Pour élucider le dix-septième dossier inscrit à son rôle, la cour d’assises de la cour d’appel de Cotonou a jugé, ce mercredi 5 juillet, Basile Zizié présumé coupable d’une tentative d’assassinat sur son frère. Au terme de l’examen de l’affaire, il a été plutôt reconnu coupable de tentative de meurtre et condamné à cinq ans de travaux forcés.
Poursuivi pour tentative d’assassinat, Basile Zizié a plutôt été reconnu coupable de tentative de meurtre et condamné à cinq ans de travaux forcés. C’est le verdict retenu à son égard au terme de l’examen du dix-septième dossier.
Au cours de l’instruction à la barre, l’accusé Basile Zizié a varié dans ses réponses. Il déclare avoir disputé le fusil avec son frère mais ne l’a pas visé. Le président et les assesseurs se sont employés à lui faire dire la vérité, mais il a résisté. Le représentant du ministère public lui a alors demandé s’il avait donné ses réponses à l’enquête préliminaire sous menace. De même si ses réponses étaient identiques devant le magistrat instructeur. L’accusé s’est senti quelque peu confondu.
Aucun témoin n’était venu le confondre ou apporter la contradiction. La victime non plus n’a pas fait le déplacement.
Dans ses réquisitions, le représentant du ministère public relève que la vie est précieuse. Elle est même sacrée, retient-il. « Il est inimaginable qu’un être humain attente à la vie de son frère », conçoit-il. Lorsque cela survient, c’est la consternation, fait-il observer. C’est le cas atypique de la méchanceté gratuite dans notre société, constate le ministère public. Le dix-septième dossier s’apparente à cette scène. Il rappelle les faits et évoque la tentative d’assassinat prévue et punie par les articles 2, 296, 297, 298 et 302 du Code pénal. L’accusé les a reconnus à l’enquête préliminaire et devant le juge d’instruction avant de les nier devant vous, rappelle-t-il. Il s’interroge : les éléments constitutifs sont-ils réunis ?
Sur la tentative d’assassinat, apprécie le représentant du ministère public, l’article 2 du Code pénal la définit comme toute tentative de crime qui aura commencé et qui n’aura manqué son effet que des suites de circonstances indépendantes de la volonté de l’auteur.
L’élément matériel résulte du couplage des articles précités : une tentative punissable et une volonté manifeste de commettre un homicide.
La tentative n’est punissable que lorsqu’il y a commencement d’exécution. La tentative est suspendue et a manqué son effet suite à des circonstances indépendantes de la volonté de l’auteur, souligne-t-il.
Pour le ministère public, la préméditation suppose un délai. L’acte n’a pas été exécuté froidement, fait-il remarquer. La constante est que l’accusé s’est emparé d’un fusil artisanal ; il a tiré un coup de feu dans la direction de la chambre de son frère. Il a agi sous l’effet de la colère, relève le ministère public. L’agent n’a pas mûri son acte ; il n’y a pas eu de préméditation. C’est plutôt une tentative de meurtre. Il a été intercepté dans son élan par des voisins; l’acte a été commis sous l’emprise de la colère.
Eléments constitutifs
La tentative de meurtre étant prévue par les articles 2, 295 et 304 du Code pénal, ses trois éléments constitutifs sont réunis à son égard.
Par rapport à la détention illégale de fusil de traite, il est prévu par un décret. Sans avoir rempli les conditions de sa détention, il en possède, relève-t-il. « Il est détenteur d’un fusil sans avoir accompli les formalités administratives requises en la matière. Il en a hérité de son grand-père et l’utilise tous les jours. L’accusé a une parfaite connaissance de qu’il détient le fusil sans autorisation », affirme-t-il.
Quid de la sanction? C’est l’article 304 du Code pénal qui le prévoit. Le meurtre entraîne la peine de mort. Le coupable encourt les travaux forcés à perpétuité. Bien que coupable, il existe à son encontre des circonstances atténuantes, retient cependant le représentant du ministère public. « Il se met facilement en colère et est d’une bonne moralité; cela entraîne un abaissement de la peine », fait-il remarquer. «Je requiers, affirme le ministère public, de retenir Basile Zizié dans les liens de l’accusation et de le condamner à cinq ans de réclusion».
Pour la défense assurée par Me Guy Dossou, le dossier le réjouit, car il a devant lui des magistrats qui s’y connaissent, toujours proches de la procédure. Ce dossier devait passer par une procédure de flagrant délit. Ils vous ont induit en erreur depuis l’enquête préliminaire, fait observer Me Guy Dossou. Il y a, selon lui, insuffisance de charge ou absence de charge. En matière criminelle, lorsqu’il y a un seul témoin, cela équivaut à une insuffisance de charge ou défaut de preuve. « J’ai apprécié la manière dont le ministère public a conduit son réquisitoire. Il a eu des difficultés et est allé sur le terrain du meurtre. Pour charger et tirer un seul coup de feu avec une arme artisanale, il faut 15 à 20 minutes», fait remarquer la défense.
La tentative punissable n’est pas juste, car on ne peut tenter de tuer quelqu’un qui n’est pas présent, à l’intérieur de la chambre, relève-t-il. Pour la défense, tirer sur la serrure d’une porte ne signifie pas qu’on veut tuer quelqu’un. «La poursuite ne nous a pas présenté de scellé et nous sommes en matière criminelle, observe la défense. Il y a tellement d’incohérence que vous avez des raisons de disqualifier», indique-t-il. « Le temps de réactivité n’a pas été observé. Il faut disqualifier en violences et voies de fait », indique la défense.
Par ailleurs, c’est un psychologue qui a établi le rapport ; c’est un psychiatre qui devrait produire ce rapport dans un temps voisin de la commission de l’infraction, relève la défense. « Cela ne me convainc pas et je vous prie d’écarter cette pièce. Sa mère a été menacée. Nul ne peut accepter pareille menace. », observe-t-il. Depuis l’enquête préliminaire, selon la défense, il y a problème ; la victime et le témoin n’ont pas comparu. Au regard de ces observations, la défense a prié la cour d’écarter la tentative d’assassinat et de meurtre car cela ne tient pas.
Un problème de droit
Par rapport à la détention illégale de fusil de traite, cela pose un problème de droit, retient la défense. C’est le fusil de son grand- père. Me Guy Dossou demande à la cour de disqualifier le crime en violences et voies de fait et de condamner Basile Zizié au temps passé en détention préventive. « Votre cour est là pour jouer un rôle de pédagogue. L’absence de témoin fragilise le dossier. Il faut corriger les déviations », relève la défense.
Les répliques du représentant du ministère public ont tendu à s’inscrire en faux contre l’insuffisance de preuve relative à l’existence d’un seul témoin. Il estime que la défense a surfé sur les insuffisances de la procédure. L’accusé a eu la détention de l’arme et en a fait usage sous l’effet de la colère, indique-t-il. C’est lui qui a tiré, souligne-t-il.
Dans ses contre-répliques, la défense estime qu’aux assises, les insuffisances du dossier profitent à l’accusé. On n’a pas présenté la victime, regrette-t-il.
La cour se retire pour délibérer. Elle disqualifie la tentative d’assassinat en tentative de meurtre et condamne l'accusé à cinq ans de travaux forcés.
Résumé des faits
Le 27 juin 2013, à Ghézohoué dans la commune de Kpomassè, le nommé Sunday Kouassi Zizié constate que son épouse a abandonné le domicile conjugal. Le samedi 29 juin 2013, de retour d’une cérémonie funèbre, il se mit à proférer des menaces contre les complices ou instigateurs du départ de son épouse du domicile conjugal. Une dispute suivie d’une bagarre éclata entre lui et son frère consanguin, Basile Zizié. Ils furent séparés et chacun regagna sa chambre. C’est alors que Basile Zizié s’empara de son fusil de fabrication artisanale bien chargé et tira sur la porte de la chambre à pièce unique de son frère Sunday Kouassi Zizié, alors que celui-ci était déjà sorti à son insu.
Poursuivi pour tentative d’assassinat et détention illégale de fusil de traite, Basile Zizié a reconnu les faits mis à sa charge à toutes les étapes de la procédure. Le bulletin n° 1 du casier judiciaire de l’accusé ne porte mention d’aucune condamanation antérieure.
Composition de la cour
Président : Jules Chabi-Mouka
Assesseurs : Olivia Hungbo Kploca
Lionel Dossou Nouatin
Ministère public : Parfait Adoun
Greffier : Théogène Zouchecon
Didier Pascal DOGUE