Le brouillage en continu des émissions de la radio Soleil Fm et tout récemment d’une émission de radio Capp Fm n’a rien d’innocent. Ce qui a l’air d’être un jeu est pourtant très sérieux même si ceux qui doivent prendre le problème à bras le corps ne le font pas. Parce que Soleil Fm n’est pas une radio proche du pouvoir politique, on ne mesure pas encore à sa hauteur, les conséquences d’un tel agissement.
Radio Soleil Fm pourrait être considérée aujourd’hui comme la plus mal aimée des radios privées parce que proche de l’opposition. Dans son devoir d’informer, elle consacre en dépit de toutes considérations, ses temps d’antennes à la diffusion d’informations aussi bien sur l’opposition que sur le pouvoir en place. Tout comme elle reçoit des invités des deux bords. Est-ce parce que la radio moralement vitriolée appartient à Sébastien Ajavon, faiseur du roi au pouvoir depuis 2016 et pas forcément son ami surtout qu’il s’est déclaré opposant au régime en place qu’il faut tout mettre en œuvre pour son asphyxie médiatique ?
La technique du brouillage est un art de guerre et les corps habillés en font bonne utilisation parce qu’elles savent de quoi il s’agit. Dieu merci, le Bénin n’est pas en conflit avec lui-même. Mais il est bon d’évoquer cet exemple juste pour rappeler que le 16 janvier 1977, la horde de mercenaires internationaux ayant posé leur avion à Cotonou avait utilisé cette technique pour brouiller les installations radar dont disposait à l’époque l’aéroport de Cotonou afin de se poser en toute tranquillité et sans être détecté si ce n’est par le signal donné par un patriote. Qu’est-ce que cela aurait donné comme résultat s’ils s’étaient déplacés avec de quoi brouiller les installations radiophoniques et télévisuelles nationales ?
Que c’est triste de s’en prendre à une radio innocente dont le seul tort est de servir les intérêts médiatiques des auditeurs au nom du droit à l’information ! Au lieu de verser dans cette petitesse d’esprit en s’attaquant aussi vertement que ça à une radio, ceux qui sont derrière cette bassesse feraient mieux de se poser la question de savoir quelles seraient les dispositions à prendre au cas où, c’étaient la radio et la télévision nationale qui subissaient cette agression. Ce qui se passe actuellement n’est que le signe d’une lâcheté à laquelle, il convient de mettre fin. Qu’adviendrait-il si les pirates de la radio Soleil Fm saisissait l’occasion pour chercher à faire passer des messages désobligeants un peu comme à l’image de la « radio mille collines » au Rwanda en 1994 ? Qui en porterait la responsabilité ? La radio pirate qu’on ne veut pas découvrir puisqu’aucune investigation sérieuse n’est menée à ce niveau ou la radio piratée ?
Le ridicule ne tue pas, dit-on ! Le Bénin est un pays qui se respecte et qui est respecté au plan international. N’y a-t-il pas de cadres et moyens matériels pouvant aider à démasquer enfin ceux qui sont à l’origine de ce crime contre l’information ? Si oui, on ne pourrait alors que donner raison au président de la République ne serait-ce que dans ce cas quand il parle de « désert de compétences ». La très respectée Haute autorité de l’audiovisuel et de la communication (Haac) qui est l’organe chargée de réguler et protéger les médias et l’espace médiatique au Bénin serait-elle donc un organe répondant de cette appréciation du chef de l’Etat ? Il faut parer au pire à ce niveau de la sécurité médiatique du Bénin avant que le pire ne s’en empare.
La minorité parlementaire interpelle le gouvernement Talon
Le brouillage de la fréquence de la radio Soleil Fm préoccupe désormais les parlementaires qui ont, à travers une question orale adressée au gouvernement Talon, interpelé le régime en place quant à cette situation qui met dangereusement à mal la sécurité intérieure du pays.
Ils ont voulu en savoir davantage quant au brouillage des ondes de la fréquence de la radio Soleil Fm. Ils, ce sont les députés de la minorité parlementaire constitués en un bloc de l’opposition au sein de ce parlement. Au nombre de quinze (15), ces députés exigent du gouvernement des réponses pour la fin de ce piratage qui n’honore aucunement l’Etat béninois sur le plan de la liberté de presse.
D’aucuns pourraient se demander pourquoi interpeller le gouvernement alors qu’il existe une institution de régulation dans le pays. Question légitime certes, mais il est de notoriété de tous que la Haute autorité de l’audiovisuel et de la communication (Haac) est l’interface du gouvernement et les députés ne peuvent qu’adresser leur question qu’au gouvernement, détenteur des fréquences dans le pays. Avec cette question orale adressée au gouvernement, ce dernier pourrait instruire le ministère de la communication qui, à son tour, sollicitera les cadres de la Haac pour des réponses conséquentes et convaincantes au sein du palais des gouverneurs à Porto-Novo une fois la question des députés programmée par le président de l’Assemblée nationale. Un autre pas est ainsi franchi dans le cadre de ce brouillage des ondes de la radio Soleil Fm qui dure depuis un mois.
Kolawolé Maxime SANNY & Josaphat FINOGBE