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De Talon à Montesquieu
Publié le lundi 15 aout 2016  |  24 heures au Bénin
Patrice
© Autre presse par DR
Patrice Talon,President du Benin




​Le projet de mandat présidentiel unique, cher au cœur du Chef de l’Etat, fait débat dans certaines têtes et jaser dans certaines buvettes. Ne serait-ce pas là un produit propice à faire s’emballer le cheval au lieu de réguler ses pas ? Le mandat unique ne conduira-t-il pas le Président de la République à la raison je-m’en-foutiste au lieu de le contraindre à la raison républicaine ? A l’idée qu’il ne reviendra plus jamais après cinq ou sept ans, ne va-t-il pas y aller à fond de train pendant son mandat unique pour dévaliser l’Etat à son profit, placer sur ses comptes personnels dans les Îles-Caïmans la plus grande quantité possible de notre argent ? Ces questions tourmentent certaines têtes et agitent certaines buvettes.
​Les pro-mandat unique ont le vent en poupe, ayant avec eux un Chef de l’Etat, ardent partisan du mandat unique et qui caracole sur les sentiers escarpés de la moralisation de la vie publique. Si Talon avait en vue le second mandat, ferait-il révoquer dix fonctionnaires munis de faux diplômes, modérer l’ardeur des policiers rançonneurs, annuler un concours réputé frauduleux ? Créerait-il les six nouveaux départements, malgré le conflit des chefs-lieux, laisserait-il l’autorité compétente de l’UAC invalider l’année académique à la Faculté des Lettres… ? Non et non ! Car à chaque fois, le bon sens politicien l’aurait fait reculer pour lui éviter d’être rattrapé et chassé du pouvoir en 2021 par la coalition des mécontents. Donc le mandat unique, c’est tout bon ! Et rien à opposer aux très bons arguments des pour.
​Cependant, même déstabilisés, les contre existent et donnent de la voix eux aussi. Pour ébranler les pour, ils disent qu’il est dangereux de généraliser la situation personnelle et particulière de l’actuel Chef de l’Etat. Voilà en effet un homme absolument au-dessus du besoin matériel, et qui peut, en ce domaine, ne rien devoir à personne. Quelles faveurs demanderait-il à qui ? Aucun gredin ne l’approchera pour lui promettre étoiles et lune, espérant ainsi l’amener à ignorer le droit et mépriser les textes de la République. Avant de devenir Chef de l’Etat, cet homme était Crésus et le restera après. Il peut donc se permettre d’être vertueux. Mais parce que sa vertu est sans risque, nous ne pouvons le prendre pour modèle. Il urge donc de se préoccuper de l’après-Talon. Ce pourrait être à nouveau le déluge : marchés publics frauduleux, détournements homériques, éléphants blancs à gogo, le peuple à l’abandon, la pègre des copains et des coquins, la mafia d’autant dévoreuse qu’on l’aura empêchée pendant cinq ans de dévorer. Il faut éviter le retour de Satan.
​C’est pour prévenir Satan qu’intervient l’Archange Montesquieu. Il renvoie dos à dos les pour et les contre, en ressortant son idée salvatrice de ‘‘la vertu politique’’. Il précise : ‘‘L’homme de bien dont il est question […], n’est pas l’homme de bien chrétien mais l’homme de bien politique, qui a la vertu politique dont j’ai parlé. C’est l’homme qui aime les lois de son pays, et qui agit par l’amour des lois de son pays.’’ Montesquieu veut dire par là que la question n’est pas celle du degré de vertu du Chef de l’Etat, qu’aucune vertu n’est attachée par nature à un mandat présidentiel unique ou multiple ou à vie, que la question n’est pas d’abord celle de la vertu personnelle d’un homme ou d’une femme, que la seule vraie question est double : celle de la charge éthique intrinsèque aux textes de la République et celle de leur application stricte par l’homme ou la femme à la tête de la République.
​Et pour l’exemple donc, toute modification de la Constitution devra donner au peuple béninois le droit de révoquer, en plein mandat et dans un délai convenable, le Président de la République convaincu de trahison de ‘‘la vertu politique’’. Voilà pourquoi, porté par le cheval du nouveau départ, Talon, promoteur du mandat unique, devra bâtir un pont solide entre la démocratie béninoise et Montesquieu, auteur de ‘‘De l’Esprit des Lois’’.

Par Roger Gbégnonvi
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