La vitalité de la démocratie dépend de la vitalité de l’opposition au régime. Malheureusement, cetactivisme qui a fait la renommée du système démocratique béninois dans les années 1990 n’est plus aujourd’hui qu’un vieux souvenir. Dans le Bénin de la Rupture, plus aucun parti politique digne du nom ne veut s’inscrire dans une opposition. Depuis avril 2016, on assiste à des allégeances de toutes sortes au pouvoir, même les plus spectaculaires.
Exit le temps où contraints à une opposition par les urnes, les politiciens béninois assumaient cette responsabilité devant l’histoire. L’opposition au régime de Nicéphore Soglo de 1991 à 1996 et celle dont tout le monde garde encore un bon souvenir. Animée en son temps par Albert Tévoédjrè, Séverin Adjovi, Adrien Houngbédji, Bruno Amoussou et autres, elle demeure à ce jour la référence. Ils n’ont fait aucun cadeau au régime d’alors et leur lutte a payé puisqu’ils ont réussi à ramener au pouvoir Mathieu Kérékou, empêchant ainsi Nicéphore Soglo de renouveler son mandat. La Rb, alors contrainte à une opposition, a assumé son destin pendant les 10 années de pouvoir de l’ancien marxiste-léniniste devenu démocrate. De 2006 à 2016, le Prd de Me Adrien Houngbédji a aussi assumé son destin d’opposant au régime de Boni Yayi. Mais aujourd’hui c’est le même Prdqui, contraint une seconde fois par les urnes, refuse d’assumer à nouveau ce destin sous prétexte que le parti a déjà cumulé 25 années dans l’opposition.Seul, le président de la Renaissance du Bénin s’est engagé dans cette voie. Mais c’est sans compter avec l’envie de ses compagnons de lutte d’aller à ‘’la rivière’’. Cette logique a coûté aujourd’hui à Léhady Soglo son fauteuil de président de la Rb puis celui du maire de Cotonou. C’est comme si au Bénin d’aujourd’hui, il y a une autre génération de politiciens qui refusent de faire l’opposition quoi qu’il advienne.
Et pourtant lorsqu’on a fait le choix de s’aligner derrière un candidat et que ce dernier échoue à la présidentielle, la logique voudrait que tous les partis l’ayant soutenu s’inscrivent dans une opposition face au nouveau régime. Aujourd’hui au Bénin, c’est tout le contraire. De plus en plus, il y a comme une phobie de l’opposition qui s’installe dans le rang des politiciens. Plus aucun ne veut assumer une telle responsabilité. Aussitôt le scrutin terminé, un nouveau président prête serment, c’est à une ruée qu’on assiste vers le nouveau pouvoir. Tous ceux qui, lors des campagnes, avaient combattu le candidat, deviennent subitement des laudateurs du nouveau régime. Pour être dans les bonnes grâces du Chef de l’Etat, certains politiciens n’hésitent pas à ramasser leurs vomissures. Ils deviennent les défenseurs acharnés du régime en multipliant les arguments pour justifier leur revirement spectaculaire.
Azannaï pour relever le défi
Fort heureusement dans cette course vertigineuse pour se mettre sous la « parapluie » de la Rupture, une lueur pointe à l’horizon. Alors que rien ne le prédisposait à jouer ce rôle, Azannaï a créé la surprise d’abord en se démarquant du pouvoir dont il était le porte-étendard puis en engageant son parti dans une opposition ‘’pure et nette’’. D’aucuns diront qu’est-ce qu’il pourra faire tout seul ? Mais c’est mal connaître l’homme. Azannaï, à lui tout seul,est capable de faire le bulot de 10 opposants à la fois. L’ancien Chef de l’Etat l’a appris à ses dépens. Tout homme politique avisé devrait savoir qu’il faut mieux ne pas l’avoir contre soi. Et le natif d’Azali (Abomey) vient de donner rendez-vous pour avril 2018, quand le pouvoir Talon aura totalisé 2 ans. Le Bénin pourrait alors renouer avec une opposition active. La démocratie ne s’emporterait que mieux.
B.H