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En fin de mission à la tête de l’Institut de recherche et de développement : « Le Bénin bénéficie de compétences scientifiques de grande valeur » dixit Philippe Chippaux
Publié le lundi 4 septembre 2017  |  Matin libre




Le représentant résident de l’Institut de recherche et de développement (IRD), Philippe Chippaux est en fin de mission au Bénin. Au détour d’un entretien à l’occasion d’un dîner de départ à l’hôtel du Lac, il s’est prononcé sur les actions menées et les défis à relever par son successeur. Lisez plutôt…

A quelques heures de votre départ du Bénin et surtout après votre expérience nigérienne, avez-vous le sentiment que le Bénin est un terrain fertile pour la recherche ?

Je n’ai pas qu’une expérience nigérienne et béninoise. J’ai également travaillé en Côte d’Ivoire, Cameroun, Sénégal et en Amérique du Sud…Le Bénin bénéficie de compétences scientifiques de grande valeur, tant au niveau national qu’au sein de la diaspora. Nous mettons en place avec le Mesrs et l’Ambassade de France des outils de renforcement de capacités pour maintenir ce haut niveau de compétences. Les thématiques que nous développons sont au cœur des préoccupations de la population (agriculture, santé, environnement, climat, urbanisme et nutrition). Cependant, les infrastructures et les équipements doivent être renforcés. Je sais que cela est inscrit dans le PAG et que le Gouvernement recherche les ressources nécessaires. Il est également indispensable d’améliorer la collaboration entre chercheurs : éviter les redondances inutiles (beaucoup de jeunes chercheurs redécouvrent ce que leurs prédécesseurs avaient déjà décrit ; les chercheurs doivent apprendre à mieux partager les résultats de leurs travaux), développer la pluridisciplinarité (aucune discipline ne se suffit à elle-même) et, surtout, mutualiser les moyens pour échapper au gaspillage inconséquent auquel nous assistons trop souvent !

Le gouvernement annoncé depuis bientôt 24 mois des actions en faveur de la recherche au Bénin. Peut-on déjà estimer que les fruits tiennent-ils la promesse des fleurs ?

Les ambitions du Gouvernement réclament du temps et des moyens… Il nous faut savoir être patients tout en restant vigilants. La communauté scientifique doit s’organiser et se montrer solidaire. En commençant par exemple, par faciliter le recensement des capacités et des ressources humaines actuelles effectuées par la Dnrsi avec la collaboration de l’Ird, du Cirad et de l’Ambassade de France. Apprendre à se connaître est une première étape incontournable ! Il serait également fructueux que les chercheurs soient davantage à l’écoute des besoins de la population et de « sacrifier » un peu de leurs propres aspirations.

Jetant un regard rétrospectif sur les projets de recherche conduits au Bénin, quels sont les résultats qui apportent déjà ce bien-être aux populations ?

Les projets de recherche menés par l’IRD – avec la collaboration du CIRAD et l’appui de l’Ambassade de France – concernent directement les priorités définies par le Gouvernement et exprimées lors du « Forum Science et Entreprises pour l’Innovation et le Développement ». Ce n’est évidemment pas un hasard… Bien sûr, nous n’avons pas les moyens de répondre à toutes les sollicitations et préoccupations de la population béninoise. Nous avons des projets concernant la santé, notamment les maladies infectieuses tropicales dont le paludisme pour lequel nous testons actuellement un vaccin contre le paludisme de la femme enceinte, les maladies transmises par les rongeurs (dont la Fièvre de Lassa) et la nutrition, la dynamique des réserves d’eau souterraine, l’érosion côtière, le climat, l’urbanisation, les filières de plantes vivrières ou de rente… Nous devons encore nous pencher sur des secteurs clés dont nous sommes absents pour l’instant : l’énergie, le patrimoine historique, l’artisanat, la valorisation des matériaux traditionnels de construction, la transformation des produits naturels, y compris la pharmacopée traditionnelle.

Des chantiers importants qui attendent votre successeur…

Je viens de citer quelques domaines dans lesquels il nous faut nous investir rapidement. Certains me semblent prioritaires : l’agriculture, et l’urbanisation où nos interventions restent insuffisantes, et l’énergie qui est un secteur totalement absent de nos compétences. Mais c’est un choix personnel qui n’engage que moi. Les pièges à éviter sont multiples et il apprendra vite à les identifier. Toutefois, je voudrais lui signaler la pesanteur administrative (encore une fois, il faut être patient !), l’approche verticale des projets scientifiques (je veux dire par là que la multidisciplinarité n’est qu’exceptionnellement au rendez-vous de la construction et de la réalisation des programmes de recherche, ce qui les pénalise fortement) et le gaspillage des moyens qu’il faut absolument savoir mutualiser dans cette période de rigueur budgétaire et de pénurie financière. Mais rien de tout cela est propre au Bénin et sans doute connaît-il déjà ces pièges.

Certaines actions, telle la géomatique, ont été inscrites dans votre agenda au lendemain du "Forum science entreprise pour le développement et l’innovation". Qu’est-ce qui est concrètement fait des recommandations de ce forum ?

Nous avons organisé trois sessions de formation en partenariat avec des Ong, dans le domaine de la géomatique précisément. Elles ont connu un vif succès (les comptes rendus sont accessibles sur notre site internet). Ces formations permettent à des chercheurs et des étudiants, mais aussi des membres de la société civile (notamment des petits entrepreneurs), de s’approprier ces outils de localisation géographique et d’analyse spatiale pour mieux se repérer et identifier – ou « comprendre » – les lieux concernant leurs activités. D’autres initiatives de ce type sont programmées en cette fin d’année 2017 et mon successeur s’attachera à les mener à bien avec la collaboration de la Dnrsi.


Propos recueillis par Aziz BADAROU
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