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Aujourd’hui le Bénin d’hier
Publié le samedi 20 juillet 2013   |  L`Araignée




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Il y a ceux qui, pour une bouchée de pain, marchent en scandant qu’ils veulent la révision de la Constitution. Ils ne croient pas un mot de leurs criailleries, mais l’emploi et l’argent ont déserté le pays, et si les sbires du régime vous jettent des piécettes, vous êtes prêt à dîner avec le diable sous le soleil de Parakou devant les caméras de la télé. Il y a celles qui, ce dimanche-là, sur ordre du Ministère de la Pauvreté des Femmes, se sont endimanchées et sont allées s’étaler sous une tente à la plage pour contempler et acclamer le prince régnant venu reboiser l’océan. Les applaudisseuses étaient visiblement médusées, sachant ce que le vent, le sable, les vagues feraient en trois jours des plans de cocotier alignés en présence de la télé. Mais pour les miettes qu’on leur a jetées au nom de leur immense pauvreté, elles étaient bien obligées de prouver leur fidélité en allant sourire à l’absurdité.
Il y a les médias qui, au garde-à-vous, laissent passer les chars et les éléphants et qui, au coup de sifflet, entonnent les commentaires commandités pour saluer les hauts faits de très grande importance pour notre démocratie et notre développement, telle cette sortie dominicale balnéaire vraiment fantastique. Le Régime, il est vrai, a passé des contrats ‘‘juteux’’ avec nos médias pour qu’ils ignorent que le Bénin, en 2013, est le troisième pays le plus pauvre d’Afrique, le huitième plus pauvre du monde, et le deuxième en matière de trafic de stupéfiants juste derrière la petite Guinée-Bissau à qui il pourrait bientôt ravir la première place. Nos medias doivent mépriser ces ragots et porter haut l’émergence, la prospérité partagée, la refondation, le RAMU, et tutti quanti, dans notre beau pays où l’on fait maintenant la promotion des cultures vivrières pour ruiner définitivement sur place les affaires cotonnières de l’ancien ami, quitte à ruiner aussi notre seule culture de rente.
Voilà aujourd’hui le Bénin. Mais ce fut déjà ainsi hier, au temps du Parti de la Révolution Populaire du Bénin (PRPB) d’effrayante mémoire, sous la bannière d’un marxisme-léninisme d’opérette protégé par nos casernes emplies de fusils débarqués de la Corée du Nord. Et nous étions traumatisés, tremblants et silencieux. Dans les milieux universitaire et syndical, par exemple, les sbires du régime venaient ‘‘cueillir’’ nuitamment ou au petit matin un collègue, un étudiant, un camarade, et nous ne pipions mot car nous avions trop peur de devoir subir, nous aussi, les affres concentrationnaires de Sêgbana. Ceux qui en sont revenus en portent toujours les douleurs. C’était la pensée unique, il ne fallait pas dire un mot ni faire un geste qui dépasse. Certains n’avaient pas accepté la camisole de force. On les déporta et tortura. Dans l’ombre.
Aujourd’hui, mutatis mutandis, nous sommes revenus au temps du PRPB de violente mémoire. Outre les morts bizarres, les marcheurs au soleil sans-y-croire et les applaudisseuses à la plage sans-y-croire, il y a, comme hier, des départs en exil pour raison de salut personnel. L’un de ces départs a laissé sur le carreau plus de huit cents travailleurs, qui n’ont plus de revenu pour nourrir leurs familles. On s’en bat l’œil. En sus on laisse croupir en prison des compatriotes que la justice a lavés de tout soupçon et dont elle a réclamé par deux fois la libération immédiate. Quelle justice, quels juges ? ‘‘Ils sont trop petits !’’
Mais ‘‘ça’’ finira. Sous le PRPB, il vint le temps où, après avoir hurlé sur ordre ‘‘Prêt pour la révolution, la lutte continue’’, nous ajoutions, tremblant de peur et à voix basse, ‘‘dans les deux camps’’. Le parti était unique, le camp était unique. Il y avait donc du courage à murmurer l’existence d’un deuxième camp en lutte. Et un jour, le peuple qui murmurait éleva le ton et organisa la résistance pacifique contre l’arbitraire et le déni des droits de l’homme. Et la résistance l’emporta.
La résistance l’emportera toujours.

Par Roger Gbégnonvi

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