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Coups mortels à son mari : Bernadette Gbèdohoun condamnée à 5 ans de travaux forcés (21e dossier)
Publié le jeudi 20 avril 2017  |  La Nation
Le
© Autre presse par DR
Le palais de justice de Cotonou




Ce mercredi 20 avril, la cour d’assises de la cour d’appel de Cotonou s’est penchée sur le vingt-et-unième dossier qui était à l’affiche. Ledit dossier met en cause Bernadette Gbèdohoun poursuivie pour coups mortels. Après examen, elle a été déclarée coupable et condamnée à cinq ans de travaux forcés.

Cinq ans de travaux forcés pour Bernadette Gbèdohoun qui a été reconnue coupable de coups mortels au terme de l’examen de la vingt-et-unième affaire inscrite au rôle de la cour d’assises, ce mercredi 20 avril. Les débats n’ont pas été laborieux comme les autres fois, car l’accusée a bien collaboré. Elle a globalement reconnu les faits. Lorsque certains propos ne concordaient pas avec ses déclarations antérieures, elle les mettait sur le compte du temps qui s’est écoulé et présentait des excuses aux membres de la cour. Ce qui a permis à la cour de bien avancer dans la conduite des débats.

Requérant, le représentant du ministère public a retenu qu’une dispute dans un couple a tourné au drame. Il se réfère à « Le médecin malgré lui » de Molière pour résumer ce vingt-et-unième dossier au vocable « scène de ménage et drame ». Virgile Kpomalégni rappelle les faits et relève que dame Bernadette Gbèdoboun a grièvement blessé son mari qui en a succombé. Ces faits qualifiés de coups mortels sont prévus par l’article 309 al 4 du Code pénal. La loi définit les coups mortels comme les coups et les blessures volontairement faits qui ont entraîné la mort sans intention de la donner, retient le représentant du ministère public. Il s’agit d’un comportement violent, apprécie Virgile Kpomalegni.
Pour l’élément matériel de l’infraction, explique-t-il, c’est le résultat qui est pris en considération. Ce crime est constitué même si la mort ne suit pas immédiatement la violence, relève le représentant du ministère public.
Les blessures s’entendent, selon la doctrine, de toute plaie issue des coups portés, conçoit le ministère public. Un lien de causalité certain est nécessaire afin de qualifier la responsabilité de l’auteur, souligne-t-il. Bernadette a-t-elle porté des coups et fait des blessures qui ont entraîné la mort ?, questionne le ministère public. Assurément oui, répond-il. Il cite des déclarations de l’accusé au cours de la procédure pour étayer cette affirmation. Le lien de causalité entre les coups portés, les blessures engendrées et la mort est manifeste sur la base des éléments ci-dessus, déduit le ministère public.
Quid de l’intention criminelle ? A ce niveau, expose le ministère public, dès que l’agent pénal est conscient, il y a crime. Les coups sont volontaires mais non le résultat. Les coups portés et les blessures faites sont-ils volontaires ? Sans nul doute, apprécie le ministère public. « Elle ne voulait pas donner la mort », a-t-elle expliqué aussi bien à l’enquête préliminaire que devant le magistrat instructeur. Il cite des éléments de ces deux étapes pour étayer son propos. L’accusée ne voulait pas la mort de son mari mais les coups mortels sont constitués, retient Virgile Kpomalegni. L’imputabilité de l’acte est établie et sa culpabilité est patente, souligne le ministère public. Elle est responsable pénalement et apte à supporter une répression pénale. Peut-elle bénéficier de circonstances atténuantes ? Oui, pense-t-il. « Les bons antécédents de couple, le repentir, les passions qui ont entraîné l’infraction, le défaut de préméditation », entre autres peuvent être assimilés aux circonstances atténuantes quand bien même ils ne constituent pas des excuses légales.

Baisser le quantum de la peine

Les circonstances atténuantes permettent de baisser le quantum de la peine, souligne le ministère public. L’enquête de moralité ne lui est pas trop favorable, relève le ministère public. Mais durant tout le séjour carcéral de son feu mari condamné à dix-huit mois fermes, retient Virgile Kpomalégni, elle s’est bien occupée des enfants. Les enfants sont livrés à eux-mêmes depuis son incarcération, il demande à la cour de lui faire bénéficier des circonstances atténuantes. « Je requiers dire que l’accusée a volontairement porté des coups qui ont provoqué la mort ; les résultats sont au-delà de ce qu’elle espérait », a requis l’avocat général, demandant de la condamner à cinq ans de travaux forcés.
A la défense, un duo composé de Mes Amandine Goudé-Djessin et d'Adiss Salami.
« Huit délinquants en vue, si rien n’est fait ; le sort de ces enfants est dans vos mains », alerte Amandine Goudé-Djessin. Pour elle, le ministère public a « dénaturé les faits ». L’avocate, en « les replaçant dans leur contexte », indique que durant son séjour carcéral de dix-huit mois fermes, Bernadette Gbèdohoun s’est occupée de son mari et même des enfants. Une bagarre a éclaté entre le couple suite à une dispute qui a dégénéré, explique-t-elle. La défense souligne : « Une femme dévouée qui s’est sacrifiée pour la famille ; elle a vendu sa parcelle pour payer la caution fixée à son mari ; aucun parent n’est venu à son secours. Un événement malheureux qu’on appelle ‘’akoba’’ survint ». Poursuivant son argumentaire, elle retient que l’accusé est une femme qui est restée vingt-cinq ans au foyer et a fait dix enfants dont deux sont morts. « Elle a voulu rester auprès de son mari et des enfants. Des coups ont été involontairement donnés parce qu’elle a voulu se défendre », relève Me Amandine Goudé-Djessin. « C’est une mère et vous êtes des maris. Messieurs les jurés, sa vie est dans vos mains, vous fabriquerez des délinquants, si vous ne la libérez pas, car ce sont des enfants qui ont besoin d’être entourés », lance le conseil, priant la cour de la condamner au temps passé en détention pour rendre justice.
Pour Me Adiss Salami, sa consoeur a « tout dit et excellemment ». Il a expliqué vouloir juste apporter quelques nuances à la compréhension que la défense souhaite que la cour ait. « Une scène de ménage a malheureusement tourné au drame ; l’accusée ne s’est pas dit : aujourd’hui je vais en finir avec lui », conçoit Me Adiss Salami. Comment peut-il rester sourd et aveugle ?, s’est dit la dame, car ce n’était pas son intention, conçoit la défense. L’accusée, selon lui, n’avait rien compris de la tournure prise par les événements, lorsque le mari a commencé à la menacer. Est-ce que véritablement Bernadette Gbèdohoun avait volontairement donné des coups à son mari ? Non, répond la défense, car c’est un acte involontaire et elle cherchait un moyen pour s’échapper. Me Adiss Salami s’interroge sur la qualification et préfère les coups et blessures involontaires ayant entraîné la mort, auquel cas la condamnation tombe, plaide-t-il. « Je souhaite qu’elle soit libérée. Autrement, il faut lui faire bénéficier de circonstances atténuantes. Elle était allée se réfugier chez le délégué. Huit enfants attendent que leur mère retourne à la maison pour jouir de son amour », insiste la défense.

La volonté est commandée par l’intellect

Les répliques du ministère public ont consisté à réagir suite aux observations de la défense. Sur la base des faits relatés, objecte Virgile Kpomalégni, le ministère public n’a ni dénaturé, encore moins nullement travesti les faits. « On a dit que les faits posés ne sont pas volontaires. La volonté est commandée par l’intellect. On ne peut nullement soutenir que l’acte est involontaire. Le rapport d’enquête médico-psychologique et psychiatrique est clair et dit qu’elle ne souffre d’aucune anomalie mentale », rappelle-t-il. Le législateur a décrit dans l’article 309 al 4 les coups et blessures volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner. L’infraction est bien constituée, réitère-t-il.
Dans ses contre-répliques, Me Adiss Salami déclare invoquer l’article 319 du Code pénal qui dispose de l’homicide involontaire. Il dit réitérer ses observations antérieures.
La cour se retire pour délibérer. Elle retient Bernadette Gbèdohoun dans les liens de l’accusation et la condamne à cinq ans de travaux forcés. Ayant déjà fait plus de quatre ans pour avoir été mis sous mandat de dépôt le 31 mai 2012, elle recouvrera sa liberté le 31 mai 2017, soit dans 41 jours.

Les faits
L’accusée Bernadette Gbèdohoun et le nommé Pierre Anagonou vivaient en couple avant l’incarcération de celui-ci à la prison civile de Cotonou. Depuis son retour de prison, le nommé Pierre Anagonou n’a cessé de soupçonner sa femme d’avoir eu des aventures amoureuses avec l’infirmier du village Hèkanmè, dans la commune de Zè. C’est ainsi que le mardi 29 mai 2012, cette situation a entrainé entre les deux une bagarre au cours de laquelle l’accusée Bernadette Gbèdohoun a porté des coups de coupe-coupe au pied gauche de son mari qui est décédé des suites d’une hémorragie provoquée par les blessures.
Poursuivie pour coups mortels, l’accusée Bernadette Gbèdohoun a reconnu les faits à toutes les étapes de la procédure.
L’extrait n° 1 du casier judiciaire de l’intéressée ne porte mention d’aucune condamnation. L’enquête de moralité ne lui est pas très favorable.


Composition de la cour :
Président : Christophe Atinmakan
Assesseurs : Michel Adjaka
Norbert Dadjo
Ministère public :
Virgile Kpomalégni
Greffier : Victoire Oladikpo
Jurés :
Louis Z Hounkanlin
Sètoungan Mèdévo
Léonce Anicet Bachioumba
Koffi F. Koukponou
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