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Léon Bio Bigou parle des réformes à l’Uac et de la présidentielle de 2016
Publié le vendredi 16 octobre 2015  |  Fraternité




La nécessité des réformes à l’Université d’Abomey-Calavi, sa vision de l’animation de la vie politique et la présidentielle de 2016. Ce sont les grands points abordés par l’ancien parlementaire et Secrétaire général de l’Université d’Abomey-Calavi (Uac), le Dr Léon Bani Bio Bigou. Prolixe et très chaleureux au cours de l’entretien qu’il a accordé à Fraternité dans son bureau à l’Uac, le maître de Conférence des universités et géographe de formation est, à l’occasion, revenu sur son parcours politique et aussi sur le profil idéal du prochain président de la République. Mais, pour le natif de Gogounou et leader du Forum africain pour la restauration, la réconciliation et l’émergence (Farre), il y a une certitude, le président du Bénin en Avril 2016 ne sera pas issu de sa formation politique. Entretien.

Le rectorat vient de prendre la décision des inscriptions sur étude de dossiers. Qu’est-ce qui justifie cette réforme ?
C’est très simple, lorsqu’on a une grande institution comme l’université, où je parle même des universités nationales de notre pays, qu’on l’accepte ou pas, les cadres de demain sortiront nécessairement de ces universités. Donc, ça veut dire que selon la qualité de la formation au niveau des universités nationales, cela aura nécessairement un impact sur l’avenir de notre pays parce que c’est une question de génération. Ceux qui sont aujourd’hui nos apprenants, nos étudiants, ce sont eux les vrais responsables de demain. Donc, la qualité du Bénin de demain dépend de la qualité de ceux que nous formons aujourd’hui, qu’on le veuille ou pas. Et par rapport à cela, au fur et à mesure que le gouvernement essaie de faire des efforts dans tous les domaines, nous aussi, au niveau de l’Uac nous nous disons qu’il faut tout faire pour accompagner le gouvernement. Ceci, en essayant de voir en termes d’infrastructures ce qu’il faut faire face au flux de nos apprenants de plus en plus grandissant. C’est ce qui nous a amené d’abord à penser à ce que nous avons appelé ‘’téléthon’’ pour accompagner le gouvernement dans la construction des infrastructures. Il y a de nouvelles initiatives, et la priorité est donnée à l’emploi des jeunes. Le tout ne suffit pas de former pour former. Mais ceux-là que nous formons deviendront quoi et seront quoi ? Nous sommes aussi conscients du devenir de ces apprenants en matière d’emploi. Et vu tout ce qui est en train de se passer, on dit qu’il faut revoir le système de formation qui peut être en adéquation avec l’emploi. Il ne faudrait pas qu’il y ait toujours un hiatus entre la formation et l’emploi. Donc l’objectif, c’est de former pour que les gens puissent trouver de l’emploi et en cela, que le pays puisse se développer. Et c’est en cela qu’il y a aussi des réformes au niveau de nos différentes entités. Parlant des reformes, ce n’est pas du jour au lendemain qu’on trouvera de l’emploi à tout le monde. Il faut les y préparer. C’est en cela que nous avons pris cette initiative de créer ce service que nous avons appelé ‘’le service des volontaires de l’Uac’’. Quand ils finissent, au lieu de s’inscrire directement en master, ils restent toujours dans la théorie. Il faut au moins qu’il y ait un minimum de dix mois à un an de pratique sur le terrain. Et après, quand ils reviennent, c’est encore d’autres types d’étudiants qu’on a. C’est ainsi que nous avons pris cette initiative-là. Je crois que la première édition était composée de 400 étudiants, et à la fin, quand on a évalué les 400, il y a au moins 50 qui ont trouvé un emploi permanent. Ce n’est pas beaucoup mais c’est quelque chose. Et l’édition qui a suivi, il y a encore eu beaucoup plus. Parmi ceux qui ont trouvé un emploi permanent, il y en a qui ont pu déjà développer les capacités de leurs compétences pour leurs propres activités pour ne pas toujours être au niveau de l’indigence. Voilà pourquoi nous continuons dans ce sens-là. Et comme le gouvernement aussi a brutalement parlé des volontaires, nous lui disons donc, s’ils ont les moyens par rapport à des projets et le financement, nous, nous pouvons prendre plus et autant de volontaires que nous pouvons. Et le système de volontariat, je vais vous dire comment cela se fait. Avant de l’instaurer, nous avons invité tous les maires, et surtout ceux des communes dans lesquelles nous avons des campus pour leur dire un certain nombre de choses. Entre autres, ce qu’ils peuvent tirer de leur université. Notre université fait partie de celles qui ont eu l’idée des réformes qui consistent à faire des universités nationales des universités citoyennes. Donc, des universités qui doivent résoudre le problème des citoyens. Et c’est en fonction des problèmes des citoyens que nous pouvons revoir notre système de formation. S’il y a des spécialités ou des filières qui n’existent que pour produire des chômeurs, progressivement, nous allons y remédier. D’autres filières n’existaient pas, mais si on voit qu’aujourd’hui, on en a besoin par rapport à l’évolution du Bénin, alors il faut les créer. D’où les nouveaux masters que vous voyez, des écoles doctorales pluridisciplinaires et ainsi de suite. Ça fait donc partie des réformes. Quand vous parlez par rapport aux dossiers, c’est vrai, tout le monde n’a pas la même appréciation de la décision du gouvernement à savoir créer des universités ou des centres universitaires. Je fais partie de ceux à qui notre ministre de tutelle a fait l’honneur de confier un certain nombre de choses au début pour la création des centres universitaires. Il m’a fait l’honneur, et donc j’ai contribué à la construction des centres universitaires. Et lorsqu’au niveau de l’opinion publique, les gens critiquent en disant que l’on crée les universités comme des Ceg, je demande s’ils savent vraiment de quoi ils parlent. Nous finissons l’année ici avec 112000 étudiants. Et les amphis de 1000 places que nous avons sont à peine cinq. La Fadesp pour ne donner que cet exemple, il y avait une année où ils étaient 11000 étudiants. Ça veut dire que c’est une question de spécialité. Un professeur dans sa spécialité, pour un amphi de 1000 places, raisonnablement, s’il veut que les étudiants soient assis, il doit répéter ça 11 fois. D’où va-t-il puiser toute cette énergie ? Pour évaluer cela, à supposer que chacun compose à l’évaluation et que ce ne soit pas des étudiants fantaisistes. Et aussi que chacun écrive seulement une page. Ça fait 11000 pages. Alors, il faut combien d’enseignants et quel délai pour corriger tout ça ? Donc, il ne faudra pas que les gens parlent en l’air. Il faut parler de ce que l’on connaît. Et c’est pour cela que je prends l’exemple des pays comme le Nigeria, l’une des plus grandes et plus anciennes universités, celle d’Ibadan, lorsqu’on s’y était rendu, il y avait seulement 20000 étudiants. Pourquoi il en est ainsi ? Parce que ne viennent à Ibadan que ceux qui ont fini et qui veulent entamer l’étape des masters et de doctorat. Donc, jusqu’à ce niveau, ils sont formés dans des centres universitaires parce que le Nigeria a au moins 6 universités fédérales et chaque État a au moins une université. Donc, ça veut dire que si dans une université le nombre est plein, ils ont la possibilité d’aller choisir ailleurs. Du coup, on peut pratiquer cette politique-là ici, et ceux qui ont fini avec leur Licence partout peuvent venir s’inscrire pour le master ou le doctorat. Mais si vous ne donnez pas la possibilité de choix aux étudiants, ils vont faire quoi ? Qui ne voudrait pas que son enfant aille à l’université ? Et à la rentrée, tous ceux qui critiquent cela courent pour que leurs enfants soient inscrits dans telle ou telle école au détriment des facultés. Alors, les pauvres paysans qui ne connaissent personne, eux ils deviennent quoi ? Leurs enfants n’ont pas droit à ça ? Voilà pourquoi, l’idée du gouvernement de créer des centres universitaires est une très bonne chose. Et il faut accompagner cela. Alors, au fur et à mesure qu’on crée des centres, si par exemple nous ici à l’Uac, notre capacité réelle pour qu’on se sente quelque peu à l’aise, c’est 50000 étudiants et même avec la création des centres on est à 90000 étudiants, inscriptions validées. Or, notre capacité réelle est de 50000 étudiants. L’université de Parakou par rapport à ses infrastructures ne peut contenir que 15 à 20000 étudiants. Donc au total, 70000 réellement pour que les gens travaillent correctement au niveau de ces deux universités qui sont les deux nationales. Or l’Uac était partie jusqu’à 112000 étudiants. Du coup, si nous disons que nous inscrivons les étudiants au niveau de la capacité d’accueil, à 50000 c’est terminé. Et Parakou dira la même chose. Alors le reste ira où ? C’est pour cela que quand j’ai l’occasion d’en parler, je dis, mais nous connaissons le problème et nous connaissons la solution. Mais elles ne sont pas applicable ces solutions-là.

L’inscription sur l’étude des dossiers est à vous entendre, une manière de limiter le nombre d’étudiants que vous recevez ?
J’y arrive... Maintenant quand l’État va dans le sens de donner des possibilités de choix aux nouveaux bacheliers, alors progressivement, il faut adopter un système qui permette à l’Uac de ‘‘dégrossir’’. Et en tenant compte de l’effectif pléthorique des étudiants dans certaines facultés, nous avons pris la décision que les enfants déposent directement leur dossier au niveau des établissements. Et les chefs d’établissement, en tenant compte de leur capacité, accepteront leur dossier qui sera transmis au rectorat pour affichage. Ce n’est pas le rectorat qui fait l’étude de dossier mais les entités. Cette une décision qui découle de la politique du gouvernement de ‘‘dégrossir’’ l’Uac et de donner beaucoup plus de possibilité de choix aux apprenants.

On apprend qu’il n’y aura pas d’inscription en première année à la Flash. Est-ce une vérité ou une rumeur ?
Nous savons qu’il y a au moins l’anglais, la géographie et la sociologie à la Flash de Parakou. Les autres départements ne sont pas encore transférés là-bas. Concernant ces trois départements, si l’Uac n’arrive pas à prendre tous les étudiants, elle retient ceux qu’elle peut contenir et le reste sera envoyé à Parakou ou à Aplahoué. Il y a aussi l’idée de permettre qu’il y ait un brassage au niveau des jeunes. C’est une très bonne idée d’aller vers les universités thématiques. Ce ne sont pas des universités de commune ni de région. Ce sont des universités nationales. Voilà la philosophie que nous voulons progressivement mettre en œuvre.

Est-ce que les responsables d’étudiants sont associés à cette réforme ?
A notre niveau, nous avons la tête sur les épaules. Il y a des niveaux de décisions où nous ne pouvons pas associer les étudiants. Ils sont représentés au Codir mais ils ne sont pas représentés à la réunion des chefs d’établissements. Nous savons à quel niveau il faut les associer.

Est-ce qu’il peut arriver qu’un dossier soit rejeté ?
Je n’ai pas sous la main la capacité d’accueil par établissement. Les établissements vont examiner les dossiers en fonction du nombre qu’ils peuvent prendre.

Est-ce que cela ne pénalise pas les enfants de pauvres ?
Quand je suis venu à l’Uac, je ne connaissais personne et en plus, je n’avais pas de bourse. Je connais ce qu’un étudiant vit sans bourse parce que je l’ai vécu. Parce que je savais ce que je voulais, j’ai affronté les difficultés. C’est ainsi que je suis resté à Calavi. Dans tous les pays, l’enseignement supérieur public n’est pas totalement gratuit. Il y a toujours quelque chose à payer. L’objectif est de voir comment faire pour que les enfants étudient dans de bonnes conditions. Si on attend que tout vienne de l’Etat, j’ai bien peur qu’on n’atteigne pas l’objectif.

Quelles dispositions prenez-vous pour qu’il n’y ait pas de violences à cause de l’application de cette réforme ?
Aucun cadre sérieux, dans son parcours académique, ne peut dire qu’il n’a pas participé à un moment donné à un mouvement de revendication. Moi, j’en ai fait. Donc, on n’empêche pas les étudiants de revendiquer, de demander l’amélioration de leurs conditions de travail, on l’a fait nous-même, alors pourquoi va-t-on interdire aux autres de le faire. Tout réside dans la manière de le faire. Si les étudiants disent on n’est pas content, nous demandons à ce que nos conditions soient améliorées, alors qu’est-ce-que nous pouvons faire contre cela ? Mais la solution ne réside pas dans le sabotage des infrastructures de l’université. Casser les vitres, brûler les infrastructures universitaires n’est pas la solution. Alors là, quel est le rapport entre l’amélioration des conditions de travail qu’on demande et la destruction des instruments de travail ? Les revendications académiques fondées, il y a une manière de procéder. Les dernières violences auxquelles nous avons assisté ont créé d’énormes dégâts. Personne n’a aimé cette violence. Est-ce-que vous avez appris une seule fois qu’un membre de l’équipe rectorale a interdit à un étudiant de revendiquer ses droits ? Jamais cela n’a été le cas. Mais nous disons qu’il n’est pas question d’utiliser des armes blanches. Que des étudiants prennent des bâtons contre leurs propres camarades étudiants, il n’en ait pas question. Au niveau de l’équipe rectorale, nous sommes garants de la sécurité des personnes et des biens. Parce que l’université, c’est un lieu de savoir. Et donc, il y a des manières pour s’y prendre. Dire aux camarades de ne pas venir au cours, ce n’est pas la solution. Si nous qui sommes là pour assurer la sécurité des uns et des autres, si nous nous taisons, qui va le faire alors ? Quel est ce droit qui permet à quelqu’un de prendre un bâton pour frapper son camarade ? Aucun. Nous sommes dans un pays de droit. Quel parent sera d’accord ou bien content de voir son enfant quitter la maison en bonne santé et revenir blessé ? C’est pour cela qu’il est important pour l’équipe rectorale de prendre ses mesures afin d’éviter des situations du genre. Il vaut mieux que les choses soient très claires par rapport à un certain nombre de questions liées à la sécurité des personnes et des biens dans l’enceinte du campus.

Dites-nous alors dans quelle mesure les forces de l’ordre vont-elles quitter le campus ?
Tout dépend de la sécurité et du climat qui règnera sur le campus. Personne n’a envie que la présence des forces de l’ordre sur le campus soit continue. Bien au contraire, leur présence nous fait dépenser nos maigres ressources. La sécurité des personnes et des biens n’a pas de prix. Cela dépend du comportement des usagers.

L’Honorable Léon Bani Bio Bigou n’est pas un inconnu sur la scène politique. Est-ce que les lecteurs peuvent en savoir plus sur votre riche parcours politique ?


Effectivement, je suis un ancien parlementaire car j’ai siégé à l’Assemblée nationale de 1998 à 2007. Et vous savez avec moi que quand on parle de député, ce sont des partis politiques. Et le parti politique dont j’étais membre à l’époque, c’est le Fard-Alafia que tout le monde connait. J’ai commencé mon apprentissage politique en 1989. Et mon entrée en politique a commencé par la réflexion. En effet, lorsqu’il s’est agit de la réflexion politique autour du Pmpb, des ambitions ont commencé par voir le jour. On était une quarantaine dans tous les départements. Et nous nous sommes dit est-ce qu’il ne fallait pas transformer notre groupe de recherche scientifique en cercle de réflexion politique ? Si on peut mener des réflexions politiques, alors on peut le faire. C’est ainsi que nous avons créé « Cercle et culture ». Parmi les archives de la conférence de 1990, vous verrez le nom de notre cercle parmi les contributions. Le ministre de l’intérieur Placide Azandé faisait partie même de la troupe ainsi que beaucoup d’autres personnes. Et c’est le groupe-là qui a fait appel au président Maga et lui a demandé de revenir en politique avec le plus jeune parti politique qu’on a créé et qu’on appelle Rdp. Notre objectif, c’est l’unité nationale, c’est ainsi que ce grand parti a fusionné avec d’autres partis à l’occasion du vote du référendum de notre Constitution. C’est à partir de ce moment là que nous avons compris que dans le rang de ceux que nous suivons, il y a certains qui n’étaient pas sains d’esprit et qu’il fallait changer la donne. Et c’est de là qu’en 1991, nous sommes redevenus un groupe de réflexion qui est dénommé « Fard-Alafia ». On a pris trois ans pour créer ce groupe dont j’ai été le Secrétaire général jusqu’en 2003. On n’avait pas de bailleur mais on ‘‘frappait fort’’. Mais dans cette force du Fard, nous avons connu deux problèmes, interne et externe. Le problème interne concerne l’ambition et quand on gagne une élection, il faut savoir gérer la victoire.


C’est à cela que sont confrontés beaucoup de partis politiques. Les ambitions internes sont des facteurs de déstabilisation. Le problème externe est lié aux mouvements et agissements de certains politiciens à cause des élections qui s’annonçaient en 1999 et, ils ont mis de l’argent pour casser le Fard. Ainsi, ils ont réussi à faire démissionner du groupe huit députés et il n’en restait que deux dont moi. On m’a proposé beaucoup d’argent et de véhicule pour que je démissionne du Fard à cause des élections législatives de 1999. Je les ai remerciés en leur disant que je préfère faire ma campagne à pied. On est venu me combattre en hélicoptère dans ma circonscription électorale pour que j’échoue. Même sans grand moyens, j’ai réussi à me faire réélire. En 2007, je ne suis plus revenu parce que l’argent a pris une ampleur et moi je n’en avais pas à distribuer.

Dites-nous de quels moyens usez-vous pour séduire vos électeurs ?
Au moment où j’étais à l’Assemblée nationale, les gens distribuaient de l’argent, sous prétexte qu’ils font campagne. Moi, je laissais chaque mois quelque chose de côté, mais pas pour aller distribuer. Il y a parmi les doléances des populations, des doléances qu’on ne peut pas satisfaire sur fonds publics et des Partenaires techniques et financiers. C’est là que j’apporte un complément pour réaliser des doléances sur fonds propres. Voilà à peu près, l’esprit que moi je développais. Comme j’ai quitté, ceux qui sont venus me remplacer, en principe devraient être sensibles aux problèmes des populations. Depuis 2006 que je ne suis plus à l’Assemblée nationale, j’observe de législature en législature et je constate que le phénomène se renforce. Jusqu’à ce que l’on dise ouvertement, même si on ne vote pas, on va acheter des députés, des conseillers. C’est dangereux. Il n’y a plus de débats, de formations politiques. Il n’y a plus un système où les jeunes se sentent concernés pour être formés, pour prendre la relève demain. Si vous ne connaissez pas ce qui s’est passé hier, comment vous pouvez éviter les erreurs. J’ai toujours le courage de mes idées. Vous prenez mes publications sur le régionalisme, certains ont trouvé que je suis régionaliste, mais je n’ai pas reculé. C’est Maga qui m’a fait connaître Ahomadégbé, Emile Derlin Zinsou et les autres. Quand on aspire diriger son pays, il faut chercher à le connaître. Raison pour laquelle je suis intéressé par l’histoire politique qui tourne autour de nous. Les questions d’idées de régionalisme et autres, c’est une invention des hommes politiques malintentionnés. Ce n’est pas au niveau des populations. C’est pour cela que je préfère mener un débat direct. Chacun apporte ses arguments et si je n’en ai pas, je me soumets. C’est cela être un homme intellectuel. Mais en tant qu’enseignant, je vais l’emporter. Comme vous voyez, j’aime tirer de mon expérience politique, pourvu que cela aide d’autres.

Bientôt, vous publierez un document basé sur vos recherches scientifiques sur les comportements politiques au Bénin. Quand est-ce que les lecteurs peuvent espérer la publication de ce document ?
Je crois que je suis en train de voir si d’ici novembre, je pourrai trouver les moyens pour l’édition. Je suis très avancé pour les écrits.

Après le Fard-Alafia, vous êtes aujourd’hui à la tête du Farre qui est membre de l’alliance Fcbe. Comment se porte votre parti politique ?
Mon intention profonde était de réhabiliter le Fard, de le refonder. Tout ceux qui parlent de Fard Alafia, n’ont jamais remis en cause les objectifs de base. Tous disent que les objectifs sont nobles. Mais, ils tournent autour des problèmes de personnes. Je leur ai toujours dit de ne pas confondre les problèmes de personnes avec les objectifs du parti. Aussi, en 2011, la manière dont la désignation se faisait sur la liste Fcbe ne respectait pas les normes. S’il y a quelque part un problème dans une commune, la chose la plus simple, c’est d’organiser des primaires. Il faut rendre hommage au système Prpb au cours duquel on donnait la possibilité à tous les candidats de monter sur la table. Ainsi, il y avait moins de tension. N’étant pas d’accord sur le système dans le temps, on est parti sur une autre liste qu’on appelait alliance cauris 2. Si vous consultez les archives, vous verrez ce que l’alliance cauris 2 a eu dans la circonscription à laquelle j’appartiens. Je suis un enseignant et il y a des comportements que je ne peux pas tolérer. Ce parti-là est inscrit au niveau des Fcbe et payait régulièrement les 50.000 Fcfa de cotisation. Mais, je ne suis pas allé sur la liste Fcbe parce que du point de vue politique, il y a certains principes, sur lesquels nous ne nous entendons pas. Tout simplement parce qu’au dernier congrès extraordinaire des Fcbe, j’étais dans la commission qui a travaillé sur la manière avec laquelle on irait aux élections. Je sais que la commission a adopté le principe des primaires. Que s’est-il passé pour que les primaires n’aient pas lieu et qu’on retienne des gens sur des listes ? Du coup, cela a créé des frustrations de part et d’autre. Si quelqu’un va aux primaires et qu’il est battu, il va s’en prendre encore à qui ? Je me suis dit qu’il fallait essayer quelque chose avec mon petit parti qu’est le Farre et voir si on est encore capable de vote de sincérité dans ce pays. En réalité, c’est un test. Nous y sommes allés sans moyens. J’ai fait des carnets à feuillets avec leurs souches que j’ai envoyés sur le terrain, puisque mon électorat n’était pas stable.


Au dépouillement, j’ai constaté à travers ce carnet qu’il y a encore des gens qui me sont encore fidèles et à mon parti. Les populations ont cotisé des sous et ont donné des vivres. Lorsque les populations adhèrent à vos idéologies, ils attendent en retour de régler leurs problèmes. J’ai compris leur message. Elles n’ont pas oublié lorsque j’étais leur député. Voilà la conclusion que je tire de ces actions. La première leçon, c’est que le comportement des populations dépend du comportement des hommes politiques. La 2ème, c’est que la manière dont on reste sensible aux problèmes des populations au quotidien détermine leur choix le moment venu, et l’hypocrisie, le mensonge dont fait souvent preuve la classe politique ne sont pas de nature à faire avancer le Bénin. Dans le jugement ordinaire, un homme politique est un menteur ou un voleur. Ce qui est dangereux. Or, ce sont des hommes politiques qui gouvernent, qui sont à la tête de nos différentes institutions. Du point de vue psychologique, cela va conduire à long terme au désastre. Quand on voit des nationalités qui se lèvent contre d’autres dans le même pays, cela veut dire qu’il y a quelque chose qui a raté. Et ces ratés n’ont pas commencé du jour au lendemain. On gère les conséquences des actes passés, mais dont on n’a plus conscience. Voilà pourquoi la formation politique est extrêmement importante pour montrer aux jeunes le sens réel de la politique. L’un des sujets préoccupants aujourd’hui, c’est le ‘’régionalisme’’. En réalité, avant la pénétration coloniale, les contradictions existaient bel et bien à travers la formation des royaumes. Lors des élections, on entend dire que tel est du Nord et que tel est du Sud. Mais, parle-t-on encore de ‘’Nord-Sud’’ après les élections ? Avez-vous vu des paysans s’affronter sans qu’il n’y ait des hommes politiques derrière ? C’est cela qu’il faut combattre. C’est pour cela que j’ai le courage de parler du régionalisme. Je sais d’où ce problème vient. Et si je le sais, c’est parce que j’ai cherché. Pour cela, les hommes politiques ne doivent pas dire n’importe quoi, n’importe comment et n’importe où. Parce qu’on ne connaît pas les dégâts qui pourraient en découler. En 1951, le comité directeur du parti unique ‘’Union progressiste Dahoméenne’’ s’est réuni pour rejeter la demande des conseillers élus dans la partie septentrionale, qui a pour doléance de placer un conseiller sur cette liste unique pour siéger à l’Assemblée nationale française. Au cours de ce comité, quelqu’un a tenu des propos malheureux. C’est les conséquences de ces propos que nous gérons aujourd’hui. Les actes que nous posons, les propos que nous tenons, nous ne pouvons imaginer leurs conséquences dans les 50 ou 100 ans à venir. Jusque-là, personne ne parlait de Nord-Sud. Qui a concurrencé Apithy lorsqu’il était le seul candidat unique au Dahomey ? Secundo, qui a été le directeur de campagne d’Apithy dans le Nord si ce n’est pas Maga ? Tertio, Maga n’aurait pas été ce qu’il a été sans son maître d’Abomey. Maga est d’une famille extrêmement pauvre. Il a fait deux séjours à Abomey et à Bohicon. Lorsque Maga a abandonné, c’est ce maître qui l’a récupéré et l’a encadré. Après cela, Maga a réussi ses études. Si ce maître était contre les gens du Nord, Maga aurait-il eu la chance de poursuivre ses études ? Maga n’aurait jamais été Président de la République s’il n’avait pas le soutien de Ahomadégbé. Si c’était l’idée Nord-Sud, pourquoi Ahomadégbé a-t-il soutenu Maga contre Apithy, étant donné que lui et Ahomadégbé sont des cousins ? La politique n’est pas un jeu d’enfants. C’est des idées.

Quelle est la position du Farre par rapport à la Présidentielle de 2016 ?
Le Farre a sa position claire et nette. Le Fard a une démarche. Elle est inspirée par sa petite expérience. On a réuni le congrès de notre parti pour faire le bilan. On a même élargi le bureau en rassemblant une pléthore de plans d’actions. Ensuite, nous avons organisé une conférence de presse. Sans moyens, nous avons pu avoir des résultats. C’est juste pour montrer que c’est encore possible au Bénin. D’autres ont vraiment dépensé, mais n’ont rien obtenu au finish. L’autre chose, c’est que le choix d’un candidat n’est pas l’affaire d’un seul individu. J’ai déjà envoyé une note de service à tous les membres. Dans cette note, il a été dit qu’aucun membre n’a le droit d’engager le parti à une quelconque élection, à commencer par le Secrétaire général du parti lui-même. Il y a une instance qui est habilitée à engager le parti à une élection. C’est le conseil national. Pour cela, nous avons prévu le 31 octobre pour tenir ce conseil national à Cotonou. De toutes les façons, le Farre n’a pas de candidat en son sein. Il reste donc à chercher hors du parti, et le débat se fera dans ce cadre là. Soit les débats aboutissent au choix d’un candidat à l’extérieur ou dans le cas contraire, on peut repousser. Ce qu’il faut retenir, c’est que c’est un parti constitué en majorité de jeunes. C’est pour préparer un avenir meilleur à celui que nous avons connu dans ce parti. Donc, si nous arrivons à retenir un candidat, nous allons faire une déclaration solennelle. Personne ne nous presse par rapport à cette question.
Au Bénin, il y a plus de 200 partis politiques et 17 alliances de partis politiques. Mais aux dernières législatives et communales, il n’y a qu’une quarantaine de partis qui ont participé. Cela veut dire qu’il y a un problème. L’objectif d’un parti politique, c’est de conquérir le pouvoir. Pourquoi ne vont-ils pas à la conquête du pouvoir si tant est que cela devrait être fait dans les règles de l’art ?

Le Farre n’est jusqu’ici pas fixé sur un candidat à soutenir, mais le Professeur Bio Bigou doit avoir une idée du profil du prochain président de la République.
N’importe quel citoyen béninois rêve d’un bon président. Le Farre n’a pas encore débattu sur la question, puisque c’est au cours du conseil national que nous allons nous entendre sur le profil du prochain président. On peut juste choisir ou mal choisir, mais ça doit être une décision responsable. Pour le peu que je connais de mon pays, je sais que le Président du Bénin en 2016 doit être celui qui a la capacité de gérer la grande diversité du pays. Il y a un certain nombre d’esprits dans notre pays. Quand un Chef d’Etat ne saisit pas ces esprits, il ne pourra pas gérer le pays. Il doit avoir une grande capacité d’écoute. Je cite en exemple le Gl Mathieu Kérékou qui prend son temps pour écouter les uns et les autres avant de prendre une décision. Aussi, le Béninois, dans son ensemble est humble. Il aime qu’on le respecte dans son humilité. Il n’est pas violent. Il a pitié de l’autre. Il s’accommode du peu, mais il veut qu’on le respecte. C’est ce qui fait qu’il prend son temps pour aller à l’information. Mais certains hommes politiques utilisent ces informations à d’autres fins. Celles de nuire à l’autre. Quand ça chauffe quelque part, c’est qu’il y a quelqu’un derrière. Un dernier aspect, c’est que le Président doit faire fi des problèmes de personnes. Mais l’esprit déviant qu’on inculque à la génération montante va à coup sûr plonger le Bénin dans le chaos.


Or, un acteur politique conscient de son rôle doit être un éveilleur de conscience, un éducateur. L’essentiel pour lui est de colmater les brèches. Mais ceux qui ne comprennent rien trouvent que je suis régionaliste, mais ils n’ont jamais eu une preuve contraire à ce que je dis. Il faut donc avoir le courage de ses idées, tant qu’on est convaincu de ces idées. Les peuples doivent faire preuve de complémentarité de richesse, d’esprit et d’idées. Quand on regarde la diversité écologique du Nord au Sud, on en vient à la conclusion que le Bénin est un pays riche. Chacun doit pouvoir apporter sa pierre à l’édifice.


Propos recueillis par : Angelo DOSSOUMOU et Isac YAI
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