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Meurtre (24e dossier): Toumoudagou Kombetto retourne en homme libre au village
Publié le jeudi 16 fevrier 2017  |  La Nation
Justice
© Autre presse par DR
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Tomoudagou Kombetto a été entendu, mardi 14 février dernier, par la cour d’assises de la Cour d’appel de Parakou. Le crime de meurtre pour lequel il était venu répondre, ayant été finalement disqualifié en coups mortels, il a été condamné à deux ans d’emprisonnement ferme. Embastillé depuis le 18 août 2014, c’est en homme libre qu’il a rejoint les siens.

La première session de la cour d’assises de la Cour d’appel de Parakou au titre de 2017 a examiné son 24e dossier, mardi 14 février dernier. Sur le banc des accusés, il y avait un vieillard de 78 ans qui, face à la rouée de coups que lui administrait un jeune de 25 ans a dû le poignarder mortellement pour se tirer d’affaire.

Les faits remontent au mercredi 13 août 2014. Au marché de Ouoro, dans la commune de Cobly, N’dah Sambiéni et Toumoudagou Kombetto ont failli en venir aux mains. C’est l’interposition des voisins qui a empêché la bagarre. Mais tard dans la nuit, sur le chemin du retour, N’dah Sambiéni a poursuivi Toumoudagou Kombetto. Après l’avoir rattrapé, il engagea une bagarre avec lui. Il le projeta au sol avant de lui faire subir la furie de ses coups de poings. De guerre lasse, Toumoudagou Kombetto a dégainé son couteau, avant de lui asséner un coup à la poitrine. Il s’écroule et meurt sur le champ.
Interpellé puis inculpé de meurtre, Toumoudagou Kombetto a reconnu les faits à toutes les étapes de la procédure, sauf nuance-t-il qu’il n’avait pas l’intention de donner la mort.

A la barre

A l’audience, mardi 14 février dernier, il est resté dans la même logique.
« Pourquoi, avais-tu ce couteau sur toi ? », lui demande le président Epiphane Yéyé. « Chez nous, c’est une tradition. Ce sont les vieux qui le portent sur eux. Même au lit, ils l’ont toujours à côté. Cela ne veut pas dire que celui qui le porte a l’intention de tuer », a répondu l’accusé. A la question de savoir s’il n’y avait-il pas un précédent entre la victime et lui ; non, laissera-t-il échapper. « N’y a-t-il pas une affaire de sac d’engrais disparu, entre vous ? », insiste le président de la cour. « Si, il avait dérobé un sac d’engrais à sa mère qu’il est venu déposer chez moi. Il a voulu me le vendre et j’ai refusé. Le sac a été récupéré par sa mère. Il pense que c’est moi qui l’ai informé », expliquera Toumoudagou Kombetto. « Ne savais-tu pas que tu pouvais le tuer en dégainant ton couteau ? », poursuit le président. « Moi, je cherchais à me défendre. Il tenait ma gorge et je ne pouvais même plus réfléchir. Il était plus fort que moi », se justifiera l’accusé. Secoué de questions par le président, Epiphane Yéyé, l’avocat général, Fiacre T. Azalou et son conseil, Julien Togbadja, il avouera qu’il ne peut se rendre au marché, sans faire un tour à N’Koota, dans les cabarets à plein air, pour prendre la boisson locale « Tchoukoutou ». Le septuagénaire confiera que s’il était ivre, c’est depuis les lieux qu’il allait céder aux provocations de N’dah Sambiéni.
Le seul témoin présent à l’audience, c’était le chef du village, Abdou Issifou. C’est chez ce dernier que l’accusé s’est rendu aussitôt après le drame. Pour Abdou Issifou, la victime était un homme agressif qui n’épargnait personne. Entre-temps, il avait même fracassé la porte de sa mère, puis fléché son grand frère.
Suspectant des actes de représailles, comme il est de tradition dans la localité, lorsqu’une personne décède après avoir été poignardée, Abdou Issifou avait fait débarquer deux gendarmes. Ce qui n’a pas empêché les proches de la victime de procéder à la destruction de cinq maisons, des champs de coton, de produits vivriers et des greniers appartenant à la famille de Toumoudagou Kombetto.
Pour le compte de la partie civile, la mère de la victime, Konan Sambiéni, a aussi été écoutée. Depuis environ trois ans que son fils qui l’aide pour les travaux champêtres l’a quittée, elle ne fait que se débrouiller, a-t-elle rapporté à la cour. Elle demande du soutien pour vivre.

L’excuse de provocation

Selon l’avocat général, Fiacre T. Azalou, il est constant que Toumoudagou Kombetto a donné un coup de couteau à N’dah Sambiéni des suites duquel ce dernier est décédé sur le champ. Essayant de réunir les éléments constitutifs du crime d’homicide commis volontairement, il fait remarquer que l’accusé a fui le danger qui, malheureusement, l’a poursuivi et rattrapé. Cherchant le mobile pour lequel l’accusé a tué, l’avocat général fait constater qu’il a volontairement porté un coup de couteau à un délinquant, lequel en est mort. Il a été victime de son esprit de vengeance, selon le ministère public qui imagine le degré de rage qu’il nourrissait à l’endroit de Toumoudagou Kombetto. L’avocat général invitera alors la cour à disqualifier le crime de meurtre en coups mortels, tout en trouvant des circonstances atténuantes et l’excuse de provocation au profit de l’accusé dont il a loué la loyauté et son refus de faire du recel. L’avocat général requiert qu’il plaise à la cour, de le condamner à 60 mois d’emprisonnement dont 30 fermes, soit au temps déjà passé en prison, puis les 30 mois restants assortis de sursis.
Pour le conseil de l’accusé, Me Julien Togbadja, les faits sont d’une telle netteté qu’on ne pourrait procéder autrement. Il est resté en phase avec les réquisitions de l’avocat général. « Si c’était vous qui étiez Toumoudagou Kombetto, qu’auriez-vous fait ? Vous avez entendu la cohue de témoignages qui blâment N’dah Sambiéni et, sont à l’avantage de Toumoudagou Kombetto », a-t-il demandé. Le malheur de son client, a-t-il déploré, c’est d’avoir refusé d’être un receleur d’un sac d’engrais que N’dah Sambiéni a soustrait à sa mère. Mécontent, il a donc voulu lui régler son compte. Selon Me Julien Togbadja, c’est n’en pouvant plus que l’accusé, dans le cadre du réflexe ultime, s’est finalement servi de son couteau, « le complément du vieillard en cas de danger ». « Terrassé par ce jeune de 25 ans et aveuglé par ses coups, le vieillard de 75 ans ne pouvait pas discerner, cibler ou viser une quelconque partie d’un corps dans la nuit profonde », soutient l’avocat, en évoquant la légitime défense, sur le terrain du droit. « Le seul grief qu’on lui fera, c’est la question de la proportionnalité entre les armes utilisées. Mais elle est relative. Il faut regarder les rapports de forces en présence. Et, autant une arme blanche peut tuer, autant la main peut tuer », poursuit Me Julien Togbadja. Estimant que son client est un concentré de valeurs recommandables que l’on ne peut plus envoyer en prison. Il invite également la cour à lui accorder des circonstances atténuantes et l’excuse de provocation.
Au cours de sa délibération, la cour a disqualifié le crime de meurtre en coups mortels, infraction prévue et punie par l’article 309 alinéas 4 du Code pénal. Elle déclare Toumoudagou Kombetto coupable d’avoir volontairement porté des coups et fait des blessures sur N’dah Sambiéni, avec cette circonstance que les coups et blessures, sans intention de donner la mort, l’ont occasionné. La cour l’a condamné à la peine de deux ans d’emprisonnement ferme. En détention depuis le 18 août 2014, le vieux Toumoudagou Kombetto peut retourner chez lui au village où déjà, il promet organiser une grande fête de réconciliation avec les membres de la famille de N’dah Sambiéni.
La cour a été présidée par Epiphane Yéyé. Ses assesseurs étaient Essowè Batamoussi et Hervé T. Houdégbé. Le fauteuil du ministère public a été occupé par Fiacre T. Azalou. C’est Me Brice Dossou-Yovo qui a tenu la plume de l’audience. Comme jurés, il y avait Adizatou C. Séro Kpéra, Poulo Amadou Sambo, Imorou Abdoulaye et Kouandi Toura.

Maurille GNASSOUNOU A/R Borgou-Alibori
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