit auparavant, je ne suis pas dans le secret des dieux, je ne connais pas le type de contrat qui a été passé entre lui et le Chef de l’Etat dans le cadre du Pvi. Ce qui est simplement dommage pour notre pays, c’est que dans ce conflit, nous qui n’avons rien à voir dans ce business, on en a tous fait des frais. Tous les Béninois ont fait les frais de ce conflit entre le chef de l’Etat et Monsieur Talon. C’est quand-même quelque chose qui nous a porté tous un préjudice. A un moment donné, la nation a arrêté de travailler, il ya eu des marches, des prières et je n’en sais que des choses pas probables, pour des choses dont ni plus ni moins nous ne connaissons ni les tenants ni les aboutissants. La seule chose que nous savons, c’est que, il y a une chambre d’arbitrage, qui a rendu un jugement, et qui dit que l’Etat béninois, devrait payer tant des milliards de Fcfa à Monsieur Talon dans le conflit qui l’oppose à l’Etat béninois. Mais si ce règlement a lieu un jour, ce n’est pas le Président Yayi Boni qui a signé le document Pvi qui va payer. C’est vous et moi. Parce que quand on dit le gouvernement béninois, l’Etat béninois, c’est l’ensemble des Béninois, qui va payer pour une affaire dont on ne connaît ni les tenants, ni les aboutissants, et qui va payer des milliards de Fcfa, qu’on aurait pu mettre dans les pistes rurales, les adductions d’eau, et j’en passe.

Est-ce un regret pour vous d’avoir appartenu à ce gouvernement, un regret d’avoir fait venir Yayi Boni ?

D’abord, je me rappelle que moi-même, j’étais candidat en 2006. Je regrette simplement que les Béninois n’aient pas voulu voter pour moi parce que s’ils avaient voté pour moi, les choses ne se seraient pas passées comme elles se passent aujourd’hui. Elles auraient été sans doute différentes. Je n’ai pas eu la chance d’avoir un parrain financier pouvant me soutenir. Mais je remercie Dieu que ce parrain est celui de ma fille. Donc on ne peut pas avoir des parrains partout. Ma fille a un bon parrain, je n’ai pas de parrain financier, mais elle a un bon parrain. Je ne regrette rien. Moi j’ai été candidat en 2006 et en 2007, le Chef de l’Etat m’a appelé pour prendre les destinées et les rênes du ministère des sports après, celui de la culture. J’ai fait du mieux que je pouvais avec mes collaborateurs, je crois que les Béninois et les Béninoises peuvent aujourd’hui comparer le travail que nous avons fait. Je pense n’avoir été associé à aucun scandale, dans aucune dérive. Au niveau du choix de mes collaborateurs, je pense que travailler avec les Béninois dans leur globalité, c’est important. Je pense que je dois remercier toutes ces administrations parce que je dois dire qu’elles m’ont toutes accompagné à tel point que les syndicats, du moins les centrales syndicales disaient tout le temps, mais on ne comprend pas, il y a des grèves dans tous les ministères, mais chez Ganiou Soglo il n’y a jamais de grève. Donc je dois remercier toutes ces administrations qui m’ont accompagné et m’ont aidé dans mon travail avec mes collaborateurs de l’époque. C’est une bonne chose de travailler ensemble. C’est vrai, le chef de l’Etat m’a nommé, donc je lui devais loyauté par rapport à cela. J’ai cru au travail que je faisais, parce que je travaillais pour mon pays, et donc étant chef de l’Etat en ce moment là, je travaillais aussi pour lui, mais pour autant, je n’ai, jamais été Fcbe, j’ai tourjours dit aux gens, il faut être droit dans ses baskets. Moi je suis né du moins renaissant, maintenant que la Rb m’a exclu du parti, ce n’est pas le plus grave. J’ai dit au Chef de l’Etat si je viens dans ton gouvernement, je ne viendrai à aucune manifestation des Fcbe. Allez demander si quelqu’un m’a vu à une activité des Fcbe ? Je ne suis venu à aucune manifestation des Fcbe. Mais je lui ai dit je te soutiendrai, je suis né et je mourrai renaissant. Moi je ne suis pas Fcbe. Je m’appelle Ganiou Soglo. J’ai été candidat, mais je soutiens les actions du Chef de l’Etat dans son entreprise de remobilisation du travail de notre pays, ce qu’on a essayé de faire modestement.

Restons toujours en politique pour évoquer ce froid entre la Renaissance du Bénin et le Chef de l’Etat. Visiblement, les choses ne se passent plus bien même si ce parti politique continue d’avoir un ministre au gouvernement. On voit la RB dans ses prises de position, dans les marches…

Vous savez, je vais être franc avec vous, moi je m’appelle Ganiou Soglo, la Renaissance du Bénin, j’ai été membre fondateur de ce parti. La Renaissance du Bénin depuis quelques années m’a exclu de ce parti et je me garderai bien de dire quoi que ce soit, non pas que j’ai peur de qui que ce soit, n’étant pas au courant, de ce qui se passe, comment voulez-vous que je puisse apporter une lecture objective. J’ai dit que je suis renaissant, je suis né et je mourrai renaissant. Maintenant je n’appartiens plus à la Renaissance du Bénin.

Les élections municipales se pointent à l’horizon et d’aucuns estiment qu’il faut dégager les Soglo de la mairie parce qu’ils ont assez duré.

Oui mais vous savez, c’est comme quand j’entends des gens sur la toile qui disent, oh mais les Soglo on les a assez vus. Mais dites-moi une élection législative et une élection communale, les gens votent, ils ne sont pas nommés par quelqu’un, les gens pouvaient dire à juste titre, on est fatigué de voir les Soglo, Galiou soglo a été nommé par le chef de l’Etat là on est d’accord, mais dites- moi sincèrement, une élection, ce sont les populations qui vont voter, si les gens votent encore pour Rosine Vieyra Soglo, si les gens veulent voter encore pour Nicéphore Dieudonné Soglo, et pour le Premier adjoint Léhady Soglo, mais ont-ils volé quelqu’un? Si d’aucuns pensent qu’on doit les dégager, ils vont voter pour les autres pour venir à leur place. Mais jusqu’à preuve de contraire, jusqu’à aujourd’hui, ils ont gagné deux fois ces élections communales, je pense que aussi longtemps que les élections seront transparentes et jusqu’à preuve de contraire, on n’a jamais crié au vol par rapport aux élections communales ou locales dans notre pays, où quand cela a été le cas il y a eu des recours, de dire qu’on a assez vu les Soglo, écoutez, si les gens leur accordent encore leur confiance ils seront toujours là.

En tant que citoyen, quand vous circulez dans Cotonou, est-ce que vous êtes fier?

Je vais être franc avec vous, dites-moi, quand vous allez à Parakou, quand vous allez à Porto-Novo, quand vous allez à Lokossa, quand vous allez à Bohicon, dites-moi dans quelle ville vous êtes fièrs de passer où il n’y a pas de problèmes dans ce pays, le problème, c’est que nous avons une régie financière qui fait que une bonne partie des ressources à mairie est logée au niveau du trésor public, et depuis que Nicéphore Dieudonné Soglo est Maire de la ville de Cotonou, depuis que le président Mathieu kérékou a pris les rênes de ce pays, jusqu’au président Yayi Boni, on l’empêche de débloquer les ressources de la mairie aux acteurs qui pourraient travailler pour l’amélioration ne serait-ce que pour la salubrité de la ville de Cotonou. Vous avez des entreprises, qui font le nettoyage de cette ville, malheureusement, quand elles vont au Trésor pour être payés, on leur dit qu’il n’y a pas d’argent. Comment va faire la mairie pour payer ces entreprises ? Leur argent est au Trésor et on refuse de débloquer cela aux entreprises. Vous me direz qu’il y a des ressources parce que la mairie vient pour collecter de l’argent dans les buvettes, les marchés. Mais une mairie a aussi un fonds de roulement moi je ne sais pas quel est le budget de la mairie, et est-ce que l’argent collectée par toutes ces régies financières lui permet de dégager l’argent pour accomplir tous les travaux qu’il y a à faire dans notre ville qui est notre ville commune. Ce que moi je trouve détestable dans notre pays, au-delà de la famille Soglo, c’est que Cotonou est la vitrine et tout le monde y vit. Simplement pour des questions de politique politicienne, un pouvoir central est là et pense qu’il faut bloquer telle personne puisqu’elle est de l’opposition. Jacques Chirac a été Maire de la ville de Paris, pendant des années, sous François Mitterrand, il a gagné son premier mandat en 1979 contre le candidat de l’époque en 1980 qui était soutenu par Giscard D’estain. Il a fait de Paris la ville lumière. Tout le monde a reconnu qu’il a fait un travail, extraordinaire dans Paris. Le président Mitterrand l’a t-il empêché de travailler ? Nous, nous n’avons que de maigres ressources, et pour des questions de politique politicienne on empêche quelqu’un parce qu’il est l’adversaire politique, vous acceptez de vivre dans la merde alors que c’est votre capitale économique. Il n’y a que les nègres pour accepter ces genres d’imbécilité.

Vous avez été Ministre des sports, quel regard avez-vous aujourd’hui sur le sport béninois, notamment le football que vous aimez tant !

Vous savez, on me parle du sport que sous le prisme de football, nous savons tous que le football est le sport roi. Mais je l’ai dit et je le répète, le sport commence à l’école, le jour où les béninois se diront que le sport, ce n’est pas seulement que football, tel que même si vous parlez de football, mais il n’y a pas de génération spontané, cela commence à l’école, je donne un exemple, les Jamaïcains ont priorisé eux l’athlétisme comme étant leur football. C'est-à-dire, c’est leur moteur au niveau des sports dans leur pays. Mais Usain Bolt que vous voyez aujourd’hui, a commencé dans les championnats scolaires, dans les lycées et il avait 10,11, 12 , il a gagné des championnats scolaires. Quand je suis arrivé au ministère des sports, j’ai mis le point sur quatre axes. Le premier axe, le retour du sport à l’école, le deuxième axe, la question de la formation des éducateurs, s’il n’y a pas de bons éducateurs, vous vous rendez compte qu’au Bénin nous avons l’Injeps à Porto-Novo, qui forme des éducateurs sportifs. Tous les pays de la sous-région envoient es cadres et qui sont formés pour le retour dans leurs pays. Le seul pays qui s’en sert le moins bien c’est le Bénin alors que l’Injeps est implanté au Bénin. Après j’ai parlé de la question des infrastructures et la dernière question c’est celle du financement. Mais si vous voulez que les hommes d’affaires investissent dans le sports, il faut qu’on ait une loi cadre pour les inciter à investir et aussi en tirer des bénéfices. Une entreprise n’a pas à investir dans un sport quel qu’il soit s’il n’est pas régi, s’il doit refaire son image, s’il doit gagner en compensation, rien n’est fait et je terminerai en vous disant, que pendant la crise on disait que Ganiou fait partie du camp Anjorin, en oubliant que ce même Président Anjorin, quand j’avais été président des Requins, était vice-président de la Fédération béninoise de football et m’en avait fait voir de toutes les couleurs. Mais quand vous arrivez à devenir ministre de la République, vous n’êtes pas là pour régler vos problèmes personnels. Ce que nous avons fait, nous avons dit à tous les acteurs du football de l’époque, que les problèmes de la famille football doivent se régler entre nous. Nous avons fermé la porte, nous nous sommes enfermés et nous avons sorti les journalistes, nous avons réglé nos problèmes. Voilà comment cela s’est passé et à un moment donné, vous êtes là les choses se passaient convenablement. Quand des gens sont venus me voir, et qui étaient du même camp à l’époque du Président Anjorin, pour dire nous voulons que vous nous aidiez à faire un push, vis à vis du Président Anjorin, je leur ai dit que cela ne se passera pas de mon fait. Vous vous rendez compte , si nous revenons au football, que ce sont les mêmes acteurs que vous voyez depuis des années. A un moment donné ils sont ensemble, à un autre ils ne le sont plus. C’est vrai à moment donné il peut y avoir des guéguerres d’intérêt, mais est-ce que cela résout les questions de l’organisation du football béninois. Il y a de cela 30ans les gens même de la sous-région venaient voir des matchs Dragons Requins ici à Porto-Novo ou à Cotonou. Il y avait 40 mille personnes au Stade de l’Amitié. Aujourd’hui, Dragons- Requins si vous voyez 2000 personnes c’est même trop. Donc à un moment donné, il faut se rendre compte que même si on veut gagner on se tire des balles dans les pieds. Parce que, à un moment donné si on veut retirer des bénéfices d’une action il faut que toutes les composantes se retrouvent pour porter. S’il y a beaucoup de gens au stade, les sponsors mettront de l’argent parce qu’ils vont dire, teins, il y a beaucoup de gens qui viennent, moi aussi mon image peut en gagner. Mais s’il y a une guéguerre perpétuelle qui va y mettre de l’argent ?

Et si je vous demandais de conclure

Je vous remercie d’abord de m’avoir donné cette opportunité, ce fut très agréable. Je pense que j’ai passé un très bon entretien avec vous, avec des questions pertinentes et très intéressantes. J’espère que nous aurons l’occasion prochainement d’avoir d’autres discussions avec vous, peut-être un peu plus chiffré, surtout dans le domaine de l’agriculture. J’aimerais pouvoir discuter avec vous sur des dossiers précis et beaucoup plus pointus, décortiquer la loi des finances qui a été votée tout dernièrement à l’Assemblée par rapport au ministère de l’agriculture et voir quels sont les avantages qu’on peut en tirer, mais aussi analyser les inconvénients à la lumière de ce qui se fait ailleurs. Je crois que votre quotidien est reconnu comme l’un des meilleurs de la place et sur la toile. Ce serait donc avec un plaisir affirmé que je vous reverrai.

Réalisation: A. J. BOCO et A. SASSE
Transcription: A.S. et Th. AZANMSSO

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