(Menace de paralysie de tous les hôpitaux dans un délai de deux semaines)
Le Collectif des syndicats des travailleurs de la santé n’approuve pas le rapport de la Commission technique des réformes dans le secteur sanitaire et menace de paralyser dans un délai de deux semaines, tous les hôpitaux du pays. Dans un entretien accordé à votre journal, le porte-parole du Collectif et secrétaire général de l’Intersyndicale des ressources humaines en santé (Irhs), Adolphe Houssou dénonce des manigances et exige la publication du rapport. Il estime que les acteurs du secteur ont été victimes d’un marché de dupe et s’oppose à la politique de privatisation des hôpitaux. Pour lui, le gouvernement a entretenu jusque-là un faux dialogue social avec les partenaires sociaux. (Lire l’interview)
Après plusieurs mois d’accalmie, vous revoilà en train de brandir une nouvelle menace de paralysie après l’adoption du rapport de la Commission des réformes dans le secteur de la santé. Que dénoncez-vous concrètement, Sg ?
Ce sont des réformes que nous avons tous accueillies de bon cœur, mais nous avons constaté qu’il y a une manigance derrière. Tout d’abord, au début, on a constaté que cette commission qu’on a mise en place n’était pas acceptée par tout le monde vu la composition qui ne tient pas compte des différents corps du secteur de la santé et qui ne tient pas compte des vrais acteurs, les paramédicaux. Nous avions décrié la chose et ils ont fini par accepter un des nôtres, un paramédical au sein de la commission. Alors qu’ils sont près de douze personnes. On ajoute le paramédical, nous avons accepté. Ils ont commencé le travail. Neuf (09) mois après, ils nous ont présenté les résultats. A travers les résultats, nous constatons que les réalités ne sont pas celles du Bénin. Ils n’ont pas tenu compte de certaines choses dans le secteur de la santé. La réforme s’est concentrée au niveau central. Les zones sanitaires, la Direction des ressources humaines ne se retrouvent pas dans ces réformes. Donc, on constate que les vrais problèmes du secteur qui sont par exemple, le financement du domaine de la santé, la disponibilité des soins dans les périphéries, la motivation du personnel n’ont pas été pris en compte dans ces réformes. Nous avons décrié cela et ils nous ont promis d’intégrer nos observations ou recommandations avant d’adopter, avec l’engagement de nous associer. A notre grande surprise, le mercredi dernier (mercredi, 26 juillet 2017), le Conseil des Ministres a adopté cette réforme et nous avons estimé qu’il s’agit d’un marché de dupe. Ils ont restitué les résultats mais nos recommandations n’ont pas été prises en compte. Nous n’allons pas accepter, du moment où ils ont adopté en même temps, un décret de mise en place d’un comité pour la mise en œuvre desdites réformes. Le compte-rendu du Conseil l’a dit et nous avons dit que nous n’allons pas nous taire. Parce que dedans, nous constatons qu’il y aura la privatisation des hôpitaux, ce n’est pas normal. Quel sera le rôle régalien de l’Etat ? Nous avons compris que l’objectif du gouvernement, c’est de pouvoir vendre tout. Sur ce point, nous ne sommes pas d’accord, s’il faut vendre jusqu’aux hôpitaux alors que les soins restent un droit pour le peuple béninois. Nous allons aider le gouvernement à pouvoir mettre les soins à la disposition des citoyens mais pas par la privatisation.
Dites-nous, Sg, vous aviez été quand même représenté dans la commission qui a conduit les travaux puisque vous l’avez dit vous-même. Il y a eu un paramédical au sein de la commission. N’avait-t-il pas tenu compte de vos observations pour qu’aujourd’hui, vous désapprouviez les résultats de la commission ?
Il n’a pas été écouté. Au milieu de tous ces médecins, le paramédical pose des problèmes mais il n’est pas écouté. Et nous lui avions dit lorsque la Commission nous a présenté le rapport qu’il ne doit pas apposer sa signature car cela pourrait nous contredire. Donc, nous avons réagi et nous avons constaté qu’il n’a pas été écouté. C’est tout le problème.
Votre représentant a-t-il finalement apposé sa signature sur le rapport de la Commission des réformes ?
Nous n’avons même pas vu le rapport. Qu’est-ce qu’ils veulent faire de bon et ils cachent le rapport. Le rapport est caché jusqu’à la date d’aujourd’hui. Ils ont gardé cela en secret. Pourquoi ? Ce qui va impacter la vie de tout un peuple, on cache cela pour appliquer. Mais ce qu’on te cache, cela ne peut être que le poignard.
Vous avez brandi une menace de paralysie du secteur de la santé dans un délai de deux semaines. Ceci, au cours de votre sortie médiatique. Dites-nous, à quoi faut-il s’atteindre ? Faut-il craindre le pire ?
Ça, c’est clair et net. Nous avons demandé d’abord au gouvernement de mettre le rapport à notre disposition et d’abroger, ensuite cette décision de mise sur pied de comité de mise en œuvre des réformes dans le secteur de la santé. Et nous exigeons la satisfaction de toutes nos revendications en instance dans un délai de deux semaines. Sinon, dans deux semaines, nous allons paralyser tout le pays. Et le pire, c’est que ce que les gens n’ont jamais vu, c’est ça qu’ils verront. Parce que le Collectif des praticiens hospitaliers (Cph), c’est-à-dire les médecins, le Syntrasesh, l’Intersyndicale c’est-à-dire tous les syndicats du secteur seront en grève. Car il n’y a aura aucun syndicat qui restera en marge.
Des revendications existaient tout de même avant l’avènement de la Rupture. Vous avez suspendu toutes les motions de grève au motif que le gouvernement actuel vous aurait donné un début de satisfaction. Où en sommes-nous aujourd’hui par rapport à cette plateforme revendicative ?
Tout d’abord avant de suspendre les mouvements ils nous avaient promis qu’une commission de base doit faire le travail. Justement, ils ont mis en place le comité par un arrêté, ce qui nous a permis de suspendre le mouvement. Et le comité a travaillé. Ils ont dit un délai de vingt-et-un (21) jours. Je puis vous dire, de janvier jusqu’à aujourd’hui, ils n’ont pas encore fini leur 21 jours. La Commission a déposé son rapport et ce rapport n’a même pas été présenté en Conseil des ministres. Et c’est pour cela d’ailleurs que les Confédérations syndicales nous ont amené voir le ministre des finances. Et lui-même disait que dans vingt-quatre (24) heures, il va rendre compte aux Confédérations par rapport à notre rapport qui est déposé sur sa table. Jusqu’à aujourd’hui, il n’est pas encore 24h. Vous voyez comment ils font du dilatoire, comment ils sont en train de faire du faux dialogue social avec nous ? C’est ça, le problème.
Un mot de la fin, monsieur le secrétaire général de l’Intersyndicale des ressources humaines en santé (Irhs) ?
D’abord, je voudrais vous remercier, vous qui êtes journalistes et qui faites ce travail. Ce sacerdoce est important et je dirai au gouvernement que nous sommes prêts à la négociation. Nous avons dit de mettre le rapport à notre disposition et mettre en place un autre comité qui implique tout le monde pour qu’on lise à fond ce rapport pour voir à quoi cela retourne. Parce que nous avons constaté avec ce gouvernement que c’est la liquidation, le renvoi des agents de l’Etat, la mise au chômage. Je voudrais dire à tous les militants qu’ils doivent être prêts parce que nous ne comprenons plus le gouvernement. Ils veulent nous amener à l’abattoir et nous n’allons pas accepter.
Propos recueillis par Aziz BADAROU