Le 02 août dernier, le Conseil des ministres s’est penché, entre autres, sur le compte rendu de la mission d’audit organisationnel, comptable et financier du Fonds national de la Microfinance (FNM) pour la période allant de 2013 à 2016.
Si le communiqué du Conseil des ministres a jeté la lumière sur les dysfonctionnements et aux irrégularités de gestion, le rapport d’audit lui-même renseigne avec précision sur la nature des faiblesses et irrégularités relevées. En voici quelques bonnes feuilles.
1. La mise en œuvre de la politique de micro crédit aux plus pauvres par le FNM a été onéreuse pour l’Etat entre 2007 et 2016 mais n’a fait l’objet d’aucune étude d’impact pertinente et formelle.
Sur la période allant de Janvier 2007 à Octobre 2016, le FNM a mobilisé environ 156 milliards de FCFA de ressources publiques dont 82%, soit 129 milliards de FCFA, ont servi à financer la mise en place de ligne de crédit en faveur de 43 Structures de Financement Décentralisées (SFD).
Ces dernières sont en principe sélectionnées en fonction de leur organisation et expérience professionnel pertinente dans ce secteur spécifique. La gestion de la politique de l’Etat en matière de micro crédit portée par le FNM a été onéreuse et s’est traduite par des coûts d’opération évalués sur la période à plus de 18% des montants mobilisés, soit 27 milliards de FCFA dont 4,2 milliards de FCFA au titre de frais de gestion payés aux SFD, 4,6 milliards de FCFA de dépenses d’appuis institutionnels, et 17,763 milliards de FCFA de coût de gestion du Fonds.
De plus, cette activité a généré d’importants impayés. En effet, au 31 mai 2017, les créances en souffrance sur les SFD partenaires stratégiques sur financement budget national et sur financements extérieurs (BOAD, BID, BADEA) s’élèvent à 16,9 milliards de FCFA dont 14,5 milliards de FCFA au titre des Micro Crédit aux Plus Pauvres (2007-2013) et 2,4 milliards de FCFA pour la nouvelle génération de ces crédits (2014-2017).
Il convient de souligner que le dispositif mis en place fait des SFD des intermédiaires dans la distribution des crédits. Les ressources sont mises à leur disposition pour l’octroi de crédits à une catégorie de bénéficiaires et suivant des conditions définies par l’Etat. Les SFD doivent prendre les dispositions requises pour limiter les risques d’impayés qui sont en définitive pris par le bailleur dans une limite conventionnelle de 5%. Ils apparaissent ainsi comme des prestataires de service pour le compte de l’Etat qui les rémunère à travers des frais de gestion et la prise en charge d’une partie de leurs dépenses.
Ainsi, les opérations de crédits à l’endroit des bénéficiaires ciblés par les programme présentent des risques élevés et de sérieuses difficultés de recouvrement des impayés compte tenu de la nature des opérations et de la qualité des débiteurs.
2. De graves insuffisances ont été relevées dans le système de gouvernance du Fonds
Les principales défaillances portent sur :
- Un fonctionnement inadéquat de l’organe d’administration du Fonds, la Commission Nationale de Coordination, d’Orientation et de Suivi (CNCOS). Cet organe n’a pas joué un rôle efficace dans la surveillance de la gestion (défaut de tenue régulière des réunions statutaires, méconnaissance de leurs prérogatives par rapport à la Direction générale).
- Une Direction Générale caractérisée par une création pléthorique et non pertinent de directions techniques, la multiplication de postes d’assistants à tous les niveaux et une inadéquation presque généralisée des profils des agents par rapport aux fonctions assumée.
- Une approche de mise en œuvre des activités comportant de nombreuses imperfections au nombre desquelles on peut citer :
o le non-respect des dispositions du manuel des procédures débouchant sur la sélection non compétitive des Structures de Financement Décentralisées (SFD) partenaires ou la création de SFD travaillant presque exclusivement pour le FNM sans organisation ou expérience technique pertinente ;
o l’absence de critères précis de détermination des montants des lignes de crédits à accorder aux différents SFD : ceci est à l’origine de clientélisme et d’augmentation inappropriée de ressources financières au profit de SFD ne disposant ni d’outils ni de ressources humaines adéquates pour assurer la bonne gestion des fonds mobilisés (surliquidité et désorganisation du système de gestion des risques dans le secteur) ;
o les modalités financières retenues dans les conventions signées avec les SFD ne sont pas raisonnables et ont occasionné des double-emplois ou des charges indues à l’Etat. C’est le cas des frais de gestion presque totalement payés à la mise en place des financements comprend des marges brutes suffisantes ;
o en plus des frais de gestion, d’importantes dépenses d’appuis institutionnels sont engagées par le FNM au profit des SFD ou du développement du secteur sans qu’il soit possible d’établir leur valeur ajoutée concrète dans l’amélioration de l’environnement des affaires dans le secteur ;
o Les échéances infra-annuels (mensuels, trimestriels ou semestriels) de remboursement des financements accordés aux SFD ne sont pas appropriés : chaque remboursement provoque en effet une décapitalisation des SFD qui pourrait être corrigée avec une politique de contrôle plus rigoureuse basée sur des remboursements suivant une périodicité au moins annuelle.
La rédaction