Le ministre de la Justice a dans un difficile exercice soutenu le retrait du droit de grève aux magistrats et à d’autres agents de l’administration publique. Me Joseph Djogbénou a ainsi montré l’implication réelle du gouvernement dans le bâillonnement des magistrats.
L’Agrégé de droit privé, Joseph Djogbénou avait curieusement remplacé Pascal Irénée Koupaki hier mercredi lors du compte rendu hebdomadaire du Conseil des ministres. Selon plusieurs sources, c’est désormais lui qui se prêtera à l’exercice. D’autres soulignent que c’est d’abord à cause de l’actualité. Ces derniers n’ont peut-être pas tort. Le gouvernement, commanditaire du retrait du droit de grève des magistrats, est sur la sellette. Il fallait donc trouver un bon avocat pour justifier le projet conçu au Palais de la Marina et que le député Louis Vlavonou a accepté de porter. Me Joseph Djogbénou n’a pas eu la tâche aisée. Habituellement très convaincant, détendu et posé, l’avocat personnel de Patrice Talon a servi des arguments moins construits. Le montage était fébrile. Lui-même était très gêné lors de la Conférence de presse animée à la présidence de la République ce mercredi. Hier, le ministre de la Justice a en effet confirmé la suppression du droit à la grève des acteurs de la santé, de la justice, le jeudi 28 décembre 2017 et de celui des magistrats le 02 janvier 2018. A l’entendre, lesdites modifications sont envoyées à la Cour constitutionnelle pour le contrôle de conformité à la Constitution. Face à la presse, l’universitaire n’a pas critiqué cette réforme liberticide en cours. Selon lui, le gouvernement dont il reste l’un des piliers mettra en application les nouvelles dispositions si les 7 Sages approuvent les changements et que le Chef de l’Etat les promulgue. Joseph Djogbénou semble doncsoutenir aujourd’hui l’importance et la régularité de la réforme qu’il a pourtant violemment combattue en 2014. Le Garde des Sceaux qui défendait l’indépendance totale de la justice a même pu souligner ce mercredi que des acteurs de la Justice sont des agents de l’Exécutif. Et de ce point de vue, selon lui, lesdits agents dépendaient des décisions que le gouvernement aura à prendre. Il indiquera par ailleurs que le souci de la continuité du service public justifie ces bouleversements brutaux. La sécurité, la justice et la santé sont des services essentiels, a ajouté Joseph Djogbénou. Or de 2014 à 2018, rien n’a fondamentalement changé dans le secteur judiciaire pour que Patrice Talon et son avocat fassent passer au Parlement une réforme de Yayi Boni qu’ils qualifiaient de dictateur. Comme quoi, il faut toujours se méfier des actes et les propos des hommes politiques. Me Joseph Djogbénou a trahi sa parole. Et il risque de s’embourber davantage dans son aventure aux côtés de l’homme d’affaires Patrice Talon.
Mike MAHOUNA