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Révision de la Constitution : Michel Adjaka dénonce le non-respect des conclusions de la commission des réformes politiques et institutionnelles
Publié le lundi 20 mars 2017  |  Le Clairon
Le
© Autre presse par DR
Le Magistrat Michel Adjaka président de l`Unamab






Par : Jérôme DEGUENON

Michel Adjaka, président de l’Unamab n’a pas fini d’opiner sur les points d’ombre du projet de révision de la constitution actuellement transmis au palais des gouverneurs pour y être étudier en procédure d’urgence. Après son billet à travers lequel il dénonce une révision qui entrave le bon fonctionnement de la justice, le magistrat revient à nouveau à la charge avec une nouvelle publication dans laquelle il souligne que le président de la république a introduit au parlement un document dans lequel il veut prôner une justice sans pouvoir, sans protection et sans moyen pour aboutir à ses fins. Lisez plutôt.

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LE CHEF DE L’ETAT PRONE UNE JUSTICE SANS POUVOIR, SANS PROTECTION ET SANS MOYEN

Chers compatriotes, au même moment où le Président de la République militarise son pouvoir par la création d’un conseil national de sécurité et du conseil national de renseignements, rattachés à sa personne (article 62 nouveau), il se propose de fragiliser le pouvoir judiciaire.

En effet, l’article 126 de la nouvelle constitution dispose que « Les juges ne sont soumis dans l’exercice de leur fonction qu’à l’autorité de la loi

Les magistrats du siège sont inamovibles durant la période fixée à leur nomination conformément à la loi». L’article 128, alinéa 3 de ladite constitution prévoit qu’« En matière disciplinaire, le conseil supérieur de la magistrature siège en nombre restreint, dans les conditions fixées par une loi spéciale au sein d’une chambre comprenant des représentants du gouvernement.»

Alors que la commission des réformes politiques et institutionnelles a suggéré au Chef de l’Etat de renforcer l’inamovibilité du juge et de l’élargir aux magistrats du parquet, comme en France, le président de la République a plutôt fait l’option d’entraver l’inamovibilité du juge en le limitant à un mandat, de garder le parquet et l’inspection générale des services judiciaires dans le giron de l’exécutif pour mieux contrôler le pouvoir judiciaire.

Désormais, le juge ne sera imperturbable dans son office que pour un temps. Au-delà de son mandat, il peut être déplacé sans son consentement au moyen d’affectation punitive et sur l’autel des règlements de comptes.

En cas de faute supposée ou avérée, le magistrat est jugé par une composition restreinte en présence des représentants du gouvernement.

Actuellement, le Conseil Supérieur de la Magistrature (CSM) ne comporte que douze (12) membres dont seulement deux (02) sont élus par les magistrats.

Qui veut-on exclure du CSM siégeant en conseil de discipline ?

En l’état actuel de la loi régissant le CSM, le Garde des Sceaux, en tant qu’autorité de poursuite, n’y siège pas lorsque cette institution statue en tant que conseil de discipline. Si l’on tente d’instaurer le contraire, l’objectif est sans nul doute de vassaliser la justice à travers une politisation à outrance de l’instance de nomination, de promotion et de sanction des magistrats. Dans quel pays, a-t-on trouvé le modèle judiciaire en gestation ?

Quel audit institutionnel a permis de déboucher sur le remède préconisé ?

Dans son office, le juge n’a pas été raté. Il aura désormais en face de lui, deux (02) catégories de justiciables, contrairement aux dispositions de l’article 26 de la constitution qui proclame l’égalité des citoyens devant la loi. D’un côté, il aura des voleurs de cabris et de poulets qu’il peut atteindre de toutes ses forces, et de l’autre, les justiciables super-privilégiés. Dans cette deuxième catégorie, nous avons les députés, les ministres et le président de la République.

Alors que tout le monde déplore le fait que l’Assemblée soit parfois un refuge pour certains citoyens en conflit avec la loi, le Chef de l’Etat envisage de rendre davantage intouchables les honorables députés recherchés par la justice. Ceux-ci bénéficieront d’une immunité contre la garde à vue et la détention provisoire pour tous les faits, y compris ceux par eux commis avant leur élection (article 90 nouveau alinéa 3).

Une telle mesure n’a aucun fondement et ne peut se justifier que par le souci d’injustice, la promotion de la corruption et de sa sœur siamoise, l’impunité.

La même injustice est élargie aux ministres. Au même moment où l’on confie les complices de ceux-ci aux juridictions du droit commun, il sera désormais très difficile pour la justice d’atteindre et de sanctionner un ministre même après la cessation de ses fonctions. Déjà avec une majorité absolue, il n’est pas aisé pour la justice de connaître des crimes économiques perpétrés par les ministres. Sans tenir compte de cette difficulté, le Chef de l’Etat porte la majorité requise pour autoriser la poursuite et la mise en accusation des ministres aux 2/3 des députés composant le parlement (article 137-2).

En clair, l’Assemblée Nationale, à l’instar d’un procureur de la République engagera les poursuites, et comme la chambre d’accusation, elle pourra renvoyer les ministres devant la cour d’assises et ce, contrairement au principe de séparation des fonctions de poursuite et d’instruction.

En conclusion, on note que le gouvernement redoute le pouvoir judiciaire. Pourtant, la commission des réformes politiques et institutionnelles, après avoir fait le constat qu’il n’y a ni avenir, ni devenir pour le Bénin sans un pouvoir judiciaire efficace et crédible, a proposé au Chef de l’Etat de renforcer l’indépendance statutaire des magistrats et de doter le pouvoir judiciaire de l’autonomie financière. On remarque avec amertume que le Président de la République a fait l’option contraire, celle de réduire les pouvoirs du juge, de priver les magistrats de protection et la justice d’un budget autonome.

On a tout compris

Michel ADJAKA
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