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Empoisonnement et complicité d’empoisonnement (9e dossier): Gniré Mora N’Gobi recouvre la liberté après 10 ans de prison
Publié le lundi 30 janvier 2017  |  La Nation
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© Autre presse par DR
Le palais de justice de Cotonou




Sur les deux accusés poursuivis pour empoisonnement et complicité d’empoisonnement, dans le cadre de l’examen du 9e dossier inscrit au rôle de la première session de la cour d’assises de la Cour d’appel de Parakou, au titre de 2017, seule Gniré Mora N’Gobi était présente, vendredi 27 janvier dernier. Finalement poursuivie pour complicité d’administration de substances nocives à la santé suivie de mort, elle a écopé d’une peine de 10 ans de travaux forcés. Elle recouvre la liberté, après avoir déjà passé 10 ans derrière les barreaux.

Au centre du 9e dossier soumis à l’examen de la cour présidée par Hubert Arsène Dadjo, il y a un problème de jalousie déplacée. Pour s’être mal prise, en voulant à tout prix retrouver l’amour de son conjoint et sauver ce qui reste de son foyer, Gniré Mora N’Gobi s’est retrouvée à la barre, vendredi 27 janvier dernier.
En effet, pour reconquérir le cœur de son conjoint Mora Séké, Gniré Mora N’Gobi sollicita, le 27 mai 2006, les services du guérisseur traditionnel Sidé Gnimagui à Guimarou, commune de Kouandé. Ce dernier lui a servi une poudre blanche qu’elle mélangea au repas destiné à son époux qui mourut, après en avoir mangé. Leur fils Tamou Séké qui, à l’insu de sa mère, mangea une partie du repas, rendit l’âme également. Interpellée et inculpée, Gniré Mora N’Gobi reconnu les faits mis à sa charge, à toutes les étapes de la procédure, tout en soutenant qu’elle ignorait que la substance que le guérisseur traditionnel lui a remise et qu’elle a administrée dans le repas de son mari était de nature à donner la mort. Ce qui n’a pas été le cas de Sidé Gnimagui. Après avoir tout nié, il a indiqué ne pas connaître Gniré Mora N’Gobi au point de lui remettre un quelconque produit.

L’accusé pique une crise

L’action publique pour l’application de la peine s’étant éteinte à l’égard du guérisseur traditionnel, Sidé Gnimagui décédé entretemps en prison, Gniré Mora N’Gobi s’est retrouvé seule à la barre. Le cas de cette dernière a été alors disjoint de celui du défunt.
A la barre, Gniré Mora N’Gobi n’a plus rien reconnu. Face aux questions du président Hubert Arsène Dadjo et du représentant du ministère public, Emmanuel Opita, la peur qu’elle n’a cessé d’évoquer tout le temps, l’a amenée à donner une autre version des faits.
Sous l’effet de l’émotion et de l’intensité des questions qui pleuvaient sur elle, sa tension ne cessait de monter. Et alors que l’assistance pensait que son silence n’était qu’une stratégie de défense qu’elle a finie par adopter, elle réalisera que dame Gniré Mora N’Gobi venait en réalité de piquer une crise de tension. Pour lui retirer le micro des mains, ce ne fut pas un jeu d’enfant. Deux sceaux d’eau ont été versés sur elle et des soins intensifs lui seront prodigués après appel au service des urgences du Centre hospitalier départemental du Borgou, avant que l’accusée ne retrouve ses esprits une heure et demie plus tard.
A la reprise, rien n’a évolué. « Vous voulez dire que je n’aime pas mon mari et mon fils ? », finira-t-elle par demander.

La défense de la veuve

Son bulletin n°1 ne porte aucune mention. Quant à l’enquête de moralité, la plupart des personnes interrogées se sont dites surprises par l’acte qu’elle a commise, après plus de vingt ans de mariage avec Mora Séké. On la savait adepte d’un fétiche qui l’obligeait à être en transe et à se rendre souvent au couvent.
Pour l’avocat général Emmanuel Opita, les éléments constitutifs des crimes d’administration de substances nuisibles à la santé suivie de mort et complicité punis par les articles 317 alinéa 8, 59 et 60du Code pénal, sont réunis. Il n’y a pas l’ombre d’un doute, c’est la substance mise dans le repas qui a provoqué la mort de Mora Séké et de Tamou Séké. Ayant le parfait contrôle de ses facultés mentales au moment du crime, l’avocat général en déduit que l’accusée Gniré Mora N’Gobi est accessible à la peine. Elle est, selon lui, coupable des fait mis à sa charge. Aussi demande-t-il à la cour de la condamner à la peine de huit ans de travaux forcés.
Dans sa plaidoirie, le conseil de l’accusé, Nestor Ninko, avouera qu’en ving-cinq ans de carrière, que c’est pour la première fois qu’il se retrouve face à une telle situation : celle de défendre la veuve, celle de défendre Dieu car il est amour. Dans cet exercice, il est allé avec toute la fougue, la vigueur et la rigueur possible. « Je plaiderai ce dossier en droit et en fait », a-t-il averti. Il a déploré l’absence du certificat médical et des actes de décès dans le dossier pour situer sur les circonstances de la mort de Mora Séké et de Tamou Séké. Ce qui, selon lui, établirait le lien de causalité entre la consommation du repas par les deux personnes et leur décès qui s’en est suivi, pour que la justice puisse former sa conviction. « C’est dire que l’imputabilité de la mort des deux individus à dame Gniré Mora N’Gobi relève tout au moins d’un doute absolu. Dans ce cas, il appartient à la justice de s’abstenir », conseille Me Nestor Ninko. Il prie alors la cour d’acquitter son client au bénéfice du doute.
Par rapport à l’aspect factuel de sa plaidoirie, il indiquera que trois enfants attendent le retour de leur mère, dans l’espoir de consolider ce qui reste encore de leur famille. « Il s’agit du cas d’une accusée malheureuse, une femme malade, une femme dont la vie est faite de drames et qui continue après dix ans de pleurer l’amour de sa vie, Mora Séké, et son fils, Tamou Séké, qu’elle ne verra plus jamais. D’où la peur qui a varié devant l’instruction et devant votre cour », insistera l’avocat. Au cas où l’intime conviction de votre cour l’amènerait à constater la culpabilité de dame Gniré Mora N’Gobi, qu’elle tienne compte du temps qu’elle a déjà passé en prison », suggérera-t-il.
Après sa délibération, la cour condamne Gniré Mora N’Gobi à la peine de dix ans de travaux forcés, au paiement des frais envers l’Etat et fixe la contrainte par corps au maximum. Mis sous mandat de dépôt depuis le 13 juin 2006, elle recouvre donc la liberté.
Aux côtés du président de la cour, Hubert Arsène Dadjo, Richard T. Limoan et Adamou Moussa étaient les assesseurs. Emmanuel Opita était dans le fauteuil du ministère public. Maître Hippolyte Ofrin assurait la mémoire de la cour. Nestor Ninko a défendu l’accusé. Poulo Amadou Sambo, Soulémane Dramane, Anselme Sossou et Adizatou Séko Kpéra étaient les jurés.
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