L’interdiction des travaux dirigés payant dans les écoles et établissements publics annoncée par le gouvernement en conseil des ministres du 30 août dernier suscite depuis quelques jours des réactions, surtout dans le monde éducatif.
Fin de la récréation ! C’est en substance ce qui ressort du conseil des ministres du 30 août dernier en matière d’organisation des travaux dirigés dans les des écoles et établissements publics, y compris les universités publiques du Bénin. En effet, lors du conclave gouvernemental, les ministres se sont penchés sur les déviances observées dans l’organisation de ces travaux dirigés qui, selon les experts, ne devraient pas être payants car faisant partie des exigences de l’approche par compétence. Ainsi, en prenant la décision d’interdire le payement des séances de travaux dirigés au sein des établissements et écoles publics, le gouvernement se met en conformité avec les prescriptions du programme d’enseignement en cours dans le système éducatif béninois. Par conséquent, selon le gouvernement, le fonctionnement de ces établissements s’apparente à des dérapages sur fond de supercheries qui vont à l’encontre des règles de la déontologie régissant ce noble secteur. Plus loin, Robert Dossou Gbodjnou, Directeur départemental de l’enseignement secondaire du Littoral, explique : « Ce que le gouvernement a interdit, ce sont les travaux dirigés payants. Le gouvernement n’a pas interdit les travaux dirigés qui devraient s’intégrer dans les apprentissages et qui sont en réalité des apprentissages. L’apprentissage ne s’arrête pas au savoir et au savoir-faire. Ça continue avec les périodes d’évaluations formatives ».
Appréciation mitigée !
Un tour ce mardi 7 septembre au collège d’enseignement général de Tankpè, dans la commune d’Abomey Calavi, et les avis varient d’un acteur à un autre. Pour le chef d’établissement Bello Souradjou, cette décision, loin de dégrader le niveau de l’enseignement au Bénin, revêt toute son importance. A l’en croire, « le gouvernement vient de creuser l’abcès, car cela va non seulement permettre d’arrêter le désordre qui s’installe depuis des années dans les établissements publics, mais aussi amènera les enseignants à s’appliquer dans leurs œuvres… On va essayer d’appliquer la décision cette année et voir ce que cela va donner ». Idem pour certains parents d’élèves qui pensent que cela va beaucoup aider les parents, surtout les plus démunis. « Je pense que les membres de l’administration doivent se réorganiser pour mieux appréhender la chose. Si les établissements ne se réorganisent pas et que si les td en viennent à être suspendus faute de moyens, le rendement de fin d’année sera catastrophique », déclare François, parent d’élève, d’un air triste. Pour ne pas vivre ce scénario, dit-il, il va falloir que le gouvernement subventionne les établissements en mettant à leur disposition une ligne de crédit dédiée à l’organisation des Td au profit de tous les apprenants, car révèle-t-il, « c’est grâce à ces travaux dirigés que nos enfants arrivent à s’en sortir lors des évaluations. Ces séances revêtent une grande importance pour l’évolution de nos enfants car leur niveau est très faible ». Romain Boco, un autre parent d’élève va plus loin et dénonce : « Certains professeurs ne dispensent pas tout ce qu’il faut en classe mais en réservent pour les Td, il ne doit pas y avoir d’échec à cause du fait que les établissements n’organisent pas les Td. Il revient aux enseignants de prendre leurs responsabilités en donnant les cours comme il le faut aux élèves, parce qu’il n’y aura plus de Td pour compenser leurs efforts. N’empêche que le gouvernement doit subventionner les Td au niveau des établissements publics ». Vidégla Cohounco, parent d’élève, pense pour sa part que : « Si les résultats sont meilleurs cette année comparativement à l’année dernière, c’est à grâce aux Td. Donc, si ceux payants sont interdits, il faut que le gouvernement trouve une solution palliative afin que nous n’ayons pas des résultats catastrophiques aux examens ». Pour les élèves, par contre, cette décision n’est pas la bienvenue. Par analogie, Noël Chadaré, Sécrétaire général de la Cosi-Bénin, compare la situation à celles des établissements privés. « Dans les établissements privés, les Td démarrent déjà les 1er et 2ème mois de l’année scolaire. Et les parents payent ces Td tant à l’école qu’à la maison. Ils prennent des répétiteurs pour renforcer davantage les enfants », explique-t-il tout en suggérant que le gouvernement préconise aux directeurs d’établissements primaires et secondaires de prévoir une ligne budgétaire pour insérer les charges que les travaux dirigés pourraient induire.
Dossou Gbodjnou, Ddesftp/Littoral
« …Chaque enseignant devrait définir le nombre d’heures d’apprentissage et le nombre d’heures de Td… »
« Les travaux dirigés sont une forme d’enseignement qui permette renforcer les connaissances acquises pendant les cours. Prenons l’exemple de la pédagogie de l’intégration. Après 5 semaines de cours, le professeur doit marquer une pause, et faire deux semaines d’intégration. Il s’agit en particulier l’apprentissage et les évaluations formatives qui sont en réalité des Td. C’est vrai qu’au Bénin, nous ne faisons pas la pédagogie par l’intégration, mais nous faisons l’Apc. Et dans l’Apc, il est prévu des séances de Td. Ce que le gouvernement a interdit, ce sont les travaux dirigés payants. Le gouvernement n’a pas interdit les travaux dirigés qui devraient s’intégrer dans les apprentissages, et qui sont en réalité des apprentissages. L’apprentissage ne s’arrête pas au savoir et au savoir-faire. Ça continue avec les périodes d’évaluations formatives. Dans le Littoral, ce qui sera fait, c’est que je vais organiser une séance de travail avec les parents d’élèves et je vais discuter avec eux de la mise en application de cette décision. J’en ferai de même avec les partenaires sociaux, les directeurs et censeurs. Ensuite, on va trouver un terrain d’entente. Au cours des Animations pédagogiques, chaque enseignant devrait définir le nombre d’heures d’apprentissage et le nombre d’heures de Td qui vont accompagner ces apprentissages. Et on doit pouvoir les inscrire dans les cahiers de texte, de manière à ce qu’on ait une traçabilité lorsque la Direction départementale de l’enseignement secondaire va procéder au contrôle… ».
Noël Chadaré, Sg Cosi-Bénin
« Les Td sont d’une très grande importance pour les enfants »
« Les Td sont d’une très grande importance pour les enfants. Si les résultats sont meilleurs, c’est grâce aux Td. Dans les établissements privés, les Td démarrent déjà les 1er et 2ème mois de l’année scolaire. Et les parents payent ces Td tant à l’école qu’à la maison. Ils prennent des répétiteurs pour renforcer davantage les enfants. Je suggère que le gouvernement préconise aux directeurs d’établissements primaires et secondaires de prévoir une ligne budgétaire pour insérer les charges que les travaux dirigés pourraient induire. Ils doivent faire en sorte que tous les apprenants se retrouvent aux Td, mais cela induit des charges. Il va falloir bien répartir les élèves afin de ne pas avoir la chine populaire dans les classes. Il faut avoir beaucoup plus d’enseignants pour intervenir. C’est important….J’espère qu’on n’a pas improvisé en prenant cette décision. Parce que, si c’est le cas, on risque d’avoir des résultats contraires à ce qui est attendu. Si le gouvernement a pris cette décision, cela veut dire qu’il l’a suffisamment mûrie. ..Et pour que ça ne disparaisse pas, les enseignants ne peuvent pas travailler pendant 18 heures de cours et se voir imposer de faire les Td sans intéressements ».
Edwige MONTCHO (Stag)