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Edito: Machin le général
Publié le mercredi 4 septembre 2013   |  L`événement Précis


Général
© Autre presse par DR
Général Mathieu Kérékou, ancien président de la république du Bénin


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Il ne manquait plus qu’un bal pour célébrer les 80 ans de Mathieu Kérékou. Le vieux a été chouchouté lundi par ses proches ainsi qu’une bonne partie de ses anciens collaborateurs venus lui dire leur happy birthday. Comme à son habitude, Boni Yayi s’est invité à la partie, profitant de l’occasion pour dire son mot sur l’homme du peuple et le patriote qu’est l’ancien président. Et tout le monde a constaté l’agacement serein du général resté silencieux au long des hommages bruyants qui lui ont été rendus.

D’aucuns ont vu dans ce silence, mépris, dédain ou réprobation. Envers le Chef de l’Etat ? Envers ceux qui l’exhibent devant les caméras comme une bête de foire ? Est-ce aussi une malice du caméléon qui se tait obstinément pour mieux se faire entendre au moment opportun ? Mystère.

Il est clair, en tout cas, que l’homme est resté de marbre, même face à la joie débordante de ses proches. Happy birthday ? Il s’en fout. Il y a dix ans, ceux qui ont organisé l’anniversaire de ses 70 ans l’ont regretté amèrement. Les festivités ont été boudées par le vieux et les organisateurs se sont contentés d’une célébration minimale. D’autant d’ailleurs que peu d’entre eux savaient pourquoi Mathieu Kérékou répugnait si ouvertement à sabler le champagne les 02 septembre, jour supposé de son anniversaire>

Ces mondanités devaient, à l’époque, permettre à quelques-uns de se hisser davantage dans le cœur du vieux ou encore de marquer des points dans leurs fiefs. La froideur du général a tout chamboulé.

Dix ans après, la même froideur, la même indifférence du vieux qui semble toujours se moquer de tout ce monde. Qui semble surtout demander avec insistance : pourquoi tant de bruits autour d’une date que l’on sait symbolique ? Le Professeur Félix Iroko qui a publié une biographie de l’homme (Mathieu Kérékou, un homme hors du commun, Nouvelles éditions du Bénin, 2001), n’en dirait pas moins, lui qui a constaté que même l’âge qu’on lui donne est tout sauf exact. Même l’âge, et à plus forte raison la date de naissance…

Pour un général cultivant un mode de vie simple voire ascétique, la célébration n’en est que plus folklorique encore. Plus que tout le monde, il connait les intentions cachées de tous ceux qui se pressent autour de lui. Ne comptons pas dans ce lot sa famille. Il y a aussi toutes ces personnalités qui lui vouent un culte presque filial, notamment Valentin Houdé, Christian Lagnidé, Thiburce Montcho ou encore quelques rares hommes politiques faisant déjà partie de la « famille » du général. Pour le reste…

Ce qui est devenu évident, c’est la récupération de l’image tutélaire représentée par le général. En passe d’être une icône dans la conscience populaire, Mathieu Kérékou continue de représenter, surtout pour les Béninois, d’un certain âge, un modèle achevé de patriotisme et de leadership politique. Ses silences et ses boutades ampoulées lui construisent un statut d’homme à part, de celui qui maitrise le landernau politique de chez nous.
Dans cette image idéalisée jusqu’à la caricature, une certaine opinion ne retient que l’habile stratège et avant tout celui par qui le Bénin a pu renouer avec la démocratie. Villes et campagnes lui rendent un hommage impérissable. Ce que l’on célèbre, c’est celui qui, à un moment de l’histoire de ce pays, à la manière de Moïse à la tête du peuple juif, nous sauva du gouffre. Et cela eut lieu au moment précis où le basculement dans le sang était redouté de tous. Ils oublient la banqueroute des années 80, la dictature et ses inévitables dérives. Ils oublient le délitement économique et la valse des scandales. Et ils retiennent celui qui préserva l’unité nationale et la paix.

Voilà l’homme. Fait de contradictions, ambigu et à la limite manipulateur. Mais d’une lucidité inébranlable. A cet âge de sagesse, l’anniversaire de cet homme d’Etat exceptionnel nous revient comme la célébration de toutes ses contradictions qui font malgré tout la trame d’une vie somme toute perfectible.

Et c’est pourquoi, je plaide pour qu’on lui colle la paix. Qu’on cesse de l’instrumentaliser comme un machin politique ou un instrument électoral à l’heure où est venu pour lui, le temps de la méditation et du repos.

Par Olivier ALLOCHEME

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