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Inégalités des genres en Afrique: Le fossé demeure
Publié le jeudi 24 novembre 2016  |  La Nation




L’Afrique a eu recours ces dernières années à une palette de moyens pour promouvoir l’égalité des genres. Mais le bilan reste mitigé et indique que des efforts doivent être encore consentis pour une meilleure intégration du genre dans les politiques en vue d’un développement global.

Femme, mère de l’humanité, pilier de développement de toute nation, se plait-on souvent à dire. Mais derrière ce concept se cachent des réalités qui contrastent avec l’ambition de développement des Etats et le vécu des femmes africaines. Au-delà de la reconnaissance de leur rôle dans la société, de leur apport au développement, les femmes africaines sont victimes de discriminations accrues.

Les différentes études sur la situation de la femme renseignent sur les inégalités dont elles sont victimes. Bien qu’il soit désormais admis que de plus en plus les femmes africaines atteignent des niveaux élevés de bien-être économique et social, l’élimination des inégalités entre les deux sexes n’a pas suivi le rythme de cette évolution. La toute dernière enquête sur le développement humain en Afrique a l’avantage de faire un aperçu général des gaps sur lesquels il faut agir. Cette étude paraît à un moment où le continent africain connaît des bouleversements multiples, des dynamiques récentes de transformation sociale et économique. Elle met l’accent sur les inégalités sociales dans divers domaines tels que la santé, l’éducation...
Le rapport révèle que les services sociaux se traduisent par moins de possibilités de bien-être pour les femmes en particulier, et pour la société en général. Sur le plan sanitaire, « les femmes subissent de graves privations en raison de facteurs tels que le mariage précoce, la violence physique et sexuelle et les taux élevés de mortalité maternelle », peut-on également lire. L’éventail des violences dont elles sont victimes inclut la violence domestique, le viol, les mutilations génitales….
Malheureusement, le silence social et institutionnel qui encadre ce phénomène perpétue en Afrique le cycle de violence.
Relativement à l’éducation, il est aisé de constater que la parité a été pratiquement atteinte en matière de scolarisation dans l’enseignement primaire. Le Bénin a accompli d’importants progrès ces dernières années en la matière grâce à l’effort conjugué de l’Etat et des partenaires techniques et financiers tels que l’Unicef. Cependant, il existe toujours une disparité en matière de scolarisation entre les filles et les garçons, selon les dernières statistiques. Les raisons pour lesquelles les filles sont exclues de l’école tiennent notamment à la pauvreté, aux pesanteurs sociologiques, à l’éloignement géographique.

Des normes défavorables à l’égalité des sexes

En dépit de l’arsenal juridique et législatif existant en faveur des femmes, plusieurs normes sociales ont aujourd’hui une influence négative sur la réalisation de l’égalité des genres en Afrique. Ces stéréotypes liés au genre qui attribuent des privilèges différents aux hommes et aux femmes ne favorisent pas la progression vers l’égalité des genres.
Selon une enquête Afrobaromètre 2015, « près de 25% des Africains sont hostiles au principale fondamental d’égalité des droits entre les hommes et les femmes ».
Dans un autre registre, l’inégalité des genres se traduit par de fortes disparités entre hommes et femmes sur le plan économique. « On observe ces inégalités sur l’ensemble du continent africain, tant au niveau de l’accès aux ressources économiques, de la participation sur le lieu de travail et des opportunités entrepreneuriales qu’au niveau de l’exploitation et de l’accès liés aux bénéfices tirés des ressources naturelles et de l’environnement », révèle le rapport sur le développement humain 2016. Pire, les femmes sont plus enclines à occuper un poste vulnérable, mal réglementé et offrant une protection sociale limitée du fait des écarts en matière d’éducation et de l’inadéquation de leurs compétences avec celles exigées par le marché du travail, mentionne l’étude. Raison pour laquelle, elles sont plus drainées vers l’économie informelle.
Selon les données d’enquêtes réalisées entre 2004 et 2010, on estime que les emplois du secteur informel non agricole en Afrique subsaharienne représentent environ 66% des emplois occupés par les femmes. Dans le domaine agricole, le manque d’accès des femmes à la terre prive les Africaines d’un outil essentiel à l’amélioration de leurs moyens de subsistance. Le rapport sur le développement humain 2016 évalue à 105 milliards en 2014 les pertes économiques dues aux écarts entre les genres en Afrique subsaharienne. Ce chiffre confirme que le continent passe à côté de son plein potentiel de croissance en ce sens qu’une part considérable de sa réserve de croissance (les femmes), est peu exploitée.
Sur le terrain de la représentation politique et du leadership féminin, la participation des femmes au sein du gouvernement constitue depuis toujours des indicateurs importants de développement. Dans la mesure où davantage de femmes s'impliquent dans l’animation de la vie politique, il est donc difficile d’ignorer leurs droits, leurs priorités, leurs besoins. Dans ce sens, des progrès notables ont été accomplis en ce qui concerne la représentation des femmes à des fonctions électives et à des postes stratégiques. Certains pays comme le Rwanda et le Sénégal ont affiché des résultats remarquables en termes de représentation féminine au sein de leurs parlements. Mais le Bénin reste encore à la traîne de cet élan africain, en dépit des tapages médiatiques des féministes pour corriger le tir. Le Bénin compte très peu de femmes parlementaires.
Face à ce tableau peu reluisant en faveur des femmes, il faut agir ! La volonté semble y être déjà dans le rang de certains acteurs. Pour le Programme des Nations Unies pour le développement (Pnud), le meilleur moyen de remédier aux inégalités entre les genres du point de vue du développement humain consiste à renforcer les capacités des femmes et à accroître les opportunités qui s’offrent à elles, ainsi qu’à contribuer à l’amélioration des résultats pour les générations actuelles et futures.

Revoir les textes existants

Selon l’administrateur du Pnud, Helen Clark « les politiques et programmes qui laissent involontairement les femmes de côté ou nient leurs droits ne connaitront jamais le succès à long terme ». Eliminer les écarts entre les sexes dans l’administration publique consiste à garantir la gouvernance démocratique, à rétablir la confiance dans les institutions publiques et à accélérer la réactivité des politiques et programmes publics. Aussi, est-il nécessaire de revoir l’arsenal juridique en tenant compte des disparités entre les sexes afin d’identifier et d’éliminer les discriminations persistantes à l’égard des femmes.
«Afin de mieux appliquer les normes juridiques nationales, régionales et internationales favorisant l’égalité des genres, les pays africains devraient renforcer les lois existantes susceptibles d’améliorer considérablement l’égalité des droits pour les femmes », préconise le rapport sur le développement humain 2016. Le rapprochement des règlementations nationales avec les traditions demeure un grand challenge.
Lorsqu’il n’est pas fondé sur la dimension genre, le développement n’est pas équilibré. De ce fait, tous les programmes et politiques doivent œuvrer à la réalisation des résultats égaux aussi bien pour les hommes que pour les femmes. Les conclusions clés et les pistes de réflexion majeures avancées dans l’Etude sur le développement humain en Afrique 2016 fournissent un cadre stratégique et un programme d’action visant à adopter une approche plus globale et axée sur les résultats, pour remédier aux inégalités entre les genres. On y décèle quatre axes majeurs offrant des recommandations concernant les politiques et programmes susceptibles d’accélérer la concrétisation de l’égalité des genres, d’intégrer pleinement la problématique hommes-femmes au sein du programme de développement humain et de contribuer à l’agenda de développement durable. L’une des principales conclusions consiste à avancer qu’il n’est pas possible de garantir l’égalité des genres par la seule mise en place des institutions spécifiquement chargées de la problématique du genre et de projets consacrés aux femmes. Le rapport préconise d’envisager plutôt une approche intersectorielle qui impliquerait tous les segments de la société. Il affirme par ailleurs que la « concrétisation accélérée de l’égalité des genres nécessite des mesures hautement collaboratives nationales et locales, faisant appel aux organisations non gouvernementales, au secteur privé, aux groupes de pression et à des organisations communautaires ». Aussi l’enquête suggère-t-elle que les institutions publiques et privées ainsi que les Osc s’engagent à mettre en œuvre les normes de certification "Label égalité des genres" (Ges) en vue de redorer le blason de la gent féminine.
Au-delà de ces recommandations, il est essentiel pour les Etats africains de fixer des délais précis afin de mieux apprécier les performances accomplies et de maintenir une vision nationale mettant en œuvre les impacts de l’égalité des genres sur l’ensemble de la société. L’échéance de 2030 retenue pour la réalisation des ODD et la fin du premier plan décennal de mise en œuvre de l’Agenda 2063 de l’Union africaine, sont des délais que les Africains ne doivent pas perdre de vue.
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