Il a l’art de l’attaque facile et des déclarations à l’emporte-pièce. Depuis qu’il a fait irruption sur la scène politique, Rachidi Gbadamassi est resté fidèle à l’image qu’il a voulu donner de lui-même. Au nom de ses intérêts, il est capable de ravaler ses vomissures. Pour lui, en politique, la conviction ne compte pas. Ce qui importe, c’est de se trouver une place au soleil, peu importe ce que ça coûte. D’un régime à un autre, il a toujours su négocier son appartenance à la mouvance présidentielle, en vue de bénéficier le plus longtemps possible des faveurs et des facilités qu’offre le pouvoir. C’est avec une facilité déconcertante qu’il voue aux gémonies ses amis d’hier pour plaire à ses alliés du moment. Hier, il a pactisé avec Boni Yayi. Aujourd’hui, il se retourne contre lui pour s’afficher aux côtés de Patrice Talon.
A l’Assemblée nationale, ces dix dernières années, on l’a vu s’opposer dans un premier temps au régime de Boni Yayi. Du jour au lendemain, il a rompu ses engagements avec le G13 et a pris aussitôt fait et cause pour le même Boni Yayi. Cette idylle surprise a duré jusqu’au terme du second mandat de celui-ci où il a préféré se ranger du côté du candidat Sébastien Ajavon, qui, au second tour, a jeté son dévolu sur Patrice Talon. Les portes du nouveau régime venaient ainsi de s’ouvrir pour lui. Pour figurer parmi les hommes de main du président de la République, il a embouché la trompette des louanges sans fin. Outrés par ce comportement, ses amis d’hier n’ont pas tardé à lui remonter les bretelles. Il n’en fallait pas plus pour que le député s’érige en donneur de leçon.
Rachidi Gbadamassi est le prototype parfait de l’homme politique béninois qui ne vise que ses intérêts. Quelques semaines avant que le député de Parakou ne monte au créneau, certains hommes de main de Boni Yayi, qui ont séjourné longtemps dans son gouvernement, et qui sont comptables de sa gestion, lui ont publiquement attribué tous les torts de son régime, parce qu’entre-temps, ils ont trouvé leur bonheur auprès de l’actuel locataire du palais de la Marina. Voilà comment se mène la politique chez nous, où les spécialistes des jeux de rôle changent de veste à tout bout de champ, jusqu’à se renier eux-mêmes. Evidemment, Patrice Talon peut se réjouir d’avoir avec lui certains ténors de la classe politique. Mais cela ne durera pas longtemps. Dès qu’ils se sentiront menacés, ils se retourneront contre lui avec la même facilité avec laquelle ils ont adhéré à sa cause. Boni Yayi en sait quelque chose.
N’étant pas non plus naïf, Patrice Talon est sans doute sur ses gardes. Le calme qui perdure dans le sérail politique annonce la tempête. Déjà, les législatives de 2019 s’annoncent. Ce ne sera pas un jeu d’enfant. Le rejet du projet de loi portant révision de la Constitution ne devrait pas constituer un frein à la réforme du système partisan. La relecture de la charte des partis politiques suffit amplement pour provoquer les changements espérés. Sans ce détour législatif, les bonnes intentions annoncées par le chef de l’Etat resteront à l’étape de projet. Sans l’aboutissement de ce processus d’assainissement des mœurs publiques, des politiciens à l’image de Rachidi Gbadamassi continueront de s’offusquer du défaut d’éthique et de morale chez leurs compatriotes. Comme quoi, une comédie qui dure ne fait plus rire.
Moïse DOSSOUMOU