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Edito: PPEA II, non lieu
Publié le vendredi 19 mai 2017  |  L`événement Précis
Barthélémy
© aCotonou.com par DR
Barthélémy Kassa, député et ancien ministre des mines et de l`énergie




Personne n’est donc coupable dans l’affaire PPEA-II. Ni Barthélémy Kassa ni les douze cadres de son ministère détenus pendant deux ans, encore moins l’ex-ministre Komi Koutché. Rien ne s’est donc passé. Le rapport du cabinet Kroll qui a conclu que les 2,6 milliards de fcfa ont été effectivement détournés, ne vaut donc pas grand-chose. Pour ceux qui ont de la mémoire, le même cabinet Kroll avait coûté aux contribuables pas moins d’un demi-milliard de FCFA. Pour le résultat que l’on voit : il n’y a rien eu. Merci.
Seulement, je reste désespérément dubitatif sur ce verdict du juge Rodolphe Azo. Il a certainement bien fait son travail, mais cela n’empêche pas les Béninois qui sont restés deux ans à penser à la culpabilité des mis en cause, qu’il y a vraiment quelque chose de pourri dans la maison justice. S’il n’y avait pas eu tant d’actes de concussion au sein de nos juridictions, s’il n’y avait pas eu des juges radiés pour détournement de frais de justice criminelle, s’il n’y avait pas eu par le passé tant et tant de décisions aux relents de corruption avérée, personne n’aurait eu de doute quant à la solidité du verdict. Et puis, il y a le personnage Barthélémy Kassa. Iconoclaste, gouailleur mais redoutablement doué pour le cinéma, le personnage fascine et rebute tout à la fois. Barthélémy Kassa est l’un des tout premiers docteurs en agronomie entièrement formés au Bénin. Dans son Matéri natal où il s’affuble du titre de « Gouverneur », il règne comme en maître. Règne sans partage sur une petite communauté apprivoisée par la force de l’argent facile distribué à pleines brassées, par les « positionnements » des fils de la localité lors des concours d’entrée à la fonction publique ou encore par ces nombreux services rendus aux étudiants et aux élèves de la commune comme d’ailleurs de toute la circonscription électorale. C’est le genre de politicien que les populations béninoises affectionnent : il est généreux, il sait donner et il sait amuser. S’il y a un ministre qui s’est parfaitement adapté au folklore permanent de Boni Yayi, c’est bien ce Kassa. Il en faisait tant et si bien qu’on en était venu à se demander qui de Yayi ou de Kassa était le maître de l’autre.
Le dénouement de ce mardi lave de tout soupçon le député, mais cela ne le réhabilite pas. Dans l’opinion, la décision du juge passe très mal. Et l’on a tôt fait de voir une connexion nauséabonde entre cette mansuétude de la justice et le ralliement récent de l’homme à la cause du régime Talon. Si vous avez fait un tour à Matéri, Cobly, Tanguiéta et Boucombé pendant les périodes électorales, vous saurez que le « Gouverneur » est une force politique avec laquelle il n’est pas du tout conseillé de se frotter. Bien sûr, il a usé des attributs de l’Etat Yayi pour asseoir son hégémonie. La plupart des têtes de pont de la contestation anti-FCBE de la région ont été jetés en prison pour des raisons aussi fallacieuses les unes que les autres, avec la complicité des juges. Le verdict de mardi nous a montré qu’il peut agir jusqu’à Cotonou, alors qu’on le pensait confiné dans les hauteurs de l’Atacora
Mais la véritable question face à ce verdict brutal et paradoxal, c’est de savoir ce que fera maintenant le Royaume des Pays-Bas face à ce désaveu cinglant venu même des entrailles de notre justice. Ayant déjà conclu à un détournement des fonds de leurs contribuables, il y a deux ans, nos partenaires risquent fort de croire qu’ils ont été bernés sur toute la ligne. Et que les Béninois ne sont vraiment pas un peuple sérieux. Par voie de conséquence, il faut se demander quelles incidences cela pourra avoir sur leurs décisions futures, relativement à l’aide au Bénin. Si l’on se rappelle très bien, en 2015, il a fallu une ferme intervention du gouvernement hollandais pour que le parlement des Pays-Bas n’en vienne pas à exiger une annulation de leur aide publique au Bénin.
Avec la nouvelle donne, les prochains jours ou les prochaines semaines nous réservent beaucoup de tumultes. Et c’est bien pour tout cela, pour que la décision de la première instance ne soit frappée davantage de suspicions, pour que Kassa lui-même soit définitivement mis hors de cause, et pour que les Pays-Bas n’en viennent pas à prendre des décisions sévères contre les pauvres populations vers lesquelles leur aide est orientée, qu’il faudra impérativement un appel contre la décision de mardi. Une instance supérieure devra nous dire si ce verdict est conforme à la vérité, si l’argent de l’eau n’a vraiment pas été volé.

Par Olivier ALLOCHEME
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