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Hermance Sènami Donoumassou: Priorité au pinceau
Publié le jeudi 28 septembre 2017  |  La Nation






Jeune artiste plasticienne, Hermance Sènami Donoumassou questionne la société à travers ses réalisations artistiques. Elle fait partie des ’’nouveaux pinceaux’’ qui ambitionnent de faire rayonner le Bénin.

Il suffit de découvrir ses tableaux d’art pour toucher du doigt les problématiques des temps modernes. Rien n’échappe à l’imagination de Hermance Sènami Donoumassou, la vingtaine : l’amour, la sécurité routière, la situation des filles et des femmes… Elle emprunte aussi à la spiritualité et s’intéresse aux questions relatives à l’Homme dans sa globalité (le fâ, la destinée, l’histoire…). Aussi, réalise-t-elle des caricatures qui retracent des faits de société, au goût humoristique. Tout un cocktail alléchant d’œuvres d’arts plastiques pour combler le regard et nourrir la soif du public.
Passionnée de dessin, Hermance Sènami Donoumassou, met tout son savoir-faire au service des arts plastiques. Bien qu’étant un ‘’pinceau naissant’’, elle travaille déjà à imprimer sa marque dans ce milieu réputé macho.
« Les arts plastiques ne sont pas un métier spécifique au genre (masculin) ; l’imagination n’est pas octroyée qu’à un seul sexe », rectifie-elle d’emblée pour signaler son attachement au métier.
Elle se révèle une artiste plasticienne pleine d’ambitions et de défis. Son principal challenge, est de défendre et vendre son pays le Bénin, partout, rien qu’à travers son art. Pour relever ce défi, Hermance estime qu’il faut avoir un minimum de background pour ne pas paraître un ‘’vulgaire artiste’’, sans bagage intellectuel. Titulaire d’une licence en Administration générale et territoriale obtenue à l’Ecole nationale d’Administration (Ena) en 2012, elle n’a pas voulu se fatiguer dans les recherches d’emploi salarié, parfois sans lendemain. Très tôt, elle s’est orientée vers les arts plastiques et dans l’illustration de documents en comptant avant tout sur son potentiel, sa passion. N’en déplaise à ses parents qui la préfèrent bureaucrate, responsable d’entreprise ou encore chef service dans une administration. « J’ai pratiquement imposé mon choix à mes parents. En Afrique, il n’est pas toujours aisé pour des parents fonctionnaires d’accepter les métiers d’art pour leurs enfants », fait-elle savoir, comme pour signaler que des sensibilisations s’imposent pour corriger les mentalités. Mais pour elle, tout s’est pratiquement passé comme une lettre à la poste, du fait de sa détermination. Aujourd’hui plus que jamais, elle s’y intéresse et émerveille aussi les admirateurs de ses œuvres lors des expositions. A peine cinq années d’expérience et Hermance Sènami Donoumassou trouve déjà ses marques. En témoignent ses expositions au festival Vootoon (festival du dessin au pays du vodou), tenu en juillet dernier.
« Le domaine artistique comme tous les autres exigent beaucoup d’organisation et de rigueur. Je ne me plains pas trop sur le plan artistique », sourit-elle.
Pour elle, les arts plastiques ne sont pas réservés à tout venant. Il est fondé sur un minimum de convictions et de passion. « J’ai toujours aimé les couleurs, les formes et le beau », affirme-t-elle. En se lançant, Hermance a mis en avant sa curiosité en faisant parler ses sens. « J’aime découvrir, j’aime voir, j’aime aller là où personne n’est pour marquer la différence », laisse-t-elle entendre. Ce penchant pour les couleurs, elle l’a acquis depuis son jeune-âge. « Depuis le cours primaire, les cours de dessin étaient mes matières préférées. J’avais mes meilleures notes dans cette matière », se souvient-elle.

Plaisir immense

Depuis ce temps, Hermance s’efforce à se faire un nom. Aujourd’hui, elle exerce avec assurance et fierté le métier. « Je ressens un plaisir immense à dessiner, car celui qui travaille avec ses dix doigts pense très peu à ses soucis », conçoit-elle. Selon elle, exercer dans ce secteur relève d’un grand atout. « Le fait de travailler dans la création m’a permis de me rendre compte de mes capacités, de mes potentialités ». Sa satisfaction, elle la puise davantage dans les mots d’encouragement et de félicitations de ses clients. Pour autant, elle ne se veut pas irréprochable. « Mes clients n’hésitent pas à me faire des reproches lorsque mes réalisations ne les convainquent pas », dévoile-t-elle.
Exercer ce métier reste pour elle un défi. « Beaucoup de gens ne comprennent pas le milieu des arts plastiques ». Or, précise-t-elle, le but de l’art, c’est de faire parler les images en les rendant aussi attrayantes.
Dans leur caractère artistique, ses réalisations ne sont jamais ennuyeuses, mais elles suscitent la curiosité au regard des thèmes qu’elle aborde.
Pour avoir osé l’aventure, elle estime que c’est une occasion rêvée : « Je suis amenée quotidiennement à dépasser mes limites, à me surpasser, étant donné que beaucoup de gens croient en mes capacités et m’encouragent à aller de l’avant ».
Pour se faire un nom dans le métier, l’artiste plasticienne sait qu’elle doit se focaliser sur le concret et aller droit au but en touchant à l’essentiel. « Je ne suis pas le genre de personne à supporter les stages à long terme. Je n’en ai pratiquement pas fait en dehors de mon stage académique ». Ce qui compte pour elle, c’est le travail bien fait.
Ce penchant pour les arts plastiques est une longue aventure. C’est depuis les études universitaires qu’elle œuvre pour la promotion du secteur. « Je vendais des tableaux de peinture depuis que je faisais mes études universitaires », explique-t-elle. « Je me suis vite jetée à l’eau dans le souci de réaliser de petits bénéfices pour mes besoins. J’ai compris que je devrais faire usage de mes doigts pour révéler mon potentiel artistique », poursuit-elle.
Conviction et détermination oui, mais c’est sans compter avec les réalités du métier. « Je me suis rendue compte que les tableaux ne se vendaient pas tous les jours au Bénin », souligne-t-elle. Cette réalité suppose donc plus de dynamisme et de rigueur de sa part. Parallèlement à l’art, elle s’est donc auto-formée en graphisme pour combler le manque à gagner lié à ses réalisations de tableaux. « Je me suis formée sur Internet. Avec les notions acquises en graphisme, j’arrivais plus facilement à joindre les deux bouts, car les commandes des affiches, des tee-shirts rapportent plus que celles des tableaux d’art ».
Ce détour en graphisme va faire d’elle une artiste polyvalente. Aujourd’hui, elle cumule aisément le dessin, l’art plastique et le graphisme en fonction de ses projets et des évènements?

«Le Bénin, mon combat»

Mais avant tout, Hermance Sènami Donoumassou travaille beaucoup à défendre ses origines. « La promotion du patrimoine béninois me tient beaucoup à cœur ». Elle fait surtout parler son sens de patriotisme à travers la confection des tee-shirts qui rappellent la culture béninoise. Une manière de vendre son pays, de défendre les couleurs nationales partout dans le monde. « Le Bénin, c’est mon combat. Il regorge d’énormes potentialités culturelles et artistiques que nous exploitons mal. Nous passons le temps à regarder ailleurs au lieu de nous contenter de notre richesse », se désole-t-elle. « Nous avons intérêt à promouvoir notre richesse culturelle, car personne ne viendra le faire à notre place, si ce n’est pas pour des intérêts », indique-telle.
Pour Hermance, le vrai rôle de l’artiste ne se limite pas seulement à son art ou à son savoir-faire. Raison pour laquelle, elle estime que son bonheur dépend de celui des autres : « Ma mission serait accomplie si j’arrivais à impacter le Bénin, l’Afrique et le monde ». Pour l’instant, elle reste convaincue qu’elle doit travailler davantage pour faire parler d’elle et de son art. « Je travaille à ce que mes réalisations ne laissent pas indifférent, c’est ce qui me motive davantage ».
Sa motivation vient également des messages d’encouragement et de félicitations de ses clients. « La plupart de mes clients me trouvent perfectionniste. Cela me vaut beaucoup de sollicitations ».
Pour autant, la finesse dont elle fait montre à travers ses réalisations artistiques ne la dispense pas de certains pièges. « Certains clients me confient des réalisations justes pour me tester et voir ce dont je suis capable ; au bout du compte, ils finissent par m’adopter », dit-elle fièrement.
Parlant de difficultés, la jeune artiste semble plutôt les minimiser. Du moins, elle les assimile à des challenges. « Je suis le genre de personne qui préfère voir le côté positif des choses », sourit-elle.
Toutefois, « le milieu artistique se révèle parfois une jungle lorsqu’il faut composer avec des individus ayant reçu différentes éducations », lâche la jeune plasticienne. Ce que regrette surtout l’artiste est le manque de valorisation du patrimoine culturel béninois et le manque de matériel de travail de qualité. « Le travail artistique n’est pas valorisé au Bénin. A un moment donné, les artistes plasticiens sont obligés de commander les outils de travail à l’extérieur du fait de la qualité, inexistante au pays », fustige-t-elle.
Le souhait de Hermance Sènami Donoumassou est d’avoir par-dessus tout, une vie artistique florissante avec la participation à des festivals à l’extérieur. Elle y parviendra lorsque davantage d’attention serait accordée aux artistes béninois par les populations, les acteurs en charge du secteur et le Gouvernement.

Maryse ASSOGBADJO
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