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La Presse du Jour N° 1983 du 2/10/2013

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Première journée de l’hépatite : Le Bénin en croisade contre les Hépatites (Le professeur Kodjoh parle des modes de contamination de la maladie)
Publié le mercredi 2 octobre 2013   |  La Presse du Jour


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© Autre presse par DR
Le Professeur Nicolas Kodjoh


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Pour la toute première fois, le Bénin a connu, le lundi 30 septembre 2013, au Palais des Congrès de Cotonou, la journée de l’hépatite. Cette initiative du professeur Nicolas Kodjoh, point focal de l’initiative panafricaine de lutte contre l’hépatite (Iplh), a permis de sensibiliser sur ces maladies plus ravageuses, après le Sida. Cette journée d’information, d’éducation et de communication a été organisée par le laboratoire Cerba de Paris et l’unité d’Hépato-gastroentérologie de la Faculté des Sciences de la Santé, en collaboration avec l’unité de Santé Publique et Epidémiologie. Dans cet entretien, le professeur Nicolas Kodjoh parle du mal, ses modes de contamination, les facteurs de risque et, les mesures de prévention contre les hépatites.
Professeur Nicolas KO-DJOH, en tant qu’initiateur de la première journée de l’hépatite au Bénin, dites-nous les motivations qui sous-tendent cet événement ?
Le Monde paie un lourd tribut aux hépatites. Il urge se lever pour aller contre ce mal. L’objectif général de la journée est de sensibiliser la population générale, la Société Civile et les professionnels de la presse sur l’hépatite virale B. Les objectifs spécifiques sont de résumer les principales fonctions du foie et les signes de la maladie, de citer les modes de contamination, d’énumérer les populations à risque, d’énoncer les possibilités thérapeutiques et de décrire les mesures de prévention.
En fait, qu’est ce que s’est que l’Hépatite ?
L’hépatite est une inflammation des cellules du foie. Elle peut être causée par des produits toxiques, une consommation excessive d’alcool, certains médicaments, une obésité, un trouble du système de défense de l’organisme. Mais au Bénin, elle est essentiellement due à des virus dénommés A, B, C, D, E. L’hépatite est appelée « aiguë » au moment du contact de l’organisme avec le virus de l’hépatite. L’hépatite est dite « chronique » quand elle persiste au-delà de six mois après l’infection initiale de l’organisme par le virus. Seuls les virus B, C et D peuvent provoquer une hépatite chronique. Les virus sont des agents infectieux (microbes) de très petite taille qui ont besoin de cellules vivantes pour se multiplier.
Pourquoi donc cette journée ?
L’hépatite est un problème mondial de Santé Publique. Le monde paie un lourd tribut aux hépatites. Deux milliards de personnes ont une infection ancienne ou présente par le virus de l’hépatite B dans le monde. On dénombre 350 millions de porteurs chroniques. 950 000 personnes meurent chaque année d’hépatite dont 600 000 pour l’hépatite B et 350 000 pour l’hépatite C (source OMS). Les chiffres estimés de mortalité pour les 4 priorités de santé publique au niveau mondial (estimations relevées en août 2013, source OMS) sont : VIH : 1 800 000 (2010, OMS) ; Tuberculose : 1 400 000 (2011, OMS) ; Hépatites : 950 000 (600 000 pour l’hépatite B et 350 000 pour l’hépatite C, OMS). Paludisme: 660 000 (2010, OMS). Aujourd’hui, l’hépatite tue plus que le paludisme dans le monde. L’autre intérêt, les prévalences des hépatites renseignent que plus de 8 % de la population pour l’hépatite B et plus de 5 % pour l’hépatite C, soit au total plus de 1 300 000 personnes ou 1 Béninois sur 8, ont le virus d’hépatite. Les malades sont exposés aux complications tardives de la maladie : la Cirrhose et le Cancer du foie, l’un des cancers les plus fréquents au Bénin, et l’une des premières causes de décès par cancer dans notre pays.
Parlons maintenant des signes cliniques. Comment se manifestent les hépatites ?
Parlant des signes cliniques des hépatites, nous avons l’infection aiguë. Dans 80 % des cas : aucun signe; le malade ne sent rien et ne se plaint de rien. Dans 20 % des cas : mêmes signes que le paludisme ou la grippe. D’où l’intérêt du dépistage par un test sanguin pour mettre l’infection en évidence. S’agissant de l’évolution de l’hépatite aiguë. L’élimination du virus par le système immunitaire, le taux de guérison dépend de l’âge au moment de la contamination. Quand cela passe à la chronicité, on parle d’hépatite chronique. Dans la plupart du temps, l’infection passe inaperçue. La principale manifestation possible est un état de fatigue prolongée et inexpliquée. La majorité des malades ignorent leur maladie, qui peut se révéler 20 à 30 ans plus tard par des complications qui peuvent être la cirrhose ou le cancer du foie. Le risque d’être porteur chronique en fonction de l’âge au moment de la contamination est la suivante : 90% des sujets infectés à la naissance ont le risque de passer à la chronicité. 80 % des sujets de 1 à 6 mois, 60% pour les sujets de 7 à 12 mois, 35% des sujets de 1 à 4ans et 10% des adultes, ont la malchance de passer à la chronicité. Parlant toujours de l’évolution de l’hépatite chez l’adulte, 90 % des sujets infectés vont éliminer le virus et guérir (sans aucun traitement) et 10 % vont garder le virus et développer une hépatite chronique. Chez l’enfant, le taux de guérison est d’autant plus faible que l’enfant est jeune et, le risque de développer une hépatite chronique est d’autant plus élevé que l’enfant est jeune; il est maximal (90 %) à la naissance.
Quels sont les modes de contamination et ou trouve-t-on le virus de l’hépatite B ?
Le virus B est présent dans le sang dans les sécrétions biologiques de l’organisme: la salive, le sperme, les sécrétions vaginales, la sueur, les lésions suintantes de la peau, le lait maternel. L’on peut être infecté si l’on n’est au contact avec du sang infecté. Les autres modes de contamination se passent lors de la transfusion de sang ou de ses dérivés, le partage d’aiguilles d’injection parentérale avec des personnes infectées. L’on peut citer les actes entrainant une effraction cutanée avec du matériel souillé: rasage, tatouage, scarifications, piercing, acupuncture, circoncision non médicalisée, excision. Comme modes de contamination, il y a :
- Partage de brosse à dent, rasoir, ou autres objets personnels similaires avec une personne infectée.
- Piqûre accidentelle par une aiguille souillée par du sang contaminé (personnel de santé)
- Transmission horizontale
Contact avec les sécrétions biologiques d’une personne contaminée (en cas de lésion cutanée ou muqueuse).
- Transmission sexuelle
Rapport sexuel non protégé avec une personne contaminée
- Transmission verticale
Se fait de la mère au nouveau-né (accouchement, allaitement, soins de maternage…)
Pourriez-vous alors nous dire les populations à risque ?
Belle question. Vous êtes un sujet à risque d’infection par le virus de l’hépatite B : si vous êtes né d’une mère atteinte d’hépatite B, si vous vivez avec une personne atteinte d’hépatite B (famille vivant sous le même toit), si vous avez été transfusé dans le passé, si vous êtes polytransfusé (hémodialysé, insuffisant rénal, hémophile…), si vous êtes infecté par le VIH ou le virus de l’hépatite C. Vous êtes un sujet à risque d’infection par le virus de l’hépatite B : Si vous exercez une profession à risque (professionnel de santé, personne exposée au sang sur les lieux de travail, etc.) Si vous avez eu recours à des scarifications sur votre corps, au tatouage, au piercing ou à l’acupuncture sans aiguilles jetables, Si vous êtes partenaire sexuel d’un sujet infecté par le virus de l’hépatite B. Vous êtes un sujet à risque d’infection par le virus de l’hépatite B : Si vous avez des relations sexuelles non protégées avec des partenaires multiples, si vous avez séjourné dans un pensionnat, dans les institutions psychiatriques, carcérales, ou en garnison…, si vous utilisez de la drogue par voie intraveineuse ou intra-nasale ; si vous êtes prostituée ou homosexuel. En pratique, le Bénin étant un pays d’endémie, toute la population est à risque.
Y a-t-il des possibilités thérapeutiques au regard de ce que vous décrivez ?
Si, il existe des possibilités thérapeutiques devant ce mal. Pour l’hépatite aigue , il faut le repos, un régime pauvre en graisses pendant la période d’anorexie, les médicaments hépatoprotecteurs sont inutiles. Il faut supprimer l’alcool. Il faut éviter tout médicament non indispensable, en particulier les médicaments métabolisés par le foie, (sédatifs et les antivitamines K…); ils peuvent être repris dès la guérison. Il en est de même pour les pilules contraceptives. Contrairement à l’idée fausse largement répandue et entretenue, il existe bien des traitements pour l’hépatite chronique B en médecine moderne. D’où la nécessité et l’intérêt d’un suivi médical. Le suivi médical a pour buts d’apprécier: l’importance de la destruction des cellules du foie, l’intensité de la multiplication du virus dans le foie (charge virale) et l’importance des dégâts provoqués par le virus dans le foie.
En quoi consiste réellement la surveillance médicale ?
Le suivi médical permet de classer les malades en trois groupes. S’agissant des porteurs inactifs du virus, le fonctionnement du foie est normal, la charge virale est faible, et les lésions du foie sont inexistantes. Quant aux malades qui ont une hépatite minime, le fonctionnement du foie est peu perturbé, la charge virale est peu élevée, les lésions du foie sont minimes. Enfin, pour les malades qui ont une hépatite sévère, le fonctionnement du foie est très perturbé, la charge virale est élevée, les lésions du foie sont sévères. Si rien n’est fait, ces malades vont évoluer vers des complications et en mourir.
Y a-t-il des traitements et à quoi servent-ils ?
Il y a des traitements. Les traitements ont pour buts de supprimer ou diminuer la multiplication du virus dans le foie, d’arrêter la progression et l’aggravation de la maladie et de prévenir les complications (cirrhose, cancer du foie). Ils permettent d’améliorer de la qualité de vie des malades et, d’allonger la durée de leur vie. C’est pourquoi on ne traite que les malades qui ont une charge virale élevée et des lésions hépatiques sévères. Les autres ont besoin d’un suivi régulier et d’une vie saine : pas d’alcool, éviter l’excès de poids, éviter les comportements à risque. Tout médicament de la médecine moderne ou traditionnelle non homologué est inutile et dangereux. Les modalités de traitement sont les suivantes. Le traitement court dure 12 mois. Le médicament utilisé est Interféron. Pour les traitements longs, la durée est inconnue. Les quelques médicaments qui interviennent sont : Lamivudine , Adéfovir, Enté-cavir, Ténofovir
Mais bien avant, quelles sont les mesures préventives ?
Ce qu’il est important de savoir, serrer la main ou toucher une personne atteinte d’hépatite B ne comporte pas de risque de transmission, sauf en cas de contact avec une plaie. Le port de gants est recommandé pour tout contact direct avec les liquides biologiques d’une personne, que celle-ci soit porteuse du virus B ou non. Les objets usuels (verres, vaisselle, cuvette de toilettes, etc.) ne nécessitent pas de désinfection particulière. Il est important de respecter des règles d’hygiène pour éviter de transmettre le virus à son entourage. Il ne faut pas partager ses objets de toilette (brosse à dents, rasoir, pince à épiler, coupe-ongles, matériel de détartrage dentaire, ciseaux, etc.) afin d’éviter le risque de transmission du VHC. Il est conseillé de placer les objets souillés par du sang (tampons, fil ou soie dentaire, aiguilles, pansements, etc.) dans un récipient protecteur. En cas de coupure ou de plaie cutanée, nettoyer, désinfecter avec du DakinÒ ou de l’eau de Javel diluée à1/10e, puis effectuer immédiatement un pansement recouvrant largement la plaie. Dans les précautions relatives à la vie sexuelle, il faut faire un dépistage prénuptial de l’hépatite B, porter de préservatif quand l’un des conjoints est atteint d’hépatite aiguë B. Il est recommandé de faire le dépistage quand l’un des conjoints a une hépatite, suivi d’une consultation médicale pour la conduite à tenir en fonction du résultat. En cas de partenaires sexuels multiples, l’utilisation du préservatif est recommandée afin de se protéger du risque de contamination par le virus de l’hépatite B, le virus du sida et d’autres maladies sexuellement transmissibles telles que la syphilis.
C’est dire donc qu’on peut prévenir la maladie ?
L’on peut bel et bien prévenir contre les Hépatites. Les populations à vacciner sont : les nouveau-nés à la naissance, l’entourage d’un porteur chronique du VHB, le conjoint d’un porteur chronique du VHB , le personnel de santé, les personnes devant recevoir des transfusions de sang ou de ses dérivés. Les autres populations à vacciner sont les hémophiles, les hémodialysés , les prostituées, les homosexuels masculins, les hétérosexuels à partenaires multiples, les toxicomanes et les sujets infectés par le VIH ou le Virus C.
Un appel à la sensibilisation.
L’hépatite B est une maladie fréquente. Plus de 8 % de la population ont ce virus. Toute la population est considérée comme à risque; les autres facteurs de risque viennent en addition. La grande majorité des personnes contaminées ignorent leur état de maladie, d’où l’intérêt du dépistage pour la prise en charge. Le suivi médical régulier et le traitement permettent le contrôle de la maladie avec : l’arrêt ou le ralentissement de l’évolution, la prévention des complications, l’amélioration de la qualité de vie et l’allongement de la durée de vie. Elle est une maladie évitable par les mesures de prévention de la maladie à l’entourage comme la vaccination.
Pouvez-vous conclure alors cet entretien ?
L’hépatite chronique est généralement silencieuse et ne donne aucun trouble spécifique pendant 20 à 30 ans. Un malade atteint d’hépatite est aussi sujet à toutes les autres maladies. Par conséquent, avant de dire que les troubles dont se plaint le malade sont dus à l’hépatite, il faut d’abord rechercher toutes les autres causes possibles de ces troubles. C’est le rôle du médecin. D’où la nécessité et l’intérêt d’un suivi médical, avant de prétendre suivre tout traitement pour hépatite. Sur un foie atteint par le virus B et C, tout médicament de la médecine moderne ou traditionnelle non homologué est inutile et dangereux. Je vais finir par une citation de P. Marcellin et T. Laurenceau : «Etrange virus, en vérité, que ce virus de l’hépatite B. Chaque jour dans le monde, il tue près de 3000 personnes dans une effroyable indifférence. Il est vrai que ce serial killer choisit de préférence ses victimes dans les pays pauvres, et qu’il sait se montrer discret : silencieux lorsqu’il grignote le foie de ses victimes, inaudible face au bruit médiatique que peuvent susciter d’autres maladies ».
Réalisé par Victorin Fassinou

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