Accueil    MonKiosk.com    Sports    Business    News    Femmes    Pratiques    Le Mali    Publicité
aCotonou.com NEWS
Comment

Accueil
News
Faits Divers
Article
Faits Divers

Assassinat (2e dossier): Huit ans de réclusion criminelle pour Djabito Wali
Publié le jeudi 19 janvier 2017  |  La Nation
Justice
© Autre presse par DR
Justice






L’examen du 2e dossier inscrit au rôle de la cour d’assises de la Cour d’appel de Parakou s’est déroulé, mardi 17 janvier dernier. Dans le box des accusés, Djabito Wali avait à répondre des faits d’assassinat mis à sa charge. Après avoir requalifié l’infraction en crime de coups mortels, la cour l’a condamné à huit ans de réclusion criminelle. Mis immédiatement en liberté, il va suivre des soins au service psychiatrique du Centre hospitalier départemental du Borgou.

Devant la cour d’assises de la Cour d’appel de Parakou qui examinait son 2e dossier, mardi 17 janvier, il y avait un accusé pas comme les autres, en la personne de Djabito Wali. De nationalité burkinabé, il tenait difficilement debout à la barre. A peine répondait-il aux questions qui lui sont posées. C’est à croire que l’homme ignorait qu’il était dans la salle pour être jugé. Souriant sans raison, tout le temps qu’aura duré l’audience, ses rares propos frisaient parfois le délire. La veille de sa comparution, il avait déjà éconduit son conseil, Me Gabriel Dossou, venu pour le rassurer. Pour arriver à bout de son dossier, les membres de la cour ont dû faire preuve de patience et d’expérience.

Les faits

Et pourtant, Djabito Wali était devant la cour pour répondre des faits d’assassinat commis le mercredi 18 février 2009 dans la commune de Banikoara. Ce jour, aux environs de 10 h, il se serait rendu au pâturage avec les bœufs de son employeur, Madjoua Lompo. Vers 12 h, il serait revenu et était couché dans la chambre, quand Djouali Wali aurait commencé à le provoquer, en estimant que sa manière de faire prouve à suffisance qu’il avait un penchant pour Sékina, la fille de leur employeur. Ainsi, sous l’effet de la colère, Djabito Wali profitera du sommeil profond que faisait Djouali Wali pour lui asséner de violents coups de hachette au cou et au menton. Ce dernier rendit l’âme. Appréhendé et inculpé pour assassinat, Djabito Wali a reconnu les faits mis à sa charge à l’enquête préliminaire, ainsi qu’à l’interrogatoire de première comparution, avant de les nier à l’interrogatoire au fond devant le juge d’instruction.
A la barre, mardi 17 janvier dernier, Djabito Wali a reconnu avoir donné la mort à son « frère », Djouali Wali. Par la suite, comme s’il délirait, il ne répondra plus aux questions du président de la cour, Edouard Ignace Gangny qui cherchait à comprendre les circonstances dans lesquelles il l’a tué. « A quelle occasion l’as-tu tué ? Il y avait un précédent entre vous ? De quoi, disputiez-vous?», continuera-t-il à insister en vain. «Vous n’avez pas de problèmes avec quelqu’un, et brutalement vous lui portez des coups », s’interroge perplexe le président.
Djabito Wali a été incapable d’indiquer le nom de la localité où il résidait au moment des faits. «C’est mon frère. Je l’ai tué. Ce qui est passé, l’est déjà. Depuis, on me pose les mêmes questions. Je suis fatigué. J’ai déjà dit la vérité. Qu’est-ce que vous voulez encore?», finit-il par lâcher, excédé.
Même l’intervention du représentant du ministère public, Léon Pape Yèhouénou, n’a pas permis à lui faire changer d’attitude. Il l’a rassuré qu’il est encore jeune pour mourir, lorsqu’il laissa entendre que personne n’a peur de la mort.

D’incohérences en incohérences

Surpris par certains points du rapport d’expertise psychiatrique au sujet de son client, Me Gabriel Dossou a souhaité que la cour fasse venir l’expert Francis Tognon pour quelques explications. Lequel rapport estime que l’accusé est normal et qu’il a une bonne présentation physique, même s’il a des rires apparemment immotivés et que les rares propos qu’il émet sont incohérents. « Quelqu’un qui rit sans motif, qui est-ce qu’il peut bien être, s’il n’est pas un fou ? », s’est-il demandé en prenant l’assistance de la salle d’audience à témoin.
Après avoir soumis l’accusé à quelques questions, le représentant du ministère public, Léon Pape Yèhouénou fera alors constater, par rapport à la cohérence de ses réponses par endroits, qu’il parait plutôt un sujet beaucoup introverti. « Analyser sur le champ de l’altération de la faculté mentale d’un sujet ou le caractère mental anormal, nous y allons par degré d’appréciation », a-t-il fait observer. « J’ai comme l’impression que ce matin, nous naviguons dans l’incohérence totale. Le ministère public dit que la cohérence des réponses de l’accusé se lit par endroits. C’est que quelque part, il y a des incohérences. Autant les réponses de l’accusé sont cohérentes, autant elles sont incohérentes. Nous allons donc d’incohérences en incohérences. Comment le ministère public pense que le sujet est accessible à la condamnation. Je sais pas qu’au Bénin nous avons déjà une cour pour juger des fous ou des sujets qui souffrent de démence », s’est insurgé Me Gabriel Dossou.
C’est dans ces circonstances que le président Edouard Ignace Gangny fera observer une suspension. A la reprise, il fait appeler le seul témoin qui a effectué le déplacement de Banikoara pour Parakou. Madjoua Lompo expliquera les conditions dans lesquelles, suite à des appels au secours, il a surpris Djabito Wali, une hachette ensanglantée en main à côté du corps de sa victime. En voulant lui retirer l’outil, il a même reçu une blessure au front. En dehors de ce que lui a rapporté un autre de leur compatriote bouvier, Tampourano Lampaba, avec qui l’accusé et la victime partageaient la chambre des étrangers, il ignore tout du mobile qui a conduit à ce drame. Selon lui, ce n’est que « l’œuvre de Dieu ». Aussi, a-t-il refusé de se constituer partie civile bien que la victime soit son parent.
Le conseil de l’accusé, Gabriel Dossou, a fait prendre acte par la cour des réponses apportées par le témoin, suite à ses interpellations.
Lecture des différentes pièces du dossier a ensuite été donnée. C’est pour la manifestation de la vérité. Son casier judiciaire lui est favorable.
Entre temps, l’expert en psychiatrie Francis Tonon est venu leur apporter quelques précisions sur l’état mental de l’accusé. Selon lui, seuls des examens appropriés permettront de savoir s’il souffre de la démence, d’un début de folie ou de la schizophrénie.

Une réplique appelle une autre

Dans son réquisitoire, l’avocat général, Léon Pape Yèhouénou a indiqué que tous les éléments constitutifs de l’infraction d’assassinat sont réunis. S’agissant de l’élément légal, il évoque les articles 296 à 298 et 302 du Code pénal. Concernant l’élément matériel, il est revenu sur l’objet dont l’accusé s’est servi et un humain à qui la vie a été ôtée. Par rapport à l’élément intentionnel ou moral, il a confié que la volonté de donner la mort était manifeste tout comme les circonstances aggravantes telle que la préméditation ou le guet-apens. Selon lui, Djabito Wali avait soigneusement préparé son plan pour supprimer la vie à sa victime, en témoigne l’heure de la sieste au cours de laquelle il l’a mis à exécution. Il n’a laissé aucune possibilité de réaction à Djouali Wali, ce dernier étant plus corpulent que lui. L’avocat général est également revenu sur les parties sensibles auxquelles les coups ont été donnés : le cou et la tempe. Il s’est ensuite intéressé à la responsabilité pénale ou l’imputabilité du crime à l’accusé. Pour lui, Djabito Wali avait le contrôle de ses actes au moment de l’assassinat et tout ce qu’il fait n’est que de la simulation. Il demande à la cour de le maintenir dans les liens de l’accusation pour assassinat, de le condamner à la réclusion criminelle à perpétuité et de fixer la contrainte par corps au minimum.
La plaidoirie de l’avocat de l’accusé n’a été qu’une réplique au réquisitoire du ministère public. « En écoutant le ministère public, je n’ai pas eu le sentiment que nous avons le même dossier », a averti d’entrée Me Gabriel Dossou. Il trouve que ses réquisitions sont truffées d’incohérences. Alors, il s’est proposé pour rétablir les faits dans leurs réalités et avec rectitude. « Devant vous, vous verrez que vous avez une victime », a poursuivi le conseil de l’accusé. Selon lui, tout serait parti des suspicions réitérées par Djouali Wali qui, après les coups violents que lui a portés Djabito Wali au cours de la bagarre qui a suivi, rendit l’âme. C’était sans intention de lui donner la mort. Dans ces conditions, il en déduit que le crime d’assassinat retenu contre son client ne tient pas la route. Prenant comme preuve le réquisitoire définitif du Parquet de Kandi en date du 14 mai 2012, il soutiendra qu’il y a eu bagarre et que la victime n’a jamais été surprise dans son sommeil. Il a fustigé la version « travaillée » des faits. « Voilà autant de curiosité du dossier. On se tait sur cette question que l’accusation elle-même a empruntée aux faits et a soutenue dans son réquisitoire définitif. Il n’y a pas eu de préméditation. Le seul témoin des faits, Tampourano Lampaba a pris la clé des champs après avoir servi cette version des faits », a déploré Me Gabriel Dossou. Pour lui, le crime d’assassinat est inexistant dans ce dossier. Aussi, a-t-il appelé à sa requalification en coups et blessures volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner. Ayant promis ne pas plaider pour la démence, il s’est toutefois posé la question de savoir, tenant compte des doutes entretenus dans le rapport d’expertise médico-psychiatrique, si son client est accessible à une condamnation ou avait la possession de ses facultés mentales au moment des faits.
Le ministère public reviendra à la charge, mais la défense ne va pas démordre. Suivra la suspension pour permettre à la cour de délibérer. Après avoir requalifié l’infraction d’assassinat en crime de coups mortels, elle déclare Djabito Wali coupable d’avoir porté volontairement des coups et fait des blessures sur le nommé Djouali Wali, sans intention de donner la mort. Se fondant sur l’article 308 alinéa 4, et les articles 243 à 384 du Code de procédures pénales, 40, 47, 52 et 55du Code pénal, 361, 826 à 883 du Code de procédure pénale, la cour le condamne à la peine de huit ans de réclusion criminelle. Elle ordonne sa prise en charge immédiate par le Centre hospitalier départemental du Borgou, service de psychiatrie et fixe la durée de contrainte par corps au minimum, le condamne au paiement des frais de justice. La cour ordonne en conséquence qu’il soit immédiatement mis en liberté, ainsi que la confiscation et la destruction du scellé.
Pour examiner ce dossier, le président Edouard Ignace Gangny avait comme assesseurs, Célestin Zanouvi et Richard T. Limoan. Léon Pape Yèhouénou représentait le ministère public. La mémoire de l’audience est tenue par le greffier François Nougbodohoué. C’est Me Gabriel Dossou qui a défendu l’accusé. Anselme Sossa, Antoine N’Tcha Natta, Emile N’Yaba N’Dah et Célestin Maférou Babhoum étaient les jurés.

Maurille GNASSOUNOU A/R Borgou-Alibori
Commentaires