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Hommages au doyen des anciens présidents béninois:Un homme, une vie et un itinéraire atypique
Publié le jeudi 25 aout 2016  |  Le Matinal
Hommages
© aCotonou.com par Didier Kpassassi
Hommages de la Nation à feu president Emile derlin zinsou.
Palais des Congrès Cotonou le 24 Août 2016.Hommages a feu president émile derlin zinsou.




Feu Emile Derlin Zinsou, le centenaire par défaut, a eu un itinéraire de vie atypique. Contrairement à beaucoup de citoyens de sa génération, il n’est pas issu de familles pauvres. Un privilège qui a favorisé son émergence et l’a propulsé au-devant de la scène politique nationale et internationale.




Fils d’un instituteur autodidacte, Émile Derlin Zinsou est né le 23 mars 1918 à Ouidah. Issu d’un milieu qui a eu très tôt, des contacts avec la civilisation occidentale, l’ancien élève de l’École normale William Ponty du Sénégal a fait de hautes études sous la conduite de son géniteur qui, avait de l’ambition pour sa progéniture. Docteur en médecine de la Faculté de Paris, l’ancien ministre de l’Economie générale sous le président Sourou Migan Apithy (2 juillet 1958 au 26 mai 1959), Emile Derlin Zinsou a suivi un cursus académique classique. Ses études terminées, il retourne au Dahomey et intègre très tôt le landerneau politique avec son statut de « sujet français ». Invité pour une première fois à être le premier député du Dahomey, il a rejeté l’offre en faveur de Sourou Migan Apithy qui sera élu avec le révérend père Francis Aupiais. Membre plus tard du gouvernement d’autonomie interne encore appelé gouvernement de la Loi-cadre, Emile Derlin Zinsou a appartenu à l’Assemblée territoriale du Dahomey puis à l’Assemblée nationale.

Le président et ses œuvres

Après l’indépendance en 1960, il a été entre autres plusieurs fois ministre des Affaires étrangères, une fois ministre du Plan et du tourisme sous les présidents Hubert Maga et Christophe Soglo et président de la Cour suprême. Homme d’État béninois et puis président de la République du Dahomey du 17 juillet 1968 au 12 décembre 1969, il a été comme beaucoup d’autres de sa génération, mêlé à la plupart des événements, notamment politiques des pays d’Afrique francophone. Au Dahomey/Bénin, il entre en politique dès l’indépendance de la République du Dahomey. Le 17 juillet 1968, son rêve présidentiel s’est accompli. Le régime militaire qui a pris le pouvoir en 1967 le propulse à la présidence. Au cours de son mandat, il a fait face non seulement aux difficultés économiques et financières qui étaient insurmontables à l’époque, mais il a aussi assuré la vie de l’Etat. Des défis qu’il a relevés en posant des actes forts comme la nationalisation des manutentions portuaires de Cotonou, la mise en chantier par le projet de l’électricité ; l’institution des Centres d’animation régionale pour le développement rural (Carder) ; la réalisation de l’usine d’égrenage de coton du Mono et l’institution de la taxe communément appelée « Takouè ». Toutes ses actions étaient placées sous le sceau de l’efficacité et du rendement immédiat. En décembre 1969 un putsch le renverse.

Affaires d’Etat

8 ans après le putsch de décembre 1969, plus précisément le 16 janvier 1977, une agression impérialiste menée par un groupe de mercenaires de Bob Denard a lieu au Bénin. L’opération, dénommée "opération Crevette" et qui avait pour but de renverser le régime marxiste du Général Mathieu Kérékou, a échoué. Plusieurs accusations sont lancées contre Émile Derlin Zinsou par le pouvoir en place. Bob Denard affirmera dans ses mémoires que ce putsch avait pour objectif de restaurer Zinsou à la tête du pays. Émile Derlin Zinsou a toujours clamé son innocence dans cette affaire. Il n’a émis cependant aucun commentaire sur le livre de Bob Denard qui affirme qu’il était à bord de l’avion des mercenaires le 16 janvier 1977 attendant d’être proclamé président de la République en cas de succès de l’opération. Pour ce faire, il est un des principaux opposants au régime de parti unique imposé par Mathieu Kérékou de 1974 à 1990. Dans le processus de démocratisation du pays, Zinsou est membre du Haut conseil pour la République fondé le 9 mars 1990 avec les anciens présidents Justin Tomètin Ahomadégbé, Taïrou Congacou et Hubert Maga.

Défenseur de l’Afrique

De sa position de citoyen, de parlementaire, de ministre ou de chef de l’État, Émile Derlin Zinsou n’a pas manqué de défendre les intérêts de l’Afrique, sa souveraineté et son progrès ; ceci soit par la parole, la plume, l’action. Malgré la maîtrise de toutes les arcanes et les avantages du pouvoir qu’il avait, il s’est refusé à tout provincialisme, toute implantation politique à base régionale ou ethnique, cultiver ou entretenir les problèmes et les antagonismes Nord-sud. Des facteurs qui ont concouru à faire la fortune politique de certains et une partie de l’infortune du Dahomey. Au plan africain, il a été élu Secrétaire général du Rassemblement démocratique africain (Rda) par la Commission des résolutions, au congrès historique de Bamako en octobre 1946. Cette élection a été bénéfique pour plusieurs couches notamment les cheminots de l’ancienne Afrique occidentale française (Aof) et du Dahomey. En effet, il a apporté un appui à leurs revendications, à leur grève longue et mémorable d’octobre 1947 à mars 1948. Dans le combat contre la balkanisation de l’Afrique, Emile Derlin Zinsou avec Modibo Kéïta et Léopold Sédar Senghor fonde le Parti des fédéralistes africains (Pfa) à Dakar en juillet 1959. Il fut élu un des deux vice-présidents dans le bureau de Léopold Sédar Senghor. Il participe à la fondation de l’Union africaine le 12 juillet 2000 à Lomé. Il est également vice-président du Haut conseil de la Francophonie ainsi que président d’honneur de l’Organisation internationale de lutte contre la drépanocytose (Oild).

Homme de convictions et de foi

Au plan religieux, Emile Derlin Zinsou est chrétien catholique pratiquant. Il trouve réunis dans le christianisme tous les idéaux qui paraissent fondamentaux dans la vie humaine. Politiquement, ses convictions socialistes ont été affirmées depuis 1946 définissant pour l’Union progressiste dahoméenne (Upd) sa doctrine. Il a proclamé son appartenance à un socialisme humaniste non-marxiste qui refuse le monolithisme totalitaire, accepté des contre-pouvoirs institutionnalisés ou non et dénie à une minorité agissante ou armée le droit de se prétendre investie de tous les pouvoirs. Cette option est l’expression du refus d’accepter, dans sa totalité, la société que propose Marx, Lénine et leurs héritiers. Son neveu, Lionel Zinsou, a été nommé Premier ministre du Bénin entre le 8 juin 2015 et le 6 avril 2016 par le président Yayi Boni. Le 28 juillet 2016 à Cotonou, il a rendu son dernier souffle à l’âge de 98 ans après des années de maladie.

Serge Adanlao
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