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Talon, âge de 40 ans, LEPI et présidentielle 2016 :Kamarou Fassassi se prononce
Publié le jeudi 20 aout 2015  |  La Nouvelle Expression
Le
© Autre presse par DR
Le ministre Fassassi Kamarou




(Il signe ainsi son retour en politique)
L’ancien ministre de l’Energie de Kérékou, Kamarou Fassassi, sort de son mutisme, face à la riche actualité du moment marquée par l’entretien télévisé de Patrice Talon et la décision DCC 15-156 du 15 juillet 2015 de la Cour constitutionnelle. Dans cette interview exclusive, il soutient qu’en 2016, le peuple béninois qu’il juge futé, aura à choisir entre la stabilité et l’errance. Il appelle par ailleurs à une correction de la LEPI avant cette échéance et invite la classe politique à davantage animer la vie politique nationale.

Nouvelle Expression : Vous êtes sans conteste un des hommes politiques béninois qui ont acquis un certain nombre d’expériences dans le domaine politique dans notre pays. Le peuple est en droit d’attendre de vous des conseils, des orientations pour faire avancer sa cause. Mais on constate un silence obstiné face aux événements que connaît actuellement le pays. Pourquoi donc cette attitude ?

Kamarou Fassassi : Vous avez a priori raison. La dernière fois que j’ai été l’invité d’un journal télévisé remonte à l’année deux mil huit (2008). J’interviens cependant - il est vrai rarement – dans la presse écrite ou même audiovisuelle. Je me suis interdit à mon âge et au niveau de mon expérience, la politique- spectacle.
L’heure est grave ; la situation au Bénin n’est pas bonne. Je reçois beaucoup et je me rends chez des amis pour discuter de tout ce qui concerne notre pays. C’est ainsi que j’ai lutté contre la LEPI en élaboration en 2014 car je craignais une liste électorale non consensuelle et partisane. J’ai signé et fait signer une pétition initiée par le Front Citoyen du Professeur Antoine Détchénou. Cette LEPI est déjà meilleure que la LEPI K.O. La LEPI remaniée dans les conditions contraires à certaines lois de la République a été adoptée ; ce que je craignais est arrivé. Les partis représentés au niveau du COS-LEPI ont réussi à avoir des scores étonnants au niveau des différentes communes où ils sont relativement implantés. Je n’ai pas besoin d’un dessin, il suffit de remarquer les bonds spectaculaires réalisés par ces partis dans leurs régions de prédilection.
Vous constaterez également que la plupart des membres du COS-LEPI ont été élus magistralement députés ou maires au terme de ces élections.
C’est vrai que cette LEPI constitue une avancée par rapport à la LEPI K.O élaborée par deux (2) personnes. Je discute donc des problèmes de la Nation et j’en arrive à la conclusion que la démocratie est dévoyée. La classe politique a atteint un niveau de putréfaction très avancé.
Je ne suis pas donneur de leçons, je suis un acteur de cette classe politique. Je ne fais que constater. Notre classe politique ne joue pas son rôle d’animation de la vie politique nationale. C’est plutôt les syndicats, les magistrats, la partie de la société civile non partisane qui essaient de suppléer à la classe politique.

Vous vous condamnez en quelque sorte ?

Oui, mais je viens de traverser une longue période où le pouvoir m’a intimidé comme d’autres et a fait pression sur moi. Je fais allusion à ma traduction, par le gouvernement, devant la Haute Cour de Justice. Tout a été fait pour me confiner dans les strictes limites de la défense de mes intérêts. Mais vous devez reconnaître que j’interviens malgré cela, chaque fois que nécessaire.
Je profite de l’occasion pour remercier les magistrats de la Chambre de l’Instruction que je ne connais pas du tout, qui en prenant la décision de ‘’non informer’’ m’ont convaincu que la Justice béninoise n’est pas si corrompue que ça. Je pense à Michel Adjaka qui, avec ses amis, abattent un important travail à leur niveau. Je remercie également tous ceux qui m’ont soutenu, notamment les journalistes, des députés, l’Union fait la nation (UN) et les nombreuses personnes anonymes éprises de justice.
Barack Obama a souhaité pour les pays africains des ‘’institutions fortes et non des hommes forts’’. Au Bénin, il n’y a curieusement ni institutions fortes ni hommes forts. Prenez la Présidence de la République. La fonction présidentielle est désacralisée au point que le Chef de l’Etat est traité moins que rien.
Le Chef actuel, il est vrai, a largement contribué à cette situation. Nous avons échappé à la catastrophe lorsque l’Assemblée nationale a élu le président Adrien Houngbédji à la tête de l’institution. Si c’était Komi Koutché « qui est dans sa quarantième année » qui avait été élu, il est à parier qu’il aurait continué à faire du parlement « la Voix de son maître ».
Mais les députés élus avec la LEPI modifiée ne sont pas toujours ceux que le peuple aurait aimé voir dans cette institution. Je salue et félicite cependant les hommes réellement du peuple qui y siègent. Mais je crains une majorité à « géométrie financièrement variable » au cours de chaque vote.
Prenez par exemple la cour des sages que certains appellent la « Cour des miracles » qui, contrairement à l’article 44, quatrième alinéa, trouve que si on est dans sa « quarantième année », on peut postuler à la Magistrature Suprême. Dans ces conditions, ne soyons pas étonnés que certains pensent que le Président de la République qui n’a que cinq ans à faire au terme de son mandat, demande à ne partir que le 31 décembre 2016 parce que dans la cinquième année de son mandat. Quand je vois les insultes qui fusent de partout, j’ai mal en mon institution.
J’ai déjà dit tout le bien que je pense du COS-LEPI où les animateurs sont à la fois juge et partie ; tout cela est à revoir. Les mentalités doivent changer et ensemble, nous devons réorienter cette démocratie chancelante qui fait désormais honte. A-t-on le temps d’organiser un dialogue national avant les élections ? Le génie béninois nous sortira de l’impasse.
La dernière tentative d’un dialogue a connu un échec. J’étais membre du comité préparatoire chargé d’organiser ce dialogue et je puis vous dire que l’odeur de l’argent, autant que les intérêts partisans, n’ont pas permis d’y aboutir.
Personnellement, j’ai cru en la « Plateforme des partis politiques de l’opposition », mais ma désillusion a été totale lorsque j’ai remarqué des mains invisibles qui faisaient la loi.
Beaucoup de choses sont à revoir avant les élections, sinon on ne sortira pas de l’auberge et l’argent peut conduire à la chienlit.

Vous faites allusion aux hommes d’affaires qui ont décidé de se présenter à la prochaine élection présidentielle ?

Même si je pense qu’il n’est pas sain de détenir à la fois le pouvoir politique et le pouvoir économique, ces hommes d’affaires ont le droit de se présenter dès lors qu’ils sont Béninois, ne sont pas dans « leur quarantième année ou dans leur soixante dixième année ». Ce n’est pas un problème car, le peuple béninois qu’on dit attiré uniquement par l’argent, est au contraire un peuple averti ; et une fois encore, il va étonner en février 2016. En outre, les hommes d’affaires ont raison car, ils en ont assez des politiques qui prennent leur argent à ne rien faire et qui, souvent, se retournent contre eux une fois l’argent consommé.
Le peuple aura à choisir, après dix années d’errance, entre le camp de la stabilité ou celui de dix autres années d’errance.
Au fait, ce n’est pas le peuple qui est vénal, c’est la classe politique qui est corrompue et doit être réorganisée. Il faudra beaucoup moins de partis et quelques subventions de l’Etat à ceux qui seront constitués. Il faut que tous, nous y pensions.
Les Béninois que nous sommes étonneront une fois encore le monde. Il suffira, pour cela, d’avoir en tête la nécessité de l’unité nationale, de rassembler toutes les forces pour enfin emprunter la voie réelle du développement. Il faut que tout le monde ait à l’esprit que nous sommes au bord du gouffre.

Que pensez-vous des états civils qui disparaissent miraculeusement ?

Vous faites allusion à l’actualité, certainement. Encore une fois, je suis pour que tout Béninois qui le désire, qui remplit les conditions exigées par notre loi fondamentale, puisse être candidat. Beaucoup de gens pensent que l’argent donnera des armes inégales aux candidats, mais il faut que chacun sache que c’est principalement certains animateurs de la classe politique qui en profiteront et non les populations. Sur cent francs remis aux « grands électeurs », dix francs seulement parviendront au peuple. Au final, l’argent ne pourra pas trop peser dans la mesure où il ne parviendra pas de façon significative aux électeurs. Et puis, les électeurs veulent sortir du gouffre dans lequel ils se trouvent. De la même façon, il faut accepter que certains cherchent par tous les moyens à se faire remplacer par des gens qui couvriront leurs arrières. C’est humain, car encore une fois, le peuple béninois est plus futé qu’on ne le pense.

Et vous qu’on ne voit pas sur le terrain, que pensez-vous faire ? Serez-vous candidat ?

Vous savez, il y a deux mois environ, lorsqu’il s’est agi d’embastiller un de nos compatriotes, bien que je fusse malade, je me suis levé du lit pour aller protester avec d’autres et contribuer à empêcher l’arbitraire.
Pour le reste, laissez-moi le temps de vous répondre dans quelques semaines. Au regard de la situation actuelle, il urge de mettre la balle à terre.
Je prie pour l’unité, la réconciliation afin que prochainement, tout le monde s’attèle à la tâche de la paix et de la reconstruction nationale.
Dieu nous donnera un Rassembleur et non un Diviseur.

Propos recueillis par Brice OGOUBIYI
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