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Echanges commerciaux Bénin-Nigeria: La mort programmée de la réexportation
Publié le mardi 20 septembre 2016  |  La Nation
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© Autre presse par DR
Des véhicules réexportés.




Une nouvelle étude commanditée par le ministère de l’Industrie et du Commerce a remis une couche sur les graves menaces qui pèsent sur l’activité de réexportation vers le Nigeria. Au-delà des effets induits par la crise que traverse le Géant de l’Est, c’est toute la politique industrielle actionnée depuis Abuja qui programme la fin de cette activité de rente pour l’Etat béninois.

‘’Mission d’évaluation de la compétitivité des produits sur le marché nigérian’’! C’est l’intitulé d’une étude finalisée, il y a quelques jours, par une équipe d’experts béninois conduite par le professeur John Igué. Nom du commanditaire : le gouvernement du Bénin, à travers le ministère en charge de l’Industrie et du Commerce. Plus qu’une étude, c’est une énième alerte lancée à l’endroit des autorités béninoises qui n’ont jamais su prendre au sérieux les cris d’alarme en provenance du Géant de l’Est. Mais cette fois-ci, la menace est si profonde qu’elle grève sérieusement les caisses de l’Etat. Le rapport déposé, il y a quelques jours sur la table du gouvernement, indique que l’activité de réexportation «l’un des fleurons de l’économie béninoise en raison des recettes douanières qu’elle procure», est en chute libre avec plus de 20 milliards de pertes de recettes sur le riz et les huiles végétales, et 30 milliards de pertes de recettes sur les véhicules d’occasion. A ces pertes, s’ajoutent une série d’activités menacées comme celles des pièces détachées de véhicules et surtout l’emploi de près de 5000 jeunes qui servent d’intermédiaires dans les différents parcs entre les propriétaires et les acheteurs de véhicules. A fin juin 2016, seulement 76 mille voitures ont été réexportées vers le Nigéria, contre plus de 285 mille en 2015 et plus de 353 mille en 2014.

La mauvaise passe de l’activité de réexportation a comme bouc- émissaire la chute du cours du pétrole qui a induit une baisse subséquente de la valeur du naira, la monnaie nigériane. Selon les experts, la perte de près de 45% de la valeur du naira face au Franc CFA en avril 2016 a occasionné une chute drastique des réexportations du Bénin vers le marché nigérian de l’ordre de 30 à 50%, selon les produits. «Aujourd’hui la grande majorité des secteurs économiques qui dépendent des relations Bénin-Nigeria, sont victimes de la crise nigériane. Toutes ces situations de mévente impactent sérieusement les recettes publiques ainsi que la vie des populations», pointe le rapport.

Une gangrène pour l’industrie nigériane

La remontée du cours du pétrole brut est annoncée pour 2017 et l’économie nigériane retrouvera sans doute le chemin de la croissance avec la reprise normale de l’activité pétrolière. Mais l’épée de Damoclès planera davantage sur le commerce de réexportation d’autant qu’il demeure incompatible avec la nouvelle politique industrielle du Nigeria «Nigeria Industrial Révolution Plan» dont l’ambition est de se retrouver dans le top 20 des économies mondiales. L’étude informe que le mot d’ordre de ce plan lancé depuis quelques années, c’est «utiliser l’argent du pétrole pour se défaire du pétrole». Des investissements structurants sont lancés dans le secteur agro-industriel, comme par exemple la construction par la firme Dangote Tomatoes Processing Factories (DTPF) de la plus grande usine de transformation de la tomate en Afrique de l’Ouest, dans l’Etat de Kano. Dangote Industries Limited et 16 autres investisseurs ont bénéficié d’un appui de l’Etat d’Edo pour la production et la transformation du riz et de l’huile de palme. Ainsi, 110 000 hectares de terres sont alloués à la production du riz et 280 000 hectares aux palmiers à huile, pour offrir à terme 20 millions de tonnes de nourritures et créer 3,5 millions d’emplois d’ici l’horizon 2020. «Ce programme de développement de la filière riz et des huiles alimentaires justifie la frilosité des autorités nigérianes face à la réexportation de ces deux produits à partir du Bénin», notent les experts.

Le renouveau de l'automobile

L’automobile n’échappe pas à la nouvelle politique industrielle d’Abuja. Un vent de renouveau souffle sur le secteur. Le Conseil national de l’Automobile a reçu 27 demandes d’agrément suite à un appel d’offres pour la production des pièces détachées et d’unités de montage d’automobiles neufs. L’étude précise: «Vingt-deux de ces demandes d'agrément sont déjà satisfaites. Au nombre de ces 22 sociétés, on peut citer les constructeurs automobiles comme Nissan, Toyota, Hundai, Wolkvagen, Honda, Kia et Tata qui se préparent activement à installer leurs chaînes de montage de véhicules». Des spécimens de véhicules «made in Nigeria», sont déjà en vente dans le pays grâce à la société Hundai pour un prix estimé à moins de 6 millions de francs CFA. Selon le rapport, le groupe chinois Kewalram Chanram s’apprête à s’installer pour produire des véhicules de marque photons et Ikorodu dans les faubourgs de Lagos. Ce groupe pense investir 10 milliards de nairas pour produire 15 000 voitures par an. D’autres constructeurs opèrent déjà à l’instar du Français CFAO qui a conclu des accords pour des opérations d’assemblage de véhicules dans ses usines situées à Lagos dans la zone industrielle d’Amuwo Odofin.
L’étude signale également l’existence d’une société Imosen appartenant à un Nigérian originaire de l’Etat d’Anabra. Cet investisseur local fabrique actuellement des voitures de toutes catégories où seuls les châssis et les moteurs sont importés du Japon. Ce regain d’activités dans le secteur de l’automobile rend bien compte de la menace qui pèse sur la filière de réexportation des véhicules d’occasion via le Bénin.

Vers un programme de dynamisation des relations Bénin-Nigeria ?

Face à toutes ces menaces sur les relations économiques avec le Nigeria en général et l’activité de réexportation en particulier, les experts pensent qu’une veille stratégique est devenue indispensable pour mieux suivre l’évolution du pays. Pour eux, si le gouvernement veut agir pour sauver les meubles, il n’a d’autres choix que de prendre des dispositions d’une réelle transition fiscale vers une fiscalité intérieure de développement. Cette option lui permettra de libérer la politique commerciale des considérations budgétaires et, à l’inverse, de libérer le budget de l’Etat de la dépendance du Tarif extérieur commun (TEC).
Si l’avenir de l’activité de réexportation reste hypothéqué, le rapport souligne tout de même que le Bénin a des atouts à faire valoir dans l’exportation des produits vivriers et industriels vers les Etats limitrophes. « Il ressort des analyses que notre pays dispose d’un important avantage comparatif dans le secteur rural, au niveau tant de la production agricole que de l’élevage de bovins, à travers ses marchés de bétail, de la pisciculture et de l’aviculture », indique-t-on. Le potentiel industriel pour soutenir les relations Bénin-Nigeria ne manque pas et des responsables d’entreprises nigérianes seraient même favorables pour créer au Bénin d’industries pour la production de biens destinés au marché nigérian. Aujourd’hui, les échanges entre les deux pays se chiffrent à plus de 4,9 milliards de dollars (environ 2500 milliards de francs CFA) dont une partie importante échappe au contrôle de l’Etat. L’étude préconise alors la mise en place d’un Programme d’actions de dynamisation des relations économiques et commerciales entre le Bénin et le Nigeria. Ce programme fera sans doute sans la réexportation qui a demeuré pendant des décennies une véritable vache à lait pour des milliers d’opérateurs économiques et de jeunes. Et pour l’Etat béninois lui-même qui y tire ses principales recettes douanières
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